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BULLETINS
DE
L’ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES
ET
BELLES-LETTRES DE BRUXELLES.
BHEBETINS
(Re me.
L’ACADÉMIÉ ROYALE DES SCIENCES
CR if
ET BELLES-LETTRES DE BRUXELLES.
ANNÉE 1839.
TOME VI. — 1 PARTIE,
BRUXELLES,
M. HAYEZ, IMPRIMEUR DE L'ACADÉMIE ROYALE.
ed
1839.
LE
PLAYER SLRTMEA DA A AU,
‘ 0 ns UN
BULLETIN
DE
L’ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES
ET BELLES-LETTRES DE BRUXELLES,
1839. — No 1.
Séance du 5 janvier.
M. le baron De Stassart, vice-directeur, occupe le fau-
teuil.
M. Quetelet, secrétaire perpétuel.
CORRESPONDANCE.
Le secrétaire perpétuel présente, de la part des auteurs,
les ouvrages manuscrits suivans :
Système unitaire et complet d'harmonie, par M. l'abhé
comle De Robiano. (Commissaires : MM. Dandelin , Pagani
et Quetelet.)
Description des caloriferes à maximum d'effet utile
applicables à tous les usages, par M. Louis Hoffmann,
Tow. vi. 1
(2)
ingénieur civil. (Commissaires : MM. Cauchy, Dandelin et
De Hemptinne. )
Mémoire sur la langue Belgique, etc., par M. Ed.
Smits. (Commissaires : MM. Willems, Cornelissen et le
chanoine De Smet.)
— L'académie, reçoit de M. J. Van De Cotte, curé à
Zonneghem, près d’Alost, deux projections ortographi-
ques de l’éclipse de soleil du 15 mars prochain, l’une
sur le méridien de Bruxelles, et l’autre sur le méridien
de Rome, ainsi qu'une carte ortographique dessinée par
le même auteur et représentant les principales circonstan-
ces du phénomène.
— M. Quetelet communique à l'académie une note qui
lui a été adressée par M. Verhulst, professeur à l'école
militaire, sur la réduction des fonctions elliptiques de la
troisième espèce à paramètre circulaire, à des fonctions de
deux argumens. L'auteur, qui prépare ün travail sur les
fonctions elliptiques, annonce qu'il a trouvé plusieurs
propositions nouvelles, et entre autres la démonstration du
théorème suivant: lorsque deux rayons vecteurs menés
du centre à la circonférence de l’ellipse sont tels que
leur produit est égal au rectangle des demi-axes , l’are
qu’ils interceptent est précisément équivalent au quart
de l’ellipse. I est également parvenu, dit-il, à repré-
senter toutes les fonctions elliptiques par des courbes ou
des solides très-simples mesurés directement par l’am-
plitude ; el il a déduit de la considération de ces courbes
et de ces solides, des propriétés plus ou moins curieuses
des fonctions elliptiques que l'analyse a confirmées de-
puis.
RL Mes. de.
tés bed 0
(8)
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
MÉTÉOROLOGIE.
M. Quetelet présente les tableaux météorologiques pour
l'année 1838, d’après les observations faites quatre fois
par jour à l’observaioire de Bruxelles. Il résulie de ces
documens que l’année 1838 a présenté une température
moyenne remarquablement basse, puisqu'elle est de deux
degrés centésimaux inférieure à la moyenne des années
ordinaires.
On déduit de ces tableaux, qui seront insérés dans le
t. XII des Mémoires de l'académie, les résultats suivans,
en les comparant aux tableaux des années antérieures.
. Pression atmosphérique.
LP tmosphérig
Les observations sont rapportées au baromètre de l’ob-
servaloire de Paris. La pression moyenne a été déduite des
observations faites quatre fois par jour, à 9 heures du ma-
tin, à midi, à 4 heures et à 9 heures du soir.
| Lee DIFFERENCE A
ANNÉE. Te RE
| DOYENQEL ER QU Sun Midi. 4h. soir. -
man | tom
0,08 32 + 0,09
0,03 + 0,06
-- 0,03 + 0,12
0,04 + 0,10
0,05 + 0,04
0,02 : + 0,09
(F4
II. Température.
La température moyenne est déduite des maæima et
des minima moyens. L'on a fait les corrections nécessaires
pour l'échelle des thermomètres qui ont servi aux obser-
#
valions.-
PAR DIFFÉRENCE A EXTRË. DE L'ANNÉE.
ANNÉE. - ER ten
moy.
9h mat. | Midi. 9h soir. À Max. Min.
III. Humidite.
On s’est servi de l'hygromètre de Saussure. L’humidité
moyenne est déduite des observalions faites quatre fois par
jour. Les nombres donnés ne peuvent être considérés que
comme approximatifs (1).
(1) L’hygromètre était trop bas de plusieurs degrés; les valeurs abso-
lues sont donc fautives , et il ne faut avoir égard qu'aux valeurs rela-
tives. ,
HUMIDITÉ DIFFERENCE A
|
NUPRTe 9 h. mat. | Midi. 4 D. soir.
IV. Jours et quantité de pluie.
Dans le tableau suivant, la quantité d’eau recueillie
comprend celle qui résulte de la fonte de la neige. L'on
a aussi compris dans le nombre des jours de pluie, ceux
où il est tombé de la neige.
HAUTEUR NOMBRE
de l’eau en mil- ; d . RAPPORT.
lle de jours de pluie
mm
761,61
511,03
617,99
827,94
738,33
597,59
(6)
V. Grèle, neige, gelée, tonnerre, brouillard.
1833. | 1834. | 1835. | 1836. | 1537. | 1838.
Nombre de'jours de gréle .
— de neige .
de gelée .
de tonnerre .
de brouillard.
L’accroissement que l’on remarque dans quelques-uns
des nombres de ce dernier tableau, peut provenir de ce
que, depuis le 1% janvier 1837, l’on tient un journal
météorologique où sont annotées avec soin les variations
de l’état du ciel, pendant le cours de la journée, tandis
que, pendant les quatre années précédentes, on s'était
borné en général aux quatre observations ordinaires.
Observations météorologiques horaires. — L'académie
reçoit aussi communication des observations météorologi-
ques horaires, faites à l’époque du dernier solstice d'hiver,
et sur la demande de sir John Herschel, à l'observatoire
de Bruxelles; à l’université de Gand, par M. Duprez; à
l'université de Louvain, par M. Crahay; et au collége
d'Alost, par M. Willaert. Les pressions atmosphériques
qui ont varié à peu près identiquement de la même ma-
nière dans les quatre localités, sont représentées dans la
carte figurative ci-jointe.
LE
Re
-Q \
a =
Est
G
d ©
me:
uk
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à -Q
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2 #4
U À
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(| NS È
E + ‘
À à
5 :1.$
à
22 Xre
27 Xbre
Cr)
Observations météorologiques horaires faites au solstice
d'hiver (1838).
BAROMÈTRE RÉDUIT A O2.
BRUXELLES |‘
LOUVAIN.
21DÉCEM,
mm
6 h. m. 770,266 771,765
770,565 771,906
770,865 772,153
770,865
771,165
771,153
770,651
770,639
770,438
770,826
770,628
770,553
768,87 | 770,654
768,67 | 770,354
768,29 | 770,131 771,635
768,31 | 770,193 771,499
768,08 | 770,056 771,225
767,95 770,968
(1) Le vent a été très-faible pendant toute la durée des observations.
BRUXELLE
LOUVAIN.
22 DÉCEM.
1h. m. | 7 770,436
770,199
769,710
769,775
769,086
768,718
766,771 768,323
766,684 | 7 767,667
766,408
766,033
765,933 à PES k
766,471
766,019
764,269 : L |
763,807
763,621
(9)
Observations météorologiques horaires faites au solstice
d'hiver FN DA
BRUXELLES. E LOUVAIN ALOST. GAND.
DATE.
H\G. THERM.| HYG.
THERM.) HYG. THERM. ATHERM.
() O0 (4)
21 DÉCEMBRE.
6 heures matin, —2°,1 | 830,0 À — 20,5 }— 10,9 | 800,6 —1°,5 | 870,0
7 Æ — 2,9 | 84,0 À — 3,1 Η 2,2 | 80,5 | — 2,0 | 87,0
8 ps rule 07 224lla0,5 25 86.5
9 2 — 2,5 | 80,0 À — 3,0 }— 3,2 | 80,4 À— 2,5 | 86,0
10 le — 1,6 | 77,5 1 — 2,8 |— 2,8 | 80,4 | 2,6 | 85,5
12 2. — 1,2 | 76,5 À — 2,7 = 1,51 80,7 L— 2,3 | 81,5
1 heure soir. . Η 1,1 | 73,0 À — 2,7 Η 2,0 | 81,7 D. 2,4 | 81,5
2 es os CAL OU eo 2 = 23) ets
8 + = 1,0 | 6901 — 21 | 22 81,0 8 2,3 | 81,5
4 2. —1,1/700Ù —2,7/— 2,4) 81,6 2,4 | 82,5
5 22 8 [70,01 — 3,6 1 2,8 | s1,8 À 2,5 83,0
6 — 2900780 AU 51 em Re 2 7 |'82,0
(") L'hygromètre ne doit étre considéré que comme donnant des valeurs
relatives ; on l'estime trop bas de 10 à 12 degrés.
TEMPÉRATURE.
Maximum. Mioimum.
(1) Du 21 au 22 décembre, à midi . . + . . — 0,1 — 50,2
Du 22 au 23 _ — d RDA 1 VND — 1,8
(2) Du 21 au 22 — — AE Te » 16,3
PRET EU AE FLE. M CRE) d6E-10,6 — 3,9
De 22 EL. «1% Die. RE D: — 2,2 — 5,9
(4) Pendant la journée au PRE A LT En EL »
Dans la nuit du, 21 au 22 %. . . . ,:. » — 6,1
Es A — 1,5 | 76,0 À — 2,8 D 2,3 | 80,4 À — 2,1 | 82,5
|
|
|
I
|
|
Pendant la journée du 22 , - . . . . . — 1,6 »
7
DATE.
heures soir
22 DÉCEMBRE,
(10)
1 beure matin .
3
2
3
4
5
6
1
2
3
heure soir.
BRUXELLES,.
LOUVAIN
—,
THERM.
— 40,0
3,9
HYG.
THERM.
THERM.
HYG,
(11)
Observations météorologiques horaires faites au solstice
d'hiver (1838).
ÉTAT DU CIEL.
_—_—_—— "7"
DATE. |
BRUXELLES. | LOUVAIN. ALOST.
21 DÉCEM.
6 h.mat.} Couvert vap. |Couvert, léger Couvert.
brouil, verglas.
7 — Brouill. hum. Id. Id.
8 — Id. Brouillard.
Re id. Couv. brouillard Id.
plus épais.
10 — Id. très-fort Léger brouill.
AT — Id. Couwv. ciel brum.| Prouillard.
givre.
AZ + Id. moins fort. Éclaircies. Id.
1 h. soir RÉclaircies , stra- Nuages. Id.
tus ; lebrouill.
s'est dissipé.
2 — Id Id.
3 — Id. Couvert.
4 — Serein, vaporeux Id.
quelq. nuages
au nord.
5 — Id. Nuages.
Serein.
6 — Id. Serein,
7. — Id, Qq. nuages.
8 — Id Serein.
9: — Serein. Id,
GAND,
Brouillard épais
très-humide.
Id.
id.
Id.
Id.
Id.
Id,
Id.
Id,
Id.
Id.
Le brouill. com-
mence à dispa-
raitre,
Couvert, brouill.
léger.
Couw., le brouil.|
à disparu.
Couvert.
Éclaircies.
10
h. soir.
2 DÉCEM.
1
Lo
h mat.
BRUXELLES.
Serein.
Id.
Id.
Id,
qq: cum.
stratus,
Id.
Éclaircies.
Id.
Cirr. cum.
Id. gelée
blanche 14 nuit
Cumulus.
Id
Id.
Id.
LOUVAIN.
Serein.
Pendant toute la
journée, le ciel
n'a présenté
que quelques
nuages ;
les 9 heures
du soir, il était
entièremt cou-
vert,
vers,
ALOST.
Serein.
Id.
Id.
Partie NEvoilée,
le reste serein.
Id.
Id.
Id.
Id.
Id.
Cirrhus.
Id.
Id.
Id.
Couvert.
Id.
Nuages.
Id.
Cirr.-stratus,
Id.
Cirrhus.
Id.
Serein.
Serein, à l'O. lég.
couvert.
Serein, couvert à
l'horizon,
Id.
Id,
Couvert.
Id.
Id.
Nuag.,éclaircies.
Nuageux.
Id.
Nuag.,éclaircies,
Éclaircies.
Écl., lég. brouil.
à l'horizon.
Id.
Éclaircies.
Couvert,
(15 )
Étoiles filantes. — M. Quetelet donne communication
d’une lettre qui lui a été adressée par M. R. Carr Woods,
de la société météorologique de Londres, au sujet de la pé-
riodicité des étoiles filantes du 12 novembre.
M. R. Carr Woods, à l’époque où devait avoir lieu la
dernière apparition, avait quitlé Londres et avait été se
placer à Richemond pour jouir d’un horizon plus libre. Jus-
que vers 3 heures 35 m. du malin du 13 novembre, le ciel,
qui était pur, n’offrit rien de particulier , et le nombre des
étoiles filantes était moindre même que d'habitude; mais
tout à coup un spectacle brillant s’offrit à ses yeux « de
VENE. au N., dit le savant anglais, les météores tombaient
comme une pluie de bombes pendant un siége, et se succé-
daient avec tant de rapidité qu'il était impossible de déter-
miner la direction de chacun d’eux, de suivre leur mar-
che à travers les constellations , ou même de fixer leur
nombre. Toute la partie visible du ciel était éclairée par
la lumière de ce nombre prodigieux de météores qui, dans
leur chute, se dirigeaient vers la terre, etc. » En rappro-
chant cette letire de celle qu'il a reçuede sir John Herschel,
et qu'il a communiquée à l'académie , dans la séance du 1°*
décembre dernier, M. Quetelet se demande s'il n’y a pas eu
méprise , et si le phénomène décrit par M. E. Carr Woods
n'était pas l'aurore boréale que sir John Herschel dit avoir
observée exaclement à la même heure: il serait en effet
difficile de supposer que, dans des localités aussi rappro-
chées ( Slough et Richemond ), le même phénomène prit
des aspects aussi dissemblables. Il ne sera du reste pas inu-
tile, dans l'intérêt de la science , de prendre acte de ces
deux descriptions.
M. Carr Woods dit avoir remarqué que, pendant les
nuits ordinaires, les météores tombaient dans une direction
I4 )
opposée à celle du vent, et que, lorsqu'il y avait de l’humi-
dité dans l'atmosphère, ils n'avaient pas de traînées. Il en
était autrement avec une atmosphère sèche : la lumière
élait d’une couleur jaune plus brillante et la descente gé-
néralement perpendiculaire à l’horizon.
17)
Coup d'œil sur la Laguna de Chapala au Mexique,
avec notes géognostiques , par M. Henri G. Galeotti.
Une immense nappe d’eau muraillée au N. et au S. par
des montagnes escarpées, située à 14 lieues au S. de
Guadalajava, chef-lieu du département de Jalisco (ancienne
province de Nueva-Galicia) et à 130 lieues à l'O. de
Mexico, porte le nom de Laguna de Chapala, dérivé de
celui du village, ancien bourg de Chapala, situé sur la
rive septentrionale du lac, et près duquel on trouve, en
creusant, d'anciennes FRS sépulcrales indiennes, où
gisent encore des squelettes accompagnés d'idoles, de
jaltes en terre cuite nommées cântaros, de jetons moné-
taires en obsidienne ou en terre cuile rouge, elc:
Le lac a environ 150 lieues carrées. Sa longueur de l'E.
a l'O. est, dit-on, de 27 lieues; sa largeur varie entre 8 et 7.
Deux à trois îles rompent l’uniformité de sa surface : l’île
de Mescala, où l'on déporte les malfaiteurs, et portant aussi
par celte raison le nom de Isla del Presidio; une autre
pelile , continuation séparée par un peu d'eau de la pre-
miére, et enfin l'île de Chapala située presque en face du
bourg de Chapala et au milieu du lac, lequel à ici environ
3 lienes et demie de largeur; elle est à 5 lieues à l'O. de
l'île de Mescala.
+:
Pulletins de Licadémie . Tom. NI, Pxge. 15.
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4 un e " sens
Lu 7 X prpfonder des eaux est erprince en Witres .
RAT
4
té
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"*
D C7
(15)
Le Rio-Grande de San-lago qui prend sa source à Lerma,
à 12 lieues de Mexico, vient , après avoir arrosé la ville de
la Baria, près du village de Poncitlan, se jeter dans la
Laguna, vers sou extrémité orientale, et ressort de cette
mer (on nomme aussi le lac, Mar Chapalico) à peu de dis-
tance de son entrée pour couler dans de profondes ravines
avec une direction d'abord NO. puis ©. , et entrer, après
un cours d'environ 410 lieues, dans la grande Mer du
Sud , à quelques lieues au N. de San-Bias. Une foule de
petiles rivières qui descendent des montagnes, servent à
alimenter le lac. Parmi les plus importantes, on doit remar-
quer le Rio de Tizapan , qui ouvre son chemin à travers les
monts escarpés qui bordent la rive méridionale et débouche
dans le lac, presque en face de l’île de Chapala; ce rio
prend sa source dans les montagnes qui conslituent une
Sierra nommée d'El Regladero (voir la carte).
L’extrémité occidentale du lac se rélrécit considérable-
ment; la profondeur des eaux y est moindre que dans les
autres parlies : on croirait voir un marais. Un défilé-vallée
dans lequel est bati Cojotepec, gros village, chef-lieu de
canton à un quart de lieu ONO. du lac, conduit par une
direction ESE.-ONO., et à travers des terres noires des
plus fertiles (elles rendent de 4 à 500 grains de maïs pour
un) à la Hacienda de Huejotitan, à quelque distance de
laquelle est un étang (presa) alimenté par les pluies qui se
réunissent dans un petit vallon allongé et étroit par lequel
on descend dans les plaines de Zacoalco ; ce vallon est
élevé de 60 à 70 mètres au-dessus du niveau des eaux de
la Laguna.
Nous avons reconnu l'existence du phénomène des
seiches à la Laguna : ce sont des débordemens assez subits,
qui durent quelquefois long-tempñ, des portions tranquilles
(16 )
a côté de parties troublées étendues; ce phénomène s’ob-
serve surtout vers les cinq heures du soir. Nous remar-
quâmes les 27 et 28 février et en mars 1837 quelques-
uns de ces effets singuliers ; le temps était serein, calme, la
température de 18 à 22° cent.; ce phénomène est sensible
sur le bord septentrional, à Tlachichilco et à Chapala. Les
débordemens s'élèvent de 1 à 4 pieds (33 centimètres
a 1.33).
Nous y avons aussi observé le phénomène du mirage des
eaux, c’est-à-dire, des parties calmes et miroïitantes à côté
de parties agilées et comme frisées, surtout près de l’île de
Chapala, à l'heure de midi, par un temps calme et un so-
leil ardent; ces deux phénomènes, des seiches et du mirage,
ont sans doute des points de corrélation.
La Laguna est parfois soumise à de terribles tourbil-
lons, trombes d’eau qui enlèvent les poissons de leurs
gites aqueux et les portent sur les montagnes des environs ;
on en a irouvé sur une montagne assez élevée prés
d'Ixtlahuacan (2 lieues du lac). Ce phénomene, dont les
effets sont souvent des plus désastreux pour les riverains,
ont surtout lieu en mars, avril et mai, avant la saison des
pluies. C'est vers celle même époque que les eaux re-
jettent des idoles, des vases des anciens Indiens: les habi-
tans pensent qu'une ville antique à été engloutie par un
accroissement subit des eaux ; des troncs de Jaxodium
distichum (Sabino) se trouvent encore cachés en partie
par les eaux à une cerlaine distance de Chapala.
Une foule d'oiseaux aquatiques habitent les bords et les
eaux du lac ou les taillis des îles, et détruisent une grande
quantité de poissons ; ainsi on trouve deux espèces de
mouettes (gaviota), un cormoran (cuervojan) à la lourde
demarche, à l'odeur forte, solitairement perché sur une
(A7 )
pierre ou nageant par bandes de 6 ou 7, plongeant conti-
nuellement pour dévorer les poissons; des foulques (gal-
lina de aqua) qui vont par troupes très-nombreuses et
xivent principalement d'herbages lacustres ; des Ærdea(1)
(garzas) dont l’une, l’aigrette, se promène solitairement
au bord du lac, étalant sa parure de neïge et lançant de
temps à autre son bec jaune pointu sur les poissons: d'autres
garzas grises, des pélicans (horrejo de aqua, alcatras,
pelican), qui habitent l’île de Chapala et en émigrent par
longues files de 50 à 60 vers les cinq ou six heures du
soir, pour chercher leur nourriture près des bords où abon-
dent des petits poissons nommés javai; leur taille est
énorme, leurs* plumes blanches et le bout des ailes vert-
bronzé ; ils sont fort sauvages ; des grèbes (pato sambuti-
dor ), oiseau sauvage qui disparaît sous l’eau à la vue du
moindre danger; des plongeons (a/caldes) bruns, petits,
peu nombreux près de l’île de Chapala; des pluviers; de
beaux courlis blancs au bec rouge recourbé; des spatules
à belle robe rose de l’île de Chapala; elles y sont fort rares
et paraissent émigrer en juin et juillet de la terre chaude;
des Ardea (A. necticorax) dont la tête est ornée de 3 ou 4
fines plumes longues et pendantes; ils abondent à l’île de
Chapala; des martlin-pécheurs (pescadores) verts, et une
quantité innombrable de canards et de sarcelles (patos)
variant à l'infini en couleurs, taille et espèces (2).
Les êtres qui peuplent les eaux sont assez variés; le
pescado blanco et le bagoc sont d’excellens poissons, qui
(1) Entre autres Ardea herodias, grande espèce grise et noire.
(2) Nous avons envoyé à Bruxelles , à l'établissement géographique de
M. Vandermaelen , la collection presque complète de ces oiseaux , qui,
quoique nombreux, ne sont point faciles à se procurer.
Tom. vr. 2
(18 )
donnent lieu à de grandes pêches, surtout au temps de la
semaine sainte. Les riverains vivent presque entièrement
du produit de cette chasse aquatique ; ils établissent des
hutles en bambous au bord de la Laguna et font, vers les
6 ou 7 heures du soir, des feux pour attirer le poisson. On
voit souvent de petits émydes se chauffer au soleil sur les
pierres, mais elles disparaissent an moindre bruit. Près
de l'île Chapala , on trouve des crabes de petite taille (2 à 3
centimètres), à pinces inégales très-fortes ; enfin des Unio
qui paraissent êlre rares (1), des Planorbis et des Lymnæa:
mais comme ces coquilles sont rejelées par les eaux, elles
sont toujours plus ou moins brisées.
La profondeur du milieu dans lequel Sivent ces ani-
maux varie entre 60 centimètres et 20 mètres; au bord de
l’île Chapala elle est de 1 mètre 33 centimètres; plus loin
de 3 mètres, et à quelque distance, elle atteint, dit-on,
celle de 18 mètres.
Les environs de la Laguna recélent beaucoup d'animaux :
les lapins et les lièvres abondent; on y rencontre des
loups, des renards (coyote), des lions (felis puma-leones),
des écureuils gris et rouges (ardilla), des putois (zorillo),
qui émettent un liquide des plus infects. Les bois peu épais
et solitaires qui couvrent les montagnes, cachent de beaux
trogons (coa), oiseaux misanthropes el tristes, des pies
bleues (uracas), criardes et agiles, se perchant sur les
arbres élevés el balançant leur longue queue bleue, et de
jolis Cuculus(2) à longue queue (wraea color de café). Les
plaines ondulées situées au pied des monts sont habitées
(1) Nous n'avons pu en trouver de bons exemplaires.
(2) Cuculus cayamus.
j
l
;
ne de 7 mie = ln
U
(19)
par de petites chouettes (/echuzals et lechuzèta) qui se
creusent une demeure dans la terre ; par d'innombrables
nuées de Turdus et de troupiales (sanates) noirs et violà-
tres , de gros-becs bleus (bovion), de faisans, etc. ; les ser-
pens et les insectes y sont rares; on observe quelquefois
des libellules.
La végétalion est peu remarquable; on voit quelques
Cerius, Organos el Carambouille, des Echeverrias et des
Sedum sur les monts porphyriques de Tlachichilco et de
Mescala; des Taxodium distichum d'une grande taille dans
Ja Siera de Jizapan; des £rythrina à fleurs roses qui bor-
dent lesroutes; des Seshania, Mimosa(huisachi), Verbena,
Stachys, Salvia, Plantago, Plumbago, Phaseolus, Doli-
chos, Cineraria, Steevia, Tagetes, Erigeron, etc.; quelques
Tillandsia sur les grands MHimosa et les chênes; la Bletia
grandiflora près d’Ajijic; à Chapala, il y a des allées de
Plumiera blancs et roses; la posilion de ce bourg, abrité,
comme il est, des vents du N. par une montagne conique,
élève sa Lempéralure moyenne et le fait jouir d’un climat
qui rappelle celui de la terre chaude; ainsi la canne à
sucre y vient bien, le Carica papaya( papaya), melon-
sapote , l’'Æchras sapota et le bananier, y prospèrent.
Du sommet des montagnes au N. de la Hacienda de la
Lavor , la vue de la Laguna est sublime : voir une immense
nappe d'eau avec ses îles, sa ceinture rocailleuse , ses vil-
lages blanchis, ses hultes de pêcheurs, le bâtiment du
presidio, ses haciendas, ses fertiles bords couverts de
champ de maïs et de pois chiches (garbanzos) , les nom-
breux troupeaux de bœufs qui paissent dans les prairies,
les ruisseaux ombragés de saules et de Cineraria,le sommet
neigeux du volcan de Colima qui s'échappe de derrière la
chaîne SSO., les bateaux légers formés d'un tronc d'arbre
(2)
qui voltigent sur sa surface unie où légérement ridée et
où se réfléchit un ciel azuré, les sombres montagnes de
Tizapan et les aspérités bleuâtres du SSE. et SE. qui appar-
tiennent au département de Méchoacan, les extrémités
vaporeuses du lac, et derrière soi les riches plaines d’In-
tlahuacan et d’Atequiza, est un de ces spectacles qui peu-
vent à juste titre enivrer le naturaliste et le paysagiste qui
s’échappent des arides plaines de Guadalajara pour s’élan:
cer sur ces crêles, d’où leurs regards plongent sur un
horizon aussi enchanteur et ne peuvent en assouvir l’en-
thousiasme; la nature est là si douce malgré sa beauté et
son grandiose, si pensive malgré son éclat, que l’âme semble
se reposer el s'associer à elle.
Lorsqu'on quitte les riches plaines d'Intlahuacan et
d'Atequiza, dont le niveau est plus bas que celles de
Guadalajara et sont enrichies du détritus des montagnes
et fertilisées par de petits ruisseaux, on gravit, pour se
rendre à Chapala, des monticules de téphrines rouges à
surface vacuolée, à intérieur plus ou moins compacte,
parsemées de mica et de pyroxène vert, alternant avec des
téphrines noires porphyroïdes avec albite pyroxène et
mica ; elles sont dures, massives , tantôt compactes, tantôt
vacuolées; la première variété se transforme en basalte;
les téphrines sont parfois brecciolaires, avec fragmens
téphriniques enveloppés dans leur pâte; la teinte vermit-
lonnée de certaines téphrines rouges de la Hacienda de
la Lavor, a fait croire qu’elles contenaient du mercure;
plusieurs habitans nous en présentérent des morceaux
sous le titre de cinabre.
Sur ces laves reposent des pépérines grises, grenues,
tendres, fragiles, formées de morceaux de téphrine sco-
riacée, de basalte et de porphyre, disséminés dans une pâte
(21)
abondante en argile avec cristaux tronqués d’albite, de
mica , d'ampbibole et de pyroxène. Les fragmens empâtés
sont quelquefois très-grands, d’autres fois si atténués qu’on
croirait voir une argile grossière.
Les laves gisent sur un porphyre violâtre vert ou
rouge , dur, compacte, avec albite, et qui recèle, dit-on,
près du Rio de San-Antonio, entre Chapala et Jocotepec,
des veines argentifères que l’on a un peu exploitées. A
Ajijic, le porphyre est rosàtre, quarzifére avec chaux
carbonatée en veines; on en a retiré du plomb sulfuré
argentifère avec cuivre pyriteux: ces petites mines sont
abandonnées. Les parties supérieures du porphyre sont de
couleurs plus foncées, avec peu de quarz ; elles semblent
se lier aux roches basaltiques qui ont comblé, conjointe-
ment avec les téphrines et les pépérines postérieures, des
fentes et des petits vallons qui existaient dans le porphyre.
Près de la Hacienda de la Lavor, d'Ixtlahuacan, de Jocotepec
et de Huejotitan, les massifs laviques sont trés-puissans ;
les vallées et crevasses, qui intersectent les monts dans
ces divers endroits, les mettent partout à nu sur une
grande échelle.
Cette formation basaltico -téphrinique se poursuit au
loin,en couvrant partout dans une direction EN. 5°,à 0.5°S.
(direction parallèle à celle de la Laguna), les sommités
porphyriques ; ainsi les laves abondent prés de la Lavor ;
elles forment le mont pointu de Chapala d'où s’échappent
des eaux thermales claires, inodores et sans saveur, d’une
température de 40° centigrades (1). À Huejotitan le ba-
(1) 1 y a 8 ou 4 bains dans le village même construits en pierres basal-
tiques ; les naturels s’en servent , les femmes y lavent le linge,
(22)
salte est gris, porphyrique; on y trouve, dit-on, des nids de
soufre, et des fissures d’où se dégagent des vapeurs d’acide
sulfureux ; il renferme des trouées et des cavernes dans
lesquelles on remarque de gros fragmens agglomérés à
surface scoriacée et rongée, ainsi que des parties dures
très-compactes un peu schistoïdes (cero de Chapala). Cette
nappe basallique se poursuit à l'O. et compose entièrement
les montagnes au SO. de Guadalajara, forme les monts
d’'Amatitan, le haut volcan de Tequila, pour expirer dans
la grande Mer du Sud, en donnant naissance au rocher sur
lequel est batie la ville de San-Blas, auquel elle se rattache
par le volcan encore fumant d'Achnacatlan (/e cebo rujo)
situé à 60 lienes à l'O. de Guadalajara; elle couronne
également les montagnes de la rive méridionale, suit la rive
NE., accompagne le cours du Rio Grande de San-lago,
s'élale en ondulations et en masses immenses près de
Lapotlanejo, couvre de ses téphrines rouges et noires les
environs du célèbre Puenta del Calderon (1) et du joli
bourg de Tepatitlan, près duquel s'élève le massif basal-
iique du Cerro Gordo (24 lieues au NNE. de Guadalajara),
en présentant partout les mêmes caractères et les mêmes
roches, c’est-à-dire des basalles , soit compactes, soit cel-
luleux, noirs ou gris, albitiques ou non, durs et pesans;
des téphrines noires, compactes ou non, avec albite et par-
fois du mica-ct du pyroxène, des téphrines rouges plus ou
moins scoriacées, surmontant les basaltes, avec albite, py-
roxène et lamelles dorées de mica, et enfin des phono-
(1) Où se donna entre les insurgés commandés par le curé Hidalge et
les Espagnols , à la tète desquels était le général Calleja , une bataille où
ces derniers, quoique en petit nombre, sortirent vainqueurs et mirent fin
à la révolution de 1810.
I
(23 )
lithes grises, albitiques , en plaques plus ou moins minces.
L'hydrate de fer colore souvent ces roches, les ruisseaux
près de Tepatitlan en déposent beaucoup; il forme des
eroûles et des boules pulvérulentes.
Le basalle se distingue facilement au loin du perphyre
par ses masses divisées perpendiculairement, formant une
muraille décharnée, sinueuse, brisée sur les flancs , mais à
sommet plus ou moins uni, arrondi ou allongé; les mon-
tagnes de Jizapan présentent des plateaux horizontaux à
leurs parties supérieures. La hauteur de ces aspérités varie
entre 100 mètres et 350. Les collines où dominent les té-
phrines sont pen élevées, irrégulières par l'amoncelement
de malières, découpées par des ravins assez profonds à
pentes souvent perpendiculaires ; les parties inférieures
sont de Javes compactes, les plus supérieures scoriacées
et comme formées de gros fragmens réunis. Le porphyre
donne lieu à des montagnes à pentes assez douces , arron-
dies, el dont les masses sont fissurées en tout sens; il est
souvent très-décomposé, et son détrilus a servi à élaler
la conche de terre végétale des plaines.
Près de Jlachichilco et de Mescala, le porphyre est gris;
il passe à la phonolithe (klingstein), se divisant en grandes
plaques compactes , sonores, avec parlies quarzeuses et
albile,
L'île de Chapala a 2 à 300 mètres de long; son extré-
milé occidentale est élevée de 15 à 18 mètres au-dessus
du niveau des eaux; son plan serait celui d'un fuseau en
pointe aux extrémités E. et O., large au centre; elle est cou-
verte de bambous, Canna indica, Plumbago, Mimosa
(iluisachi) odorant, etc.
Elle est formée dans son extrémité orientale de basaltes
amygdalaires gris, à noyaux d’agathe et avec veines de jaspe
(24)
vert-pré et vert-jaunâtre; ils sont souvent celluleux avec
albite , les eaux les ont fortement rongés et découpés; le
basalte de l’extrémité occidentale passe à la phonolithe et
à du basalte porphyrique, dur, pesant; cetle île paraît
être la sommité d’un dôme basaltique.
Ces diverses roches lant basaltiques que porphyriques,
se sont fait jour à travers le calcaïre qu'elles recouvrent
presque partout. Ge calcaire, qui apparaît près de Cha-
pala , est gris-jaunâtre ou blanchätre, rarement bleuätre,
ilest dur, dense, à aspect terne , à grains serrés, exhalant
par l'insufflation une odeur un peu argileuse; 1l est entre-
coupé, parfois, de veinules de chaux carbonatée; enfin,
il est stratifié en couches de 60 centr‘ à 1 mètre de puis-
sance , inclinant de 10 à 30°, en plongeant au N. et se di-
rigeant SSO., NNE. et O.-E. Cette dernière direction est
probablement la plus générale, ce dont il est difficile de
s'assurer, vu sa courte étendue. Tout près du bourg de
Chapala il est terreux, blanchi, et ressemble un peu à la
craie à peu de distance du mont pointu de Chapala, qui
s’est élevé du sein du calcaire qui l’environne , de ce mont
d’où sourdent les eaux thermales, des veines de chaux
sulfatée (yeso), grise et jaunâtre, translucide, prisma-
tique.
Ce calcaire forme des collines basses, arrondies, au pied
des monts porphyriques et basaltico-téphriniques, avec
lesquels il est en contact : ces collines sont recouvertes de
terre argileuse grisâtre, provenant de la décomposition cal-
caire, et dans laquelle on retrouve des morceaux de cette
roche compacte ou schistoïde (commencement d’altéra-
tion); il paraît sur les hauteurs de Tlachichilco et près de
Mascala (hauteurs de San-Juan ), où il est teint par un peu
d'hydrate de fer.
die in nt Ce or ls Re, OS ne à
RE IS I I PE TS
(2%)
La Laguna semble être creusée dans ce calcaire; ses
bords sont généralement argileux, de couleur grise ou
blanchâtre, à surface recouverte d’efflorescences analo-
gues au tequesquite (natron , carbonate de soude impur)
de Guadalajara et de Mexico; un faible espace près de
Chapala est composé de sable quarzeux fin avec fragmens
de cristaux d’albite, de mica et de roches porphyriques;
les eaux se seront rassemblées dans une large fente ou
vallon, parallèle aux massifs ignés, fermé par ces mêmes
massifs, et ces îles sont des sommités également ignées.
Nous n'avons point découvert de débris de corps orga-
nisés fossiles dans le calcaire ; cependant quelques mor-
ceaux nous ont offert des traces incomplètes de polypiers
el d’autres, encore plus mutilées, d'’ammonites. La nature,
l'aspect et la couleur du calcaire ( caractères bien faibles
dans les conclusions géognostiques), et surtout la régula-
rilé de sa stratification, qui ne présente point de plisse-
mens ou de couches contournées, nous ont engagé à le
classer parmi les formations oolitiques (calcaire jurassi-
que), et à regarder le sulfate de chaux comme produit par
des vapeurs acides sulfureuses qui auraient agi sur le cal-
caire dont la décomposition est assez grande dans le voisi-
nage du basalte, lequel, comme nous l’avons déjà dit,
émet à Huejotitan des vapeurs d’acide sulfureux , des eaux
thermales au NNO. du bourg de Chapala el une quantité
d'eaux chaudes qui sourdent à des distances plus où moins
grandes (Istlan près Olotan, route de la Barca , Atotonil-
quillo près Atequiza , Zalatitan à 3 lieues de Guadalajara ,
Ixcatan , arrondissement de Zapopon, etc. )
Les plaines situées entre Tlachichilco et Chapala sont
assez larges, ondulées, couvertes d’humus mêlé de sable
argileux jaunâtre et d’un peu de calcaire dans lequel
(26 )
on trouve beaucoup de fragmens basaltiques et porphyri-
ques ; sous cetle couche superficielle, gît une argile plus
ou moins impure d'un gris noirâtre, se détitant à l'air;
tantôt, et le plus souvent, mélangée de sable quarzeux,
et tantôt assez pure et formant alors des couches dans la
précédente. On observe dans ce dépôt alluvien des cail-
loux roulés de porphyre , de quarz, de basalle et de lrapp,
disséminés dans un détrilus de ces mêmes élémens de
construction ; et de gros blocs souvent énormes, déposés
dans les argiles et les sables, ou associés aux cailloux.
C'est dans ce dépôt alluvien que gisent les os fossiles de
mastodonte ; les fortes dimensions des débris les ont fait
attribuer par les habitans à d’antiques races d'hommes
géans (huesos de gigante). On trouve des fragmens de
fémur et de tibia assez intacts ; les os que nous avons dé-
terrés se réduisaient de suite ou en poudre blanche, à
leur exposition à l'air, ou en esquilles, et la spécification
devenait impossible.
Les os se présentent sous trois états ; 1° comme calcinés
et tombant en poussière d'un blanc de lait, semblable à
de la farine ; 2° ils ont subi un commencement de silicifi-
cation , laquelle a fendu et fracturé les os, de même que
l'eau par sa congélation fend les vases où elle est renfer-
mée; le canal médullaire est obstrué de sable siliceux»
de fragmens de pierre; les os sont bruns, assez pesans et
solides, mais ils sont rares; enfin &° dans cet état, le
moins commun , ils sont intacis, ils n'ont fait que brunir,
ils sont plus légers que les os silicifiés , luisans et solides;
les molaires se sont bien conservées. Les os que l'on ren-
contre ordinairement sont des fragmens de fémur , tibia,
côtes , radius , péroné et des débris d'omoplate.
Avec ces os se trouve une grande quantité de morceaux
éns -e
(27)
de troncs d'arbres dicotylédons pourvus d’embranchemens
et de portions de racines; quelques-uns semblent appar-
tenir à des Mimosa ou à d’autres légumineuses; on les
rencontre généralement silicifiés (silex passant à la calcé-
doine), les fibres ont disparu ; d’autres fois ces fragmens
sont blancs, compactes ou se réduisant en poudre, tandis
qu'ailleurs ils sont assez durs par un commencement de
silicificalion ; un enduit de calcaire pulvérulent, tachant
les doigts en blanc, les entoure en général.
Les débris végétaux sont disséminés en fragmens in-
nombrables dans les sables silicéo-argileux, dans le gravier,
ou en compagnie avec les ossemens. De petites ravines au
N. du village de Santa-Cruz en offrent des troncs entiers
avec leurs racines , plantés perpendiculairement dans les
masses alluviennes, comme s'ils avaient cessé de végéter
in situ ; il semble qu'il existe dans les sables un principe
silicifiant qui attaque encore de nos jours les racines des
arbres qui vivent en ces lieux : ainsi nous avons remarqué
des filamens déliés de racines de graminées, de Prosopis
dulcis et de Plumbago durcis et blanchis ; le chevelu des
arbres fossilifiés conserve parfois son épiderme non sili-
cifiée de couleur brune, qui tombe en poussière au moin-
dre toucher.
C'est surtout près de la Hacienda de la Lavor que l’on
trouve les ossemens de mastodonte; nous n'avons point eu
le bonheur d'en recueillir d’assez intacts et qui puissent
jeter du jour sur l'espèce à laquelle ils ont appartenu ; le
propriétaire de la Hacienda, don Manuel Olasagarry, homme
instruit et de profondes connaissances , possède une pelite
molaire trouvée dans ce terrain, et M. Ritchie a déposé
dans une maison de commerce, avant son départ pour
l'Angleterre, deux squelettes de mastodonte, l’un de grande
(2%)
espèce et l’autre ayant appartenu à un petit individu;
nous n'avons pu les voir à cause de l'absence du proprié-
taire; nous proposerions cependant de nommer l'espèce
dont nous avons trouvé de nombreux restes près de la
Lavor, Mastodon chapalensis , animal qui semblerait avoir
vécu et être mort dans les lieux où nous retrouvons au-
Jourd’hui ses dépouilles.
Les pluies et les eaux torrentielles, en creusant les ter-
rains , lavent journellement des débris de troncs d'arbres
et les étalent à la surface des champs à d’assez grandes
distances de leurs berceaux; les localités où gisent les
fragmens végétaux et animaux, ne sont situées qu’à huit
ou neuf mêtres au-dessus du niveau des eaux de la Laguna.
La diversité d’endroits où l’on rencontre au Mexique des
ossemens d'éléphans , de mastodontes et de tapirs (départe-
mens de Palisco, Guanaxualo, Mexico, Puebla, etc.), leur
position dans des terrains alluviens lacustres , souvent peu
éloignés de quelque grand lac , donnent lieu à penser que
quelque immense envahissement des eaux a fait périr ces
animaux ; en effet, tout le pourtour de la vallée de Mexico,
les montagnes de Pachuca, lesquelles jusqu’à plus de moi-
tié de leur hauteur (515 mèlres au-dessus de Mexico)
sont recouvertes de dépôts argileux analogues à ceux que
forment les eaux des lacs de Tezcoco , Chalco et San-Cris-
1obal ; les vallées d’Actopan , d'Izmiquelpan , les pentes du
Puerto de Zimapan, tout le Baxio, les plaines de Léon,
Lagos (1), celles de Guadalajara et même de Tepie ( à 200
lieues O. de Mexico), présentent des traces non équivo-
ques de l’ancienne occupation des eaux : telles que les
(1) Les plaines de Lagos recèlent de l’étain de lavage { stream tir ).
Laver (K°) 25g8
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Tom VI, Page 29.
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» (29)
efflorescences salines des plaines et de la ville même de
Guadalajara, du Baxio, du val San-lago, des plaines de
Mexico ( Istapalapa, Tezcoco, villa de Guadalupe, etc. );
telles que la surface unie et les dépôts alluviens qui for-
ment le sol des vallées ; les nombreux lacs quïr occupent
encore quelques fractions de ces plaines immenses qui
s’étalent d’une branche de la Cordillière à l'autre semblent
rendre témoignage de l’ancienne puissance des eaux. Les
éruptions, les émissions de laves, en barrant de larges
vallées, formèrent des bassins où refluèrent les eaux que
des causes analogues, des soulévemens et le brisement des
barrières, ont pu détourner plus tard (1).
Mexico, le 1er juin 1837.
Nota. — La carte géologique qui accompagne ce mémoire a ‘été
dressée en partie sur les cartes existantes et en partie sur nos propres
observations. La position des montagnes est basée presque entièrement
sur les remarques que nous avons faites dans nos voyages.
La longitude est à l’occident de l’observatoire de Greenwich. La
hauteur des lieux, exprimée en mètres au-dessus du niveau de la mer,
a été calculée par nne suite d'expériences faites sur la température de
la terre donnant une moyenne de 16 à 170 centigrades ; ces expériences
s'accordent dans leurs conclusions, avecles résultats obtenus par M, Rit-
chie au moyen de nivellemens.
(1) Nous nous occupons, autant qu’il est possible de le faire, de
Vexamen des diverses chaînes du Mexique, de leur connexion entre elles,
des roches qu’elles renferment et surtout des bouleversemens, des
tassemens intérieurs des masses et des phénomènes divers qui se ratta-
chent à la géngnosie. L'étude de l’immense relief qui dessine cettevaste
contrée est des plus difficiles. Il n'existe probablement pas de carte
géographique du pays pour indiquer les accidens du sol soulevé à une
immense hauteur par d'assez récens phénomènes, fracturé en tous sens
et visité par d'énormes débâcles volcaniques.
( 50 )
Notice sur l’histologie de V'AGARICUS EPIXYLON , par
M. Ch, Morren , membre de l'académie , etc.
L'Agaricus epixylon (Dec., FL. fr. 2, p. 134 et 359.
Pleuropus , Persoon) est une des espèces de ce genre
nombreux qui présente une couleur très-foncée à la sur-
face supérieure de son chapeau. Il est, en eflet, d'un
bleu d’ardoise très-intense , avec le reflet un peu métal-
lique cuivré de l'indigo. Celle matière colorante a son
siége dans une épaisseur d'énviron un demi-millimètre ,
qui se dénote fort bien quand on coupe le chapeau en
deux (fig. 1, a). Le reste de la chair est blanc et ferme,
ainsi que les lamelles.
J'étais désireux de connaître la cause organique de cette
couleur si intense, d'autant plus qu'on n’a rien écrit sur
les constitutions des matières colorantes des champignons.
On ne possède là-dessus que des travaux chimiques. Celle
question m'intéressait d'autant plus que je venais d'étu-
dier la formation de l'indigo dans les feuilles du Poly-
gonum tinctorium, et que ce champignon semblait émi-
nemment indigofère. Le bleu n'existait qu'au contact de
l'air; il était sombre, ardoisé, à reflet cuivré. Il y avait là
une analogie qu'il était prudent de poursuivre.
Mais, la dissection est venue prouver que, dans les cham-
pignons, les malières colorantes sont tout autrement for-
mées que dans les autres plantes, et surloul dans Îles
végélaux colorifères, comme la garance, le po/ygonum,
la betterave , le raisin , les fruils en général , etc.
En effet, il n’y a pas sur le chapeau de membrane pro-
prement dite ; le tissu y est conslilué comme dans la chair.
Ce tissu est formé par un lacis de vaisseaux allongés, cy-
|
|
(31)
lindriques, égaux sur toute leur longueur en diamètre,
semblables entre eux, contortupliqués et disposés par
couches , de manière à former un dédale de fibres creuses,
un peu noueuses, flexibles, molles et qui plus est trans-
parentes. (Voy. fig. 2).
Cette transparence est remarquable. Une mince tranche
de cette partie bleue si foncée, est bleuâtre; mais on ne
croirait jamais que les élémens tissulaires de celle partie
contiennent si peu de molécules colorantes pour produire
une intensilé de couleur si grande. Ces vaisseaux ne ren-
ferment, en effet, que de rares globules (fig. 3 é) bleus,
corpuscules sphériques d’un 300tème de millimètre, les
uns un peu plus, les autres moins, nagcant librement
quand ils sont libres , mais cependant dépourvus de mou-
vement spontané à l'état libre ou lorsqu'ils sont incius
dans les vaisseaux; car dans leur situation normale, ils
sont renfermés dans les tubes mêmes. (La figuré 4 les re-
présente à l’état libre.)
Ces globules bleus n'éprouvent aucune modification
par l'iode (fig. 7, e). Hs deviennent moins nombreux dans
les tubes des couches inférieures et disparaissent peu à peu.
Dans les tubes de la chair blanche du champignon, il n’y
en a plus.
Voilà la seule chromule visible dans ce champignon de
couleur si foncée. Sous ce rapport cet ordre de plantes dif-
fère complétement des végétaux phanérogamiques.
On place les champignons dans la série des plantes cel-
lulaires, et l'on regarde leur tissn comme éminemment
formé d'utricules qu'on dit être irrégulières et sans ordre.
Hedwig a reconnu des vaisseaux fibreux dans les pezizes(1).
1) Hedwi Cryptog., tom. V, fig. 3. — Treviranus, Physiologie
8 yptog.; » 9 : y ge,
tom, 1, p.178.
(32)
Treviranus voit aussi dans le pied des champignons des
vaisseaux (1). Plus tard, il considère le tissu de ces plantes
comme formé de cellules et de vaisseaux liés par un mu-
cus ; les vaisseaux occupent le centre, les cellules, la péri-
phérie (2). Meyen, dès 1830, reconnaît que les champignons
ont beaucoup d’espéces de tissus’cellulaires (3) ,et dans les
plus inférieurs en organisalion, il'découvre des tuyaux
cylindriques qui constituent un véritable feutre (4). Ges
tuyaux ont été vus par Turpin, qui les nomme des ligel-
lules (5) et Schullz y a reconnu une circulation (6).
D'après les progrès de la phytotomie, il est évident
qu'il est fort douteux que tous les champignons et les hy-
poxylons soient des végétaux cellulaires. Le fait est que
dans l’Ægaricus epixylon , il n’y a pas une seule cellule.
Le tissu est formé par des vaisseaux anastomosés, quel-
quefois noueux (fig. 6, d), ordinairement dichotomes
(fig. 3, bb, fig. 6, fig. 7), rarement trifurqués. Les nœuds
saillans prouvent que les rameaux de ces tubes croissent
en poussant, de sorle que les tubérosités sont des jeunes
ramuscules. Souvent les tubes se joignent en H, par une
anastomose transversale et perpendiculaire (fig. 5, a).
M. Meyen a eu raison de regarder la membrane de ces
vaisseaux comme une des plus fines, de l’organisation végé-
tale. Elle l’est en effet , car les tubes ne paraissent solides
que par la matière contenue dans leur intérieur. Cette
(1) Treviranus, Zmwendigen Bau der Gewächse, p.115).
(2) Treviranus , Physiologie der Gewächse, tom. 1, p.177, $ 125.
(3) Meyen, Phytotomie , p. 138, HIT.
(4) Id., Zéid., p. 139, IV.
(5) Mémoire sur la Truffe et ailleurs.
(6) Rapport sur son mémoire couronné par l’Institut de France.
608)
substance est surtout colorable par l’iode, et la membrane
des organes contenans l’est beaucoup moins ou presque
pas. C’est ce qui fait que lorsqu'on soumet sa préparation à
l’action de cet agent soit solide ; soit en teinture, les tubes
se colorent inégalement (fig. 7), surlout là où ils sont
vides. Les parties vides restent blanches ou légèrement
jaunètres. C'est principalement aux extrémités par où la
matière s'est écoulée que les membranes des tubes se
montrent dans toute leur simplicité d'organisation ; mais
si le milieu d’un vaisseau est vide, la membrane ne s’y
colore pas plus (fig. 7). |
En outre, on reconnail sur quelques tubes de vraies
cloisons (fig. 6, ec), qui sont évidemment la trace de la
soudure bout à bout des tubes, mais qui ne naissent la
sans doute pas autrement que dans les algues et plantes
voisines, c’est-à-dire par une action postérieure à la for-
mation même du tube.
Des tubes allongés, cylindriques, anastomosés , formés
d’une membrane anhiste, renfermant un liquide et des
globules, et pourvus çà et la de cloisons ; des Lubes d’une
immense longueur, disposés en tissu feutré , ces tubes-là
ne peuvent rentrer dans le parenchyme proprement dit.
Il est évident que la forme du tissu cellulaire est la plus
_ éloignée de cette organisation.
Il saute aux yeux que la forme des vaisseaux opophores
ou lalicifères est ce qui se rapproche le plus de celle ici
observée , et qui est générale à tous les champignons. C’est
donc un véritable angienchyme ou tissu vasculaire, et je
le place dans la seconde classe de ces tissus à vaisseaux,
celle où les organes sont anastomosés. Les vaisseaux lati-
cifères ou opophores sont de simples élémens organiques
dont l'ensemble constitue l'appareil de la circulation chez
Tom. vi. »
CARD
les végétaux; ils forment tissu, et ce tissu, je l'appelle
cinenchyme (nsc , mouvement ). On pourrait sans doute
assimiler le tissu des champignons aux vaisseaux opo-
phores, mais cependant il en diffère notablement par la
disposition feutrée, par l'absence de la circulation, du
moins pendant la majeure partie de la vie de la plante, et
par son fluide qui est moins globulifére. Ajoutons que
l’ordre des végétaux où il existe, ordre naturel, très-bien
limité, milite encore pour sa séparation. Je le distingue
donc et le nomme dædalenchyme (Ads , fabriqué in-
génieusement) pour rappeler le dédale de fibres , le feutre
inextricable de ses vaisseaux. Il devient la caractéristique
anatomique des champignons.
Les sporules de l’Ægaricus epixylon sont fusiformes
simples , courts (fig. 8). Ce qu'ils ont de plus remarquable
est leur mouvement spontané dans l’eau; ce transport
dans l’espace est lent ; il les fait tournoyer sur eux-mêmes
et s’avancer peu à peu en rappelant la marche de quelques
navicules. Je n’ai observé ce mouvement que lorsqu'ils sont
frais et vivans.
L'histologie des champignons, si élégamment représen-
tée dans le nouvel ouvrage de M. Corda, prouve que les
distinctions que nous venons de faire connaître pour cette
seule espèce, peuvent s'appliquer à toute cette intéressante
famille.
EXPLICATION DES FIGURES.
Pig. 1. Coupe de grandeur naturelle du chapeau de l’Agaricus
epixylon.
a. Couche colorée en bleu foncé.
b. Tissu blanc.
c. Lamelles blanches ou brunâtres,
sonnette fit
I
lag. 34, Tome VI.
Bulletins de l'Acadere
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Fig. 2,
(35)
Tissu feutré ou dædalenchyme de la couche bleue , vue à 309
fois le diamètre.
. Tubes,
. Globules bleus.
c. Tubes coupés dont on voit l’aire intérieure.
MDI RO SR
Fig. 7.
Fig. 8.
Tube ou vaisseau séparé, vu à 300 fois le diamètre.
: Paroi.
. Dichotomie.
. Globules bleus.
Globules bleus, isolés, vus à 300 diamètres.
Tissu feutré ou dædalenchyme de la chair blanche, vu à 300
diamètres.
. Tubes anastomosés en H.
Tubes séparés.
. Parois,
. Trifurcation.
. Cloisons.
. Nœuds.
. Globules.
Membrane isolée de la matière contenue.
Mèmes tubes colorés par l’iode.
. Parties colorées,
. Parties non colorées.
. Globules.
Sporules.
ANATOMIE VÉGÉTALE,
Recherches sur le développement du pollen et de l’ovule
du Gui. (Extrait d’une lettre de M. Decaisne au se-
crélaire.) j
Il résulte de mes Recherches sur le développement du
pollen et de l’ovule du Gui(V'iscum album (1), que l’an-
(1) J'ai connaissance des mémoires de MM, Griffith et Korthals.
(36 )
thère de cette plante s'éloigne complétement du caractère
général de cel organe , en ce qu'elle est soudée en totalité
et dès son origine, avec le lobe calicinal devant lequel elle
se trouve placée; que le tissu du calice, dépourvu de
faisceaux vasculaires , n'offre à l'époque où se forme l’an-
thère, pour toute différence avec cette dernière, qu’une
coloration verte plus intense; que l’anthère, enliérement
cellulaire et homogène, se creuse partiellement, ct pré-
sente de petites cavilés indépendantes les unes des autres,
et au milieu desquelles s'organisent les utricules pollini-
ques; celles-ci sont libres, retenues cependant entre elles
au moyen d'une sorte de mucilage de manière à former
de peliles masses qui ne sont pas enveloppées par une
membrane spéciale. Le diamètre des utricules polliniques
dépasse de beaucoup celui des autres cellules ou utricules
du même végétal; d’abord transparentes, elles offrent en
premier un nucleus (cytoblaste), accompagné de nombreux
granules ; plus tard, ceux-ci s’agglomèrent et laissent voir
a leur place deux, et plus tard encore, quatre nucleus
ovales, lenticulaires, jaunâtres , ayant chacun au centre
un point lumineux; l’utricule générale présente alors
d’autres phénomènes, elle s’épaissit par couches concen-
triques très-distinctes , et laisse au centre une cavité plus
ou moins arrondie au milieu de laquelle se trouvent les
quatre nucleus séparés les uns des autres par du muci-
lage. Ce mucilage venant à son lour à s’épaissir, forme
pour chacun des nueleus une logette particulière, où ils
s'organisent et prennent les principaux caractères du pol-
len. La séparation de l'utricule pollinique, en quatre par-
ties, se fait simultanément et non par l'épaississement du
mucilage qui marcherait de la circonférence au centre de
l'utricule.
LÉ sd os
(37)
Des fleurs femelles.
L'adhérence du calice à l'ovaire a lieu dès l’origine de
ces premiers organes; la feuille ovarienne n'est donc ja-
mais libre ni ouverte, comme elle paraît l'être dans la
plupart des fleurs à ovaires libres; vers l'époque de la fé-
condation, l'ovaire nous offre deux petites lacunes laté-
rales, n'ayant aucun rapport avec le tissu conducteur du
style; ces deux lacunes en s’avançant l’une vers l'autre,
forment la cavité de l'ovaire, revêtu par l’endocarpe, dont
les parois restent long-temps intimement appliquées les
unes contre les autres même après la fécondation; ce n’est
que plusieurs mois plus tard qu'on commence à aperce-
voir à la base de l’endocarpe un petit mamelon pulpeux,
sessile; ce petit corps est un ovule orthotrope, il est or-
dinairement accompagné de deux corpuscules extrême-
ment délicats, claviformes; ce sont des ovules avortés.
Lorsque deux ou trois de ces ovules sont fécondés, et qu'ils
viennent à se souder, il en résulte une graine unique à
deux ou trois embryons; l'embryon est suspendu au som-
met de l’ovule par un fil entièrement cellulaire; c’est la
partie correspondant à la radicule qui s'accroît et verdit
la première, les cotylédons restent long-temps encore à
s'organiser après que la radicule est arrivée à son parfait
développement , la coloration en vert du corps pulpeux,
dans lequel se forme l'embryon, commence à se manifes-
ter à la base, Comme j'ai suivi pendant quatre années le
développement de l’ovule du gui, et que je Jui aï toujours
trouvé le même caractère, j'en conclus que l'ovule est
réduit au nucelle; la substance visqueuse et blanche du
fruit appartient au sarcocarpe ; la pélicule verte, réticu-
lée, qui revêt la graine, est formée par l'endocarpe.
( 58 )
Dans le Thesium linophyllum , on sait que les ovules
sont supporlés par une colonne placée au centre de l’en-
docarpe. Au moment ou le tube pollinique vient à se
mettre en rapport avec la partie libre et réfléchie de
J'ovule, on en voit sortir une vésicule dans laquelle se
forme l'embryon; la colonne se divise alors en deux par-
ties, l’une inférieure parcourue au centre par un faisceau
vasculaire, l’autre supérieure , dans laquelle on remarque
un tube digité inférieurement et renflé au sommet, comme
un matras; cette parlie renflée perce la colonne et se met
en rapport avec un point déterminé de l’ovule.
Je suis porté, d’après des observations faites sur des
plantes sèches, à regarder les ovules des o/acinées, san-
talacées, lovanthacées, comme étant dépourvus de tégu-
mens et réduits au nucelle.
Les faisceaux corticaux dans le gui, sont en nombres
déterminés; ils ne correspondent pas d’un mérithalle à
l’autre ; le nucleus se trouve dans le parenchyme cortical
des plus grosses tiges.
Paris, le 22 décembre 1838.
MOLLUSQUES.
Supplément à la note sur le genre Skrioue, par Messieurs
P. Gervais et P. J. Vanbeneden.
Dans la note que nous avons eu l'honneur de présenter
à l'académie dans la séance du 7 juillet 1838, nous avons
fait mention d'une nouvelle espèce du genre Sépiole,
découverte par M. Delle Chiaie dans le golfe de Naples, et
dont nous n'avons pu donner la description.
:
L
:
(39)
Pendant le séjour que l’un de nous vient de faire à
Naples, nous nous sommes procuré un individu de cette
intéressante espèce, grâce à l'obligeance empressée de
M. Delle Chiaie. Elle a été figurée par ce célébre anato-
miste dans la cinquième livraison de planches de ses mé-
moires sur les animaux sans vertébres , mais dont le texte
n'a pas encore paru, Get anteur nous l’a généreusement
cédée, et il nous a autorisés à la décrire comme supplément
à notre note. [l l’a désignée sous le nom de
8. SEPIOLA MACROSOMA.
Delle Chiaie. Memorie sulla storia e anafomin degli animali
senza vertebre. Atlas, pl. 71, fig. 1-2.
Habite le golfe de Naples.
Ce qui nous a frappés en examinant celle espèce avec
attention, c’est l'existence d’une paupière inférieure qui
rappelle, jusqu’à un certain point, le caractère principal
sur lequel M. Richard Owen a établi le Rossia palpebrosa.
La Sepiola macrosoma a encore de commun avec cette
derniére espèce une taille extraordinaire comparativement
aux autres espèces du genre.
IL serait peut-être nécessaire de comparer ensemble les
individus mêmes de ces deux espèces, avant de se pronon-
cer sur leur distinction spécifique, si l'on ne pouvait se fier
entièrement aux descriplions exactes du savant auteur
anglais. Du reste leur distribution géographique autorise-
rait presque seule leur séparation, puisque la Sepiola
palpebrosa à été découverte par le capitaine Ross au pôle
arctique , dans la baie d’Elwin, tandis que notre Sepiola
macrosoma habite le golfe de Naples.
Le corps est globuleux et parfaitement arrondi à sa par-
( 40 )
tie postérieure. Les nageoires sont placées au milieu de sa
hauteur; elles se rapprochent l’une de l’autre, de quel-
ques lignes de plus en dessous qu’en dessus.
Les bras ne s’éloignent point, pour leur longueur respec-
tive, de ceux des autres espèces. Nous donnons plus loin
leurs proportions. Les ventouses sont nombreuses et placées
irrégulièrement sur la surface interne des bras.
Le manteau n'offre point d'adhérence avec le corps dans
sa partie inférieure ou anale, ce n’est que sur la nuque
qu'on aperçoit une réunion d’une très-courie étendue.
La lame dorsale est plus large en avant qu’en arrière, et
se rétrécit insensiblement. C’est sans aucune comparaison
la plus grande espèce de ce genre. Nous donnons à la fin
les dimensions de l'individu que nous avons rapporté,
mais M. Delle Chiaie en possède dans sa collection qui ont
plus du double de celui-ci.
Si nous comparons la Sepiola palpebrosa, avec l'espèce
qui nous occupe, nous voyons d’abord que le globe ocu-
laire est protégé par un repli palpébral dans l’une et l’autre
espèce; mais dans l’espèce du nord, d’après la figure et la
description de l’auteur anglais, les paupières peuvent
recouvrir complétement les yeux, et il en existerait une en
dessus et en dessous, quoique cette dernière soit plus
forte: « They were (the eyes ) however almost completely
hidden from view by the contraction of the lawer eyelid
principally (1). » Nous ne trouvons dans notre espèce
point de trace de paupière supérieure, aussi ne pourrail-
elle point fermer complétement l'œil.
M. Owen suppose que ces paupières pourraient bien
(1) Voyage du capitaine Ross, Mist. nat., pl.B, fig. 1, et pl. C, pag. 95.
(41)
servir, à l'espèce qui habite des contrées si froides, pour
garantir le globe oculaire contre les fragmens de glace au
milieu desquels vit cette espèce. Mais l'existence de pau-
pières dans une espèce napolitaine détruit nécessairement
cette supposition.
Le corps est beaucoup moins allongé dans notre espèce,
et les nageoires ne sont pas insérées si près du bord anté-
rieur du manteau. Les nageoires sont aussi parfaitement
arrondies.
Les bras ont les mêmes proportions dans les deux espè-
ces; à commencer des supérieurs moyens, nous trouvons
les proportions suivantes 1 , 2 ,4,3. Il y a seulement cette
différence que dans l'espèce du nord la troisième paire
dépasse davantage la quatrième. Les bras tentaculaires
sont aussi plus longs dans l'espèce napolitaine, puisqu'ils
dépassent le corps, tandis qu'ils descendent tout au plus
jusqu'à l'extrémité du corps dans celle du nord.
Pouces. Lignes.
Longueur du corps et de la tête sans les bras, . . . . 3 »
— detrpius 1008 bras: St SP IMMNET ESE TUE 1 9
— des bras tentaculaires . . :.:. 2 . 0. 4 5
— delalame dorsale 4: 420 0e Mo cet: fe » 8
Largeur à la racine des nageoires . . . . . . . . 1 »
— DOME Ne ee Met es Lie le Le ge » 9
Nous possédons les quatre espèces européennes de ce
genre, à Louvain.
ANATOMIE.
Note sur les muscles de l’avant-bras du cheval, par,
M. Ch. Phillips, de Liége.
Les muscles de la région antérieure de l'avant-bras sont
(42)
destinés à opérer l'extension du membre; les anatomistes
ont décrit quatre muscles qui sont : l'épitroklo-préméta-
carpien , qui étend le canon; le cubito-métacarpien obli-
que, qui est comme le précédent extenseur du canon;
l'épitroklo-préphalangien, agent extenseur du pied; et
le cubito-préphalangien qui concourt avec le précédent à
étendre le pied.
Dans les ouyrages d'anatomie vétérinaire, ce muscle est
ainsi démontré : cet extenseur provient de l'extrémité in-
férieure de l’humérus et se propage jusqu’à l'os du pied.
La partie charnue supérieure et pyramidale règne au côté
externe de celle du muscle épitroklo-prémétacarpien, s’in-
sinue et glisse dans une gaîne qui commence à l'extrémité
inférieure du cubitus et s'étend jusqu’au bas du genou;
parvenu sur l'os principal du canon, ce muscle donne
une branche grèle qui va s'unir avec le tendon du cubito-
préphalangien; son attache inférieure se fait au bord an-
térieur de l'os du pied.
Le cubito-préphalangien, qui reçoit une branche tendi-
neuse du muscle précédent , ne s'étend pas aussi bas; son
insertion inférieure a lieu à l'os du paturon: ces deux mus-
cles agissent donc en opérant, le premier l'extension du
pied, le second l'extension de l'os du paturon.
Entre ces deux tendons, et attaché au bord externe du
tendon de l’épitroklo-préphalangien, on remarque un
petit ruban fibreux qui paraît appartenir à ce dernier, mais
on est bientôt convaincu du contraire lorsqu'on fait mou-
voir un membre disséqué ; si l’on exerce de grands efforts
sur la partie charnue de ce muscle, on produit l’extension
du membre; mais aussi on voit la bandelette dont je viens
de parler; ne pas étendre son action aussi loin que le ten-
don avec lequel elle est unie, sa puissance s'arrête à l’arti-
(43)
culation du boulet, là on voit ses fibres s'épanouir d’abord
en éventail et se perdre ensuite dans l'épaisseur de la cap-
sule articulaire avec laquelle elle se confond ; cette dispo-
sition remarquable devait faire naître le désir de remonter
à l’origine de cette bandelette. En approchant de la gaîne
fibreuse qui retient les tendons, nous avons pu constater
que la branche grèle qui va s'attacher au cubito-prépha-
langien n'appartient pas à l’épitroklo préphalangien comme
on l’a cru , mais qu’elle dépend de la bandelette dont nous
parlons; ce qui explique bien la fonction de cet organe.
Lorsqu'on divise la partie charnue de l’épitroklo-prépha-
langien, on est arrêté près du cubitus par une lamelle apo-
névrotique de ce muscle sur un faisceau de fibres muscu-
laires; en prolongeant avec soin cette dissection, on par-
vient à l'isoler complétement et l’on a pour résultat un
faisceau charnu bien distinct du corps du muscle auquelil
adhère fortement.
Ses attaches sont en haut, à la face externe du cu-
bitus, et en bas, à la capsule supérieure du paturon; il
est situé sous l’épitroklo-préphalangien et est en rap-
port par son bord externe avec le cubito-préphalangien.
Voici les conditions nécessaires pour faire reconnaître un
muscle :
1° Les attaches bien distinctes ;
2° Enveloppé par une aponévrose qui lui est propre ;
8° Et chargé d’une fonction spéciale,
À cause de sa position et de ses rapports, nous croyons
pouvoir le nommer le petit cubito-préphalangien ; il est
chargé de produire l'extension de la capsule articulaire,
afin qu’elle ne soit pas serrée entre les os lorsque le muscle
cubilo-préphalangien étend le paturon, et lorsque l'épi-
troklo-préphalangien étend l'os du pied.
C4)
EXPLICATION DES FIGURES.
#
Fig. I.
Face antérieure de l’avant-bras, représentant le: muscles décrits
par les anatomistes,
1. Humérus
&
. Olécrâne.
. L’huméro-cubital.
+ L'épitroklo-prémétacarpien.
L’épitroklo-préphalangien.
Le cubito-préphalangien.
. L’épitroklo-suscarpien.
. Le cubito prémétacarpien.
Le tendon de l’épitroklo-préphalangien.
. Le tendon du petit cubito-préphalangien.
+ Le tendon du cubito-préphalangien.
12. Bandelette qui unit ces deux tendons.
. Attache du tendon de lépitroklo-préphalangien,
+ Huméro-olécränien externe.
© © 1 © Cr à
mi bi
ei ©
bi
co
ei
CS
oh
Fig IT;
Face externe de l’avant-bras.
1. Humérus,
2. Olécrâne
3. L’huméro-cubital,
4. L’huméro-olécrânien externe.
5 L’hépitroklo-prémétacarpien.
6. L’épitroklo-préphalangien. \
7. Le cubito-préphalangien.
8. Le petit cubito-préphalangien.
9. L’épitroklo-suscarpien.
10. Le cubito-prémétacarpien.
11. Le tendon divisé de l’épitroklo-préphalangien. à
12. Partie inférieure du tendon précédent.
13. Bandelette qui unit les deux tendons des muscles grand et petit
cubito-préphalangien.
14 Attache du petit cubito-préphalangien à la capsule du boulet.
15. Attache inférieure dn grand cubito-préphalangien.
Bulletins de l'Acaenue | lag. 44. Tome VI
7/24 ilhps
(45)
CHIMIE.
Notice sur l'existence de l'acide lactique dans les bières
aigres , par M. Vanden Ghyen, préparateur à l’univer-
sité de Gand. :
« Scheele, à qui la chimie est redevable de tant de dé-
couvertes, fut le premier qui constata l'existence de l'acide
lactique et le distingua de l’acide acétique ou vinaigre,
avec lequel il avait été confondu jusqu'a lui. Depuis cette
époque, qui date de l’année 1780, plusieurs chimistes s’en
sont occupés successivement. Allernativement admis ou
rejeté, suivant que l’on avait opéré sur des produits plus
ou moins purs , il ne fut plus permis de douter de son exis-
tence depuis le beau travail dont il fut l’objet de la part
de MM. J. Gay-Lussac et Pelouze.
Scheele l’a découvert dans le lait fermenté et aigri,
M. Corriol l'observa dans l’infusion fermentée de noix vo-
miques, MM. J. Gay-Lussac et Pelouze l’extrayèrent du suc
fermenté de betteraves, et dernièrement M. Liebig démon-
tra son existence dans la choucroûte. M. Berzélius, qui de
son côlé en a découvert une petite quantité dans tous les
fluides animaux et dans la chair musculaire, croit que
l'acide lactique se forme dans toute matière fermentée.
Cette opinion vient de se corroborer par la présence de cet
acide dans la bière aigre.
La bière que j'ai soumise à l'expérience était de la
bière de Diest, qui s'était aigrie sur bouteille, et qui
m'avait été fournie par M. le professeur Van Mons, à la
prière duquel je l'ai examinée.
Pour en extraire l'acide lactique, il suffit de la traiter
par le carbonate de zinc hydraté, de chauffer au bain-ma-
rie et de filtrer ; d'évaporer ensuite la liqueur au même
«
( 46 )
bain, jusqu’à consistance convenable, et de laisser cristal-
liser. Pour purifier le lactate de zinc et isoler l'acide, j'ai
suivi la méthode indiquée dans le mémoire de MM. J. Gay-
Lussac et Pelouze.
La quantité d'acide lactique existant dans la bière est
suffisante pour que ce soit un procédé très-économique
pour le préparer, puisqu’un litre de cette liqueur m'a
fourni 2,20 gr. d'acide lactique syrupeux.
Dans uné lettre que vient de m'écrire M. le professeur
De Koninck, il m'annonce qu'il a trouvé le même acide
et également en assez grande abondance dans la bière
brune aigrie de Malines. D'après cela, il est très-probable
que toutes les espèces de bière doivent, au moins leur
première aigreur, au développement de l'acide lactique,
ce dont je me propose de m'assurer par des expériences
ultérieures. »
Le secrétaire en présentant cetle notice, annonce qu’il
a reçu une lettre par laquelle M. Van Mons fait connaître
que M. Vanden Ghyen a retiré de l'écorce de la racine du
peuplier tremble, le principe nommé populine, qui jus-
qu'ici n'avait élé trouvé que dans l'écorce de la tige et dans
les feuilles du même arbre ; que cette extraction a été
faite par le procédé le plus simple, et qu’à la place de la
salicine qui, dans les autres parties de l'arbre, accom-
pagne la populine , M. Vander Ghyen a trouvé un principe
nouveau et qui, par aucune de ses qualités , toutes bien
déterminées et singulièrement prononcées, n’a aucune
relation avec la salicine.
M. le vice-directeur, en levant la séance, a fixé l’époque
de la prochaine réunion au samedi 2 février.
(47)
/
OUVRAGES PRÉSENTÉS.
Documents statistiques , recueillis et publiés par le
ministre de l’intérieur. Quatrième publication officielle.
Bruxelles , chez De Mat, 1833. 1 vol. in-4°.
Annuaire de l’observatoire de Bruxelles, pour l'an
1839, par le directeur A. Quetelet. Bruxelles, 1839. 1 vol.
in-18.
Dictionnaire géographique du Luxembourg, par Ph.
Vandermaelen. Bruxelles, 1838. 1 vol. grand in-&.
Nuova quida per la citta’ di Arezzo, del tenente
N. Oreste Brizi. Arezzo, 1838. 1 vol. in-18.
Additions à la note de M. Vincent, sur la résolution
des équations. 1 feuille in-8°.
Analectes historiques, recueillis et annotés par le doc-
teur Le Glay. Paris, 1838. 1 vol. in-8°.
Cataloqus conchyliorum regni neapolitani, quæ
usque adhuc reperit A. Scacchi. Neapoli, 1836. Broch.
in-8°.
Les deux cousins, ou les suites de l’éducation, co-
médie en 3 actes et en vers, par P. Bergeron. Bruxelles,
1839, 1 vol. in-8°.
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BULLETIN
DE
L’ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES
ET BELLES-LETTRES DE BRUXELLES.
1839. — No 2.
Seance du 2 février.
M. De Gerlache, directeur.
M. Quetelet , secrétaire-perpétuel.
CORRESPONDANCE.
Le secrétaire communique une lettre de M. Whewell, qui
fait connaître que le gouvernement anglais paraît disposé
à envoyer une expédition vers le pôle austral, pour déter-
miner la position actuelle du pôle magnétique ; de même
que pour y établir plusieurs observatoires magnétiques
permanens, dans la vue d’observer les variations simulta-
nées de l'aiguille aimantée, découvertes par l'association
pour les observations du magnétisme terrestre, établie
par M. Gauss. Les principales stations, indépendamment
de celle de l'observatoire royal, seraient au cap de Bonne-
Espérance , à la terre de Van Diemen, à Ceylan et dans
Tom. vi. 4
(50)
quelques places du Canada. Il paraîtrait que le capitaine
Ross serait chargé de l'expédition australe , tandis que le
major Sabine irait dans le Canada. Une commission, prési-
dée par sir John Herschel, a présenté un rapport à ce sujet.
M. l'abbé Carton écrit de Bruges qu’il vient de se former
dans celle ville une société d'émulalion pour l'histoire et
les antiquités de la Flandre occidentale. Cette société parli-
ciperaun peu de la nature d’une société de bibliophiles ; ses
publications ne se tireront qu’à un nombre borné d’exem-
plaires : ainsi, la chronique de l’abbaye des Dunes (en la-
tin) par Adrien Debut, ne sera Lirée qu’à 125 exemplaires.
CONCOURS DE 1839.
L'académie avait proposé, pour le concours de 1839,
cinq questions dans la classe des lettres et huit dans la
classe des sciences. Le secrétaire annonce qu'il a reçu les
mémoires SUIVANS :
1° Sur la 1°° question de la classe des lettres :
Quels furent les changemens apportés par le prince
Maximilien-Henri de Bavière (en 1684) à l'ancienne
constitution liégeoise ; et quels furent les résultats de ces
changemens sur l'état social du pays de Liége jusqu’à
l’époque de sa réunion à la France.
Un mémoire portant la devise :
Un prince de Liége ne donne seutence que par ses justices, et
ne fait ordonnances contre les lois du pays que du consentement
des états. (Le prince GÉRA&D.)
Commissaires : MM. de Gerlache, le baron de Reiffen-
berg, Grangagnage.
(51)
2° Sur la 1° question de la classe des sciences:
Un mémoire sur l'analyse algébrique, dont le sujet est
daissé au choix des concurrens.
Deux mémoires, l’un contenant un essai sur les for-
mules d'évaluation des produits continus, et portant la de-
vise : On le peut , je l’essaie ; l'autre, contenant un essai
analytique sur la force de percussion, par M. l'ingénieur
Manilius. L'auteur de ce travail s'étant fait connaîlre, ne
pourra être admis à concourir.
Commissaires : MM. Timmermans, Garnier et Dandelin.
3° Sur la 5% question de la classe des sciences :
Exposer la théorie de la formation des odeurs dans
les fleurs. *
Un mémoire écrit en latin et portant la devise :
Homénis sapientia est, ut neque omnia te scire putes, quod Dei
est, neque omniu nescire quod est pecudis , est enim aliquod me-
dium quod sit hominis ; id est scientia cum ignoratione juncta et
temperata. (Lacrans. Div. instit., lib. IIT.)
Commissaires : MM. Dumortier, Morren et Martens.
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
—
PHYSIQUE DU GLOBE.
Températures de la terre. — M. Quetelet présente les
résultats des observations sur les températures de la terre,
faites à l’observaloire de Bruxelles, pendant l'année 1838;
ces tableaux font suite à ceux qui ont été présentés pour
les années précédentes, et qui ont été imprimés dans les
tomes X et XI des Nouveaux Mémoires.
(52)
Il est à remarquer que les grands froids qui se sont fait
ressentir au commencement de 1838, n’ont pas eu d’in-
fluence marquée pour altérer les époques du minimum
de température à différentes profondeurs; ainsi, le plus
grand froid de janvier n’a fait sentir son influence à 24
piedsde profondeur (7",80) que vers le 20 juin, époque trés-
voisine du 18, 5 juin que donnent toutes les observations
antérieurement faites à Bruxelles. Le tableau suivant in-
diquera mieux la marche progressive du minimum et du
maximum de température pour les différentes profon-
deurs où les variations annuelles du thermomètre sont
suffisamment appréciables.
ÉPOQUES DU
—— Ra —
PROFONDEURS. MINIMUM DE TEMP. MAXIMUM DE TEMP.
oo
1838. | MOY. GÉNÉR. 1838. MOY. GÉNÉR.
Surface. 27,4 janv. | 22,9 janv. | 14,5 juill. | 22,0 juill.
Om, 19 7,1 févr. 2,9 févr. | 19,7 26,8 »
45 13,3 » |114 18,8 31,1 »
75 16,4 » | 21,8 25,8 5,4 août.
00 (1) 24,8 27,2 83 »
90 19,1 avril. | 21,7 avril. | 23,6 oct. 12,6 oct.
80 20,0 juin. | 18,5 juin. | 15,6 déc. | 12,0 déc.
(1) Le thermomètre n’a pu être observé.
Quant aux valeurs des minima , elles ont dû naturelle-
ment être plus prononcées que celles données par les
années ordinaires, à cause de la température remarqua-
blement basse de 1838 ; d’une autre part, les maæima ont
été moindres.
(55 )
TEMP. MAXIMUM.
Re
1838.
TEMP, MINIMUM.
. PROFONDEURS,
1838. MOY,GÉNÉR.
Om, 19 + 0532 | + 2°76
0, 45 1,81 3,66
SE
MOY.GÉNÉR.
+15,56 | + 16265
+-16,05 16,48
0, 75 1,90 4,28 15,33 16,34
1, 00 ? 5,94 15,64 16,38
3, 90 9,48 9,69 14,31 14,30
7, 80 10,71 11,14 12,31 12,62
Il résulte de ces observations que les oscillations du
liquide dans le tube thermométrique décroissent trés-sen-
siblement à mesure que les profondeurs augmentent; à
7,80 mètres de profondeur, la différence entre l’état le
plus élevé du thermomètre, qui n’arrive que le 12 décem-
bre, et son état le plus bas, qui a lieu du 18 au 19 juin,
n'est que d’un degré et demi environ.
Ces variations ont donné les valeurs suivantes :
VARIATION ANNUELLE.
PROFONDEURS. EE ——
1838. MOY. GÉNÉR,
(54)
Les observations dont il vient d’être parlé, ont été faites
au moyen de thermomètres placés en terre et au nord de
l'observatoire ; mais, depuis trois ans, des observations sem-
blables ont été faites au moyen de thermomètres placés
au sud, et dans une exposition accessible au rayons so-
laires. M. Quetelet se borne, pour le moment, à présenter
les tableaux de ces dernières observations, en se réservant
d'en présenter plus tard la diseussion.
— L'auteur communique à ce sujet les résumés de
recherches analogues qui viennent d’être faites à Édim-
bourg, sur la demande et avec les fonds de l'association
britannique pour l'avancement des sciences. M. Forbes,
qui a été chargé de la surveillance de ces observalions,
écrit que les résultats généraux sont parfaitement d'accord
avec ceux obtenus à Bruxelles. Afin de rendre plus com-
parables les résultats de l'Écosse, on avait eu soin de faire
Jes thermomètres destinés aux observations, de même lon-
gueur que ceux de Bruxelles et de Paris. Voici, d’après
M. Forbes, comment le maximum de la chaleur de l'été
a pénétré aux différentes profondeurs, dans trois terrains
différens, qu’on avait choisis à dessein pour reconnaître
la différence de eonductibilité.
OBSERVATOIRE JARDIN
PROFONDEURS. CRAIGLEITH.
d'Edimbourg. | expérimental.
3 pieds. 6 août. 31 juillet, 5 août.
2 septemb, | 24 août. 19 »
17 octobre. | 7 octobre. | 11 septemb.
8 janvier. | 30 décemb. | 11 novemb,
( 59 )
Les plus grandes variations annuelles des thermomètres
dans les trois stations ont été les suivantes, pendant l’année
qui vient de s’écouler.
OBSERVATIONS JARDIN
PROFONDEURS,. CRAIGLEITH,
d'Edimbourg. | expérimental.
On déduit de ces résultats, comme de ceux de Bruxelles,
que les variations thermométriques annuelles décroissent
selon une progression géométrique, quand on descend
au-dessous de la surface du sol selon une progression
arithmétique.
Aurore boréale. — M. Quetelet annonce que, dans Ja
soirée du 19 janvier dernier , il a vu une aurore boréale,
dont les journaux n’ont pas fait mention. Le phénomène
élait déjà assez avancé lorsqu'il l’aperçut vers 10 heures. La
lumière de l'aurore boréale avait sa plus grande intensité
vers le NNO.; elle s’étendait de chaque côté de ce point,
le long de l'horizon, jusqu’à la distance de 60 à 70 degrés
environ, et elle ne s'élevait guère, dans sa plus grande
hauteur, à plus de 20 à 25 degrés au-dessus de l'horizon.
Cette lumière était blanchâtre , continue et sans jets. Vers
10 : heures, des nuages épais bordaient l'horizon septen-
trional, et s'élevaient de plus en plus en formant comme une
(56 )
voûle obscure, surmontée de la lumière de l'aurore bo-
réale ; sa plus grande hauteur était aussi vers le NNO. Les
nuages se dispersèrent ensuite dans le ciel, en se dirigeant
vers le SSO.; à travers les éclaircies qu'ils laissaient, on
distinguait encore l'aurore boreale vers 11 : heures.
Le ciel avait été couvert pendant le jour; il avait même
plu un peu vers quatre heures; le vent, qui avait soufflé
avec force, en partant de l’ouest, avait changé de direc-
tion au moment du phénomène. L’hygromètre de Saussure
marquait une humidité très-grande. Quant aux autres
instrumens météorologiques, voici leur marche.
æ
THERMOMÈTRE | THERMOMÈTRE
BAROM.
mt. ext.
19 janvier 9 h. matin, . 75491 411,7 cent. | + 191 cent.
midi, . . . | 751,55 14,3 2,2.
4 heures . . | 746,10 16,2 2,6
Jh.soir . . |! 752,08 14,7 3,1
9h. matin. . | 760,18 12,5 2,0
L’accroissement de température, vers l'heure du phéno-
mène, est assez remarquable, et les variations du baro-
mètre ont été très-brusques. M. Duprez écrivait de Gand,
sans qu'il sût qu’il y eût eu une aurore boréale : « Dans la
nuit du 18 et dans la journée du 19, époque à laquelle,
d’après le dire des journaux, un vent trés-violent n’a cessé
de régner à Bruxelles , les variations du baromètre ont été
assez brusques pour que je croie utile de vous les faire
connaître... Ainsi, dans l’espace de 24 heures, le sommet
(57)
de la colone de mercure a parcouru un espace total de
23mm, 87. On n’a ressenti ici que quelques coups de vent
violent dans la journée du 19, entre midi et 4 heures du
soir ; le vent n’a cessé de souffler du SO. Il est tombé à dif-
férentes reprises de la neige et de la pluie. »
M. Quetelet annonce en même temps qu’il a reçu une
lettre de M. le docteur Julius, qui lui fait connaître qu'il
a aussi observé une aurore boréale à Hambourg, le 10 jan-
xier dernier, entre 5 et 6 heures du soir, et dans la direc-
tion du NNO. M. Julius ajoute qu'a Copenhague, on a ob-
servé plusieurs aurores boréales vers la même époque.
MÉTÉOROLOGIE.
M. Crahay, membre de l'académie, présente le résumé
des observations météorologiques qu'il à faites à Louvain,
-au collége des Prémontrés, pendant l’année 1838. Ce ré-
sumé sera publié dans le iome XII des nouveaux Mé-
moires de l’Académie.
M. Quetelet communique en même temps les résumés
des observations météorologiques qui ont été faites dans
le cours de la même année, par M. C. Willaert, professeur
de physique au collége d’Alost, et par M. Duprez, pro-
fesseur à l’athénée de Gand (1).
Les tableaux de ces observations, rapprochés de ceux
de l'observatoire de Bruxelles, qui ont été communiqués
à l'académie dans la séance précédente, présentent les ré-
sultats qui suivent :
(1) Ces résumés seront publiés dans les Annales de l'Observatoire.
(58 )
Quantité d’eau tombée et nombre de jours de pluie.
BRUXELLES
LOUVAIN,
Janvier 240% 1,63 5,83 415
Février . . . | 22,72| 22,77| 23,76
Mars . . . . | 46,18! 48,72] 37,33
Avril. . . . | 53,74] 65,76] 44,85
Mai . . . . | 51,76) 48,35) 65,85
Juin . . . . [119,54 106,56 116,15
Juillet . . . | 43,39) 56,36) 87,90
Août . . . . | 75,811106,95 si
Septembre . . | 54,60! 53,58, .
Octobre . . .!} 45,97| 46,77) 68,77
Novembre ,
Décembre . . | 18,25
Année. . |597,59
61,10! 85,19 L)
|
21,53, 24,77
QUANT. D'EAU EN MILL.
OO ———— |
23,85
44,37
57,42
63,81
83,79
112,41
132,75
48,69
68,94
80,01
32,67
NOMB. DE JOURS DE PL.
BRUXELLES
LOUVAIN,
658,37 669,571748,71)181 |195 |172 |168
(1) Pour les 15 premiers jours du mois.
(59 )
HAUTEUR MOYENNE TEMP, MOYENNE CENT.
du baromètre réduit à midi.
BRUX. | LOUV.
BRUXELLES
(1)
LOUVAIN.
ALOST.
GAND.
mm | mm mm
Janvier . 1756,62 758,041759,87
Février 748,88 751,09 |752,59
Mars . . 753,79 755,90 |757,12
| Avril . . . [751,76 753,24\755,04
Juin . . 755,05 756,80 758,53
Juillet. . 757,16 758,93|761,34
| Mai. . . . 1754 . 21|758,08
Août . . 755,82|757,79 760, 48
l Septembre 757,19 759,00 |760,43
! Octobre . 757,31,758,98 760,89)
Novembre . |747,90,749,83,751,06
| Décembre . |760,91
Année. . |754,76,756,52 rar
(1) Le thermomètre donnait des indications trop hautes de 094.
(2) Pour les 15 premiers jours du mois.
( 60 )
Les observations de Bruxelles, de Louvain, d’Alost et
de Gand, s'accordent à donner une température moyenne
de l’année bien inférieure à la moyenne générale, qui est
de 10°,5 environ. Le nombre des jours de pluie a été de
180, terme moyen; c’est à Gand qu’il est tombé le plus
d'eau, 748,71 millimètres, et à Bruxelles qu’on en a re-
cueilli le moins, 600 millimètres environ. La période
diurne du baromètre s'est manifestée dans les quatre lo-
calités d’une manière à peu près semblable. En compa-
rant la pression moyenne, déduite des observations faites
quatre fois par jour, à 9 heures du matin, à midi, à 4 h.
et à 9 heures du soir (1), on trouve en effet :
BRUXELLES
Lu LIL mm
Pression moyenne. . . . 756,50 | 758,26
9 heures du matin, . . . +0,19 | +0,20
Midi RER COR RS +0,02 | +0,02
4 heures du soir . . . . —0,33 | —0,33
» +-0,09
— Le secrétaire présente ensuite quelques tableaux mé-
(1) Les observations de Louvain ne comprennent pas l'observation
de 9 heures du soir. On a pris pour pression moyenne celle de midi,
diminuée de Omm,02, d'après les observations d’Alost et de Bruxelles.
ES
(61)
téorologiques qui lui ont été communiqués par M. le pro-
fesseur Martens , de Louvain.
Ces tableaux renferment les résumés des observations
faites à Maestricht, pendant les années 1808, 1809, 1810
et 1811, par M. le professeur Minkelers, ancien membre de
l'académie , qui les a rédigés sur la demande du préfet du
département de la Meuse inférieure. Ces documens météoro-
logiques seront imprimés dans le XTI° volume des mémoires.
ANATOMIE VÉGÉTALE.
Observations sur l’anatomie des uebyYcuivum, par
M. Ch. Morren, membre de l’académie.
Les nouveaux travaux de M. Unger et Meyen (1), sur
les cristaux qui se trouvent dans les cellules des plantes,
ayant prouvé que les systèmes prismaliques sont, en gé-
néral, rares parmi les végétaux, j'ai cru qu'il était con-
venable de publier quelques observations que j'ai faites
sur un système semblable dans les Zedychium et notam-
ment sur l’Æedychium flavum. Ces dissections précisent
d’ailleurs des faits sur lesquels on avait encore des doutes
dans cette partie des sciences phytotomiques.
(1) Unger, Uber Krystallbildungen in den Pflansensellen. Annalen
des Wiener Museum’s , I Bander 1 Abttheilung. Vienne 1837.
Meyen, Von den Krystallen und den anorganischen Substansen
überhaupt, welche in den zellengewebe der Pflansen vorkommen. Phy-
siologie , tom. I, p. 212, Berlin, 1837.
(62)
Dans la plus jeune feuille encore enroulée du sommet
de la tige, on voit déjà quelques rares cristaux, plus sou-
vent dans les cellules privées de chlorophylle que dans
celles qui en sont pourvues, plus souvent dans les cellules
profondes que dans les superficielles. Comme la feuille
est alors fort jeune, qu'elle vient de naître, on ne peut
reconnaître dans la formalion de ces cristaux un effet de
l’âge et un indice de vieillesse, comme on l’a fait. Ce
n’est pas une tendance à la mort, un relour au monde
inorganique que ce phénomène de la cristallisation s’exer-
çant librement dans les cellules.
Dans l’ovenchyme de ces jeunes feuilles, la chloro-
phylle globulinaire verte est formée par des vésicules pa-
riélales, occupant presque toujours une seule zone de la
cellule, et ces vésicules ont un granule de fécule au cen-
tre, bleuissant par l’iode (fig. 7, a , b). Ce granule de fécule
n'existe pas d'abord; il se développe par la suite. Plus
tard, quand la feuille est vieille, et l’on voit le même fait
dans les vieilles cellules de la tige, la vésicule viridifère a
disparu et la fécule aussi, mais l'enveloppe de celle-ci,
sa vésicule, non-bleuissant par l'iode, est restée; c'est
sous cet état qu'on la voit former de petits granules inco-
lores dans le prismenchyme âgé (fig. 1, k).
Dans le jeune ovenchyme, les cristaux forment des
prismes rhomboïdaux (fig. 5). Ceux qui se manifestent
dans des cellules plus âgées, sont des prismes hexaëdres,
dérivant du rhomboïde (fig. 6). Dans les vieilles cellules,
le prisme devient oclaëdre (fig. 3), et quatre de ses faces
s'émoussent ou s’'arrondissent (fig. 4). Ces deux dernières
formes, très-rares dans le règne végétal , sont ici les plus
communes ; les prismes se déforment quelquefois.
Le plus souvent il y a ainsi un seul cristal qui occupe
( 63 )
un des angles de la cellule. Ce cristal est indépendant; il
re se produit pas sur une vésicule chlorophyllaire ou sur
un globule de fécule, comme on l’a dit pour d'autres
plantes, mais il est libre {#g. 7). Seulement , quand il y
a beaucoup de substance cristalline dans une cellule, le
cristal déja formé sollicite la formation d’un plus grand
nombre de cristaux, qui alors se réunissent en amas plus
ou moins composés (fig. 1, g, h, à); il y a aussi fusion de
différens cristaux dans ce cas (fig. 1, g).
Ces cristaux, dont les plus gros vont à + de millimètre
ne se déposent pas dans les grandes cellules bexagonales
du derme, comme dans les espèces du genre Tradescan-
tia (Meyen. Physiologie, 238, tom. I). Le second plan
cellulaire du derme a des cellules plus petites, chacune
pourvue d’un nucléus (fig. 8, c), mais toutes privées de
cristaux.
Les prolongemens scarieux de la gaîne des feuilles sont
formés d'un prismenchyme dont quelques cellules sup-
portent des poils. Quand ceux-ci se déiachent, ils en-
traînent la cellule qui leur sert de support, et il y a ainsi
des trous dans les deux membranes sèches qui constituent
ces organes scarieux, C’est un phénomène analogue à celui
publié récemment pour le Nuphar luteum , par M. Schlei-
den (1). Cependant, dans ces lamelles scarieuses , il n’y a
pas le moindre cristal, quoique ce soient des parties
mortes sur le végétal développé, et n'ayant vécu que dans
la première évolution des feuilles.
Les canaux aérifères ou les cavités aériennes de la
(1) Schleiden, Zotanische Notizen. Archive für Naturgeschichte von
Wicgmann, Erster Heft , 1838, p. 49.
( 64)
plante ne contiennent aucun cristal (fig. 10,b). Mais ces
conduits laissés entre des cellules prismatiques , conduits
sans membrane propre, il y a des cellules particulières
qui naissent sur ou entre celles qui constituent les parois
de ces canaux aériféres. Ces cellules sont ordinairement
pourvues de grains chlorophyllaires et ont toutes sortes
de formes, mais surtout celles de cornes ou de crochets,
parfois symétriques (fig. 10 , e), parfois sans symétrie
(fig. 10, c). Jamais elles ne contiennent sous leur paroi
épaisse et entre leurs granules verts pariétales, des cris-
taux. Ces cellules se lient évidemment aux stellicules ou
poils intercellulaires des Vymphea et autres plantes aqua-
tiques. Ce sont des organes du même genre, situés dans
les mêmes parties.
Il y a des cellules féculiféres dans les nervures princi-
pales des feuilles, et exclusivement féculifères ; elles sont
clair-semées.
La fécule y est ovoïde, petite, sans point central, et les
granules peu nombreux, librement suspendus dans des
cellules mérenchymateuses (fig. 9, a). On n’y trouve pas
de cristaux.
Il n’y a pas de cristaux dans aucune des cellules essen-
tiellement chlorophyllifères qui longent les fibres. Entre
les cellules qui se posent le long des vaisseaux séveux de
ces fibres et celles qui constituent la seconde rangée, à
partir de ces fibres , on trouve d’espace en espace une cel-
lule ovoïde, toule remplie de chlorophylle (£g. 2, r), et
dans celle-là il n’y a jamais de cristaux, quoique toutes les
cellules des alentours en aient.
Au milieu de huit ou de dix cellules qui en entourent
une autre, prise un moment pour centre de ce groupe, on
remarque des cristaux, moins dans la centrale (fig .1), et
(65 )
celle particularité se rencontre souvent dans la lige de
l'Æedychium.
L'Aedychium flavum est sujet à une maladie particu-
lière, à une nécrose de cellules. Au milieu de feuilles
bien saines qui terminent la plante, la feuille la plus
jeune, encore enroulée sur elle-même en cornet et pro-
tégée de toutes parts par les gaînes ou les limbes de cinq à
huit feuilles environnantes, devient rousse, brune, hu-
mide ; elle ne croît plus, meurt et pourrit. Celte désor-
ganisalion est bien due à une cause interne : car, sur une
feuille semblable, je me suis assuré que jamais le derme
n’est attaqué le premier; il est encore entiérement sain
quand les cellules infrajacentes sont toutes malades.
Cette nécrose s'empare individuellement des cellules;
il yen a de mortes au milieu d’autres bien vivantes.
Les premières, au lieu d’avoir un liquide intracellulaire
transparent comme de l’eau, sont remplies d'un liquide
brun , rougeûtre ou jaunâtre, opaque, qui se concrète et se
coagule tellement dans la cellule que, par le compresso-
rium, on détache celles-ci tout entières, on les roule
sans les briser, et dans quelques-unes on voit des globules
épars, très-pelits, qui sont les grains jadis féculacés, au-
jourd’hui muqueux (fig. 11 et 12). Chose singulière! d'a-
prés les idées admises sur la présence des cristaux dans les
organes morts ou malades, de préférence aux organes
vivans, on devrait s’altendre à voir dans ces cellules né-
crosées et se désarticulant si facilement de leurs voisines,
de ces cristaux prismatiques et rhomboïdaux; mais on
n’en découvre là aucun.
En général, d'aprés ces faits, on voit que la présence
d’un organe dans la cellule est défavorable à la formation
des cristaux, qui n’ont pas besoin d’un centre solide pour
Tom. vr. 5
( 66 )
se former plus facilement. La présence de la chlorophylle
n'exclut pas celle de ces cristaux, mais il paraît cepen-
dant qu'il ne faut pas qu’elle soit trop abondante.
Ces cristaux sont plutôt développés dans les parties
vivantes que dans les organes malades ou desséchés, et le
liquide me paraît avoir dans toutes les cellules une quan-
tité inégale de matière saline. Sous tous les rapports , on
dirait donc que les phénomènes qui permettent la cristal-
lisation ou qui l’empêchent, sont particuliers à la cellule
et échappent à la vie générale de l'être. L'évaporation ne
favorise pas du tout cette cristallisation, car les parties
périphériques où elle s'exerce facilement, et les parties
desséchées où elle a eu lieu , ne renferment pas de cris-
taux, tandis que les organes profonds et humides sont
ceux où ces corps inorganiques sont les plus abondans.
Dans l’Æedychium coronarium Rox, le haut du rhi-
zome et le bas de la tige ont leurs cellules remplies d'une
grande quantité de fécule discoïde, aplatie (fig. 14) et
ordinairement pourvue d’une pointe à laquelle commence
la série des stries concentriques, semblables à celles de la
fécule de pomme de terre (fig. 13). Quelques cellules sans
fécule ont un cristal analogue à ceux de l’'Æedychium
flavum.
Plus haut, dans la partie jeune de la tige , il y a plus de
cristaux dans les cellules, mais ils sont moins abondans
que dans l'Æedycaium flavum. Leur système cristallin est
du reste le même.
Dans l’Hedychium Gardnerianum Wall, la fécule est
la même que dans l'espèce précédente, mais au-dessus
de l'endroit qu’elle occupe, le tissu cellulaire ne renferme
qu'un liquide limpide et des granules verts; au pourtour
de latige, il est sans fécule et sans cristaux ; tandis que très-
="
(67)
haut dans la tige, dans la partie nouvelle, les cristaux
sont très-nombreux et appartiennent au système rhomboï-
dal décrit plus haut.
Ces deux espèces confirment donc les vues que nous ve-
nons d'émettre relativement aux condilions où la cristal-
lisalion peut s’opérer au sein des cellules végétales.
Les fibres de l’Æedychium flavum sont formées, au
dehors, de vaisseaux séveux (fig. 2,a,b,c,d,e,f, q),
remarquables par leur grand développement. Leur paroi
fort épaisse se déchire par éclats et ne paraît avoir aucur
tissu ultérieur appréciable. Celte membrane , comme vi-
trée, un peu jaune, limite une cavité cylindrique où il
n’y a pas le moindre corps solide appréciable , mais seule-
ment le liquide séveux. Ces vaisseaux se terminent en cône
plus ou moins pointu et sont de toutes parts clos et fer-
més (voyez leur sommet fig. 2,ene,d,f).
Les pléiotrachées (trachées composées de plus d’une
fibre) reposent immédiatement contre ces vaisseaux sé-
veux (fig. 2, g), de sorte que par leur compression
mutuelle, il se forme sur les fibres de ces trachées des
lignes verticales qu’on a prises pour des corps particuliers,
et qui ne sont que les traces de la compression de deux
vaisseaux séveux contigus sur la fibre trachéenne (fig. 2,
h). I est facile de s'en assurer en suivant ces lignes sur des
piéiotrachées à moitié déroulées.
La fibre de ces pléiotrachées présente chez ces plantes
la bifurcation et les anastomoses déjà signalées par M.
Meyen ( Phytotomie) dans quelques Musacées et autres
végélaux (fig. 2,k, ). Aussi le nombre de fibres qui se
réunissent pour former le ruban de l'organe principal,
varie-t-il précisément à cause de ces bifurcations ; cepen-
dant ce nombre est aux environs de sept communément.
( 68 )
Des trachées simples peu nombreuses, des pléiotrachées
à spires croisées et des vaisseaux annulaires, rares ici,
sont les autres élémens organiques de ces fibres comme
on le voit en la figure 2.
EXPLICATION DE LA PLANCHE,
NB. Toutes les figures sont représentées à 250 fois le diamètre ; les
Fi77001°
Fig. 2.
figures 3, 4, 5 et 7, le sont à 5600 fois.
Tissu cellulaire du bas de la tige de l’Æcdychium flavum.
a. Cellule sans cristaux.
8. Impression des cellules voisines sur la paroi de la précé-
dente.
cc. Cellules cristallifères.
d. Cristal en prisme octaèdre.
e. Deux cristaux dont un déformé.
f. Deux cristaux réguliers.
g. Amas de trois cristaux soudés les uns aux autres.
h. Grand amas de cristaux.
i. Prisme à quatre faces arrondies.
k. Petits noyaux de fécule modifiée en globules muqueux.
Fibre de la même plante.
a. Vaisseau séveux.
b. Sa.paroi.
c. Sa cavité interne ; ce vaisseau est coupé.
d. Sommet fermé en cône.
e. Autre sommet du vaisseau qui s’implante où le premier finit.
f. Cône très-pointu ou sommet d’un vaisseau.
g. Vaisseau séveux comprimant une pléiotrachée.
h. Lignes ou impressions produites par ces vaisseaux sur les
pléiotrachées.
i. Fibres se déroulant, “+>-
k. Fibres anastomosées, deux soudures ou division et réunion,
{. Division.
m. Trachée conique.
n. Pléiotrachée croisée.
o. Vaisseau annulaire.
p. Fibres des trachées,
4. Cellules cristallifères longeant la fibre.
Bulletins de l'Acaderne
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(69)
r. Cellule chlorophyllifère.
Fig. 3. Prisme octaëdre allongé de la tige.
Fig. 4. Prisme octaëdre à quatre faces arrondies de la tige.
Fig. 5. Prisme rhomboïdal (forme des cristaux des feuilles).
Fig. 6. Prisme hexaëèdre rhomboïdal de la feuille,
Fig. 7. Deux cellules de l’ovenchyme des feuilles.
a. Paroi de la cellule,
b, Grain de chlorophylle renfermant un granule de fécule.
c. Cristaux.
Fig. 8. Derme avec ses deux couches (derme supérieur de la feuille).
a. Prismenchyme supérieur.
8. Prismenchyme inférieur ; les cellules n’ont qu’un tiers des
précédentes.
c. Nucléus ou cytoblaste de ces cellules,
Fig. 9. Cellule féculifère de la même plante.
a. Granule de fécule,
b. Paroi de la cellule.
Fig. 10. Cavité aérienne de la même plante.
a. Cellules qui limitent la cavité.
b. Cavité.
c. Singulières cellules cornues s’avançant dans la cavité.
de, Autres de ces cellules chlorophyllifères.
Fig. 11. Tissu cellulaire malade, à cellules nécrosées.
a. Cellules malades.
c. Cellules saines.
Fig. 12. Cellules nécrosées, désarticulées,
Fig. 13. Fécule de l’Æedychium coronarium.
abc. Granules discoïdes , vus d’en haut.
Fig. 14. Fécule de la mème plante, vue de côté.
— M. Morren présente ensuite un mémoire dont il
énonce le sujet de la manière suivante.
«Le mémoire intitulé : Recherches sur le mouvement
et l'anatomie du style du GorvrussiA ANISOPHYLLA , Que Je
présente aujourd'hui à l'académie, a pour but de faire con-
naître le mécanisme employé par la nature pour mouvoir
(70)
le pistil de cette plante intéressante. M. Treviranus re-
grettait dans sa nouvelle Physiologie (1838) que je n’eusse
point expliqué mes idées relativement au mouvement de
la colonne des Stylidiées, mouvement dont j’ai vu la cause
dans l’excitabilité de la fécule, considérée comme partie
organisée, comme organe vivant de la plante et non
comme produit chimique, comme substance inerte. Je ré-
ponds aujourd’hui au vœu de M. Treviranus par ce mémoire
nouveau. Le mouvement du style du Go/dfussia avait
échappé à l’investigation des naturalistes; il est cependant
bien remarquable. La plupart des fleurs où l’on a vu un
pistil mobile , possèdent un stygmate bilabié ; ici la partie
mobile est subulée et un peu en fuseau. Le vrai stygmate
occupe seulement la partie dorsale du style, et quand il se
recourbe il s'éloigne le plus possible des étamines: en se re-
dressant il va trouver des poils collecteurs qui, par la posi-
tion de la fleur ou au moyen du secours des insectes, re-
çoivent le pollen. La cause finale du phénomène est bien
certainement l'accomplissement de la fécondation ; mais
la cause mécanique siége dans la turgescence du cylin-
drenchyme du stygmate ; son tissu est formé par de longs
cylindres dilatables à l'une ou l’autre des extrémités, et
chacun est rempli d’un liquide globulifére. Ces globules
sont excitables ; naturellement ils se vortent aux extrémités
extérieures du cylindrenchyme ,et alors ces extrémités se
dilatant , elles font courber le styÿgmale; mais lorsqu'on
vient à le toucher, les globules et le liquide se refoulent au
bas des cylindres, et dans ce cas, ce côté devenant le plus
long, le style se redresse ou se courbe en sens inverse de
celui qu'il avait précédemment. La cause physiologique
siége done dans l’excitabilité d'un fluide vita. J'ai fait plu-
sieurs séries d'expériences pour prouver ces assertions , et
( 49
j'ai donné l'anatomie des parties. Je ne sache pas qu'on ait
jamais trouvé une structure semblable dans une partie
mobile des plantes. |
La morphologie et les métamorphoses des poils présen-
taient également sur ce végétal des observations curieuses.
Je me suis attaché à donner leur histoire. »
Commissaires : MM. Dumortier, Kickx et Martens.
ENTOMOLOGIE.
Notice sur la synonymie de quelques Gonvres ( genre
d'hyménoptères fouisseurs, Lat.), par M. Wesmael,
membre de l'académie.
Le premier volume des Ænnales de la société entomo-
logique de France , publié en 1832, contient un mémoire
de M. Lepelletier de Saint-Fargeau , sur le genre Goryte
de Latreille. L'examen de ce travail ayant fait naître en moi
quelques doutes sur la valeur de certaines opinions émises
par l’auteur, et ayant eu la facilité de vérifier dans la col-
lection de feu notre confrère Vanderlinden , l'identité des
espèces de Gorytes mentionnées par lui, j'ai cru devoir,
dans l'intérêt de l’entomologie, publier le résultat de mes
recherches. J'ose d’ailleurs espérer que personne ne sera
tenté de regarder cette notice comme une attaque person-
nelle contre M. De Saint-Fargeau, pour qui, j'aime à le
déclarer, je professe la plus sincère estime.
Quelques mots d’abord sur la forme de l'ouvrage.
M. De Saint-Fargeau a supprimé les phrases spécifiques,
comme il l'avait déja fait dans sa Monographie des
(72)
Tenthrédines. C'est là une innovalion dont je suis loin de
le louer, et qui, malheureusement, paraît depuis quelque
temps trouver beaucoup d’imitateurs en France. Ce qu'il y
a d'assez bizarre, c'est que le mémoire de M. de Saint-
Fargcau suit immédiatement un discours de M. Godet,
dans lequel celui-ci plaide de toutes ses forces la cause
des phrases spécifiques , comme on peut s’en convaincre
en jetant les yeux sur la page 40 (Ann. de la soc. ent.
de France, t. I, 1832). ‘
Division des Gorytes en plusieurs genres.
M. de Saint-Fargeau divise les Gorytes de Latreiile en
six genres, qui ne me semblent pas tous également admis-
sibles, ou à qui, tout au moins, il assigne des caractères
de valeur bien inégale. Le plus important de ces carac-
ières réside incontestablement dans la présence ou l’ab-
sence de longs cils aux tarses de devant des femelles. Ce
caractère, qui coïncide avec celui de la grandeur des pe-
lotes des tarses (1) et d’autres encore, partage ces insectes
en deux groupes très-naturels. Le premier, auquel l’auteur
conserve le nom de Goryte, comprend les espèces dont les
femelles ont les tarses de devant dénués de cils, les pelotes
des tarses petites et les quatre jambes postérieures sans
épines (2); l’autre groupe se compose des espèces qui n’of-
(1) C'est Rossi qui, le premier, a attiré l'attention sur les pelotes des
tarses, dans la description de son Crabo calceatus, Mantis. 122, 108.
(Gor. quinquecinctus , Lat.).
(2) Ces petites épines, quand elles existent, sont toutes placées le
long du côté extérieur des jambes, ce qui rend fort douteux l’usage que
leur assigne M, De Saint-Fargeau , d’être propres à retenir une proie.
(75)
frent pas ces trois caractères, et qui sont subdivisées en
cinq genres, Hoplisus, Euspongus, Lestiphorus, Psam-
mæcius et Arpaetus (1).
Je ne pense pas que les caractères indiqués par M. De
Saint-Fargeau soient suflisans pour justifier la création de
ces cinq genres: car 1° les caractères lirés des antennes
des femelles, un peu plus courtes ou un peu plus longues,
un peu plus ou un peu moins renflées vers le bout, sout
presque insaisissables; ou, au moins, ne peuvent être em-
-ployés que pour signaler les espèces; il en est de même
des antennes des mâles, et quant à l'échancrure que peut
présenter chez ceux-ci l’un ou l’autre article, et surtout
le treizième, on sait que dans des genres très-voisins des
Gorytes , tels que les Nyssons et les Alysons, l'existence et
la forme de cette échancrure varient à peu près d'espèce
à espèce ; 2° les dimensions des pelotes des larses, grandes
ou médiocres, n’offrent pas non plus de limites suflisam-
ment tranchées , et ne sont pas d’ailleurs en rapport avec
les légères différences que présentent les antennes: ainsi,
de trois genres à qui l’auteur assigne des antennes en
(1) Je dois déclarer ici, que, tout en admettant l'importance des ca-
ractères fournis par les cils des tarses et les épines des jambes, je laisse
à M. De Saint-Fargeau la responsabilité des conséquences qu’il tire de
l'absence de ces cils et de ces épines. « Il faut, dit-il, conclure que les
» femelles privées de cils aux tarses antérieurs et d’épines aux jambes
» postérieures... sont parasites. » Ce qui prouve combien de pareilles
conclusions sont hasardées, c’est l’histoire du Trypoæylon fiqulus, à
qui, vu l’absence de cils aux pattes, M. De Saint-Fargeau avait aussi
attribué des mœurs parasites (Encycl. méthod., t. X, pag. 750), tandis
que des observations positives, faites par MM. Shuckard et Westwood ont
prouvé que ce trypoxylon prépare lui-même le berceau de sa postérité
et l’approvisionne d’araignées. Voyez Transactions of the Entomological
society of London , vol. 1, pag. 204—206.
(783
massue allongée pointue (Eusponqus, Psammæcius et
Arpactus) , le premier a les pelotes très-grandes, tandis
que les deux autres ont des pelotes médiocres ; un autre
genre, les Lestiphorus, a les antennes filiformes chez les
femelles , et des pelotes de grandeur médiocre, caractère
qui, pour le dire en passant, est inexact, car les pelotes
des deux tarses de devant sont très-grandes chez les indi-
vidus de ce sexe ; 3° enfin , je ne puis admettre l’oblitéra-
tion plus ou moins complète de l'extrémité du cubitus,
comme propre à distinguer deux genres semblables sous
tous les autres rapports ; el c'est cependant le seul carac-
tère qui, suivant l’auteur, sépare ses Psammeæcius de ses
Arpactus.
Peut-être pourrait-on cependant conserver le genre
Lestiphorus , qui offre, dans la forme du premier anneau
de l'abdomen , un signalement de même valeur que celui
qui distingue les Eumènes parmi les Guépiaires solitaires.
Quant aux quatre autres genres, je crois qu'ils doivent être
réunis en un seul, auquel on pourrait conserver le nom
d’Ærpactus. Enfin , si on voulait , à toute force, pousser la
division plus loin , il faudrait tout au moins réunir en un
seul genre les Æoplisus et les Eusponqus , et en faire
autant pour les Psammeæcius et les ÆArpactus; et on
aurait ainsi deux genres, dont le premier aurait les pe-
lotes des tarses grandes, et les articles des antennes sans
échancrure chez les mâles; le second, les pelotes des tarses
médiocres, et les 10% et 13% articles des antennes
échancrés chez les mâles.
En admettant deux sections principales dans le genre
Goryte de Latreiïlle, je n'ai mentionné comme leurs carac-
ières distinctifs que ceux indiqués par M. De Saint-Fargeau;
mais il en est d’autres qui paraissent avoir échappé à
(75 )
l'attention de ce savant, et qui sont d’autant plus précieux
que leur vérification est trés-facile, et qu'ils appartiennent
également aux deux sexes. Ainsi, 1° chez les espèces dont
les femelles ont les tarses antérieurs garnis de longs cils
(Hoplisus, Euspongus, Lestiphorus, Psammeæcius, Ar-
pactus, Lepel.), le deuxième segment ventral est unifor-
mément convexe, et le mésosternum offre de chaque
côté une fine carène sinueuse, qui, partant de l’extré-
mité latérale du pronotum, se prolonge jusqu'au côté
extérieur des hanches du milieu ; 2° chez les espèces dont
les femelles ont les tarses de devant dépourvus de crins
(Gorytes, Lepel.), le deuxième segment ventral est brus-
quement élevé et comme tronqué à la base (1), et le mésos-
ternum n’a pas de carène en dessous de chaque côte.
Synonymie des espèces.
I. Gers GORYTES. Zepel.
1° G. mystaceus. Lepel., 57, 1.—J'admets la synonymie
de la femelle et du mâle, telle que la propose l’auteur ;
j'ajouterai seulement que c’est probablement à la variété
mâle à 4 bandes jaunes sur l'abdomen , qu'il faut rapporter
le Sphex longicornis de Rossi, à cause de la couleur des
jambes où le noir domine plus que chez l'espèce suivante.
2 G. campestris. Lepel., 58, 2. — L'auteur doute de
l'identité de la femelle de cette espèce avec la Vespa cam-
Or
(1) Ce caractère existe aussi chez les Nyssons, et concourt à prouver
que Latreille les avait, avec raison, placés à côté des Gorvytes, dans son
Gen. crust.et insec.
(76)
pestris de Linné: je ne partage pas ce doute, parce que j'ai
des individus qui ont la bande jaune du premier segment
abdominal interrompue au milieu. Quant au mâle, il pa-
raît avoir beaucoup de ressemblance avec la figure du
Mellinus quadrifasciatus de Panzer, qui, à cause de la
longueur des antennes et de la couleur jaune des jambes,
me semble être une autre espèce que celle décrite sous le
même nom par Fabricius; cette dernière ayant les jambes
ferrugineuses.
D'après la collection de Vanderlinden, le mâle du
G. campestris est le mâle de son G. quudrifasciatus,
96, 10.
Observation. — D'après M. De Saint-Fargeau, le carac-
tère distinctif des G. mystaceus et campestris réside dans
les antennes: ces organes sont effectivement un peu plus
longs chez le G. mystaceus, surtout chez les mâles; mais
comme cette différence de longueur est en réalilé très-
petite, et d’une appréciation trés-difficile pour celui qui
n'aurait que l’une des deux espèces, j'ai cherché s’il n’exis-
terait pas entre elles quelques autres différences caracté-
ristiques. Voici le résultat de cet examen: I. Chezle G. mys-
taceus , 1° les palpes sont obscurs ; 2° l’écusson est un peu
convexe, et il est marqué, chez la femelle , d’un gros point
enfoncé, près du bord postérieur; 3° le premier segment
de l'abdomen est couvert à la base de rides longitudinales
très-distinctes dans l'intervalle des deux carènes; 4° le se-
cond segment ventral est fortement et vaguement ponctué
à la base. IL. Chez le G. campestris, 1° les palpes du mâle
sont jaunes, ceux de la femelle testacés; 2° l'écusson est
déprimé, et n’a que des traces à peine distincles d'un
point enfoncé près du bord postérieur ; 3° le premier seg-
ment de l'abdomen n'offre à la base que de faibles appa-
Ga)
rences de rugosités; 4° le second segment ventral est
très-finement pointillé dans toute son étendue.
II. Gevus HOPLISUS. Zepel.
3° A. quinquecinctus. Lepel., 61, 1. — Je n’ai rien à
objecter à la synonymie de la femelle de cette espèce.
M. De Saint-Fargeau n’a pas indiqué celle du mâle, qui
cependant avait élé depuis long-temps très-clairement dé-
signé par Latreille , dans son Gen. crust. et ins., pag. 89,
in nota.
Il est très-possible que le Mellinus quinquefasciatus
de Panzer, ne soit qu’une variété femelle de cette espèce.
Observation. — Chez l'A. quinquecinctus, le milieu
de l'extrémité du chaperon offre une petite échancrure.
La face est étroite, et les antennes sont insérées très-
près du bord interne des yeux. Le dos du dernier seg-
ment de l’abdomen est finement rugueux, d'un noir
terne.
4 H, Lacorderei &. Lepel., 64, 2. — Je ne connais
pas celte espèce, qui semble ne différer de la précédente
que par une bande jaune de moins sur l'abdomen.
5° A. albidulus %: Lepel., 65, 3. — Je ne connais pas
cette espèce.
IT. Genus EUSPONGUS. ZLepel.
6° Æ. laticinctus. Lepel., 66, 1. — Les deux sexes de
cette espèce ont été décrits d’une manière fort claire par
Vanderlinden. LE. laticinctus & est la variété & de son
G. arenarius , p. 97, lig. 22 et suiv.; l'£. laticinctus Ÿ,
est son G. arenarius %, p. 98, lig. 7 et suiv. Du reste,
( 76 )
cette espèce ne pouvait pas conserver ce dernier nom.
Le dos du dernier segment de l’abdomen est ponctué,
luisant.
7° E. vicinus. Lepel., 68, 2. — L'auteur, ne donnant
aucune synonymie de celle espèce, la regarde sans doute
comme nouvelle : je ne saurais êlre de son avis.
Il me paraît incontestable que c’est le mâle de cette
espèce qui a été décrit par Fabricius sous le nom de Mel-
linus quadrifasciutus. Syst, Piez., 298, 5.— Et c'est aux
deux sexes de cette même espèce que Latreille avait aussi
appliqué la dénomination de Fabricius, dans son Gen.
crust. et ins., IV, 89.
Si le Mellinus arenarius de Panzer avait quatre bandes
jaunes sur l'abdomen , au lieu de trois, je le regarderais,
sans aucun doule, comme la même espèce que le M. qua-
drifasciatus de Fabricius. J'ai, dans ma collection, un
individu chez qui la quatrième bande jaune est presque
complétement effacée.
D'après la collection de Vanderlinden, son Gorytes Are-
narius S (non compris la variété) est l'E. vicinus &'; et
son Gorytes quadrifasciatus 9 est VE. vicinus 9.
M. Westwood m'a envoyé de Londres les deux sexes
de l'Eusp. vicinus, sous le nom de Gorytes libithinus ,
Curtis.
Observation. — J'ai cherché s’il n’y avait pas entre les
ÆE. laticinctus et vicinus quelque différence autre que
celle des couleurs, et il m'a semblé que chez l'E. vicrnus,
la plupart des rides du triangle métathoracique sont
droites, tandis que chez VE. zarraxcrus, elles sont on-
dulées et leur intervalle est divisé par des rides trans--
versales.
Le dos du dernier segment de l’abdomen est comme
chez l’espèce précédente.
<
&"
de me > —
(79)
8 Æ. alhilubris. Lepel., 70, 3. — Je ne connais pas
cette espece.
IV. cenus LESTIPHORUS. Lepel.
9% L. bicinctus. Lepel., 70, 1.
Chez cette espèce, la première intersection de l’abdomen
est finement crénelée.
V. cents PSAMMAÆCIUS. ZLepel.
10° P. punctulatus. Lepel., 72, 1. — J'ai vu le mâle
dans la collection de Vanderlinden; quant à la femelle,
je ne la connais pas; mais si celle-ci est le Gorytes lati-
frons de Spinola, comme l’affirme M. De Saint-Fargeau,
le nom de latifrons élant plus ancien, devrait être donné
à l'espèce.
VI. Genus ARPACTUS. Lepel.
11° À. lævis. Lepel., 74,1. — Je pense que la var. 4 de
celte espèce , décrite par Vanderlinden , est une espèce dis-
tincie que je nommerai Arpactus Pelgicus.
12° À. formosus, Lepel., 75, 2.
13° À. tumidus, Lepel., 77, 3.
14 À. Carceli, Lepel., 78, 4.
15° A. elegans, Lepel., 79, 5.
Ces deux dernières espèces me sont inconnues; elles
semblent avoir, l’une et l’autre, beaucoup d'analogie avec
le Gorytes affinis de Spinola. j
Observation. — Chez toutes les femelles qui ont les
tarses de devant garnis de longs cils, il y en a deux à l'ex-
trémité externe de chacun des quatre premiers articles;
Na
( 80 )
en outre, le premier article en porte peux le long du côté
externe, chez le quinquecinctus, le laticinctus et le vici-
nus ; le même article en porte rrots chez le bicinctus, le
tumidus, le lævis et le belgicus, et probablement chez
tous les Arpactes de M. De Saint-Fargeau.
Résumé de la synonymie des Goryres (Lat.) de
Pelgique.
1. GoRYTES MYSTACEUS.
Gorytes mystaceus Q.Lat., Gen., IV, 89 (exclusa nota).
— — 9.8, var. a, Vanderl., I, 94 (ad:
Jjuncta synonymia ).
Gorytes mystaceus 9.8, Lepel., 57.
Sphex longicornis , Rossi. Fn. Etr., 1, 67, 827.
9, GOoRYTES CAMPESTRIS.
Gorytes campestris 9.7, Lepel., 58.
— mystaceus &, var. B, Vanderl., 1, 94 (ad-
Jjuncta synonymia).
Gorytes 4-fasciatus d', Vanderl., I, 96.
© 8. Gonyres 5-cINCTUS.
Gorytes 5-cinctus ç.d', Lat., Vanderl.
Hoplisus 5-cinctus ç.æ', Lepel., 61.
4. GonyYTEs 4-FASCIATUS.
Gorytes 4-fasciatus ç.d,Lat., IV, 89 (adjuncta syno-
nymia , tabula Panzeri excepta ).
Gorytes 4-fasciatus g, Vanderl., [, 96.
(81 )
Gorytes arenarius g, Vanderl., I, 97 (exclusa maris
varietate ).
Eusponqus vicinus 9.æ. Lepel., 68.
5. GORYTES LATICINCTUS.
Eusponqus laticinctus 9 .d'. Lepel., 66.
Gorytes arenarius ç.&, var. Vanderl., I, 97 (Jin. 22
et seq.) et 98 (exclusa synonymia).
6. GoRYTES BIGINCTUS.
Gorytes bicinctus. Vanderl., I, 93.
Lestiphorus bicinctus 9.8. Lepel., 70.
7. GoRYTEs Tumiovs.
Gorytes tumidus. Lat., Vanderl., @. (adjuncta sy-
nonymia). À
Arpactus tumidus 9.%. Lepel., 77.
8. GORYTES RELGICUS.
Gorytes lϾvis, var. 8. Vanderl., 91.
ANATOMIE COMPARÉE.
Note sur le rapprochement qui existe entre la disposi-
tion du système cérébral des animuux vertébrés , et
celle du ganglion susæsophagien des animaux arti-
culés , par Henri Lambotte.
L'étude de l’organisation du cerveau des animaux verté-
brés, a fait connaître comment les divers ganglions qui
Tow. vi. 6
(827)
composent cet organe sont disposés les uns par rapport
aux autres, et a déterminé la vraie signification des di-
verses masses médullaires qui, dans les vertébrés infé-
rieurs, semblaient, au premier abord, si diflérentes de
celles de l’homme.
Si, sous le même point de vue, on compare le sys-
tème cérébral des articulés à celui des vertébrés, on re-
connaît que ce système est construit sur le même plan,
et que les différens ganglions qui composent le cerveau
des articulés, sont liés entre eux dans le même ordre que
ceux qui, par leur réunion, constituent le cerveau des
vertébrés.
Dans les articulés, où le système cérébral est le plus
compliqué, il se compose de sept ganglions : quatre sont
rangés transversalement en arc de cercle dont la concavité
est tournée en avant; deux autres ganglions sont placés
immédiatement derrière ceux qui occupent le milieu de
cette ligne transversale ; le septième enfin est situé en
avant, dans la courbure décrite par les quatre premiers
ganglions.
Ces divers ganglions sont réunis entre eux par des fais-
ceaux ou commissures dont la longueur varie : les quatre
premiers sont réunis latéralement par des commissures
trèés-courles, ce qui donne à leur ensemble l'aspect d'un
ganglion quadrilobé; les deux moyens sont immédiate-
ment placés sur l’œsophage.
Les deux ganglions postérieurs (nommés ganglions vi-
taux, par M. Straus Durkeim) sont réunis aux deux gan-
glions moyens par deux filets qui viennent s'attacher à leur
partie posléro-inférieure.
Le ganglion antérieur ou impair (nommé frontal,
par Lvonnet\ «+ réunit aux deux ganglions extrêmes ”:
(85 )
la ligne citée plus haut, par deux filets qui sont exces-
sivement minces dans beaucoup d'insectes, mais qui se
voient très-bien chez d’autres.
La figure ci-dessous donne une idée juste de la dispo-
sition que je viens de rappeler.
De chacun des deux ganglions centraux a se détache,
à la partie inférieure , un filet nerveux qui se porte en bas
et en arrière pour suivre la face inférieure du corps, et se
renfler d'espace en espace en s’anastomosant avec celui du
côté opposé.
Outre ces deux nerfs, il y en a encore deux autres aussi
considérables ; ils se portent en avant et sur le côté pour
gagner les antennes; c’est la paire des nerfs antennaires.
Quelques filets naissent encore de ces ganglions et se
jeltent dans les organes regardés comme servant au goût,
les palpes.
À la face postérieure de ces deux mêmes ganglions se
montrent un grand nombre de filamens nerveux qui se
dirigent en arrière et se perdent dans les parties voisines.
À l'extrémité libre de chacun des deux ganglions ex-
trêmes b», prend naissance un gros nerf qui se porte aux
yeux.
Des deux ganglions postérieurs ce, naissent seulement
quelques minces filets qui, comme ceux de la face posté-
rieure des ganglions a, se perdent dans les parties voi-
sines.
(84)
Du ganglion frontal ou antérieur d sort un nerf ré-
current qui se porte sous la commissure des ganglions
centraux &, et donne ses rameaux à l'appareil digestif et
au canal dorsal ; il donne aussi quelques filets en avant.
Souvent le ganglion frontal est remplacé par deux ou
trois petits ganglions rangés longitudinalement les uns à
la suite des autres, et réunis par de doubles commissures ;
mais ce fait s’observe surtout chez les larves et disparaît
chez les insectes parfaits, par la réunion en un seul de ces
petits ganglions.
Les ganglions postérieurs e sont quelquefois aussi for-
més chacun de deux petites masses placées l’une der-
rière l’autre, et unies par une commissure simple.
Les ganglions b manquent souvent, et dès lors le nerf
pour les yeux naît à l'extrémité libre du ganglion a, de
même aussi la commissure du ganglion frontal a lieu avec
l'extrémité libre du ganglion a, quand le ganglion b
manque,
Dans plusieurs ordres d'insectes, à l'origine des nerfs de
l'antenne se montre un renflement.
Si maintenant on cherche à apprécier la signification
des divers organes dont je viens de décrire succinctement
la disposition , on peut reconnaître que les deux ganglions
centraux a correspondent aux corps quadrijumeaux; que
les faisceaux qui s’en séparent pour se renfler dans les
ganglions postérieurs €, peuvent être regardés comme
correspondant aux faisceaux des corps quadrijumeaux au
cervelet; les ganglions postérieurs € représentent le cer-
velet , qui ne diffère de celui des vertébrés que parce que
les deux moitiés qui le forment ne se sont pas réunies par
une commissure, et ne présentent pas la forme d’une ar-
cade complète, comme chez les vertébrés.
( 85 )
. Les deux ganglions latéraux b ne peuvent rappeler que
les couches de nerfs optiques, et ne diffèrent de celles des
animaux vertébrés qu’en ce qu’elles sont plus écartées de la
ligne médiane, et que les nerfs optiques qui s’en séparent
ne viennent pas s’entrecroiser en avant.
Dans les vertébrés, de chacune des couches de nerfs
optiques, se détache un petit filet nerveux, qui se rend à
un ganglion impair, la glande pinéale, qui ne se trouve en
rapport qu'avec un lacis vasculaire.
Dans les articulés, des ganglions que je rapporte aux
couches de nerfs optiques, naît, de chaque côté, un petit
filet qui se réunit à un ganglion impair, qui est en con-
nexion avec les systèmes vasculaire et digestif. Ne pour-
rait-on pas considérer ce ganglion comme glande pinéale?
Les nombreux filets qui naissent de la face postérieure
des corps quadrijumeaux et de la commissure qui les unit,
peuvent être regardés comme prototype de la moelle épi-
nière, ou plutôt de la queue de cheval qui termine la
moelle épinière des vertébrés, et qui, dans les insectes,
naîtrait ( ou aboutirait) immédiatement aux corps qua-
drijumeaux.
Quant aux nerfs qui entourent l’œsophage, d’après cette
manière de voir, ils doivent être considérés comme re-
présentant les nerfs pneumogastriques. Mais on pourra ob-
jecter ici : que ces nerfs sont destinés autant aux organes
de la locomotion, qu'aux organes de la nutrition ; que ce
sont eux qui pourvoient les pattes, les ailes, l'appareil
digestif; qu'ensuite les pneumogastriques des vertébrés
ne naissent pas des corps quadrijumeaux, mais bien de la
moelle allongée.
La première de ces objections perd beaucoup de sa force,
et, peut-être même est-elle favorable à la proposition que
: ( 86 )
j'émets, si l’on fait attention que, dans un grand nombre
d’articulés inférieurs, les pattes et les ailes ne sont repré-
sentées que par des branchies ou autres appendices res-
piratoires ; que dans les articulés les plus élevés même,
ces organes respiratoires ont à peine dépouillé la forme
qui les caractérisait , pour se présenter sous celle de mem-
bre locomoteur, et il est même probable que, dans beau-
coup d’articulés supérieurs, les appendices locomoteurs
servent encore à la respiration. Dés lors il est bien moins
surprenant que ces organes tirent leurs nerfs des pneumo-
gastriques.
La même raison servira de réponse à l'objection que
l'on pourrait faire que les mandibules reçoivent aussi
leurs nerfs de ce système; puisque ces organes répètent,
avec tant de vérité, les membres du corps qui ne sont eux-
mêmes que des organes branchiaux à une puissance plus
élevée.
Pour répondre à la seconde objection, je n’ai qu’à faire
remarquer que si la moelle épinière manque ici, le nerf
pneumogastrique doit tirer son origine plus près du cer-
veau : et c’est précisément à l’endroit où les faisceaux
pour les ganglions postérieurs prennent naissance, que
l'on voit se détacher les nerfs du collier.
Enfin, la paire de nerfs antennaires correspond au trifa-
eial des vertébrés ( 5° paire ).
Si les nerfs optiques se portaient vers la ligne médiane,
et s’entrecroisaient , les deux nerfs antennaires se trouve-
raient en dessous et derrière les nerfs optiques, et offri-
raient évidemment les mêmes rapports que le trijumeau
chez les vertébrés.
La différence d’origine du nerf antennaire et du trifa-
cial ( on sait que ce dernier tire son origine des faisceaux
béton roc beat . à
(87 )
postérieurs de la moelle allongée ) s'explique par l'absence
de la moelle allongée ; car dès lors le point de départ est
ramené plus en avant.
Il est à remarquer que les fonctions des antennes sem-
blent confirmer cette opinion, et, une circonstance qui
lui donne plus de valeur, e’est que dans les articulés doués
du sens de l'audition , le filet qui vient pourvoir l'organe
auditif, naît du tronc nerveux dont il s’agit; ce qui rap-
pelle la connexion étroite qui existe entre les nerfs de la
cinquième paire et l'appareil de l’ouïe dans les poissons.
J'ai dit, plus haut, qu’à l’origine du nerf antennaire se
trouvait, dans certains insectes, un renflement ganglion-
naire. Ce renflement rappelle, peut-être, le ganglion sé-
milunaire des vertébrés. Quoi qu'il en soit, lorsque ce gan-
glion existe, c’est de lui que tirent leur origine les nerfs
quise rendent aux palpes et qui sont analogues à la branche
infraorbitaire du trifacial des vertébrés. Lorsque ce renfle-
ment n'existe pas, ces peliles branches nerveuses se séparent
des ganglions a et de la partie inférieure du nerf antennaire.
Il nous reste encore à chercher la valeur des filets ner-
veux qui naissent des ganglions postérieurs c, que j'ai dit
correspondre au cervelet; puisque , dans les vertébrés, on
ne voit aucun nerf se séparer de cet organe.
Dans les vertébrés, le cervelet reçoit des faisceaux pos-
térieurs de la moelle allongée, deux prolongemens qui
vienuent s'épanouir dans sa masse; mais ici, les fibres
médullaires, qui devraient constituer une moelle épinière
par leur assemblage, ne se sont pas réunies el se rendent
séparément au cerveau ; il est donc trés-naturel de consi-
dérer ces filets nerveux qui naissent des ganglions posté-
rieurs comme coïncidant aux faisceaux de la moelle allon-
gée au cervelet.
(88)
BOTANIQUE.
L
Descriptio diagnostica nonnullarum Cactearum que a
domino Galeotti in finibus Potosi, Guanaxato et
aliis, regni Mexicani inveniuntur a M. J. Scheid-
weiler.
1. Cereus callicoche. Galeotti.
C. inermis.—Mihi.
C. globosus, depressus, glaucus, lepidoto-punctatus ;
costis 5—7, carnosis, crassis, subverticalibus; sinubus
latis; areolis approximatis, infra apicem tuberculorum im-
mersis, lanalis ; lana parca absumpta, grisea ad basin
aurantiaca.
Mexico prope Moran.
2. Cereus Dumortieri.
C. truncus simplex 6 angularis, laete viridis, subluci-
dus; costarum cristae compressae, undulatae; sinubus
latis; areolis ovalibus approximatis vix prominentibus,
tomento griseo instructis , adultis nudis ; aculeis 10 rectis,
patentissimis, stramineis, aut corneis, concoloribus, in-
aequalibus , supremo interdum reflexo, centrali recto aut
reflexo. Planta pedalis, diam. 3 poll. areolae 2 lin. dis-
tantes ; aculei 3—4,6, 9, 13 lin. longi.; centralis inter-
dum deest.
Buenos-Ayres.
3. Echinocactus equitans.
E. globosus glaucus ; costis 8 obtusis, basi latissimis
ins
(89)
superne arctioribus, profunde transversim insculptis, si-
nubus subundulatis, acutis, profundis; areolis tubercu-
latis, immersiusculis , tomento griseo instructis, tandem
nudis; aculeis septem aequalibus validissimis , rectis, pa-
tentibus, compressiusculis, annulatis, ad basim carneo-
roseis, medio corneis, apice purpureis, infimo inter duos
sequentes interjecto.
Sepala spinosa , pungentia ; petala? semina gyroso-exas-
perata , umbilico excavato ; embryo crassus, radicula pro-
minens, acula.
4. Echinocactus insculptus.
E. oblongato-ovatus glaucus, minutissime albo punc-
tatus (1); costis octo sinuatis circa areolas tuberculatis,
transversim insculptis; areolis junioribus lanuginosis, se-
rius nudis; aculeis septem divergentibus, recurvatis , rigi-
dis , nascentibus purpureis tandem corneis.
Flores citrini.
Buenos-Ayres.
5. Echinocactus hexaëdrus.
E. globosus aut oblongo-ovatus, glaucus sub lente den-
sissime punctatus, vertice umbilicato nudo; costis octode-
cim verticalibus , tuberculatis ; tuberculis oblongo-rotun-
datis ad basim hexaedris, infra areolas gibbosis, apice
depressis ; areolis oblongis, lanatis; aculeis 13 albidis,
(1) An hic caracter momenti maximi? In dubium voco.
( 90 )
basi purpureis, 10 regulariter bifarie ordinatis radianti-
bus, undecimo infimo longissimo, duobus centralibus
rectis , vel recurvulis.
In provincia de Potosi.
6. Echinocactus irroratus.
E. globosus, amoene viridis, laevissimus, vertice de-
presso coslis 18—21—22 arcualis compressis, obtusis,
ad latera et super cristas costarum purpureo-striato ma-
culatis ; sinubus acutis, areolis magnis ellipticis , immer-
sis, adolescentibus tomentosis, adullis nudis; aculeis
extimis gracilioribus rectis, rigidis ; patentibus , compres-
siusculis transversim striatis, albido-sericeis aut fusco-
purpureis , bifarie dispositis, infimo minimo; centralibus
quatuor validissimis, lateralibus et infimo subulatis trans-
versim striatis; supremo longissimo, subletragono annu-
lato.
Mexico.
7. Echinocactus arachnoideus.
E. ovatus, viridis; laevis, basi parum attenuatus ; 9—
10 angulatus; costis rotundatis inter areolas gibbosis;
sinubus acutis subundulatis, basi dilatatis cum costis con-
fluentibus; areolis rotundis , subimmersis, lanuginosis,
superioribus pilis lanae nexis; spinis radiantibus 10—12
patentibus, aequalibus, superioribus quandoque parvulis;
centralibus 4 decussatis, validioribus, corneis basi pur-
pureis.
Sunt nobis in nostris caldariis specimina duo 3—4 poll.
alt., 3 poll. diam. ; aculei 5 lin. longi.
Buenos-Ayres.
(91)
8. Mammillaria obconella.
M. cylindracea , basi lateribusque prolifera ; axillis la-
nalis ; mammillis conicis, tetragonis, glaucescentibus , sub
lente punctatis; areolis juvenilibus lanatis, tandem nudis,
infra apicem mammillarum sitis ; aculeis semper quatuor
rectis cruciato-palentibus, supremo incurvulo, initio fla-
vescentibus, apice bruneis, dein carneis, duobus laterali-
bus parum minoribus; flores circa verticem; sepala 5—6
lanceolata acuminata margine membranacea; petala 13—
14 lanceolata mucronulata, erecta, rosea; stamina rosea
introrsum curvata; stylus teres, cylindricus albus, stigma
4—5—6 radiatum; radii sulcati purpurei ; bacca purpu-
rea , pollicaris , clavata.
Buenos-Ayres.
d, M. obconella var. Galeottii.
M. trunco ovato-cylindraceo e lateribus prolifero ; acu-
leis longioribus divergentibus sursum et deorsum versis,
corneis vel rufescentibus.
9. Mammillaria rutila Zucc. var. octospina.
M. cylindracea, simplex, axillis sublanatis; mammillis
conicis basi tetragonis; aculeis radiantibus 16—20 albis,
seliformibus, supremis minimis, inferioribus 7 rectis in-
terdum recurvulis , infimo longissimo, centrali recto, om-
nibus fuscis.
Adnotatio. In nostris caldariis arcolae saepissime aculeos
sex ceulrales solummodo emittunt.
(92)
10. Mammillaria aula cothele. Lemaire, var. mul-
tispina.
M. clavata e lateribus prolifera ; mammillis glaucis , tri-
gonis, bisulcatis; sulcis inaequalibus; axillis lana glandu-
lisque flavis cinctis; areolis infra apicem mammillarum
immersis, nudis, adolescentibus lanatis; aculeis radian-
tibus 11—12, centralibus 4 validioribus, omnibus fusco-
flavescentibus.
Planta pedalis, 4 poll. diam. ; mammillae 1 poll. longae
basi 3 lin. latae.
Patria ? specimen ex horto Hamb. sub nomine M. Leh-
manni missum.
11. Mammillaria conopsea. Nob., var. longispina.
M. lactescens; glauca, cylindracea, vertice convexius-
culo mammillis crassis, obtusissime tetragonis, angulis
3 superioribus confluentibus, infimo producto; maramillis
juvenilibus compressis, polyaedris ; areolis valde lanatis;
aculeis 5 , inaequalibus : infimo et lateralibus compressius-
culis, 3 pollicaribus, corneis ; juvenilibus diaphanis , apice
purpureis.
12. Mammillaria incurva.
M. globosa, axillis nudis, initio parum lanatis; mam-
millis pyramidatis, trigonis incurvatis, basi latis con-
fluentibus, intra faciem superiorem sulco profundo sicut
ac glandula rubra notatis ; areolis infra apicem mammil-
Jlarum sitis, oblongis nudis, adolescentibus rotundis, to-
mento brevissimo instructis ; aculeis radiantibus 20 —22
( 93 )
subulatis rigidis, griseis, centralibus 3, duobus superio-
ribus recurvatis divergentibus ,tertio in medio silo , recto,
rigido , omnibus nascentibus stramineis.
Bacca ovata, aurantiaca , à lin. longa , odorem ingratum
redolens ; embryo incurvus.
Crescit in rupibus prope Guanaxato regni Mexicani.
13. Mammillaria Pfeifferi. Booth.
Sunt mihi notae varietates sequentes :
æ M. P. var. fulvispina.
Trunco bicipite, globoso-cylindraceo ; mammillis lon-
gioribus glaucescentibus ; areolis sub nudis; aculeis radian-
tibus 24 albis, centralibus 6—8—9 fulvis, dein purpureis.
8. M. Pf. var. dichotoma.
Trunco dichotomo, aculeis rufescentibus, junioribus
pallidioribus.
y. M. P£. var. altissima.
Trunco alto, sesquipedali bicipite; aculeis omnibus
flavissimis.
2 M. Pf. var. flaviceps.
Trunco bicipite globoso ; aculeis radiantibus albis, cen-
tralibus 8 flavis.
e. M. P£. var. variabilis.
Differt a M. Pf. vertice magis depresso, aculeis multo
brevioribus , junioribus omnibus albicantibus.
‘
14. Mammillaria gladiata Mart., var. aculeis rectis.
a. M. cylindracea , lactescens , mammillis polyaedris co-
nicis, glaucescentibus punctatis ; axillis densissime lana-
lis; areolis junioribus lanatis, tandem nudis; aculeis
( 94 )
exterioribus septem , duobus superioribus minimis, cen-
tralibus 2 maximis recurvulis vel rectis, carneis apice
purpureis , dein corneis.
8. M. gladiata var. aculeis minimis.
M. lactescens, cylindracea ; mammillis conicis, obtuse
telragonis, punctalis glaucescentibus ; axillis lanatis ; areo-
lis lanatis, lana decidua ; aculeis exterioribus 5—7 parvu-
lis in lana latentibus vix prominentibus, centralibus 2
parum validioribus ; omnibus carneis apice purpureis.
-. % M. gladiata var. spinis longissimis.
M. lactescens, cylindracea ; mammillis conicis obtuse
tetragonis, glaucescentibus punctatis ; axillis lanatis ; areo-
lis lana decidua instructis ; aculeis exterioribus 4—5 in-
terdum in lana latentibus ; centralibus 2, longissimis,
subinaequalibus, semiteretibus , angulatis , divergentibus,
corneis apice bruneis, junioribus lutescentibus apice ni-
gris.
15. Ad mammillariam acanthoplegmam. Lhem.
Vidi in caldariis domini Vandermaelen specimina adul-
ta, habentes truncum exacte cylindraceum ad basim pro-
liferum, cum vertice umbilicato, aculeis diaphanis apice
purpureis et surculis monacanthis.
Variat haec species :
.Trunco gracili clavato, vertice convexo ; areolis villosis,
aculeis radiantibus 28—30 albis, centrali 1 incurvulo,
diaphano, apice rubello.
(95)
CHIMIE.
Sur les produits de la combustion lente de l'alcool et de
l’éther autour du fil de platine, par M. Martens, mem-
bre de l’académie.
Au mois de février 1837, j'ai présenté à l'académie
royale quelques observations sur les produits de la com-
bustion lente des vapeurs de l'alcool et de l’éther autour :
d’un fl de platine plus ou moins incandescent. Le résultat
de mes expériences m'avait porté à conclure que le platine,
à chaud et sous l'influence de l'oxygène atmosphérique ,
faisait subir à l'alcool et à l’éther une combustion partielle
” ou incomplète, bornée généralement à l'hydrogène du
combustible, et qu’il donnait naissance, avec l'alcool et
avec l'esprit de bois, à des composés analogues à ceux que
l’on obtient en distillant ces liquides avec du peroxyde de
manganèse et de l'acide sulfurique ( voy. les Bulletins de
l'académie , séance du 4 février 1837). J'étais tenté de
croire que le platine, par sa propriété aéroscopique , qui
lui permet de condenser à sa surface divers fluides élasti-
ques à la manière du charbon de bois , devait favoriser la
combinaison de ces fluides, à peu près au même degré
que l’état naissant d'un gaz en favorise la combinaison
avec d’autres corps. Je me représentais donc le phénomène
de la combustion lente de la vapeur alcoolique autour du
fil de platine, comme identique avec celui de sa déshy-
drogénation partielle par l'oxygène naissant dans l'acte
de la distillation de l'alcool avec le peroxyde de manganèse
et l'acide sulfurique. L'une et l’autre réaction peuvent , en
effet, comme je l'avais remarqué , transformer l'alcool en
( 96 )
aldéhyde. Cependant quoiqu'il soit reconnu que dans la
distillation de l’alcool avec du bioxyde de manganèse et de
l'acide sulfurique il se produit non-seulement de l’aldé-
hyde, mais encore de l'acide acétique, de l'acide formi-
que, etc., je crus à tort pendant quelque temps que l’aldé-
hyde était le seul produit constant de la combustion lente
de l’alcool autour du fil de platine incandescent , et que les
autres substances que j'y avais rencontrées parfois, telles
que l’acide carbonique , l'acide acétique , n’étaient que des
produits accidentels résultant d’une combustion moins in-
complète ou plus avancée, ou de ce que l’aldéhyde lui-
même avait été oxygéné ou comburé sous l'influence du
fil de platine. Ainsi j'avais remarqué que l’acide carboni-
que était d'autant plus abondant que le fil de platine
comburant était plus chaud , et que, lorsque ce dernier
devient rouge blanc, la combustion lente et incomplète
de la vapeur alcoolique se transforme souvent en combus-
tion complète avec explosion et production exclusive d’a-
cide carbonique et d’eau. Il était facile de prévoir, d’après
cela, qu'il pourrait y avoir des degrés différens de combus-
tion lente ou incomplète de l'alcool , et que, puisque dans
la distillation de ce liquide avec le bioxyde de manganèse
et l’acide sulfurique , il se forme, outre l’aldéhyde, de l’a-
cide acétique, de l'acide formique, de l'acide carboni-
que, etc., ces différens produits devront aussi générale-
ment se former dans la combustion lente de la vapeur
alcoolique autour du fil de platine chaud, s’il est vrai que ce
dernier agit sur celte vapeur, par l'intermédiaire de l’oxy-
gène , de la même manière que le fait l'oxygène naissant
séparé du bioxyde de manganèse par l'acide sulfurique.
Cette indication de la théorie a été complétement con-
firmée par l'expérience. J'avais déjà reconnu, il y a plus
(1947)
d'un an, qu'en opérant la combustion lente de l'alcool an-
hydre à l’aide d’une lampe dont la mèche en amiante est
surmontée d'une hélice en fil de platine très-fin et à spires
très-rapprochées, et en condensant la'vapeur qui s’en éléve
à l'aide d’un chapiteau en verre, on obtenait un produit
acide au tournesol et contenant beaucoup d'acide acétique.
Depuis j'ai reconnu que le liquide acide, ainsi obtenu,
contient aussi de l'acide formique, mais en moindre quan-
tilé; car, lorsqu’après l'avoir neutralisé par de l'ammo-
niaque, on y verse de l’acétate de plomb, on obtient un
précipité de formiate de plomb augmentant par l'addition
de l'alcool, et qui , après avoir été dissous par l’eau bouil-
lante, s’en sépare par refroidissement avec la forme cris-
talline qui lui est propre.
L'aldéhyde , l'acide acétique et l’acide formique ne se
forment pas toujours simultanément dans la combustion
lente de la vapeur alcoolique: car plus d’une fois j'ai obtenu,
pour produit, de l’aldéhyde trés-faible sans mélange d’au-
cun acide ; c’est ce qui a surtout lieu lorsqu'on brâle len-
tement la vapeur alcoolique autour d’un fil de platine
très-fin, à peine incandescent, et dans un flacon où l’air n’a
que peu d'accès. D'un autre côté, M. Slas, qui m'avait
secondé à Louvain dans mes expériences, ayant continué
à Paris, dans le laboratoire de M. Dumas, la même étude,
a obtenu souvent pour produit un liquide acide sans la
moindre trace d’aldéhyde. Il a remarqué que cette der-
nière substance se produisait surtout en opérant dans
des circonstances où le platine n’atteint jamais le rouge
visible, et notamment en employant une boule d’éponge
de platine faiblement chauffée , qu’on plonge dans un fla-
con contenant un mélange d'air et de vapeur alcoolique.
Il paraît donc que plus la combustion lente de l'alcool est
Tom. vr. 7
( 9% )
vive, plus il s’oxygène et plus il passe à l’état acide. Ainsi
un premier degré de combustion lente ne fera que le
déshydrogéner en partie au point de le transformer en al-
déhyde (CSH$O?). Si une plus grande quantité d'oxygène
réagit sur la vapeur alcoolique, elle la transformera en
acide acétique ( CSHSO® ), puis en acide formique (CSH05),
et enfin, dans le cas de combustion complète, en acide
carbonique (GSOS) , abstraction faite de l’eau qui se pro-
duit dans toutes ces combustions. On comprend aisément
que dans le cas de production des acides acétique et for-
mique, il pourra bien aussi.se produire un peu d’éther
acétique et d’éther formique par suite de l’action des acides
précédens , au moment de leur formation, sur de la va-
peur alcoolique; ce qui doit rendre le produit de la com-
bustion lente de la vapeur alcoolique beaucoup plus
variable que je ne l’avais d’abord présumé.
D'après ces considérations, il est facile de prévoir que
le produit de la combustion lente de l'éther autour du fil
de platine chaud, ne saurait non plus offrir une compo-
silion constante et invariable. Toutefois la combustion
lente étant généralement plus vive ici qu'avec l'alcool,
sans doute à raison de l’état d'hydratation dé ce dernier,
un premier degré de combustion lente ne fait jamais pas-
ser la vapeur éthérée à l'état d’aldéhyde seulement ; tou-
jours il se produit simultanément de l'acide acétique et
même de l'acide formique, et leur quantité est propor-
tionnellement beaucoup plus forte que celle qui se produit
dans la combustion lente de l'alcool ; ce qui est probable-
ment une suile de ce que l'alcool n’est qu'un hydrate
d'éther. J'avais déja mis hors de doute par mes travaux
antérieurs la présence de l’aldéhyde et de l'acide acétique
dans l'acide lampique ; mais n'ayant pas assez examin g
(99: )
l'action de cet acide sur les bases salifiables, je n’y avais
pas aperçu la présence de l'acide formique. Depuis, l’exis-
tence de ce dernier acide dans l’acide lampique a été mise
hors de doute par les expériences de M. À. Connell (Zond.
and Edimb. philosoph. Maqgaz., décemb. 1837), qui, en
saturant l'acide lampique par la magnésie ct par l’oxyde
de plomb, en a obtenu des cristaux de formiate de magné-
sie et de formiate de plomb parfaitement bien déterminés,
et dont il a aussi reconnu la nature par l’analvse. M. A. Con-
nell a encore constaté la présence de l'acide acétique dans
l'acide lampique, en séparant à l’aide de l'alcool bouillant
l’acétate de plomb du formiate obtenu en neutralisant l'a-
cide lampique par l’oxyde de plomb. M. Stas, sans avoir
eu connaissance des travaux de M. Connell, est parvenu
également de son côté à démontrer la présence de l'acide
formique dans le produit de la combustion lente de l’éther
autour du fil de platine, et il a fait voir en outre { ce que
Von ignorait jusqu'ici ) que l'acide formique et l’aidéhyde
y existent à l'élat de mélange. Voici comment M. Stas s’est
assuré que l'acide lampique de l'éther contient à la fois
de l’aldéhyde, de l'acide formique et de l'acide acétique à
l'état de mélange. « Deux onces du liquide acide obtenu
» par le fil de platine furent mêlées, m'écrit M. Stas, à de
» l'éther sulfurique pur. L'éther s’y dissolvait en partie;
» une aulre partie surnagea. La parlie surnageante fut
n secouée avec un peu de magnésie el distillée avec beau-
» coup de ménagement. Le liquide distillé avait une odeur
» très-suffocante ; il fut refroidi à 19° sous zéro; on y fit
» passer de l'ammoniaque et l'on obtint une grande quan-
» tité d'ammonialdéhyde. Par ce procédé, je mis hors de
» tout doute que l'aldéhyde y existe tout simplement mé-
» langé, puisque l’éther seul le sépare. J'ai eu recours à
(100 )
d’antres procédés encore, mais il serait trop long de
les décrire.
» Il s'agissait de voir quelle était la nature du liquide
acide non dissous par l’éther. A cet effet , huit onces de
ce liquide furent délayées dans leur volume d’eau dis-
tillée et exactement neutralisées par de l’oxyde de plomb
pur. Pendant la saturation avec l’oxyde de plomb il se
précipila abondamment une poudre blanche. Le liquide
fut mélangé avec son volume d’alcool qui y détermina
encore un petit précipité. Les deux précipités réunis,
lavés par l’eau alcoolisée, furent dissous dans l’eau
bouillante. Leur solution laissa déposer par le refroi-
dissement des aiguilles trés-brillantes qui, dans leur
analyse , m'ont donné les résultats du formiate de plomb.
J'en ai conclu que c'était de l'acide formique qui se
trouvait dans l'acide lampique. — Le liquide restant
fut mis à évaporer dans le vide pneumatique. Au bout
de peu de temps il s’y fit une abondante cristallisation
d’un sel de plomb en aiguilles fines, que l’analyse me
démontra être de l’acétate de plomb neutre. L'eau mère
d’où venaient les cristaux, fut mise de nouveau dans le
vide sec; mais par aucun procédé il n’était possible d’en
retirer une matière d’une forme cristalline déterminée.
La masse amorphe , qui était le résultat de cette évapora-
tion, contenait beaucoup d’acétate de plomb; elle avait
une odeur particulière ; je ne puis mieux la comparer
qu’à l'odeur qu’exhale l’éther lorsqu'il a été long-temps
renfermé dans un grand flacon, et qu’il s’est acidifié.
Chauffée à peine jusqu'a 65°, elle laisse échapper une
matière acide suflocante qui prend à la gorge, tandis:
que la malière résidu se colore fortement en brun. Ces
caractères me démontrérent que je n'avais pas à faire à
de l’acétale de plomb pur.
YF
( 101 )
» J'essayai plusieurs méthodes pour séparer l'acide acé-
tique qui pourrait se trouver dans le mélange, à l’état
d'acétate peu soluble. J'eus recours au nitrate d'argent,
mais à l'instant l'argent parut à l’état métallique sans
effervescence de gaz, et il resta de l’acélate d'argent en
dissolution, Je dus renoncer à ce moyen, et je crus pou-
yoir séparer l'acide acétique du sel de plomb à l’état
d’acétate tribasique iusoluble dans l'alcool anhydre. A
cet effet je dissolvais la masse saline dans une petite
quantité d’eau. La solution fut mise en contact avec un
grand excès d’oxyde de plomb, et après quatre jours d’ac-
tion, je précipilais l’acétate tribasique an moyen de
l'alcool. Je vis bientôt que ce procédé était encore in-
suflisant. Ne pouvant parvenir à séparer l’acétate de
plomb de l’autre sel de plomb, je convertis le sel de
plomb en sel de cuivre, au moyen du sulfate de cuivre.
Le mélange de l’acétate de cuivre et du nouveau sel de
cuivre fut mis dans le vide à cristalliser, et il se déposa
encore une grande quantité d’acétate de cuivre en rhom-
boëdres bien définis. Le liquide restant fut soumis à
une évaporation ultérieure, et donna un mélange de
cristaux verts, foncés, et d’un autre sel de cuivre bien
moins coloré que l’acétate. Ce sel, comme celui de
plomb, a une odeur désagréable. Si l’on fait une disso-
lution de ce sel de cuivre, et que l’on porte la dissolu-
tion à 100°, il se précipite du protoxyde de cuivre, et le
tout se convertit en acétate qui cristallise alors comme
l'acétate ordinaire. Par aucun moyen je n’ai pu parvenir
à isoler à l'état de pureté l'acide qui participe à un si
haut degré des propriétés de l'acide aldéhydique de
M. Licbig. Son mélange avec l'acide acétique a les pro-
priélés suivantes : il est incolore, d'une saveur acide qui
(102 )
» prend à la gorge. Chauffé jusqu’à 100 et quelques de-
» grés, il commence à bouillir en répandant une vapeur
» àcre. Après quelques instans d’ébullition il se colore
» fortement en brun (l'acide lampique brut jouit aussi
» de cette propriété), en répandant alors l'odeur du ca-
» ramel ou du papier qui brûle; il réduit à froid le ni-
» trate d'argent ammoniacal sans aucun dégagement de
» gaz. Chauflé avec un alcali, il produit un corps brun
» résineux. »
D'après ce que nous venons de voir, il est évident que
l'acide lampique contient outre l’aldéhyde, lacide acé-
tique et l'acide formique mélangés et libres, un autre
acide peu stable, qui lui donne ses principales propriétés.
C'est cet acide qui peut être considéré comme la base de
Pacide lampique. Il réduit les sels d'argent , de mercure et
même de cuivre sans effervescence de gaz , etilse trans-
forme dans cette réduction en acide acétique, ce qui le
distingue de l'acide formique. D'après ces propriétés, Da-
niell avait supposé que l'acide lampique n’était autre
chose que de l'acide acétique uni intimement à un peu de
matière désoxydante. M. Liebig le regarde, au contraire,
comme un acide particulier qu'il appelle acide aldéhy-
dique, et auquel il donne pour formule CHO® ; formule
qui expliquerait sa facile transformation en acide acé-
tique CSH°O. Quoi qu'il en soit, la question est toujours
irrésolue, et il faudra des recherches ultérieures pour dé-
terminer la véritable nature de cet acide. L'étude des alté-
rations que la chaleur fait éprouver aux composés de cet
acide avec la magnésie , la barite el d’autres bases, pourra
peut-être jeter quelque jour sur cette question ; car si
l'acide dont il s'agit, n’était au fond que de l'acide acé-
tique uni à quelque principe désoxydant , la chaleur pour-
( 103 )
rait peut-être bien séparer ce dernier principe du sel de
magnésie ou de barite, à moins de lui faire éprouver une
décomposition plus complète. J'avais conjecturé dans le
temps que l’acide en question pourrait bien être de l'acide
acétique, uni intimement à plus ou moins d’aldéhyde qui
s’y trouverait dans le même état de combinaison que l’al-
cool ou l'éther dans les acides viniques; mais jusqu'ici
je n'ai point d'expériences assez concluantes à citer à
l'appui de cette hypothèse.
Recherches chimiques sur la Phlorizine, par
M. J.-S. Stas.
Dans une lettre que M. L. De Koninck et moi nous
eûmes l'honneur d'écrire à l'académie de Bruxelles, nous
fimes connaître l'existence de la phlorizine, substance
nouvelle dont nous venions de faire la découverte dans l’é-
corce de la racine du pommier.
Le travail que j'ai l'honneur de soumettre aujourd’hui
à l'examen de l’académie ,a pour but l'étude de cette sub-
stance; mais avant d’entrer dans l'exposé de ce travail, je
dois déclarer qu'il a été fait dans la laboratoire de M. Du-
mas, sous ses yeux, d’après ses conseils et avec son bien-
veillant appui. Je ne fais que remplir un juste devoir en
lui en témoignant ici toute ma reconnaissance.
La phlorizine est une matière solide, d’un blanc satiné ,
cristallisée en aiguilles soyeuses, d’une saveur amère, s0-
luble dans l’eau et dans l'alcool, précipitant le sousacétate
de plomb, sans action sur les papiers du tournesol et
ressemblant, par l’ensemble de ses propriétés, à la fois à la
salicine et à l’orcine.
( 104 )
La composition de ce corps a été déduite des résultats
des analyses de la phlorizine cristallisée et de ceux de la
combinaison qu'elle forme avec l’oxyde de plomb. L'étude
de l'action de la chaleur sur ce corps, la comparaison des
résultats obtenus dans cette action à ceux fournis par les
analyses de la phlorizine libre et combinée, m'ont permis de
déterminer avec vraisemblance son équivalent. Je ne don-
nerai cependant pas les formules par lesquelles elle se re-
présente dans ces différens états, vu qu’il serait impossible
de suivre à une simple lecture les liaisons qui existent
entre elles.
J'abuserais des momens de l'académie, si j'entrais dans
plus de détails sur un corps qui, par lui-même, offre peu
d'intérêt; mais je demanderai la permission d’exposer ra-
pidement l'action singulière qu'exercent plusieurs corps
sur cette substance. Je placerai en premier lieu la trans-
formation remarquable qu’elle subit sous l'influence si-
multanée de l’eau, de l’air et de l’ammoniaque. En effet,
sous l'influence de ces agens, la phlorizine absorbe rapi-
dement et en grande quantité l'oxygène de l'air; d’inco-
lore qu’elle est, elle se change entièrement en un corps
d’une couleur bleue magnifique. Ge corps n’est autre chose
qu’un sel ammoniacal produit par une matière colorante
rouge, incristallisable, amère, peu soluble dans l’eau et
dans l'alcool, et qui, comme l'indigo, se décolore sous l’in-
fluence des causes désoxydantes, en reprenant comme
lui sa couleur, par le contact de l'oxygène.
La transformation de la phlorizine incolore en phlori-
zéine colorée s'opère avec beaucoup de facilité. Il suffit
d'exposer la phlorizine mouillée d’un peu d’eau dans de
l'air chargé de gaz ammoniaque. Au bout de peu de temps
de réaction, on observe que la phlorizine se fonce en cou-
( 105 )
leur, de jaune serin elle devient orangée, puis rouge,
puis pourpre, et enfin au bout de 3 ou 4 jours de réac-
tion, suivant la température et suivant que l’on a plus ou
moins souvent remué la matière, le tout se présente en une
masse épaisse ayant une riche couleur bleue. Cette masse,
dissoute dans une petite quantité d’eau, est versée dans de
l'alcool, dans lequel la matière bleue est insoluble; par ce
traitement on en sépare la phlorizine qu'il est trés-prudent
d’y laisser toujours à très-petit excès, pour que la phlori-
zéine elle-même nese trouve pas altérée à son tour par les
mêmes élémens qui lui ont donné naissance. Le précipité
obtenu, qui est un sel ammoniacal de la phlorizéine, dissous
de nouveau dans une petite quantité d’eau, est décomposé
par l'acide acétique, qui en précipite une maliëre d’un
rouge de sang, qui est la phlorizéine pure.
Si l’on songe à la facilité avec laquelle ce corps se pro-
duit, et d’un autre côté à la difficulté toujours croissante
qu'on éprouve pour se procurer les lichens nécessaires à
la fabrication de l’orceille, on peut se demander si la
phlorizéine, qui, comme on le verra, a tant d’analogie avec
lorcéine , ne pourrait au besoin remplacer cetie matière
dans les arts.
Si l’on compare les résultats fournis par l'analyse de la
phlorizéine et des combinaisons qu’elle contracte avec
d’autres corps, à ceux de la phlorizine elle-même, on ne
tarde pas à s’apercevoir que celle matière s’est formée
par une simple absorption d'oxygène , d'hydrogène et d’a-
zote, dans les proportions que ces deux corps constituent
lJ’'ammoniaque.
Cette transformation de la phlorizine en phlorizéine
doit rappeler les belles et importantes observations de
M. Robiquet sur le changement de l’orcine en orcéine, En
(106 )
effet, M. Robiquet a prouvé le premier que, sous l'influence
de l’eau, de l'air et de l’ammoniaque, l’orcine, substance
incolore, se change en une matière colorante l’orcéine. Ce
savant a également cru observer que la production de ce
corps n'élait accompagnée d'aucun autre et, tout récem-
ment, M. Liebig vient de vérifier ce fait.
Quelques résultats analytiques de lorcine et de l'or-
céine tendraient à prouver que cette métamorphose au-
rail également lieu par une simple absorption d'oxygène,
d'hydrogène et d’azote dans les proportions où ces deux
corps constituent l’ammoniaque.
La transformation de l’érythrine et de la fausse érythrine,
sous l'influence de ces mêmes agens en des matières colo-
rantes nouvelles, la production du tournesol au moyen
de l’'ammoniaque, sont certainement des faits qui rentrent
dans le même cercle d'actions, et rien ne prouve que l’in-
digo , tel que nous le connaissons, ne provienne pas d’une
même source.
Ainsi donc l'expérience tend tous les jours à confirmer
l'hypothèse émise par M. Robiquet sur la production et la
nature d’une série de matières colorantes. Ge savant, en
effet , avait cru déduire du seul fait de la transformation
de l’orcine en orcéine que beaucoup de matières colo-
rantes pourraient bien naître de matières incolores par
la simple fixation de l'oxygène et des élémens de l’'ammo-
niaque.
Si l’action de l’'ammoniaque et de l'air sur la phlorizine
est digne d'intérêt en ce sens qu’elle vient confirmer l’exis-
tence de cette série naturelle et importante des corps dont
l’orcéine est le type ; l’action des acides puissans n’est pas
moins remarquable par le genre de décomposition que ces
corps font éprouver à celte substance. En effet, sous l’in-
(107)
fluence des acides, la phlorizine se dédouble et donne
naissance à deux corps bien distincts, dont l’un, le sucre de
raisin, et l’autre, un corps nouveau, la phlorétine, qui est
une matière blanche cristallisée à petites lames, d’une
saveur sucrée, peu soluble dans l’eau, soluble dans l'alcool,
l'acide acétique et les alcalis.
Que l’on chaufle une dissolution aqueuse de phlorizine
acidulée par de l’acide oxalique ou par un acide minéral
quelconque, qui ne cède pas facilement de l'oxygène, on
verra la solution limpide perdre; vers 80° à 90°, toute sa
transparence, et laisser déposer une matière cristalline, la
phloritine. La liqueur acide restante, neutralisée par une
base susceptible de faire un sel insoluble avec l'acide em-
ployé, laisse, après évaporation, une matière blanche, diffi-
cilement cristallisable, sucrée, fermentescible, et qui n’est
en effet rien autre chose que du sucre de raisin comme l’a-
nalyse élémentaire me l’a prouvé.
La comparaison de la formule qui représente la compo-
sition de la phloritine à celle de la phlorizine, fait voir
que sous cette influence la phlorizine perd du carbone,
de l'hydrogène et de l'oxygène dans les rapports où ils
constituent l’eau, et l'expérience directe vient de prouver
que les élémens perdus ne sont autre chose que du sucre
de raisins. Je dois ajouter que dans cette décomposition les
élémens de la phlorizine ne perdent rien nine gagnent
rien, vu qu'on les retrouve dans les élémens réunis du
sucre de raisin et de la phloritine. Ce fait serait donc à
joindre à ceux que l’on attribue à la force inconnue que
l'on a nommée force catalytyque.
La décomposition de la phlorizine en sucre de raisin et
en phloritine paraît remarquable en ce que ce résultat
modifiera certainement l'idée qu’on s'était faite de la pro-
( 106 )
duction du sucre des fruits. En effet, je crois qu'il est per-
mis de se demander si le sucre qui se trouve dans Îles
fruits ne provient pas de l’action décomposante des acides,
qui se trouvent toujours dans ces fruits, sur des matières
que jusqu'ici on n’a pas encore isolées ou examinées dans
celle direction.
L'étude de l'action des acides et des bases sur quelques
substances organiques neutres, fortifie cette manière de
voir et tend même à prouver que cette manière d’agir est
assez générale. M. Perie n’a-t-1l pas obtenu du sucre de rai-
sin et un corps résinoïde par l’action des acides sur la sa-
licine ? L’acide gallique obtenu par M. Liebig, en trai-
tant le tannin par les acides et les bases, ne serait-il pas
le résultat d’une décomposition pareille, et la perte de
charbon et d’eau qu'il éprouve ne serait-elle pas du sucre ?
L’acide esculique que M. Fremy a fait connaître , ne ren-
trerait-il pas dans cette même action ? Cela est probable,
mais des expériences peuvent seules le prouver.
Observations sur la lanque et la littérature romanes,
a l'occasion d’un manuscrit de la bibliothèque royale,
contenant d’anciennes poésies, par M. le baron De
Reiffenberg, membre de l’académie,
L'académie a bien voulu accueillir avec indulgence plu-
sieurs de mes notices qui, ayant la liltérature romane pour
objet (1), pouvaient servir d'appendice aux recherches plus
(1) Sur le roman du Renard, Wulletins, X, 33, 41, 156; sur Jean
( 109 )
élendues que j'ai destinées à la commission royale d’his-
toire (1). La langue romane dont les monumens primitifs
semblent appartenir à des provinces jadis réputées belges,
est un sujet que j'appellerais éminemment nalioral, si
l'abus étrange qu'on a fait de cette expression n’avait jeté
un peu de ridicule sur des idées que le ridicule ne devrait
jamais atteindre. |
Récemment encore, en parlant du restaurateur de la
philologie romane, j'ai risqué quelques rapides aperçus
concernant la querelle des partisans des trouvères et de
ceux des troubadours, et je viens d'acquérir la preuve sa-
tisfaisante que je m'étais rencontré avec plusieurs hommes
de mérite, juges irès-compétens en cette matière, entre
autres avec M. De Martonne, dont les dissertations insé-
rées au premier volume de la nouvelle série des Mémoires
de la société royale des antiquaires de France, ne m'étaient
point parvenues jusqu’à ce jour (2).
Molinet, 1, 117-121, IT, 41; sur Alard Janvier, IL, 69; sur un album
ancien, 11,155; Rapport sur le concours de 1837, 76, 176, 606; sur
les chansons de geste et les romans de Jourdain de Blaye et de Gode-
froid de Bouillon, IV, 242-362, fragment en langue romane, IV, 414;
sur un MS, de la bibliothèque de Tournai, IV, 509, Version de la légende
de Jourdain de Blaye attribuée à un belge, V, 300; des légendes poéti-
ques relatives aux invasions des Huns dans les Gaules et du poème de
Waltharius, V, 597.
(1) Bulletins de cette commission passim, et les introductions des
deux vol. de l’éd. de Ph. Mouskes. La première offre une histoire de
la langue romane en Belgique jusqu’au XIIIme siècle; la seconde un
examen des légendes épiques en général et de celles qui se rattachent
à Charlemagne en particulier. Je prépare en ce moment pour les Mo-
numenta IHannoniæ, le Gilles de Chin en vers. Ce sera un pendant,
modeste à la vérité, du Gilion de Trasignies de M. O. L. B. Wolf,
que j'attends avec impatience.
(2) De la priorité de la langue d’oil sur la langue d’oc ou de leur
(110)
Il est évident que, quant aux vocables, le fonds de la
langue romane, au midi ou au nord, est du latin cor-
rompu, et que les élémens empruntés aux langues barbares
n'ont qu'une importance secondaire (1). Or la tendance à
dénaturer le latin a dû se manifester dans les contrées où
il était plus anciennement en usage, donc, sous ce rap-
port, le germe de la langue romane a existé plus tôt dans
le midi que dans:le nord, on peut même dire qu'il exis-
tait au sein de l'Italie antique et jusque dans Rome, aux
plus beaux jours de sa domination (2); mais il y a loin
d’une altération partielle à une transformation totale.
contemporanéité, pag. 293-300. — Rapport sur Purtonopeus de Blois,
pag. 400-422. — M. Schayes, dans son estimable ouvrage intitulé :
Les Pays-Bas avant et durant la domination romaine, émet l’opinion
que l’influence romaine, tout-à-fait impuissante , n’imposa pas plus la
langue des vainqueurs à la Belgique, qu’elle ne parvint à lui donner
leurs mœurs, leurs lois, leur religion. Il va même jusqu’à soutenir
que la langue des Germains n’était pas seulement répandue dans toute
la Belgique actuelle, mais qu’au Xe siècle elle s’étendait encore dans
toute la Picardie, M. E. Gachet, en faisant, dans l’Emancipation du 30
janvier 1839, l'analyse du livre de M. Schayes, s’est rangé au sentiment
de M. Raoux et au nôtre.
(1) Ph. Mouskes, 1836, 1, xcui; cf. Buhez Santez Nonn…. Mystère
composé en laugue bretonne antérieurement au XIIme siècle, publié
d’après un MS. unique, avec une introduction par l’abbé Sionnet, et
accompagné d’une traduction littérale de M. Legonidec, Paris, 1837,
an-8°, p. xvui et suivantes; Fréd. Diez, Grammatik der romanischen
Sprueken, Bonn, 1836-1838 , 2 vol. in-8o.
(2) N. De Wailly, Élémens de Paléographie, Paris, 1838, gr. in-40,
1, 162. Dans le cinquième volume des Palimpsestes du Vatican, publié
en 1833 par le docte Angelo Mai, on lit des fragmens d’un grammairien
de Toulouse du 1Vme siècle, qui n’a pu échapper à l’obscurité, malgré
le nom de Vargilius Maro, qu'il avait le courage de porter. Il y est
fait mention de douze espèces de latinités, désignées par des mots
inconnus la plupart jusqu'ici. M. Mai a noté, en outre, dans cet écri-
vain, trois cents mots qu’on ne rencontre dans aucun des auteurs latins
conservés.
( 111)
C’est celle-ci qui a produit la langue romane, à l’aide
de l'influence qu'ont exercée les idiomes des peuples
celtes (1) et germains sur les formes grammaticales. Le
roman est fils du latin par la majeure partie de son voca-
bulaire, il l'est des langues appelées barbares, par sa gram-
maire et sa syntaxe.
La corruption du langage ne saurait avoir lieu dans
plusieurs régions à la fois, d’une manière systématique et
uniforme ; elle est le résultat de l'irréflexion et de l’igno-
rance , et les principes généraux supposent ordinairement
la science et la méditation. Si donc, au nord et au midi
cette corruption s’est opérée, en bien des points, d’une
manière analogue, c’est qu'elle s’exécutait d’après des
habitudes acquises, d’après une manière d’être antérieure
qu’on ne peut chercher que dans le génie des langues na-
tionales des populations qui avaient adopté le latin où qui
essayaient de s’en servir.
Cette altération s’accomplissait avec des caractères par-
ticuliers , quoique simultanément, au nord et au midi, car
je ne saurais admettre avec M. Raynouard une langue
romane universelle, servant d'intermédiaire à toutes les
(1) Un décret de l’an 230 atteste l’existence du celte au IIIe siècle :
Fidei commissa quocumque sermone relinqui possunt ; non solum latina
vel græca, sed etiam punica vel gallicana vel alterius cujuscumque
gentis. Digest. XXXII, I, 17. Le témoignage de Sulpice Sévère constate
sa permanence au cinquième : Tu vero , inquit, vel celtice aut si mavis
gallice Zoquere dum modo jam Martinum loquaris. Ce passage a l’avan-
tage de présenter l'interprétation du mot gallicana, qui se trouve dans
l'autre, C’est à tort , suivant moi, que M. Champollion Figeac a cru que
gallicana lingua désignait la langue romane. Voir sa note dans l’Introd.
à l'Atlas ethnographique du globe, par A. Balbi, Paris, 1826, in-8o,
pag. 168.
( 112)
langues néolatines; mais quant aux règles qui ne parais-
sent pas avoir été fournies par les idiomes celtiques ou
germains, il est plus que probable qu’elles ont pris naïs-
sance dans les pays où le roman, séparé du latin d’une
manière plus tranchée, s’est constitué avec assez de force
pour se perpéluer, nonobstant les mutations nécessaire-
ment amenées par la marche des siècles.
Voilà où en est, si je ne m'abuse, cette question de
chronologie et de linguistique qu’un homme comme le
danois Christian Rask aurait sans doute complétement
résolue, s’il en avait pris la peine et si la mort n'était
venue si promptement le frapper (1).
Après cela, le débat sur le mérite respectif des trouba-
dours et des trouvères n’est plus qu’une affaire de goût;
décide qui voudra si la force, l'étendue, la variété des
conceptions l'emporte ou non sur l'harmonie du langage.
Pour moi qui suis du nord, les troubadours me charment,
mais je me plais mieux et plus long-temps avec les trou-
vères.
Occupé de l’examen des manuscrits de la bibliothèque
royale qui, contiennent de leurs ouvrages, je me suis ar-
rêté à un volume qui a fixé d'autant plus mon attention,
qu'il offre plusieurs pièces de Rutebeuf, écrivain fécond
et original dont M. Achille Jubinal vient de donner une
bonne édition (2).
(1) Voyez la notice de M. Depping sur ce profond linguiste, dans la
Revue Française, septembre 1838,
(2) M. Jubinal, qui me fait l'honneur de citer le premier vol. de
Ph, Mouskes, semble n’avoir pas eu connaissance du second. — $on
Rapport au ministre de l'instruction publique est enrichi d’une chan-
son de notre duc de Brabant, Henri III, à son trouvère Guilbert de
(113)
Dans sa préface, ce litlérateur établit un parallèle entre
Rutebeuf et Adenez. Le style du premier, d’après son ju-
gement , est plus nerveux, son vers plus net, sa manière
plus incisive. « Moins régulier et moins uniforme que l’au-
» teur de Cléomades , il prend avec facilité, dit-il, tous
» les tons et tous les rhythmes: tantôt il est inspiré , plein
» de chaleur ou d’amertume ; tantôt il est léger, folâtre,
» badin; c’est Adam de la Halle réuni au roi de Navarre.
» Chez Adenez, au contraire, qui n’est pas à beaucoup
» près aussi inégal que Rutebeuf, on sent déjà l'approche
» du XIVe siècle : l'alexandrin règne seul et sans par-
» age... »
Comme, indépendamment du joli roman de Berthe-aus-
Grans-Pié dont on a obligation à M. P. Paris, et de celui
d'Eustache-le- Moine , attribué à notre poète par M. Fran-
cisque Michel, j'ai mis au jour des fragmens de divers
poëmes composés par Adenez, Guillaume-au-Court-Nez,
Ogier-le-Danois, Aymeri de Noirbone, Cléomadès (1),
et que M. Van Hasselt a aussi donné un épisode de ce der-
nier poème (2), on peut s'assurer qu’Adenez ne s'était pas
voué sans partage à l'alexandrin, puisque de ces quatre
. chansons de geste , trois sont en vers de dix syllabes, l’autre
en vers de huit.
M. Jubinal a rencontré plus heureusement lorsqu'il a
reconnu qu'à la fin du Cléomadeés, dont (chose éton-
Berneville, plus complète que la leçon qu’il avait imprimée avec la
complainte de P. De la Brosse, et différente des deux insérées par
M. Vau Hasselt, à la fin de son Mémoire sur la poésie française en
Belgique, pp. 178, 179.
(1) Ph. Moushes, 1, eux, CLXV, cLXxXIIT, CLXXX VIII
(2) Mémoire sur La poésie francaise en Belgique , pag. 85—91.
Tom. vi. 8
( 114)
nante!) il transcrit de son côté un long passage en versdehuit
syllabes, se trouvait un acrostiche qui révélait les noms des
deux grandes dames dont lesavis avaient aidé l’auteur, savoir
La Royne de France Marie et Madame Blanche. M. Ju-
binal balance, à l'égard de celle-ci, entre Blanche d’Artois
et Blanche, fille de saint Louis, mariée à l'infant d’Espagne :
Les Dame: qui ce me contèrent,
A faire cest livre monstrèrent,
Etc. (1)
Pour en revenir au manuscrit menlionné tout à l’heure,
c'est un bel in-fol. sur parchemin en deux colonnes, écrit
à la fin du XIVe siècle ou au commencement du XV,
et orné de miniatures et de lettrines. Il porte dans l’Zn-
ventaire les n°° 9411-9426. Une main du XVIe siécle a
tracé à l'intérieur de la couverture ces mots: Discours
moraux en vers. À la fin on a écrit Jarford, Holand,
Cliffort, Stury, ce qui me ferait soupconner que ce vo-
lume a appartenu à Marguerite d'York, épouse de Charles-
le-Téméraire. Les dix premiers feuillets en ont été arrachés
à une époque sans doute antérieure à celle où il fut em-
porté à Paris. On verra tout à l'heure que le Grand d’Aussy
et Méon l'avaient eu entre les mains. Il est à regretter que
M. Jubinal n’ait pas joui du même avantage. Son édition,
quoique très-estimable, aurait pu y gagner, pour s'enrichir
de leçons ou de pièces nouvelles.
Voici le contenu de ce manuscrit, où sont transcrits
34 morceaux diflérens.
(1) Éd. de Rutebeuf, 1, 253 et suivantes. — Sur Adenez consulter
F Volf, Ueber die neuesten Leistungen der Franzoesen fuer die Ieraus-
gabe ihrer National-Heldenued. Wien, 1833, in-8o, p. 29 et suiv. —
F. Michel, Examen critique du roman de Berte.
Fol. X,.
Fol. X, verso.
Fol. XI, verso.
Fol. XIIJ (1).
Fol. XIIJ © verso.
Fol, XV.
Fol. XV 5 verso.
(115)
Biaus sire Dieus que vaut que vaut
La joie qui tost fine et faut ?
Dire vous voel d’un home dur
Ki tant avait corage sur
Qu’il n’avoit dou poyre pitié.
Cil qui plus voit plus doit savoir.
Ore escoutés, singneur, un songe
Qui croist no matère et alonge.
Dou cors et de l’ame.
Cors, en toy n’a point de savoir,
Car tu goulouses trop avoir.
Del unicorne et dou sierpent.
Moult par est fols chius ki s’entent,
Ki le bien voit et le mal prent.
Li dis del mort.
Mors ki m’as mis muer en mue
En telle estuve où li cors sue...
Comparez cette pièce avec celle attribuée à Helynand,
par M. Auguis, les Poètes français , depuis le XIIe siècle
jusqu'à Malherbe, I, 58—81, voyez en outre les Pers
sur la Mort, par Thibaut de Marly, dont M. Crapelet à
fait deux éditions.
Fol. XVIJ, Li dis dou croisier et dou descroisier.
L’autrier entour le St, Remi,
Chevauçoie pour mon afaire.
Extrait en prose, Le Grand d'Aussy, éd. de Renouard,
(1) Neuf feuillets sont cotés XILJ; la pagination restant la même
pour chaque pièce,
è ( 116
II, 211—221 ; Essais historiques sur l’origine et les pro-
grès de l’art dramatique en France, Paris, 1784, I,
146—154; texte A. Jubinal, Bull. de la société de l’hist.
de France, 1834; Docum. orig., pp. 53—66; le même,
OEuvres de Rutebeuf, 1, 124—135, 419—425 ; Paul
Tiby, trad. de l’Æist. des croisades de Mils, Paris, 1835,
tom. IIT, notes.
Fol. XVIJ? ». Li songes ke Rutebues fist de le voie de Paradis.
En march, droit en icel termine
Que dezous tière est la viermine..…….
A. Jubinal, IL, 24—55, 227260.
Fol, XVILJ 5 verso. Li dis des mesdisans.
De parler ne me puis plus faindre,
Car fortune me fet complaindre.
Fol XX. Li complainte d’Acre.
Pour l’envie et pour le domage
Ki je voi en l’umain lignage..…
Pièce intitulée : La nouvelle complainte d'outre-mer,
dans l’édit. de M. A. Jubinal, [, 110—123.
Fol. XXI. Laissier m’estuet le rimoier,
Car je me doi bien esmayer
Quant tenu l’ai si longement.
Fol. XXI verso. Miserere mei Deus,
Trop longhement me sui téus..
CHA) |
Fol. XXI 2! verso. Ch’est de carite.
Dire m’estuet
Et bien doit plaire
Chou dont on prent
Boin exemplaire... :
Fol. XXILJ 8 ver. Ch’est dou triacle et dou venén.
Mout a entre triacle (1)
Et venin grant descorde.
Fol. XXIV 5 verso, Ch’est de le cantepleure.
De celui hant segnour
Qui en la crois fu mis...
Quoique ce poème soit composé d’alexandrins , il est
écrit comme s’il était en vers de six syllabes. oy. le texte
de M. Jubinal, 1, 398 — 405. Notre manuscrit contient
quelques vers de plus. Voir en outre l'édit. de M. Monin,
Lyon, 1834, in-&8°.
Fol. XXVI, Ch’est Li dis des VII vices et des VIT viertus.
Mondus caro demonia
Diversa monent prelia
Turbantque cordis sabatum,
Ch’est troi nous cacheront amort..….
(1) Le mot triacleur (terriaqueur), pour charlatan, marchand d’or-
viétan, est encore employé dans la Satyre Ménippée : « Le sommaire
de toute cette pancharte estoit que ce triacleur, petit-fils d’un espa-
gnol de Grenade... » Édit. de Ratisbonne ( Bruxelles, P. Foppens),
1726, 1.3, Rabelais l’emploie également.
( 118 )
Foi. XXVI2». C’est li dis dou cors et de l’ame le grant.
Une nuit par délit
Me gisoye en mon lit...
Fol. XXIX. C’est là congiés Jehan Bordiel.
Pitiés à ma matère puise
M'ensigne qu’on ce me deduise...….
Voy. Recueil de Barbazan et de Méon, I, 135 —152 ;
on trouve dans notre manuscrit les deux stances ajoutées
par Méon, d’après le manuscrit de Belgique, n° 218,
mais avec quelques variantes, quoique ce manuscrit 218
soit le nôtre, ce qui prouve que M. Méon, malgré sa répu-
tation d’exactitude, altérait quelquefois ses originaux.
Fol. XXIX 4 ». Ci comence doctrinaus li salvages.
Certes bone cose est
De bon entendement..….…
Analysé par Le Grand d’Aussy, dans les Votices des
manuscrits, N, 515—517. Ce philologue cite, comme
Méon, le manuscrit de Belgique n° 218, et indique le
fol. 29 verso, ce qui sufhrait pour que ce manuscrit fût
celui dont je me sers actuellement, quand même l’ancien
numérotage ne l’affirmerait pas. Sanderus marque le Doc-
trinal saulvage sous le n° 455 des manuscrits de Bourg.
Bibl. manuscripta, KI, 10.
Fol. XXXI. Chi comence là prière Theophilus.
Mère Dieu qui vous siert
Mout a bon gueredon.
{ TES
Différent des prières publiées par M. Jubinal, IL, 94—
100, 327—334, et du poème de Gautier de Coinsy, publié
par M. D. Maillet.
Fol. XXXI 5 ». C’est uns dis de Nostre Dame.
Sainte Marie, douce Mère,
Qui es de mes estoile clère..….….
Fol. XXXIJ, C’est uns dis de l’âme.
Amors ne craint mort ne torment
Ains si esjoist liément.
Fol. XXXILJ, Ci coumence Catons.
Seignour, ains que je vous commant
Despondre Caton en romans...
Fol. XXXIV. C’est li contes dou pel.
Jà ne mesise contredit
De raconter aucun biel dit.
Fol, XXXIX 15 ». C’est li contes dou mantiel.
Ki de boins est s’i mete entente...
Fol. XLI. Ci commence li contes d'envie.
Cil n’ont soing que je monte en pris
Qui a reprendre m’ont empris.
Fol XLILJ, Chi commence li contes de La rose
Amours ki maint amant là prent
À ce que doucement l’aprent.
Fol. XLIV 5, Ci commence uns examples de le mort.
Chil ki le mieus
La char encarne..….
Fol. XLV verso. Ci coumenche li contes des hiraus
L'autre an ensi que après mai...
0
Fol. XLVE£ % er. Chi commenche là contes de gentilleche.
Tout adies doit li hons gentius
À centillèce estre ententius.
Fol. XLV!J ver. Chi commence li Ave Maria.
En une pume fu l’amors..….
Fa es Ci commence li contes del aver.
Sour toute riens d’une mervelle
Et plus i pens plus m’esmervelle..….
L'intérêt qu'a éveillé depuis quelque temps la légende
de Théophile, m'engage à terminer cette notice par un ex-
trait de sa prière, qui esl dans le dialecte wallon, et offre
quelques tournures assez heureuses :
Mère Dieu, qui vous siert mout a bon gueredon,
Car nul ne vous siert, Dame, longement em pardon.
Qui vraiement vous aime, vous li querez pardon
À celui de qui vienent tout li sayereus àon.
Dame, car m’aprendés que vous face siervir
Et que je par vous puisse l’amour Dieu désiervir;
Mais (je) l’ai tant coureciet, n’os mais vers lui guencir;
Si me convient à vous à warant revenir.
Pour warant va-on, Dame, à le grande (grant) forterèche,
Dame, je viens à vous en me très grant destrèce ;
(121)
Si vous ne m’aidiés, Dame, mis ière en tel estrèche
Dont jamais n’isterai, se vos sens ne m’adrèche :
Mais vous estes li voie ki savés adrechier
Ciaus ki à droit se veulent de leur maus estrachier,
Dame, je suis kéus, aidiesme à redrechier,
Je me veul acorder, aidiesme à rapayer,
Dame, vous estes cele ki les plourans apaie,
Je me veul acorder , pour Dieu tailliés ma paie.
Mais peu ai repentance, c’est chou ki plus m’esmaie,
Et se jou en ai point , ne sai-je s’ele est vraie.
Dame, trop ai estet de grant desmesurance ;
De mon très dolant cors où ainc n’eut atemprance
Sos de cuer, sos de bouche, outragens delle pance;
Dame, proyés vo fil k’il me doinst repentance.
Repentance we doinst, por coi plour mes péchiés,
Dont mes cors et mes cuers est tres tous dépéchiés,
Très douche Mère Diu, ki les cuers adouchies,
Arousème le mien, car il est tous séchies.
Vous estes li solaus ki le mont enlumine,
Vous estes le chemins, où on se rachemine.
Si vous ne m’aidiés, Dame, ançois que je tiermine,
Bien puet dire : As las! kéus est en le mine!
En le mine est li ame, por ma char si minée,
C’aussi gist empéchié con sus (suie) en cheminée,
Mais se por vous n’est, Dame, à droit chemin menéc,
Bien puet dire : As las! en infer ert minée.
Dame , tant ai couru que ne sai retourner,
Li doleurs de cest monde m’a fait si bestourner
Que je ne sai mon cuer à nul bien retourner.
Très douce Mère Dieu veulliesme à chou clamer,
Que jou sache vo fil et vous de cuer amer.
Dame, se je vous aim, dont ai-je bien amé,
Car dont amerai-jou le douch vrégié ramé
Que Dius a de tous biens et de tous sens clamé;
Dame, escaufés mon cuer, car trop lai enrimé.
Voirement i-a-il rimée de froidure,
De péchiés engielés, de venin et d’ordure,
Car tout a fait mes cors de honte et de laidure
Que c’est fine mervelle que Jhucris l’endure.
Et puis que Dius l’a tant soufliert et enduré
Que j'ai en mes péchiés si longement duré,
&
(12)
Dame, bien doi connoistre ceste larghe bonté ;
Soyés à men conseil, tant que j'aie conté.
Conté, en quel manière ose (os) conte demander,
Quar tant ài de mal fait n’ainc n’en volc amender?
Et coument os-je dire que jou veul acorder,
Que men cors ne puis faire à nul bien atourner.
Très douche Mère Dieu, par vo miséricorde
Proyés vostre douch fil qui à tous biens s’acorde
Qu'il ançois que je muire m’estraïgne de tel corde
Que de lui et demaine soit faite li acorde.
Dame, au darrain jour de men destroit départ,
Proyés votre chier fil qui tous les biens départ,
Qu’en paradis me doinst un anglet d’une part
Car se por vous n’est, Dame, j’ou n’i os clamer part.
Dame, vous estes cele ki portes les messages,
Vous proyés por les fols, vous proyés por les sages ;
Vous estes tours et marche ki wardés les passages ;
Ki à Dieu crut aler por vous est li voiages.
Aussi com li chastiaus, ki en marche est assis,
Est warans et rechès au besoing ses amis,
Et desfant d’autre part contre ses anemis,
Aussi estes-vous , Dame, li rechès à chaïtis.
(Quatre-vingt-dix stances sont omises et la prière
finit ainsi:)
En est bien drois que Dius son paradis ésaine
A celui qui est plains d’envie et de rancune.
Boines gens jà n'est-il de toutes joie que une,
Et si iert à tous ciaus qui le vauront commune.
Commune est à tres tous ki avoir le vaurront
Mais c’iert por un couvent que jà n’i enterront ,
Dès que por Dieu siervir premiers le comperront,
Car jà en si grant joie péchéour ne m’auront.
Jà en si grande joie n’enterront péchéour
Se de leur maus ne sont premiers dépécheour ;
Dont seront bien houni cil glouton lichéour,
Traiteur, userier, larron et tréchéour.
Pour quant je ne di mie que nus soit si péchière,
(123)
Mais que de repentance soit de mal dépéchiére,
Et par confession en welle estre adrechière,
Que Dieu ne le recuelle et fache biele chière.
Jà n’ara tant fourfait que Dius ne le recuelle,
Mais k’il à son serviche sera traie et racuelle,
Et confiession vraie raverdist comme fuelle
L’ame del péchéour, mais que croire le veulle.
Par confession vraie est l’ame raverdie,
Jà tant n’ara esté de mal faire escandie,
Dont est boin que cascuns des maus en tel point die
Que s’ame ne déparche fors de sen cors mendie.
On s’est aperçu qu’une des formes de prédilection de
l’auteur consiste à commencer une strophe par le dernier
mot de la précédente. Cette élévation d’un pécheur vers
la Mère de miséricorde, est fervente et naïve; ne vaut-elle
pas mieux cent fois que les déclamations élégantes, mais
païennes, qui remplacent l’oraison du chrétien, comme
les colifichets si énergiquement flétris par M. le comte de
Montalembert (1), remplacent l’art catholique? La prière
de Théophile, traitée ici avec quelque habitude de la ver-
sification , était un sujet à la mode parmi les trouvéres, et
M. Jubinal nous en fait connaître à lui seul plusieurs ver-
sions. Il est étonnant que s'étant livré à des investigations
étendues et trés-curieuses à cet effet , il n’ait pu profiter de
celles de M. Mone, dans les Anzeiger, IX, 188, IIL, 159 suiv.,
V, 434 suiv. (Cf. Uebersicht der Niederl. Volks-Litera-
tur, 101), et de M. Ph. Bloemaert, dans l'introduction
du Theophilus flamand ; mais qui se vanterait d’avoir
assez d'yeux pour tout voir, assez de mains pour lout re-
cueillir, assez de temps pour tout interroger ? Telle est la
(1) Du vandalisme et du catholicisme dans l’art, Paris, 1839, in-8e,
( 124 )
science moderne, qu'elle est devenue un ensemble écra-
sant de faits plutôt que d'idées, et qu'avant d’oser faire
quelque chose par soi-même , il faut user les trois quarts
de sa vie à s’enquérir de ce qu'ont fait les autres.
LITTÉRATURE FLAMANDE.
Proverbes. — Malgré des travaux multipliés, une bonne
histoire des proverbes manque encore ; et cependant quoi
de plus propre à faire connaître le génie des langues et le
caractère des peuples, que ces maximes vulgaires, renfer-
mées presque toujours dans un tour vif et précis, el qui
constituent la sagesse des nations ? Les proverbes les plus
usuels ont passé à travers les caprices de la mode et les
répugnances de la civilisation progressive sans s’altérer ;
ils remontent à des époques trés-reculées. Ce sont des mo-
- numens irrécusables des idées, du langage et souvent des
coutumes et des mœurs du passé. M. Mone, qui cite les
anciens recueils de proverbes flamands, en a rassemblé
plusieurs (1); on en trouve également dans le Belgisch
Museum, ainsi que dans des ouvrages ex professo de
MM. Willems et G.-J. Meyer (2). J'ai fait remarquer ail-
leurs que Molinet était peut-être l’auteur qui nous avait
(1) E.-3. None, Uebersicht, etc., Tuebingen , 1838, 316 — 319, 385,
398. Anseiger, 1834, 101, 202; 1835, 73; 1836, 452; 1837, 322.
(2) G.-3. Meyer, Oude Nederlandsche spreulien en spreckwoorden ,
Groeningen, 1836, in-8°; J.-F. Willems , Xeur van Nederd. spreck-
woorden, enz. Antw. 1824, in-8; Belgisch Museum, 1, 99—136; Cf.
Ad. Ziemana, AZédeutsche Lezenbuch, Spraeche aus dem XIIT Jahr.
Quedlinb. und Leipz., 1838, 213—334; W. Wackernagel, Altdeutsches
Lesebuch , Basel, 1839, in-8; ÆReëmsprueche, pp. 213—216 ; Lieder und
( 125 )
conserté le plus grand nombre de proverbes français (1).
Quant aux proverbes flamands, voici une indication que
je n'oserais marquer du nom de découverte , bien que je
la croie neuve, et que ce mot, appliqué tous les jours à
des puérilités , soit absolument sans conséquence.
Je viens d'acquérir à une vente publique qui s'est faite
à Ham, dans le comté de la Marck, en Prusse, un petit
in-4°, non rogné (n° 144 du catalogue), imprimé dans le
XV: siécle, à longues lignes, avec des caractères qui res-
semblent assez à ceux des prémières lettres d'indulgence (2),
ou à ceux d'Arnold Therhoernen, de Cologne. Il est sans
nom d'imprimeur et sans date, dépourvu de chiffres et de
réclames , mais avec des signatures; la dernière est CV, le
nombre des feuillets est de 26. Les grandes initiales ont
élé tracées en rouge, à la main.
Ce volume, que je considère comme rarissime , puisqu'il
a échappé au diligent M. Mone, porte pour intitulé : In-
cipiunt proverbia seriosa à (in) theutonice (sic) pma
(prima). Deinde in latino sibi invice (invicem) csonantia
(consonantia) judicio colligentis pulcherrima ac in ho-
minum colloquiis comunia. Chaque proverbe flamand est
suivi de sa traduction en latin, mais traduction qui en
©
Sprueche, KHernn Walthers Vonder Vogelweide, Ib.,375—394; Sprueche
des Meisners , Xb., 687—690 ; Ein Spruch Meister Stollens , Xb., 689—
690 ; Sprueche des Unverzagten, Ib., 694—692 ; Sprueche des Marnes ,
Ib., 694—690 ; Zin Spruch Meister Raumelands , Xb., 695—696; Sprich-
woerter und Sprueche, Xb., 835—836, etc.
(1) Voyez mon édition de la Chron. métrique de Chastellain et de
Molinet, Brux., 1836, in-80, pag. 72; et celle de l'Histoire des ducs
de Bourg., Brux., 1836, X, 5, 6.
(2) Cf. mes recherches à ce sujet dans les Mémoires de l’académie,
Bulletin de Techener, 2 série, mars, 1836, no 4, pp. 145 —144.
(126 )
exprime rarement la naïve énergie et la rondeur, À la fin
on lit: Finiunt pverbia comunia. Voici quelques-uns de
ces proverbes :
L
Also lanck gaet die kruick to water dan si brickt.
Tot reysas (1) ad aquas facit hydria quod luit ipsas,
Ad vada tot vadit urna quod ipsa cadit (2).
. Also menich hooft so menighen sin.
Quolibet in capite viget ingenium speciale (3).
Alle riviren lopen in die ze.
Ad mare dectivus omnis currit cito rivus (4).
. Een man can ghenen dans maken.
Solus homo validum nunquum facit ille choream.
Na grote droocht comt dick groot reghen.
Inundans pluvia sequitur post tempora sicca (5).
Ces proverbes n’ont pas été inconnus au savant Louis
Hain, qui, dans son Repertorium bibliographicum ,
tom. IL, 2, pp. 162-63, en indique une autre édition
anonyme, in-4° gothique de 22 feuillets à 40 lignes, au
lieu que ceux de la nôtre, n’en ont que 85 , et une édition
de 1487, de Nimègue, chez Gérard de Leempt, in-4°.
Sur un diplôme de Louis-le-Débonnaire, par M. le cha-
noine De Smet, membre de l'académie.
Dans les ouvrages d’érudition, alors même qu'ils ne
(1) Flandricisme ; voyages.
{2) Tant va lu cruche..…. proverbe mis en variation par Figaro.
(3) Tot capita tot sensus.
(4) L'eau va toujours à la rivière.
(5) Après lu pluie vient le beuu temps.
(CA )
sont pas de longue haleine, rien n’est plus facile à con-
cevoir et plus excusable qu’un malentendu ou une inexac-
titude dans la citation d'un texte. Quand ces méprises
n’ont aucune influence sur les raisonnemens ou les con-
clusions de l’auteur, on aurait tort, ce me semble, de
les lui reprocher; ce sont de ces fautes dont on peut dire :
Non ego paucis
Offendar maculis , quas autincuria fudit,
Aut humanu parum cavit nature.
Mais il ne saurait en être de même, si un écrivain s’ap-
puie sur ces distractions pour fonder un système ou éta-
blir des faits, d'ailleurs dénués de preuves; l'erreur ne fi-
nit pas là d'ordinaire, et plus l’auteur mérite de confiance,
plus on répétera sans examen ses hypothèses mal fondées.
C’est là le motif qui m'a porté à croire qu’il était utile de
monter les méprises qu'a faites M. Raepsaet dans l’usage
d’un diplôme de Louis-le-Débonnaire.
« Je sais bien, ditil, qu'il y eut alors (au IX® siécle)
des évêchés , mais c’étaient des évêchés relativement à ces
pays plongés dans les ténèbres du paganisme, qu’on pou-
vait réputer in partibus, qui ne connaissaient pas leurs
limites et bien moins leurs ouailles, puisque celui de
Hambourg s’étendait jusqu'en Flandre. Lorsqu'en 834,
Louis-le-Débonnaire bâtit la première chapelle à Renaix
et à Tourhout ( anciennes villes de Flandre), il détacha la
première du diocèse de Hambourg, et la soumit à celui de
Reims, comme plus à portée de surveiller un lieu envi-
ronné de gentils et de peuples barbares (1). »
(1) Défense de Charles Martel, 1re édit. pag. 24. L'auteur reproduit
la même assertion dans l'Histoire des états-généraux , pag. 219.
( 1439
Que les diocèses de la Belgique n'aient pas connu leurs
limites au IX° siècle, serait chose bien difficile à prouver.
L'hagiographe Henschenius nous trace les bornes du dio-
cèse de Maestricht (1), dans le IV* siècle; le P. Boucher,
juge compétent dans celte partie , nous donne avec beau-
coup de développement les anciennes limites des diocèses
de Cambrai et de Tournai (2), et M. Warnkoenig remarque
avec raison qu'il ne se fit aucun changement dans la déli-
milation des diocèses dont relevait la Flandre, pendant
tout le moyen àge (3). Plus d’une fois, M. Raepsaet lui-
même s’est appuyé dans ses différens ouvrages de la règle
de critique, adoptée par les antiquaires, que l’ancienne
démarcation des diocèses indique la démarcation des an-
ciens peuples ; un grand nombre des conjectures heureuses
et des rectifications qu’il a failes dans son précis topogra-
phique de l’ancienne Belgique(4), n’ont pas d’autres bases
que ce principe; mais comment un écrivain judicieux
ne s'est-il pas aperçu qu'il devenait impossible de l’appli-
quer à nos provinces, aussitôt qu’on supposait que les dio-
cèses n’y avaient point de limites, et qu'il s’y trouvait
des endroits soumis à la juridiction d’un évêché aussi
éloigné que celui de Hambourg? Il serait facile de mul-
tiplier ces preuves, si notre tâche ne se bornail ici à l’exa-
men du document sur lequel s'appuient des assertions que
nous regardons comme peu fondées.
Le seul diplôme allégué par le défenseur de Charles-
(1) Deepise. Traject., page 2.
(2) Belgium romanum, ete., 1. VIT, c. 10 et seq.
(3) Histoire de lu Flandre, tome IT, page 328.
(4) Voir entre autres l'Analyse, tome I, p. 68.
(129 )
Martel a été inséré par M. Baluze, parmi les capitulaires (1),
et avant lui par le Pêre Henschenius dans les Æcta sanc-
torum (2); dans le premier de ces recueils, il est intitulé :
De paganis ad Christianitatem invitandis et de insti-
tutione episcopatüs Hammaburgensis, ce qui déjà pou-
vait suffire pour donner à cette pièce un sens lout autre
que celui qu'on a cru y voir, puisqu'il y est question de
l'établissement même de cet évêché de Hambourg, dont on
pense que Louis-le-Débonnaire a détaché une ou deux égli-
ses. Mais ce qui peut étonner davantage, c'est qu’une lec-
ture attentive de lout le rescrit impérial ne saurait parvenir
à trouver ce que M, Raepsaet y a découvert.
Et d’abord, il y a vu que Louis-le-Débonnaire a bâti la
première chapelle à Renaix et à Tourhout , mais dans tout
le diplôme y a-t-il rien qui indique une chapelle? On y
parle de cellam Hrodnace vocatam et de cellam Turholt
vocatam, mais le mot cella a-t-il le sens de chapelle, au
moyen âge ? et en particulier dans la question qui est dis-
cutée ici, ce mot n'indique-t-il pas un couvent ou monas-
tère ? Cela ne saurait même être contesté, de manière qu'il
nous semble inutile d'ajouter d’autres autorités à celle du
bollandiste Henschenius, qui, dans la vie de saint Rembert
et desaint Anschaire, explique ce mot par monasterium ou
monasteriolur (3). Quand même on n’attache aucun prix
à une distraction , assez légère en effet, Louis-le-Débon-
naire avance-t-il réellement que c’est lui qui a bâti ces
chapelles on monastères ? aucunement. Il parle du cou-
\
(1) Tome 1, col. 683 et 684.
(2) Acta SS., tome L, februarii, pages 404 et 405.
(3) Ibidem. 8. Grégoire-le-Grand emploie fréquemment le mot de cellu
dans ce même sens. Voir Dial., lib. 11, præf,, cap. 9, 12, 13, 21, 33.
Tow. vr. 9
(130 )
vent de Tourhout comme d’un établissement déjà fondé,
et il assure en termes exprès que Charlemagne avait donné
celui de Renaix au missionnaire Héridac, qui prêchait
l'évangile aux peuples de la presqu’ile scandinave. Nous
savons d’ailleurs que Louis ne pouvait parler autrement,
car le monastère de Renaix, et bien évidemment celui
dont il est question dans le diplôme, avait été bâti sous le
règne du roi Dagobert, par saint Amand ; Balderie le dit for-
mellement en deux endroits différens de sa chronique (1) :
nous ne donnerons ici que le second.
Dans le village de Renaix, dit-il, on trouve un couvent
de chanoines, fondé par saint Amand, en l'honneur des
saints apôtres , où reposent les précieuses reliques du mar-
Lyr saint Hermés. Ce qui nous étonne, c’est que Louis-le-
Débonnaire ait donné à l’abbaye d'Ende un monastère si
ancien et si opulent. Quant au monastère de Tourhout,
les hagiographes Henschenius et Perierus pensent tous
deux qu’on peut également en attribuer la fondation à
saint Amand; ce n’est là, il est vrai, qu’une conjecture (2),
mais ce qui est incontestable, c’est qu'il existait déjà du
temps même de ce saint apôtre, puisqu'on lit dans la vie de
saint Bavon qu’il était ami intime de Domlin, religieux de
Tourbout, et qu’il en reçut les secours spirituels à l’article
de la mort (3). Il est donc impossible que Louis-le-Débon-
naireait jamais supposé qu’il avait bâlila première chäpelle
de Renaix et de Tourhout. Il est plus difficile de s’expli-
(1) Chronicon cumeracense et atrebatense, lib. I, c. 75, et lib. II, c. 30.
Édit. Le Glay.
(2) Dans son Ancienneté de la ville de Gand, p. 17, le chanoine De:
Bast l’afirme formellement, mais il se dispense de citer ses preuves.
(3) Acta SS, Belgii, tome I}, page 508.
( 131 )
quer comment on a pu trouver dans le diplôme, que l’em-
pereur avait soumis le couvent de Renaix à l’église de
Reims, car on n’y rencontre aucun mot qui puisse donner
lieu à cette supposition. Le nom de Reims se lit une seule
fois dans le document , pour indiquer que l'archevêque
Ebbon était un des prélals qui assistèrent au sacre de saint
Anschaire (1). Le chroniqueur de Cambrai , qui connais-
sait apparemment la pièce que nous examinons, est très-
exact, quand il avance que Louis donna le couvent de Re-
naix à l'abbaye d'Inde ou d'Ende; c’est là ce que porte en
termes exprès l'ordonnance impériale : suadentibus qui-
busdam jam diciam cellam ad Indam monasterium con-
tuli. Or, on sait que l’abbaye d'Inde, bâtie près d’Aix-la-
Chapelle, par Louis-le-Débonnaire pour saint Benoît d’A-
niane , et appelée plus tard abbaye de Saint-Corneille (2),
n’avait rien de commun avec la métropole de Reims et ap-
partenait au diocèse de Cologne.
Si l'excellent défenseur de Charles-Martel avait consulté,
dans les ÆZeta sanctorum , les vies de saint Anschaire et de
saint Amand, ou l'ouvrage flamand du bollandiste Corn.
Smet, sur les saints et les hommes illustres des Pays-Bas (3),
(1) Adstantibus archiepiscopis Elbone Remensi, Hetti Treverensi, etc.
(2) Elle fut nommée ainsi à cause de la tête et du bras droit de saint Cor-
meïlle qui lui furent donnés. Les domaines que lui valut Ja donation de
Louis-le-Débonnaire s’étendaient sur Renaix, Lesele, Wendeke, Akerne,
Hoorebeke -St - Corneille, Russegnies, Amougis, Middelbeke, Baim,
Bscornuix et Tichove , selon Miræus, Donat. Belq., lib. I, c. 120. Sande-
rus et Mayer ajoutent Brakel, Wondelbeke et Ellezelles. Le comte Gui
Dampierre acheta tous ces domaines de l’abbé Raynard en 1280, eten
assigna une partie au chapitre de St-Hermès, qui avait remplacé le cou-
vent.
(3) Page 210.
( 132 )
il se serait bientôt aperçu qu'il ne s'agissait aucunement de
juridiction épiscopale dans la constitution du fils de Char-
lemagne, mais uniquement de revenus qu’on accordait
au nouvel archevèque de Hambourg. Le texte de la pièce
est d’ailleurs assez clair : Charlemagne avait donné le mo-
nastère de Renaix à Héridac, simple prêtre. « Delegavit
etiam eidem presbytero ; » pourquoi ? pour le soumettre
a sa juridiction ? En aucune manière; mais afin qu'il y eût
un revenu supplémentaire à celui qu'on avait assigné au
siége à établir au dela de l'Elbe, et qu'on regardait comme
incerlain à cause des nombreux dangers que présentait le
pays « quatenus eidem loco undique periculis circum-
dato fierit supplementum. » Louis-le-Débonnaire donne
ainsi les revenus du couvent de Tourhout, pour l’établisse-
ment du nouvel archevèché, « huic novæ constructioni, »
et pour les besoins de saint Anschaire et de ses successeurs,
comme une offraude qu'il fait à la divine majesté ; il motive
sa donation comme son père sur les dangers qui doivent
rendre précaire la position du nouveau prélat, « ejusdem
sedis supplemenio multimodis periculis circumdatæ. »
Dans la vie de saint Rembert, successeur immédiat de saint
Anschaire, on explique la fondation de manière à ne per-
meltre aucun doute.
« Les limites du diocèse de Hambourg étant fort ré-
trécies, disent les biographes du saint (1), et les revenus
qu'on pouvait recueillir des lieux qui en dépendaient
étant insuffisans pour l’œuvre entreprise par le nouveau
prélat , et de plus souvent enlevés par les barbares , Louis-
(1) Acta SS, februur., tom. 1, pag. 560.
Eu -
Ce
… dames di
f
L
( 133 )
le-Débonnaire assigna à l’homme de Dieu certain monas-
stère situé à Tourhout, pour être attaché à perpétuité à
cette mission. » La vie de saint Rembert fut écrite peu de
temps après sa mort, et cependant les auteurs nous disent
que les limites du nouveau diocèse de Hambourg étaient
fort resserrées : Cum jam prædictæ noviter institutæ
Hammaburgensis ecclesiæ termini essent anqusti: com-
ment un écrivain du XIXe siècle a-t-il pu dire qu'il s’é-
tendait jusqu’en Flandre ?
Il est étonnant, d’ailleurs, que ce savant ne se soit pas
aperçu de l’empiélement que l’empereur aurait commis
sur l'autorité pontificale , s’il avait osé détacher une église
d’une métropole et la soumettre à une autre; attentat sin-
gulier, dont Louis-le-Débonnaire était certes incapable,
et qui eût provoqué d’énergiques réclamations. Le pape
Grégoire IV, dans la bulle qui érige un archevèché à Ham-
bourg, loin de réclamer contre les formes employées par
l'empereur, assure qu’il confirme par son autorité lout ce
que le vénérable monarque avait fait à cetle occassion :
aurait-il pu s'exprimer ainsi s’il y avait eu réellement une
manifeste usurpalion de la part du pouvoir civil ?
Pour soutenir la mission au delà de l’Elbe, et assurer au
nouvel archevêque une existence honorable, Louis assigne
à la mense épiscopale les revenus du couvent de Tourhout,
comme son père avait résolu d’y attacher ceux du couvent
de Renaix; voilà tout ce qu’on peut inférer du diplôme :
j'en ai peut-être donné trop de preuves.
Dans la plupart de ces nombreux ouvrages , il est évident
que M. Raepsaet a fait d'abord une étude approfondie des
sources avant d’embrasser une opinion; mais dans celte .
partie de la défense de Charles-Martel , il paraît s'être
écarté de cette excellente méthode. Ce qui l'a trompé an-
( 134 )
paremment , c’est la vue des cantons encore païens dans le
pays el des courses apostoliques de prélats étrangers aux
diocèses dans lesquels ils exerçaient le saint ministère :
rien n’était cependant plus facile à expliquer.
Les limites d’un diocèse ne changent point, parce qu’on y
trouve des restes de paganisme, el les missionnaires portent
la parole de Dieu partout où les ordinaires les y autorisent.
Du reste, on sait que le pape saint Denis, décédé l'an 269,
établit déjà la circonscription des diocèses et des paroisses,
comme nous l’affirme le pontifical de saint Damase (1).
Il est inutile sans doute d’ajouter, en finissant , que nos
observations n’affaiblissent point les preuves de M. Raep-
saet en faveur du père de Pépin-le-Bref.
Note sur Antoine Sanderus, par M. le baron Jules de
St-Genois, correspondant de l'académie.
Il n’y eut pas, au XVII: siècle, chez nous, d'écrivain
plus fécond que Sanderus, le célèbre historiographe. On a
lieu de s'étonner du grand nombre d'ouvrages qu'il nous a
laissés depuis l'an 1608 qu'il entra dans la carrière, jus-
qu’à 1664, époque de sa mort. On sait que cette quantité
prodigieuse décrits, tout en favorisant sa réputation de
savant, nuisit considérablement à sa fortune. La plupart
des biographes de cet auteur vont même jusqu’à dire que
ses publications géographiques le ruinèrent si compléte-
ment, qu'il dut être accueilli par commisération , dans sa
L
(1) Hic presbyteris ecclesias divisit et cæmeteria, parochiasque et
diœceses constituit.
( 135 )
vieillesse, par les moines d'Affligem. Bien qu'il eût hérité
de ses parens un honnête patrimoine et qu’il eût été investi
de fonctions lucralives, on conçoit que le grand nombre
de planches dont il enrichit sa Flandria illustrata, etc.,
lui ait occasionné des dépenses hors de proportion avec
ses ressources. Et cependant les gratifications et les encou-
ragemens pécuniaires ne manquérenl point à ce laborieux
historien. M. J. Ketele a publié, dans le Messager des
sciences et des arts (1), quelques documens curieux, qui
prouvent que Sanderus avait grand tort d'accuser ses com-
patriotes d’indifférence à son égard. Nous y voyons que le
magistrat d’Audenarde , ayant reçu le premier volume de
sa Flandria illustrata avec la demande d’une gratifica-
tion , répondit à cette gracieuseté intéressée, en lui en-
voyant une somme de 72 liv. tourn. (36 f.), ce qui était
beaucoup pour cette époque; et nous ferons remarquer ici
qu'aujourd'hui la lésinerie de nos budgets municipaux
pourrait recevoir des leçons de la libéralité dont ces éche-
vins d’une petite ville de province donnaient un si écla-
tant témoignage, en 1642.
Paquot (1) est surpris que les États de Flandre ne soient
point venus au secours de Sanderus, qui s’épuisait en frais
de gravure et d'impression, pour élever un beau monu-
ment à sa patrie. M. Ketele attribue aux embarras de la
guerre d'alors celle prétendue insousiance. Les notes que
nous allons publier défendent suffisamment les États du .
reproche que leur fait le bibliographe susmentionné. Dans
(1) Année 1838, t, VI, pp. 144 seqq.
(2) Mémoires pour servir à l'histoire littéraire des XVII provinces,
XV1,366, in-8o.
( 136 )
les registres des résolutions des Etats de Flandre (1), nous
lisons :
ACTUM DEN XXVIII NOVEMBER 1641.
Eodem gedepescheert ordonnance op Cobbaert voor den heere
Sanderus, canonik , tot Fpre, van de somme van hondert pon-
den groten, ende dat in recompense van de diensten ende moeyte
by den selven ghedaen int maeken van eenen bouck ghenaempt
Flandria illustrata.
(Le même jour dépêché une ordonnance sur Cobbaert,
pour le sieur Sanderus, chanoine, à Ypre, d’une somme
de 100 liv. de gros, el cela en récompense de ses services
et des peines qu'il s’est données dans la confection d’un
livre inlilulé Flandria illustrata.)
Malgré les grandes sommes dont on avait besoin en ce
moment pour soutenir une guerre longue et difficile, on
voit que les États de Flandre savaient encore trouver le
moyen de récompenser dignement les talens et la science;
100 livres de gros (600 À.) étaient à cette époque une grati-
fication considérable, et Sanderus n'avait certes aueun
droit de se plaindre de la générosité de ses concitoyens.
Au reste, cet écrivain n’est pas le seul qui ait obtenu
des encouragemens pécuniaires des États; dans un autre
registre des résolulions, du même corps (2), nous trou-
yons qu'ils accordérent , le 4 janvier 1648, une somme de
50 florins, à Antoine Vinckaert pour la transcription de
(1) Voyez le registre commençant au 18 février 1641 et finissant au
18 juillet 1642, fol. 107, déposé aux arch. de la Flandre orientale,
(2) Commençant au 18 décembre 1645 et finissant au 31 juillet 1648,
fol. 221.
( 137 )
ce qui s'était passé dans la dernière campagne (1641-1648),
et une somme de 20 florins à N. Roelants, à Ypre, pour
ayoir envoyé à l’assemblée quelques cartes figuratives des
villes assiégées.
Le même jour notre Sanderus reçut aussi une deuxième
gratification. Voici ce que nous lisons (1):
Ende an heer ende Mr. Antoine Sanderus over een bouxken
an de vergaderynghe ghepresenteert, gheïntituleert OsiAnver
Sruanus Bezca , 50 guldens op de voorseyde gratuytyten.
(A sieur et maître Antoine Sanderus, pour un livre pré-
senté à l'assemblée et intitulé Osiander Stuanus (2)
Belga, 50 florins sur les gratuités).
Cette fois il s’agit d’un livre fort insignifiant, mais l’on
s’aperçoil que la gratification est donnée moins à cause du
mérite de l'ouvrage qu’à cause de la grande réputation de
l’auteur.
Si l’on devait parcourir les résolutions des États de Bra-
bant, nous sommes persuadé que l’auteur de la Choro-
graphia sacra Brabantie n'y fut point oublié parmi
ceux qui avaient droit à des subsides pécuniaires.
En publiant ces détails, notre intention a été d’empé-
cher qu’on reprochât plus long-temps au pouvoir d’alors
d’être insoucieux des gloires littéraires et scientifiques du
pays.
Ces particularités de peu d'intérêt en apparence, servent
cependant à faire ressortir l'esprit dirigeant de l’époque à
(1) Zbid.
(2) Ce nom bizarre n’est autre que l’anagramme d’Antoine Sanderus.
Voyez Paqnot, t XVI, p. 380.
( 138 )
laquelle elles se rapportent. Des encouragemens de cette
espèce , accordés si libéralement au XVII: siècle, par les
États d’une province et les magistrats d’une ville, méritent
d’être signalés aujourd’hui que cet exemple est si peu
suivi. Aussi dirons-nous que si Sanderus était un savant
historien, les États de Flandre surent à leur tour remplir
dignement leur rôle de Mécène.
Ambassade extraordinaire envoyée par Jacques K*, roi
de la Grande-Bretagne, à l'archiduc Albert, pour
demander justice contre Erycius Puteanus, par M. Ga-
chard , correspondant de l'académie.
Bayle , dans l’article qu’il a consacré à Erycius Putea-
nus, l’un des hommes les plus savans de la Belgique au
X VIT: siècle, et le successeur de Juste-Lipse dans la chaire
que cet illustre professeur avait occupée avec tant de gloire
à l’université de Louvain, parle d’une satire contre Jac-
ques I, roi d'Angleterre, qui lui fut attribuée. Cette
satire, qui portait pour titre : /saaci Casauboni Co-
rona reqia , id est, Panegyrici cujusdam verè aurei ,
quem Jacobo 1, Magnæ Britanniæ regi, fidei defensori,
delinearat , fragmenta ab Euphormione inter schedas
inventa , elc., fit beaucoup de bruit à l'époque où elle
parut ; on n’en sera point étonné : le règne de Henri VIII,
l'origine et le célibat de la reine Élisabeth, et surtout la
naissance et les actions de Jacques, y étaient attaqués dans
des discours empreints d'autant de ficl que de malice-
(139 )
Bayle rapporte , d'aprés un autre critique (1), que le roi
de la Grande-Bretagne, sy voyant dépeint avec des cou-
leurs si noires, obtint de ses alliés que l’on fit une re-
cherche exacte de l’auteur pour le punir , el que, quelque
soupçon étant tombé sur Erycius Puteanus, l'archiduc
Albert fit informer contre lui.
Mais ce que ne disent ni Bayle, ni les autres biogra-
phes de Puteanus, c’est que Jacques I® le désigna nomina-
tivement à l’archiduc comme l’auteur du libelle où il était
déchiré d’une manière aussi sanglante, et qu'il envoya
un ambassadeur extraordinaire à ce prince, pour deman-
der justice contre le professeur de Louvain. La preuve de
ces deux faits existe dans la lettre suivante, du roi à l’ar-
chiduc, que j'ai trouvée en original (non sans surprise)
dans un volume de correspondances diplomatiques (2), au
dépôt des affaires étrangères, à Paris :
« Monsieur mon frère et cousin, nous envoyons vers
» vous le chevalier Benet , docteur en droit et juge de la
» cour de nostre prérogative, et chancelier de la royne
» nostre trés chère compagne, en qualité de nostre am-
» bassadeur, pour vous demander justice contre la per-
» sonne d'Iriceus Puteanus, professeur.en vostre université
» de Louvain, pour le libelle diffamatoire qu'il a osé es-
» crire et publier contre nous, intitulé : Zsaaci Casauboni
» Corona regia, par lequel il s’est eflorcé maliciceuse-
» ment et calomnieusement de flestrir l'honneur de nostre
» réputalion, Qui estant une licence indigne et intolérable
(1) Bullart, Académie des sciences et des arts , contenant les vies des
hommes illustres. Amsterdam , 1682, ou Bruxelles, 1695, 2 vol. in-fol,
(2) Ce volume est intitulé Pays-Bas, 1601 à 1615.
( 140 )
» à l’endroict d'un prince, nous nous promettons qu’en
» cela, vous nous ferez avoir telle raison qu'il appartient,
» non seulement pour le respect de nostre qualité et de
» la bonne amitié qui est entre noz couronnes et voz pro-
» vinces, mais aussy mesmes pour l'amour de la justice
» qui est due à tous : en quoy, comme vous nous donne-
» rez tesmoignage particulier de vosire bienveillance,
» aussi vous obligerez réciproquement la nostre envers
» vous, et nous serons presis à vous en faire paroistre les
» effects, quand l’occasion se présentera, ainsy que nous
» avons chargé nostre ambassadeur de vous fayre plus
» particulièrement entendre de bouche ,auquel nous vous
» prions de donner audience gracieuse, et toute créance
» en ce qu'il vous dira et proposera de nostre part. Ainsy
» nous prions Dieu, monsieur mon frère et cousin, de
» vous tenir en sa saincte et digne garde. De nostre palais
» de Westminster, le 20° de mars l’an 1616.
« Vostre très affectionné cousin et frère,
« JAGQuES , R. »
La superscription : 4 Monsieur mon frère et cousin l'ar-
chiduc Albert d'Autriche.
Il fallait certainement que Jacques I attachât une
grande importance à la découverte et à la punition du li-
belliste qui l'avait offensé , pour envoyer dans ce seul but
un ambassadeur extraordinaire à Bruxelles. Au reste, l’in-
nocence d'Erycius Puteanus fut reconnue , heureusement
pour lui, car le roi Jacques n’était pas homme à lui par-
donner, et ce monarque vindicatif l'aurait poursuivi avec
(141)
le même acharnement qu'il montra contre Vorstius , pro-
fesseur à l’université de Leyde, que les états-généraux se
virent obligés d'éloigner de sa chaire , uniquement parce
qu'il était arminien , et que celle secte élait en horreur à
Sa Majesté Britannique.
Condamnation et exécution d’un pourceau , note com-
muniquée par M. Gachard , correspondant de l'académie.
Une des singularités qu'offre l'histoire de la justice cri-
minelle au moyen âge, ce sont les procédures dirigées
contre les animaux coupables de quelque méfait. J'ai cité,
dans les Ænalectes Belgiques(1), d'après dom Martène,
une sentence du 16 mai 1499, par laquelle un taureau
était condamné , dans le diocèse de Beauvais , à être pendu
aux fourches patibulaires , pour avoir « par furiosité,
» estant aux champs, occis et mis à mort un joine filz
» de l’âge de quatorze à quinze ans.» ; j'y ai fait aussi men-
tion d’un acte du 22 septembre 1486, dont j'avais vu l’o-
riginal aux archives de Lille, et qui certifiait l'exécution
faite, à Bailleul, par la main du bourreau d'Ypres, d'un
pourceau qui avait « meurtri et mangé un enfant. »
Dans mes recherches récentes aux archives de Dijon , un
document du même genre m'est tombé sous les yeux : ce
sont des lettres de Nicolas le Jaul, lieutenant-général du
bailliage de Mâcon , en date du 18 septembre 1474, con-
tenant mandement au receveur du Mâàconnais de payer
au prévôt de Mâcon soixante sols lournois « pour ses
EL LE 2 De ASE ES
(1) Page 62.
( 142 )
» peines et salaires d’avoir fait mettre à exécution cer-
» taine sentence criminelle donnée à l'encontre d’un
» pourceaul, lequel avoit tué ung enffant en la ville dudit
» Mascon, en l'ostel de Jehan Fargnet , lequel pourceaul
» pour ledit cas a esté pendu audit Mascon à nne potence
» qui, pour ce faire, a esté faicte toute neufve.» Le lieu-
tenant-général du bailliage ordonne aussi le paiement des
frais qu’a coûté la construction de la potence, et, en outre,
« de dix solz tournois pour une eschielle pour ledit gibet,
» de trois toises et demie, et pour une polye pour tirer
» au gibet ledit pourceaul. »
GÉOGRAPHIE ANCIENNE.
Recherches sur la position des nivirenses, peuple dont
il est fait mention dans des inscriptions latines et
dans d’autres monumens historiques du temps de
l’empire ; par M. Roulez, membre de l'académie,
On trouva, il y a quelques années , dans les environs de
Mayence, une inscription sépulcrale consacrée à la mé-
moire de Togius Statutus, soldat du corps des éclaireurs
Divitenses (1); elle a élé récemment l’objet d’un savant
(1) Elle est publiée dans le Quartalschrift des Mainzer Kunstvereins.
Année 1831, cah. 2, p. 49, ainsi que dans le Codex inscriptionum
Eomanar. Rhenti, de Steiner, n° 434, Je la reproduis ici avec les restitu-
tions de M. Osann. D. M. || TOGIO. STAT || VTO. MILITI. || NVMERI.
EXPL |] ORATORVIM || DIVITIESIVM || ANTONINIA || NORVM. STIP || EN-
DIORVM || XVIII. TOGIA || FAVENTINA || SOROR ET || HERES || FrATRI
[| camissrMO || F. sur ascra.
( 143)
commentaire (1) de la part d’un philologue distingué de
l'Allemagne, le célèbre éditeur de la Sylloge inscriptio-
num Græcarum et Latinarum. Un seul des points impor-
tans de cette inscription doit nous occuper ici, c'est le mot
Divitiesium {au lieu de Divitiensium). M. Osann cite
deux passages d'Ammien Marcellin (2) dans lesquels ces
mêmes Divitenses (3) sont mentionnés conjointement avec
les Tungritani, de façon à paraître ne former qu’un seul
corps de troupes. La circonstance d’une pareille réunion
et, en outre, la teneur du second de ces textes, ont amené
le savant professeur de Giessen à penser que ces deux peu-
ples étaient voisins l’un de l’autre. Or, comme le mot
Tungritani (d'autres écrivent Tungricani) ne semble
être qu’une autre forme de Tungri, il en tire la conclu-
sion que les Divitenses habitaient près des Tongrois dans
la province de Liége, ajoutant qu'il est obligé de laisser aux
géographes du pays la recherche et l'indication plus pré-
cise de la localité. J’eusse désiré pouvoir justifier et com-
pléter l'opinion de M. Osann, mais c'est en vain que j'ai
cherché dans la province de Liége et dans les provinces
limitrophes, un endroit qui rappelât le nom des Divitenses,
et je doute qu’un autre soit plus heureux que moi, parce
qu'à mon avis ce n’est pas chez nous qu'a habité ce peu-
ple. Le nom de Divitenses se rencontre encore dans deux
autres inscriptions trouvées à Cologne, et qui remontent
(1) Dans le Zeitschrift für die Alterthumswissenschaft de Zimmer-
mann, 1838 , n° 64, pag. 523 et suiv.
(2) XXVL, 6. et XXVIE, 1.
(3) Je regarde Divitienses, Divitenses , Ditenses, comme des variantes
d’un même nom.
( 144 )
à l'époque de Constantin-le-Grand. Dans la première (1),
on lit: Milites castri Divitensium ; V'autre (2) porte :
Constantinus Pius Romanorum imperator Augqustus,
devictis Francis castris Ditensium in terris eorum fieri
jussit , etc. Or, vis-à-vis de Cologne , sur la rive droite du
Rhin (et c'est précisément là que paraît avoir été déterrée
celte dernière inscription ) est située la petite ville de
Deutz, Dorticum, appelée aussi Munimentum Divitense;
il devient donc probable que là était l'emplacement des
Divitenses (3).
La notice des dignités de l'empire fait aussi mention
\ /
des Divitenses en deux endroits différens. Premièrement
elle (4) cite une légion de Divitenses Gallicani, sous
les ordres du magister militum per Thracias; ensuite (5)
elle nomme parmi les douze légions palatines, sous le
commandement du mnagister peditum præsentalis, en
occident , une légion de Divitenses seniores, et une autre
de Tungricani seniores. Les commentateurs de la No-
(1) Voy. Gelenius, De magnitudine Coloniæ, p.84. Huepsch, Epigram-
matoyraphie, pag. 11. 31; Orelli, Znscript. Lat. sel. ampl. collectio,
vol. 1, p. 239, n° 1085 ; Steiner : Cod. inscr. Rom. Rhent, P.I, p. 110,
no 858.
(2) Voy. Donati Suplem. ad Muratorii inscr. IL, p.220 , 5; Saxii Mis-
cellan. 4, p. 33; Orelli, /oc. cüt., p. 240, n° 1086 ; Steiner, Loc. cüt.,
p. 1, no 859.
(3) Voy. Steiner, loc. cit., P.I, p. 266.
(4) Notitia dignitatum imperit, p. 1479 de l'édition contenue dans
le tom. VIL du Thesaur. antig. Rom. de Grævius. — Les Divitenses re-
çoivent ici le surnom de Gallicani, à cause de leur séjour antérieur
dans les Gaules. Il est à observer que les Dévitenses dont parle le pre-
mier des passages précités d’Ammien Marcellin, se trouvent égale-
ment dans la Thrace.
(5) P. 1822.
( 145 )
tice (1) font dériver le nom de Divitenses de Divetum ,
ville de Sicile. Si cela était vrai, il faut avouer que nous
aurions lieu de nous étonner de cette réunion presque
constante des Divitenses avec les Tongricani. Un autre
passage de la Notice servira peut-être à jeter quelque jour
sur cette question. Nous y (2) trouvons dans la liste des
troupes à la disposition du dux Daciæ ripensis,un Cuneus
equitum Dalmatarum Divitensium Dortico. Je remar-
querai d’abord que je ne saurais parlager l'avis des com-
mentateurs, qui pensent que les Divitenses reçurent le
surnom de Dalmatæ, pour avoir eu auparavant leurs can-
tonnemens dans la Dalmatie. Je crois qu'il s’agit au con-
traire de Dalmates qui furent surnommés Divitenses, à
cause qu'ils avaient stalionné dans.le pays de ces derniers.
Mais ce passage renferme une difficulté réelle, qu'on n’a
pas essayé d’aplanir, quoiqu’elle ne paraisse pas être de-
meurée inaperçue. À en juger par ce qui précède et par ce
qui suit, lesens de la phrase doit’ être qu’un corps de ca-
valiers Dalmatæ-Divitenses se trouvait placé à Dortiewm.
Or comment s'expliquer que des troupes en station à Deutz
fussent sous les ordres d’un commandant militaire dé. la
Dacie, Je soupçonne que Dortico.est une glose du mot
Divitenses , laquelle aura: fait disparaître le nom de la
station de ce corps de cavalerie et:en aura-usurpé la place.
Ce rapprochement des mots Divitenses et Dorticum, vient
donc confirmer pleinement l'opinion, déjà vraisemblable,
d’ailleurs , que le peuple de ce.nom avait:sa demeure sur
la rive droite du Rhin, et dans cette hypothèse son éloi-
(1) P.:1483.et 1826.
(2) P. 1757.
Tom. vi. 10
( 146 )
gnement du pays des Tongrois, n’est pas si grand qu'on
ne puisse les regarder comme voisins.
Nous revenons maintenant au second des deux passages
précités d'Ammien Marcellin, parce qu'il a suggéré à
M. Osann une autre conjecture qui a droit d'intéresser
notre pays. L'historien y parle d’une invasion des Æla-
manni dans les Gaules , sous les empereurs Constance et
Valens, invasion que tenta d'arrêter Charietton, per utram-
que Germaniam comes... adscito in societatem laboris
Severiano , itidem comite invalido et longævo, qui apud
Calidona Divitensibus præsidebat et Tungricanis. Le
verbe præsidebat offre un sens équivoque. En effet, on
peut dire que Severianus commandait un corps de troupes
composé de soldats de Deutz et de Tongres. Au contraire
l'on peut prélendre aussi qu'il se trouvait à la tête de
troupes deslinées à maintenir dans l’obéissance les Divi-
tenses el les Tongrois. M. Osann (1) adoptant celle seconde
interprélalion, et rapprochant Calidon de l'adjectif ca-
lidus , soupçonne que cet endroit inconnu était situé sur
l'emplacement du village de Chaufontaine , province de
Liége. Sans approuver ni rejeter l'hypothèse du savant pro-
fesseur allemand, je me bornerai à faire observer qu'Ha-
drien de Valois et Wagner (2) n’entendent pas seulement
præsidebat dans le sens d’un commandement militaire ,
mais remplacent encore Calidona par la variante Cabi-
lona , nom de Chàlons-sur-Saône. Leur opinion ne paraîtra
nullement dénuée de vraisemblance si l’on fait attention
que les Æ{lamanni avaient déjà franchi les frontières de
(1) Loc. cit., p. 525.
(2) Ad Ammnian. Marcellini. lib. XXVIT, C.1, t. LIL, p. 170, ed.
Wagner et Erfurdt.
( 147 )
la Gaule, et que rien n’oblige à croire que Severianus fût,
comme Charietton, comes per utramque Germaniam ,
plutôt que comes per Gallias.
M. le directeur, en levant la séance, a fixé l’époque de
la prochaine réunion au samedi 2 mars.
OUVRAGES PRÉSENTÉS.
Nouveaux Mémoires de l’Académie royale de Bru-
æelles, tom. XI, in-4°, 1839.
Bulletins de l’Académie, tom. V (1838), in-8°.
Annuaire de l’Académie pour 1839, 1 vol. in-18, 1839.
Faits et vues détachés sur certains points de théorie
chimique, etc. Feuilles 15 et 16. Par M. Van Mons.
Huit jours à Newcastle en 1838. Par Ch. Morren,
broch. in-12.
Compte-rendu des séances de la commission royale
d'histoire. Tome LIL, I bulletin. Bruxelles, 1838. Broch.
in-8°.
Traité complet sur les causes d’explosion de machines
et chaudières à vapeur. Par Désiré Tack. Bruxelles, 1839.
1 vol. in-8&°.
Essai sur la vie et les ouvrages du baron de V'illen-
fagne. Par Ferd. Henaux. Gand , 1838. Broch. in-8e.
Cours élémentaire de prononciation, de lecture à haute
voix et de récitation, par un professeur. 2° édilion. Tour-
nai, 1839. 1 vol. in-8v. De la part de M. Fréd. Hennebert.
Annales et bulletin de lu société de médecine de Gand.
Année 1838 , 4° vol., 12° liv. (Décembre). — Année 1839,
5° vol.; 1° Liv, (Janvier). Gand, 2 broch. in-8°.
( 148 )
Comptes-rendus des séances de l'académie des seien-
ces de Paris. 2°.sem. 1838, n° 22-27. 19 sem. 1839, n° 1:
à 5. — Tables alphabétiques du. 1° sem. 1838: Paris,
9 broch. in-&.
Bulletin de la société géologique de France. Tome IX:,
feuilles 23-27. 1837 à 1838. Paris, broch. in-&.
Journal de la sociète de la morale chrétienne. Tome
XIV , n° 6. Paris, 1838. Broch, in-8°.
Compte rendu des travaux de la société philotechni-
que, par le Bet de Ladoucette, secr. perp. Séance du 23
décembre 1838. Paris, 1839. Broch. in-8°.
Institution of civil engineers : Transactions, vol. IL.
— Minutes of proceedings, 1838. — Annual report, ses-
sion 1838. London, 1: vol. in-4° (1838) et 2 broch. in-8e.
Report of a. Joint Committee of. Physics and .Meteo-
rology, elc., broch. in-8. De la part de, la société royale
de Londres.
Ricerche sul termo - elettricismo dinamico e luci-
magnetico ed elettrico di Francesco Zantedeschi. Milano,
1838, 1 vol. in-8.
Recherches historiques et bibliographiques sur la bi-
bliothèque de l’université et de la ville de, Gand, par
Aug. Voisin, Gand, 1839. Broch. in-8°.
Belgisch museum, uitgegeven door J. F. Wüllems. 2°
deel. — 4° aflevering. Gent. Broch,. in-82.
*S graven raedkamer van Vlaenderen, onder een
geschiedkundig oogpunt beschouwd, by haer, eerste.tyd-
perk, 1385-1409, door D.J. Van der Meersch. Gent; 1838.
1 vol. in-8e..
BULLETIN
DE
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES
ET BELLES-LETTRES DE BRUXELLES.
1839. — No 3.
Séance du 2? mars.
M. De Gerlache, directeur.
M. Quetelet , secrétaire-perpétuel.
CORRESPONDANCE.
M. Hensmans fils, docteur en médecine et en pharma-
cie, adresse à l'académie une note sur un principe cris-
tallisable, trouvé dans l'écorce de la racine du peuplier
de Canada. M. Van Mons est invité à faire un rapport sur
celle communicalion.
— M. De Koninck fait parvenir à l'académie un paquet
cacheté pour être déposé dans les archives, jusqu’à ce qu’il
ait terminé an mémoire qu’il compose sur des recher-
ches chimiques pour lesquelles il désire prendre date.
— M. Phillips envoie le manuscrit d'un ouvrage inti-
tulé : Anatomie du cheval, dont il demande le renvoi à
une commission de l'académie. Commissaires : MM. Mor-
ren, Cantraine et Wesmael.
Tom. vr. 11
(150 )
— M. Van de Cotte fait hommage d’une note manuscrite
sur les moyens de transformer toutes sortes de figures en
pentagones équilatéraux.
— M. J. Wilkens-Remy demande qu'on examine un
ouvrage de sa composition sur la quadrature du cercle.
Cet ouvrage étant imprimé , l'académie ne peut accéder
aux désirs de l’auteur.
— M. Kickx, membre de l'académie, écrit que le jour-
nal anglais : « Ænnals of natural history or magazine
of zoology, botany and geology » contient dans son nu-
méro de mai 1838, pag. 208-210, un mémoire intitulé :
On a new species of epilobium nearly allied to E. An-
gustissimum and Rosmarinifolium, by W. H. White.
Ce mémoire dont M. White a donné lecture dans la
séance de la société botanique de Londres, le 2 mars
1838, est une traduction littérale, sans aucune addition
ni-changement quelconque, d’une notice que l’acadé-
mie a publiée dans son bulletin du mois de novembre
1886, et dont l’auteur est M. G. D. Westendorp, médecin
de l'armée belge.
RAPPORTS.
— L'académie, après avoir entendu l'avis de ses com-
missaires, chargés de l'examen du mémoire présenté par
M. Morren à la dernière séance, sur le mouvement et
l'anatomie du style du Goldfussia anisophylla , a or-
donné l'impression de ce travail dans le recueil de ses
mémoires.
(Fo)
— MM. Willems, Cornelissen et le chanoine De Smet,
font ensuite leur rapport sur le travail manuscrit présenté
par M. Ed. Smits, à la séance du 2 janvier, sous le titre,
Mémoire sur la langue Belgique ; et, sur les conclusions
de ses commissaires , l'académie décide que des remerci-
mens seront adressés à l’auteur pour sa communication.
LECTURES ET COMMUNICATIONS.
Sur la transformation de quelques fonctions imagi-
naires , par J.-G. Garnier, professeur émérite et membre
de l'académie.
Si l’on désigne par À un nombre entier quelconque
et par 7 une demi-circonférence d’un rayon égal à l'unité,
on sait que
: 2hry/ 35
— cos. 247 + sin. 247. V/—1 —e +
d'où résulte
Dkry/ —
n sh ar Le Ge
VI=lr—=cos. — Esin.—y/—1—=e ? . (a)
L1/ n
Soient, en premier lieu, n—2, puis k=o,k=1, et
on aura
+1, 17 ——1.
Faisons encore n—3 , puis 4—0, k—1,et on aura
L 1 27 27
Lt L= cos, — Æsin.— | |
) »»
(: 152:)
d’où résultent les trois racines cubiques de l'unité, dont
deux sont imaginaires. Occupons-nous de la digression
des valeurs'de À : on observera qu'on doit toujours prendre
2k
k de manière que —— n'excède pas l'unité, ou que k soit au
plus égal à =, où a —, suivant que à sera pair ou im-
pair. Par exemple, pour n—6, on posera 4=0o, =1,
—2, —3, valeurs auxquelles répondent six racines dont
les extrêmes sont + 1 et — 1, et les quatre autres inter-
médiaires sont imaginaires. Pour »—7, on ira jusqu'à
n—1
k =
six autres racines imaginaires. Pour »—8, on aura
—_=3, et il en résultera la racine réelle + 1 et
re)
k—; — 4, et on observera qu'aux valeurs extrêmes £—0
et k— }, répondent les racines + 1 et — 1; qu'à 4—2
répondent deux racines imaginaires sans terme réel et
qu’à chacune des deux autres valeurs de À correspondent
des imaginaires complètes.
On aurait aussi, d’après (a),
2 kz 2kz me
17 — (cos. LE sin. = ei)
n n
S]3
9 kr 2%
— COS. F2 + sin. ins y —1
n ñn
2e dr
be) ain. — LL. 4 00e)
n n
en posant 24m — f.
Supposons qu'il s'agisse d'élever la quantité positive a
à la puissance fraclionnaire *, on écrira :
m my kr kr. y/— I
— ñn n
a"=Va"+y/1=a" nos Er SENTE S
n ñ
M ;. 9kLol
n
ZT CES. +. UNIS
( 153 )
On a, en second lieu,
—1—= cos. (24+1)7 + sin. (24+1)r4y/—1,
d’où résulte :
2 Q@A+I)z | (Cé+Dr V1
1) —0c05. NE + sin (b)
n
m LA m
En partant de (— 1} —y/(—1), et observant que le
cas de m pair rentre dans le précédent, on n'aura à con-
sidérer que celui de » impair ou de la forme 2m +1, qui
donne
(2%+1)(2m'+1 x, ar (2441)(2m#1)r V1
n n
dk +1 9% +1)7r.y/—1
FE Cr+1) + "sin. @F+l)rl
n n
(—1)" = cos.
- @)
qui rentre dans (b).
Pour n — 5, on ferait dans (b) k—0, k—1,k—2, et
on aurait ‘
V/—1—= cos. 5 sin. et ,VW=1 — cos. + sin. I
5 57
—1— cos. — —— I.
V cos 5
Pour n—6 , on pourrait encore poser k—0, —1, 7,
et on aurait les résultats
PES NE: _ 6 87 . 87
Mein e —Æ sin. V/—1; hp 008: +sin. —V—1
GE" 5r
5
V—1 FOND E sin, —. V—1.
( 154 }
On a donc :
CR AVES
m. 2%+1 2 1
— a" a Ga Es PEER . _ 4 a
n (b’”)
ou
m n mn m 2%+1 )n 2k+1)m
am V/(—1) =a" A
ñn ñn
Passons à quelques autres fonctions imaginaires. Des
formules connues
NA 78/2 PAR RU ee
Hits —€ A4 + € z
7
SIDE CDs. 7 —=
2 —1 2
on déduit, en changeant x en xy/ — 1,
—T +% —T +7
sin. cos. a/—1—" = (c}
en sorte que la propriété
sin, 25 — 92 sin. cos. t,
qui suppose la suivante sin. (a + b) — sin. a cos. b +
sin. b cos. a, a lieu pour un arc imaginaire æ}/—1 ; car,
d’après les formules (c), on aurait
—2r +97
e =
;
2-1 Fete
2 sin. (ay/—1) X cos. (ap/—1) = ch
sin. (22}/—1) =
LV
( 155 )
On aurait aussi
sin. [(2+y)y/—1]= sin. (2}/—1) cos. (yy/—1) |
+ sin. (yy/—1l)cos.(xp/—1) ;
ART CPAS EME ne
Si, dans la formule
. (ce)
zT
ra 1 ’ é +y/—1. tang. à
2 —1 DEEE ar
. - - LA - Ls La
où / indique un logarithme népérien, on fait x — et
qu’on observe que tang. ?— , on aura
Si, dans la formule
7V/—1 _ (
aV/—1 = (cos. x + sin.zy/—1),
on fait r—7, ou aura
zV/—1 = l(—1),
ce qui vérifie la propriété (d). On en conclut encore
(2 + 1) 7 —1 = (—1).
Donc , à cause de —a—ax—1,ona
l(—a) = la + (2k + 1)7y/—1,
formule qui rentre dans (b”’), en faisant dans celle-ci
m=n=1 et remplaçant cos. (2441) r+ sin. (24+1)7y/—1
par e24+1) 7/1.
(156)
Soil actuellement Z (a+ by/—1), { indiquant tou-
jours un logarithme népérien. En faisant
Va + —k, cos. =, sin. =="
on à
D bios. x vin. 1/0 ONE
donc
L(a + by — 1) —I& + l (cos. 3 + sin. z/ — 1)
Pt UE | 0 00
On pourra prendre au lieu de l'arc z, les arcs
Dr HS, Ar + 3..... Qnr +3,
ñn étant un nombre entier, en sorte que
Ia + by/—1) = + (Our + 5) V—1 . fr)
Soit , en second lieu (a + b/—1)* + V— 1: on sait
que
La HT TS MG te 7) (LR EE
EE) GE)
d’où en repassant des logarithmes aux nombres ,
PR OUR arr
Si l’on substitue dans le second membre pour
L(a Eby/—1) sa valeur ci-dessus (f°), savoir /k + 2/—1,
( 157 )
il en résultera
dr" + EV/—1 ant (a+ —L (Uk + zy/—1}
(alk — €z) + (as + 6lk) V/—1
— €
(alk— 6) HE(as+ CIk)/—1
—=e€ x e
lc
“4 9) [cos. (as + 61h) + sin. (2:+@k)/—1], (g)
qui revient à
4 zy/—1 à pu Il (alk—6z) Æ(az+6lk)y/—1 (g')
ke —e xe
en vertu de (f). Posant maintenant
( D RES) a LE /—1
_ke — 11e
,
on aura , en comparant,
Wr= alk — Cr, o—=as + Elk. . . . . (g”)
équations qui renferment l’une des solutions de la pro-
posée A°—C, À, Bet C étant des fonctions imaginaires.
On en trouvera le complément dans une note de M. Pa-
gani, lue à l'académie, le 7 octobre 1837, et insérée
dans le tome XI des Nouveaux Mémoires.
Faisons une dernière application. En posant £—0 et
changeant « en m , la formule (g) devient
me 2
(a+by/—1) 267 1 (cos. mx + sin. mz}/—1)
m
= (a +b°)? (cos. mz + sin. ms V/—1).
( 158 )
Extrayant de part et d'autre la racine »?, on obtiendra
(a+by/—1}x RE 0! ==) Ji (cos. 2e sin. y —1) . (k)
Qu'on ait à extraire
3
V/—10 + 9y/3/—1 ;
on à
a — 100, b°—243, a° + b—343,
3 6
Va +b=17, Va +b: 1/73
donc
3 ;
V—10+9) 87 —1 — 7 cos. 5 + sin. à el )
élevant au cube de part et d’autre, il vient
—10+9V/81/—1 —77 [cos S— 3cos. 5 sin.” =
(s Hansen nn 1 | k"'}
cos.” DRE _ Maé vi
donc, en égalant les termes réels de (#'),
, % 8 3 . , 2 #10
cos. Yet cos. : sin. Tage
d'où
ñ É a z 10
cos. — — B COS. = = ——:
AT
Posant
cos.
DJS
( 159 )
la précédente se iransformera dans celle-ci
MONS Pr + 10 INK 7 — 0,
dont les diviseurs commensurables sont
22N4X71—0, SxXT—=0,2+2X 5 X 7—=0;
on a donc
Z 2 z l z 5
cos. 3 hr? 8 — 2/7" cos 3 7
Égalant encore dans (4) les coefficiens de }/—1, on aura
9/3
8 COS. * = X sin, PAGE A a 146)
3 3 7 77
qui donne les trois valeurs de sin. z, correspondantes à
celles de cosinus, savoir :
on aura donc ces trois valeurs de la racine cubique (4),
savoir :
V 10-+91/37 —1 | IS
l 31/3 LA
V” 10+9y/37/—1 | 7 nt 3 ns ELA
om 1] — RATE 1e 7
(160 )
C'est par des procédés analogues que Pelambre est
parvenu à cette série
EX D; RUE
B— - sin.C + —— sin. 2C + —-: sin. 8C + etc.
a 2a° 3a°
a et b étant deux côtés d’un triangle rectiligne , G l'angle
compris et B l'angle opposé à b : série d'autant plus con-
vergente que b est plus petit par rapport à a.
n n
On observera 1° que les valeurs de y/1 et ÿ/—1 sont les
racines des équations binomes z°— 1—o et x" + 1=—=0;
2° que les formules
V2 DJ | 2k+1
—] —cos, ss) 7 + Sin. bare rV/—1,
1 V2
—1 —=cos.(24+1)ry/2+sin.(2+1)ry2y/—1,
ne fourniront que des racines imaginaires ; 3° que le pro-
duit Va x vb étant V'ab, et chacune des racines Va et
b admettant m valeurs, on pourrait croire que V'ab
doit admettre » X» ou »° valeurs. Pour lever cette dif-
m m
ficulté, désignons par « et € les racines Va, Vb, en
sorte que É
" 2k7 2k7
LE a (cos. UE sin et V—1) ÿ
mn m
ma 2k'7 . 2x
D = € ( cos. + sin. Ty—1),
m 1/12
le produit donnera
ge 2(k+k 2(k+k à
V/ab = ax6| cos. — he Æ sin. ol) r.V— 1) ,
c m
m
= «af chères
( 161 )
or, m étant pair, les plus grandes valeurs de Æ et # sont
— en sorte que la plus grande valeur de 4+#' est m5
mais aux valeurs de 4 +’ de jusqu'à m , répondent
celles qui ont lieu dé o à =: ainsi le produit ne peut ad-
mettre que 2=— m racines : Ce io ot aurait lieu
pour m impair ; 4 que, pour multiplier V1 par V—1,
il faut réduire le second radical à l'indice 4, ce qui don-
nera VAT = V1; ; et dés lors les quatre valeurs de VI ;
multipliées chacune QE les deux valeurs de p/—1, se
réduisent à celle de V1. Il y aurait lieu à d’autres remar-
ques que nous omettrons pour ne pes allonger cette note.
ÉLECTRICITÉ.
M. le professeur Martens, membre de l’Académie, pré-
sente un mémoire manuscrit de sa composition sur la
pile galvanique et sur la maniere dont elle opère les
décompositions des corps. Les principales conclusions
auxquelles l’auteur est parvenu sont les suivantes :
1° Le développement de l'électricité dans les piles doit
être attribué à ia fois et au contact métallique et au con-
tact du liquide conducteur avec les métaux de la pile,
surtout avec celui qui est le plus oxidable.
2 L'action chimique du liquide conducteur acide sur
les métaux de la pile n’influe pas directement sur la pro-
duction du courant électrique, et si elle correspond ordi-
nairement par son intensité à celle de l'électricité pro-
duite par la pile, c’est qu'une forte action chimique entre
deux corps suppose cn général une grande différence entre
( 162 )
leurs états électriques ou une forte action électro-motrice
exercée lors de leur contact.
3° Si l’action chimique intérieure d’une pile en activité
est proportionnelle et même équivalente à son action chi-
mique extérieure, c’est-à-dire, à celle produite par le cou-
rant externe, ce n’est pas que l’une soit la cause de
l’autre, mais bien parce qu’elles sont toutes deux l'effet
d’un même courant électrique, circulant à l’intérieur
comme à l'extérieur de la pile.
4° Il n'existe aucune difficulté à concevoir qu’un sim-
ple contact de corps hétérogènes, quoique tout-à-fait
passif, puisse donner lieu à une décomposition de fluide
électrique naturel.
5° Les courans électriques produits pendant la com-
binaison de divers corps, ne sont probablement que le
résultat de l’état électrique dans lequel ces corps se con-
stituent par leur contact avant de se combiner.
6° Le mode de distribution de l'électricité dans les piles
isolées, provient de ce que l’action électro-motrice tend à
imprimer aux plaques extrêmes de la pile une tension
électrique qui est en raison inverse de la conductibilité
de la pile, et qui se communique plus ou moins aux cou-
ples intermédiaires.
7 L'élat électrique des divers couples d'une pile
fermée par un bon conducteur, de même que le courant
dont elleest le siége, sont partout les mêmes, et l’électricité
qui s'écoule des pôles n’est pas, comme l'avait pensé
Volta, le résultat de celle des plaques intermédiaires ; elle
provient exclusivement des dernières plaques mêmes de la
pile, qui constituent les pôles.
8 Le grand nombre de couples dans une pile ne sert,
conformément aux observations de MM. De la Rive et
rm ne So LAS nt ane =
Rs. 0
( 163 )
Peltier, qu'à augmenter la tension de ces pôles, lorsqu'elle
est isolée , et dans le cas où elle est close, à forcer le cou-
rant externe à passer par de mauvais conducteurs.
9° La décomposition chimique opérée par la pile dans
les composés liquides , est le résultat d’une espèce de po-
larité électrique imprimée aux molécules du composé pla-
cées dans la direction du courant, en sorte qu'il n’y a de
décomposition définitive qu'aux pôles de la pile.
10° Le transport des élémens d'un corps composé vers
les pôles opposés de la pile, n’est qu'un phénomène ap-
parent de translation. Les élémens ne sont isolés qu’à
l'endroit même où ils apparaissent, et ce. mode de décom-
position n'a jamais lieu que pour autant que le composé
liquide forme où puisse former un conducteur continu
d'un pôle à l’autre.
11° Lorsque le composé liquide qui sert de passage au
courant d'une pile est interrompu de distance en distance,
par des fils métalliques, les élémens du composé devien-
nent libres à chacune des extrémités de ces fils, parce que
l'échange des élémens qui a lieu entre toutes les molé-
cules intermédiaires du composé liquide, ne saurait avoir
lieu pour celles qui sont contiguës aux extrémités de ces
fils, de même que pour celles qui aboutissent aux pôles de
la pile.
12° L'action chimique des pôles de la pile peut influer
sur les décompositions produites par le courant électrique;
en sorte que si les pôles sont oxidables, la décomposition
de l'eau peut être produite par un seul élément galva-
nique ; ce qui n'a pas lieu dans le cas contraire. L'aflinité
chimique concour! ici avec les forces électriques pour pro-
duire la décomposition.
(164 )
Sur l'Électricité du Sucre, par M. Van Mons, membre
de l'académie.
Tout le monde connaît le phénomène d’illumination
que fait voir le sucre en pain lorsque, dans un lieu obscur,
on le divise ou on le pulvérise par un corps contondant
ou par une râpe. Le frottement, et le rapprochement des
parties du sucre donnent lieu à cet effet, car ce n’est qu'aux
endroits où s'exerce la friction et la compression que la
lumière se montre. En même temps que la lumière est
émise , une odeur d'électricité désappliquée se fait sentir.
On a dit que le sucre luit par phosphorescence ; ce terme
rend l’effet, mais n’exprime rien à l'égard de l’origine de la
lueur. Ce qui suil va prouver que celte origine est élec-
trique.
Un soir que je faisais râper du sucre par la personne qui
en est habituellement chargée, elle me dit: «Tiens, voilà du
sucre qui ne sent pas (riekt niet). » Je fis aussitôt éloigner
les lumières pour m'assurer si aussi il ne phosphoresçait
pas. Il ne faisait ni l'un ni l’autre; je fis donc doubler la
rapidité du frottement, et presser fortement le sucre
contre la ràpe, mais pas plus une lueur que de l'odeur ne
devinrent perceplibles. Le sucre était de l'espèce la plus
dure. Après que le tout eut été râpé, on rentra les lu-
mières. On fut surpris de voir que le volume de la poudre
était le double de ce qu'il aurait dû être. Un des assistans
dit à la râpeuse que la légèreté de sa main avait passé dans
la poudre. Un autre fit la remarque qu’il y aurait du béné-
fice à vendre à la mesure plulôt qu’au poids la poudre de
sucre qui n'élincelle pas. Un troisième dit: ce n’est pas de
la poudre, mais de la poussière des rues, car je l'ai vue
EU TT a A
” i er
CE PT TE
-
cb ad me
tin
etes
( 165)
se mouvoir sans qu’on y touchât. En effet, des parties s’en
déplacèrent encore spontanément pendant qu’on la ver-
sait dans le sucrier. Le sucrier aux deux tiers plein, fut
porté à ma chambre et le surplus fut enfermé dans un cor-
net de papier. Le lendemain, de grand malin, me trouvant
près de la table où le sucrier était placé, je vis, au moment
où la domestique emportait la lumière pour aller chercher
le café, que le sucre était luisant à sa surface. Voulant
m'assurer s'il l'était aussi dans son intérieur, je tentai de
le déplacer en inclinant le vase, mais la poudre, la veille
si mobile, ne se bougea pas. Je m'abaissai pour explorer
son odeur, mais elle n’en avait pas du tout. Au retour
de la lumière , on s’aperçut que le volume de la poudre
était diminué de moilié. Je fis mettre le couvercle sur le
sucrier et j'usai du sucre enfermé dans le cornet de pa-
pier. Celui-ci ne luisait pas , maïs il s’élait aussi considé-
rablement contracté, car il ne remplissait plus à beau-
coup prés le papier, et il s'était congloméré en une masse
cohérente. La poudre dans le vase luisait encore , mais plus
faiblement, une heure plus tard. Son affaissement avait
fait de nouveaux progrés. Je la revis encore deux fois, et
chaque fois je trouvai la lueur plus pâle et l'affaissément
plus grand. Comme le jour on ne peut exclure toute lu-
mière, je remis jusqu'au relour de l'obscurité à l'examiner
de nouveau: toute lueur avait disparu , mais une partie
notable de la poudre du sucre s'était portée contre la voûte
du couvercle , et insinué entre les jointures, qui n'étaient
pas bien serrantes, et y avait formé des incrustations si
dures et si fortement adhérentes au vase, que par aucun
effort du pouce on ne pouvait les briser ou les détacher,
Ce qui était resté au fond du vase y formait un gâleau si
compacte qu'il a fallu l'emploi d’eau chaude pour l’en-
Tom. vi. 12
(166 )
lever. Une partie de l’incrustalion subsiste encore malgré
l'usage continuel qu'on fait du sucrier. Le sucre, l’appar-
tement, l'air, toul était au plus sec possible. J'avais déja
plus d’une fois remarqué que la poudre de sucre qu’on
rape au-dessus d’un plat d'étain y formait une croûte adhé-
rente et qui s'en détachait difhcilement. Quand j’ai envoyé
chercher du mème sucre pour répéter l'expérience, il n’y
en avait plus; j'aurais aussi voulu voir si le sucre qui ne
donne pas de lumière avec la ràpe, n’en donne pas par
d’autres moyens d'écrasement et entre autres par la friction
entre deux de ses morceaux. Les gros cristaux de sucre
candi, qui émettent de la lumière sous la râpe, n’en émet-
lent pas étant frottés l’un contre l’autre : mais la friction
rapide entre leurs bords tranchans, ainsi que le choc vif
entre ces mêmes bords, en fait jaillir des étincelles lumi-
neuses. J'ai depuis essayé plusieurs sucres de dureté et
provenance (canne et betterave) différentes, mais je n’ai
pas vu le phénomène cité se reproduire.
Je rapporte un fait auquel je m'abstiens de vouloir as-
signer une cause : que l'électricité se soit immiscée dans sa
production, à cela il n’y a pas de doute. L’électricité d’une
sorlese sera échappée en état d'application, et dès lors in-
visible, par le métal de la râpe. Celle de l’autre sorte sera
restée interposée à la poudre et se sera appliquée sur ses
particules; et, comme des éleclricités de même nom se
repoussent, la poudre aura été entraînée dans le mouve-
ment d’exparsion que l'électricité a exécuté. La lumière
aura été l'effet de sa séparation d'avec la poudre, el la su-
blimation, celui de son évolution brusque provoquée par
une explosion.
( 167 )
\
ENTOMOLOGIE.
Notice sur les Chrysides de Pelgique, par M. Wesmacl,
membre de l'académie.
Les principaux caractères des Chrysides sont, comme
on sait, d'avoir wn oviducte en tube articulé et rétrac-
tile; des antennes coudées, de treize articles chez les
deux sexes ; les ailes postérieures sans nervures, et des
couleurs métalliques.
Les Chrysides, placés par Latreille, dans ses derniers
ouvrages, à l'extrémité de la famille des Pupivores, se
rattachent de diverses manières aux autres tribus de cette
famille. Ainsi : 1° c'est surtout dans la nervation des ailes
antérieures que réside leur analogie avec les Ichneumo-
nides , et plus encore avec les Braconides; il y a même tels
genres de ce dernier groupe, comme les Sigalphes, les
Chélones et les Ascogasires, avec lesquels les Chrysides à
ventre voûté se lient en outre par la forme de l’abdo-
men, le nombre d’anneaux de la portion dorsale , la forme
et les dents du métathorax; 2° les Chrysides ont de nom-
breux rapports avec les Chalcidites : chez les uns comme
chez les autres, les antennes sont coudées, les ailes pos-
térieures sont sans nervures et les couleurs sont généra-
lement métalliques ; 3° quand aux Proctotrupiens, leur
analogie avec les Chrysides résulte surtout de la forme
tubulée de l’oviducte, et aussi de l'absence de nervure aux
ailes postérieures. On remarque aussi que les Cleptes ont
les cuisses de derrière fortement élargies vers la base,
comme elles le sont chez les Dryines ; ces mêmes Cleples
ne manquent pas non plus d'analogie de formes avec les
Spalangies.
(168)
Les genres de Chrysides jusqu'à présent observés en
Belgique, ne sont qu'au nombre de quatre, les Gleptes,
les Hédycres, les Elampes et les Chrysis, qu'on peut
signaler de la manière suivante :
al. enter convexus!s,= .. 13. 2 teurs se eo ps fee CLEPTES.
=
=
SET ENRE *
S Unguiculi den- Unguiculi unidentati . . HEDYCRUM.
5 é
8 À Venter formicatus. pos AE pe Unguiculi serrati. . . . ELAMPUS.
FE
n
N Unguiculi simplices . . . . . . AMEL: Carysis.
1. Gewus CLEPTES Lat.
Prothoraz mullo angustior quam mesothorax.— Abdomen feini-
narum quadriannulatum, marium quinqueannulatum. —
V'enter convexus. —— Unguiculi unidentati.
+
Pronoti margo posterior depressus , plus minus dis-
tincte scrobiculatus.
1. CLrPrEs sEmIAURATA Lan.
Viridis g, vel aurata Q, abdomine rulo , apice nigro. 23 li.
SYNONYMIA MARIS.
Sphez semiaurata Lin. Fn. suec. 1661. — Syst. nat. II, ns 35...
Tchneumon semiauratus Panz. Fn. Germ. 51, 2.
Cleptes splendens Fab. Syst. Piez. 155, 38.
Chrysis semiaurata Oliv. Ency. méth. Ins. V, 676, 21.
SYNONYMIA FEMINÆ.
Ichneumon auratus Panz. Fn. Germ. 52, 1.
Cleptes semiaurata Fab. Syst. Piez. 154, 1.
Cleptes Pallipes Lepel. Ann, du Mus. VIL, 119, 8.
? Cleptes semiaurata ibid, ibid. 1.
RE. 1 €
( 169 )
Cleptes semiaurata Lai. Hist: Gen. XUX, 236, 1. — Gen. Crust. et
Ins. IV, 44.
Cleptes semiaurata Jur. Hym. 298.
Adnot. — Maris antennæ nigræ, tibiæ rufæ; feminæ pedes toti et
antennæ basi late, pallida.
Assez commun.
Remarque. — I] résulte évidemment de la description
donnée par Linné, de son Sphex semiaurata, que c'est
le même que le Cleptes splendens de Fabricius.
+
Pronoti margo posterior non impressus.
2. CLepres nirinuza Q Fab.
Cyaneonigra ; prothorace, abdominis dimidio anteriore , trochan-
teribus tibiis et arsis, annuloque antennarum, rufis. 2—9% li.
Cleptes nitidula Fab. Syst. Piez. 154, 2. (1).
Rare.
Il. Genus HEDYCRUM Lat.
Prothoraz latitudine mesothoracis, transversus. — Abdomen
triannulatum , ano integerrimo. — Venter fornicatus. —
Unquiculi unidentati.
x2
Dens unguiculorum in medio situs.
1. Henycrun roseux Ross.
Viride, abdomine rufo. 25—92% li.
Chrysis rosea Ross. Mant. ins. 132, 290.— Fn. Etr. IL, t. 8, fig. 7.
Chrysis rufa Panz, Fn, Germ. 19, 16. — Krit. rev. 104.
(1) Je ne donne la synonymie que lorsqu'elle peut fournir matière à
quelque contestation,
Chrysis rufa Jur. Hym. 297.
Hedycrum roseum Lepel. Ann. du Mus. VII , 123, 13,
Rare.
4dnot. — In hac specie cellula radialis perfecta.
2. Henyerun arvexs Lat.
Purpureoauratum , thorace postice eyaneo. 13—2 li,
Chrysis ardens Coqueb. Ill. icon. dec. 2, 59, t. XIV, fig. 7.
Rare.
+ +
Dens unguiculorum juxta apicem situs.
3. Henycrux Luciouzux Fab.
Viridicyaneum ; pronoto, mesonoto ante scutellum , abdomineque
ÿ ; ; :
rubroauratis. 215 li.
Chrysis lucidula Fab. Syst. Piez. 174, 21.
Commun.
4. Henycrou rervioun Fab.
Viridicyaneum; fronte, vertice. pronoto, mesonolo , abdomine-
que supra , rubroauratis. 5 li.
Chrysis fervida Fab. Syst, Piez 175, 23.
Très-rare en Belgique; trouvé une seule fois à Rouge-
Cloître, près de Bruxelles, par l'élève Hannon, de l’A-
thénée.
(171)
5. Heovenou recu Fab.
Cyaneoviride , abdomine rubroaurato. 2—5 1li.
Chrysis regia Fab. Syst. Piez. 175, 6.
Commun.
III. Genus ELAMPUS Spin.
Prothorax latitudine mesothoracis, transversus.—Metanotum
gibbum.— Abdomen triannulatum , ano exciso.— V’enter for-
nicatus.— Unguiculi serrati.
Remarque. — Personne, que je sache, n'avait encore
observé la conformation des crochets des tarses chez les
Hédycres et les Elampes.
se
Tertium abdominis segraentum marginibus latera-
libus integris.
1. Ecaweus aurartus Lan.
Cyaneoviridis, abdomine rubroaurato; metanoto subconico ; ano
profunde exciso. 2—3 li.
Chrysis aurata Lin. Fn. Suec. 1666.
Commun.
2, Eraweus vioLacEuS 15c0p.
Subviolaceus; metanoto subconico ; ano leviter exciso. 5 li.
Sphex violacea Scop, Ent. Curn. 793.
Chrysis violacea Ross. Fn. Etr. W,77, 848.
(172)
Omualus nitidus Panz. Fn. Germ. 97, 17.
Hedycrum uitidum @ Panz. Krit. Rev. 105.
Adnot. — Antennarum articuli tres vel quatuor priores metallicovi-
rides.
Rare.
3. Ecampus arrints mir.
Subviolaceus ; metanoto subhæmispherico ; ano leviter exciso.
ce
2 2 hi.
? Omalus Æneus Panz. Fn. Germ. 85, 13.
Adnot, — Tertium sbdominis segmentum interdum æneum.
Rare.
Remarque. — Celle espèce et la précédente, qui se
ressemblent presque entièrement sous le rapport des cou-
leurs, présentent cependant d’autres différences que j'ai
peine à regarder comme purement sexuelles. Ainsi, chez
l'E. violaceus, l'excavalion faciale se prolonge jusque
fort près de l’ocelle antérieur; les 3 ou 4 premiers ar-
ticles des antennes sont métalliques; les yeux sont plus
saillans, plus arrondis, presque hémisphériques; enfin le
mélanotum , vu de côté, présente à peu près la forme d’un
cône. Chez l'EL. affinis, au contraire, l’excavation fa-
ciale se termine à une assez grande distance de l’ocelle an-
térieur ; les deux premiers articles des antennes sont
seuls d’un vert métallique; les yeux sont moins saillans,
plus allongés ; et le métanotum, moins prolongé en arrière,
est bombé à peu près en demi-sphère.
(173)
++
Tertium abdomwinis segmentum marginibus late-
ralibus sinuatis { apice medio sat profunde exciso ).
4. Eraweus rusiurus Fab.
Viridicyaneus, abdomine viridiæneo : tertio segmento utrinque
bisinuato ; melanoto subeonico. 1:—2 li.
Chrysis pusilla Fab. Syst. Pies. 176, 33.
Adnot. — Variat abdomine magis viridi vel magis cupreo.
Commun.
5. ELaupus minurus 1h1.
Viridicyaneus, abdomine viridiæneo : tertio segmento utrinque
unisinualo ; metanoto subconico. 1+—2 li.
Adnot. — Variat uti præcedens.
Commun.
Remarque. — Les deux dernières espèces se ressem-
blent beaucoup, et pourraient bien n'être que les deux
sexes d’une même espèce, auquel cas je leur laisserais de
préférence la dénomination de ET. pusillus , quoiqu'il ne
soit pas bien certain que ce soit le Chrysis pusilla de
Fabricius , cet auteur n’ayant pas fait mention de l’échan-
crure anale.
Quant au Chrysis æncea de Fabricius, je ne sais ce que
c’est : c’est probablement un Hédycre ou un Elampe ; mais
auquel de ces deux genres appartient-1? at-il ou n’at-il
pas l'anus échancré ? A cette question, Fabricius ne four-
nil aucune réponse , il ne parle pas de la conformation de
( 174 )
l'extrémité de l'abdomen , tandis qu'il a eu soin de dire que
les Chrysis lucidula et regia, ont l'anus entier, et que le
Chrysis aurata a l'anus échancré. Panzer, dans sa Faune
Germanique (1), a représenté, sous le nom de Chrysis
ænea , un insecte dont l'anus est distinctement échancré;
dans sa Âritische Revision (2), changeant d'avis sans ex-
pliquer ses motifs, il place ce même Chrysis ænea dans a
division des Hédycres qui ont l'anus entier. Enfin , Coque-
bert (3) a représenté ce même Chrysis, et, dans la figure
grossie qu'il en donne, il n’y a pas la moindre trace d’une
échancrure anale, ni d’une gibbosité métathoracique : en
présence de toutes ces contradictions, devines si tu
peux et choisis si tu l'oses !
IV. Genus CHRYSIS Zain.
Prothorax latitudine mesothoracis, transversus. — Abdomen
triannulatum, segmento tertio scrobicularum serie transversa
ante apicem diviso. — Venter fornicatus. — Unguiculi sim-
places.
1. Carysis 1GnITA Lin.
Cyaneoviridis , abdomine rubroaurato; ano 4 dentato. 23—6 li.
Chrysis ignita Lin. Fn. Suec. 1665.
Var. a. Ventre rubroaurato.
b. Ventre viridiaurato.
c. Ventre cyancoviridi
(1) Fasc. 51, t. 7.
(2) rit. rev. 104.
(3) ZUL. icon. dec. 2,t. XIV, fig 9. ”
dont cn D “HR ir nat
PAT CLOSE POST PU
per 1
( 175 )
Adnot, — In var. b, ec, occurrunt ctiam individua tertio segmento
ventrali nigro. — Pedes semper metallicovirides.
Très-commun.
Remarque. — Les plus grands individus de celte espèce
sont ceux de la var. a ; aussi , je pense que c’est particu-
liérement à cette variélé qu'il faut rapporter le Chrysis
ignita de Linné, dont il dit : Æpe domestica major.
d,. Cnnysis AURIPES #1h4.
Viridis, pronoto et scutello parce auratis; abdominis dorso et ventre,
pedibusque anice, rubroauratis; ano 4 dentato. 2—43 li.
Rare. Cinq individus des environs de Bruxelles.
3. Canysis STOUDERA Jur.
Subtus viridis, supra subviolacea, abdominis segmento secundo
apice tertioque rubroauratis; ano 4 dentato. 4 ;—5 li.
Chrysis stoudera Jur. Hym. 296, t. XIT, fig. 9.
— — Panz. Fn. Germ. 107, 12.
Très-rare. Deux individus des environs de Bruxelles et
de la Campine.
4. Curysis gipENTATA Lin.
Viridicyanea; thorace abdominisque segmentis duobus prioribus,
dorso rubroauratis; ano Jate sed parum profunde triemargi-
nato. 32—4 li.
Chrysis bidentata Lin. Syst. Nat. 11, 947, 2.
Chrysis bidentata Panz, Fa, Germ. 77, 15.
( 176)
Chrysis bidentata Jur. Hym. 295.
Chrysis Lbidentata Oliv. Ency. Meth. ns. V, 674, 12.
Chrysis dimidiata Coqueb. Z/1. Icon. dec. 2, 58, t. XIV, fig. 234.
Chrysis dimidiata Fab. Syst. Piez. 174, 22.
Chrysis dimidiata Lepel. Ann. du Mus. VI, 127, 20.
? Chrysis bidentata Fab. Syst. Piez. 173, 16,
Trés-commun.
Remarque. — I] n'est pas certain que le Chrysis bi-
dentata de Fabricius soit le même que celui de Linné et
des autres auteurs , parce qu’il lui attribue trois courtes
dents à l'anus, au lieu de quatre. Voy. Ent. syst. IT,
241, 11.
5. Cnrysis succrncTa Lan.
Viridicyanea ; pronolo antice , mesonoto cum scutello , abdomine-
que rubroauratis; ano utrinque oblique subemarginato, in
: LR
medio obtuso. 22—5 li.
Chrysis succincta Lin. Syst. Nat, IL, 947, 3.
Chrysis succincta Fab. Syst. Piez. 174, 19.
Chrysis succincta Jur. Hym. 295.
Chrysis succincta Lepel. Ann. du Mus. VII, 128, 24.
Rare.
6. Curysis ILLIGERI Mihi
Viridicyanea; pronoto antice, mesonoto ante scutellum, abdomi-
neque rubroauratis ; ano utrinque oblique emarginato , in me-
dio bidentato. 21—5 li.
Chrysis succincta Wig. Fn. Etr. IL, édit. 123, 846.
Chrysis succincta Panz. Fn. Germ. 77, 16.
Rare.
Remurque. — M. Spinola cite le C. succineta (fase. 1,
RSS D ET
Pe
( 177 )
p. 10), en le plaçant dans une division où , selon lui, les
mâles seuls auraient l’anus denté; d’un autre côté, Jurine,
qui ne mentionne que le mâle du même C. succincta,
dit qu'il n'a pu reconnaître à l'anus ni dents ni échan-
crures.
Je ne sais si le C. nitidula de Germar ( Ahr. Æn., IV,
12) est réellement une espèce distincte du C. succineta ;
dans tous les cas, le nom spécifique doit être changé,
puisque déjà Fabricius l'avait assigné à une autre espèce
(Ent. Syst. , 243, 21). On pourrait nommer l'espèce
de Germar, Chrysis Germari.
‘
7. Curysis aurichaLceA Lepel.
Viridicyanea ; pronolo antice, mesonoto cum scutello, abdomi-
neque læle auratis; metanoto basi gibbulo; ana vix emargi-
mato. 2 li.
Chrysis aurichalcea Lepel., Ann. du Mus. VII, 128, 55.
Trés-rare. Un seul individu des environs de Bruxelles.
L'anus n’a au milieu qu’une faible échancrure, sans traces
de dents ni d'échancrures latérales. La base du métano-
tum est un peu élevée en bosse, de manière à dépasser
le niveau de l’écusson.
8. Curysis cyaANEA Lin.
Cyanea ; ano tridentato. 2—53 li.
Chrysis cyanea Lin. Fn. Suec. 1667.
Trés-commun.
( 178 )
ANATOMIE VÉGÉTALE.
Observations sur l'anatomie des Musa; par M. Charles
Morren, membre de l'académie.
Parmi les tissus les plus remarquables de l’organisation
végétale, on compte à juste titre celui qui est formé par
des utricules étoilés qui se joignent les uns aux autres
au moyen des extrémités de leurs rayons. Ge tissu, qui
existe dans un assez grand nombre de monocotylédones ,
est développé dans toute sa richesse et avec toute son
élégance dans les Musa ; et comme plusieurs faits qui se
rattachent à son histoire, sont encore complétement in-
connus aux phytolomistes, j'ai pris ces plantes pour sujet
de mes recherches ; elles auront principalement pour but
d’éclaircir l’histoire de l’aclinenchyme, de la fécule, des
cristaux et des cellules cristallifères.
Le tissu slellé des Musa échappa aux investigations
des anciens botanistes. Van Leeuwenhoek, dans sa 74me
lettre, 1692 (Op. omn., tom. IL, p. 297), avait , il est vrai,
disséqué le scirpus lacustris, mais la manière dont il
représente le tissu stellé fait voir qu'il le connaissait
fort mal et qu'il en avait les plus fausses idées. En 1806,
M. L. Treviranus, un des membres de ce triumvirat cé-
lèbre que l'anatomie végétale vit se former au commen-
cement de ce siècle, comme à sa naissance, elle avait
compté celui des Grew, des Malpighi et des Van Leeu-
wenhoek, M. Treviranus, dis-je, signala le premier,
l'existence de cette forme histographique dans le Musa
sapientum (1). Il expliqua plus exactement sa génèse que
(1) Treviranus, Vom inwendigen Eau der Gewächse, Gottingen, 1806,
52; Vom Bau der Palmen, p. 129-131, pl. I, fig, 1.
(479 )
ne le firent quelques-uns des analomisles qui le suivirent.
En 1812, Kurt Sprengel s'occupa de ce même tissu, en
l'étudiant surtout dans le Sparganium ramosum (1) ;
mais il ne s’occupa guëre de son mode de développement.
La même année M. Kieser remportait le prix d'anatomie
végétale à la société Teylerienne de Harlem, par son cé-
lèbre ouvrage sur celte partie des sciences naturelles. Il
dessina, mais fort mal, l’actinenchyme des Musa. Le texte
parle du Musa sapientum et l'explication des planches
du Musa paradisiaca. M. Treviranus avail clairement
vu la jonction double des cellules au milieu des rayons
des étoiles. M. Kieser n'ayant pu la voir, dit-il, il avoue
qu’il ne conçoit ni la construction, ni l'origine de ces
cellules (2). De plus M. Treviranus avait dessiné les cris-
taux dans ces corps, mais tout cela échappa à l'œil de
M. Kieser, qui dessina l’actinenchyme comme une ma-
tière continue et à laquelle on dirait qu'un emporte-
pièce a enlevé des plaques triangulaires, de maniére que
le restant est étoilé. En 1815, M. Mirbel paraissait con-
cevoir la formation de l’actinenchyme comme un résul-
tat des fentes des cellules; fentes qui se multiplieraient
tant que les cellules se transformeraient en tissu rélicu-
laire (3). Ce fut en 1827, que Hayne accomplit finalement
la distinction de ce tissu stellé en le nommant Æctinen-
chyme, et en le séparant de tous ses congénères (4). La
(1) Sprengel, Von den Bau und der Natur der Gewächse ; Halle,
1812, 6 89, pl. VILL, fig. 41.
(2) Kieser, Mémoire sur l’organisation des plantes, p. 90, pl. IV,
fig. 18.
(3) Mirbel, Élémens de Physiologie végétale, p. 29.
(4) Hayne, Ueber die Bildung des Zellyewebes in den Gewächsen.
(Flora, 1827. Isis, 1828, Heft, 5).
( 180 )
\
forme de ses élémens, la croissance singulière de ces bras
ou rayons, l’activité dont semblent jouir ici les méats
intercellulaires, les diaphragmes que ce tissu constitue à
lui seul dans les canaux aérifères des Musa , Strelitzia ,
Pandanus, Canna , Scirpus, Juncus, Sparganium ,
Poa, Iris, etc., sont autant de motifs pour différen-
cier celle forme organique de ses analogues. En 1830,
M. Meyen , dans sa phytolomie, le rangea dans son paren-
chyme, mais sous le nom de parenchyma stellatum (1).
En 1836, il conserva cette dénomination (2), et étudia
spécialement les interstices intercellulaires si développés
dans ce tissu. En 1835, M. Treviranus, dans sa nouvelle
Physiologie (3), confirma que la forme étoilée des cel-
lules se lie à la nature des monocotylédones, et qu’elle est
propre surtout aux espèces aquatiques. M. Mobl avai an-
térieurement signalé l'actinenchyme dans plusieurs pal-
miers, et figuré celui du Mauritia armata (4).
M. Meyen, dans son mémoire couronné à Harlem (5),
donna la génèse de l’actinenchyme dans le Pontederia
cordata , qu'il mit en rapport avec celui du Potamoge-
ton natans et celui du Pandanus odoratissimus , mais
il fixa moins son attention sur le contenu de ces cellules
et ses variations, que sur la manière dont se forment les
méals intercellulaires. En corroborant ses vues sur la gé-
(1) Meyen, Phytotomie; Berlin, 1830, p. 85
(2) Meyen , Veber die neuesten fortschrifte der Anatomie und Physio-
logie der Gewâchse ; Harlem, 1836, p. 34.
(3) Treviranus, Physiologie der Gewächse, 1835, p. 30.
(4) Mobl, De Palmarum structura, tabl. IV, fig. 2.
(5) Op. laud., p 53.
PP CE EE
( 181 )
mèse de ce tissu examiné dans les Musa , j'ai tâché de
combler la lacune que j'indique ici.
Lorsqu'on examine un très-jeune pétiole de Musa para-
disiaca ; celui de la feuille la plus intérieure qu’on voit
enroulée dans la coupe figurée de grandeur naturelle
(fig. 1), feuille qui ne s'était montrée que depuis trois jours
au-dessus d’une coupe horizontale faite à la base de cette
plante, on trouve les diaphragmes des canaux aériféres
très-pressés et à peine distincts. Mis sous le microscope,
il n’y a pas de trace d’actinenchyme, mais ces diaphrag-
mes sont alors formés d’un mérenchyme très-régulier qui
devient bientôt, par l'allongement transversal des cellules,
un ovenchyme trés-caractérisé ( fig. 8). Le nombre de
couches de cellules superposées varie, mais il est ordinai-
rement de trois à cinq (fig. 8,a,b,c).
Il paraît que les canaux aérifères croissent plus vite
en diamètre que les cellules. Celles-ci augmentent cepen-
dant en largeur et en se comprimant, elles deviennent
des prismes hexaëdres (fig. 2, k), et constituent un pris-
menchyme ordinaire. Alors, les méats intercellulaires
qui existaient dans l’ovenchyme disparaissent , et le tissu
des diaphragmes est continu. Il suit de là, qu'à cette
époque , il n’y a aucune communicalion d’une lacune à
une autre, et à cetle époque aussi, la feuille encore
blanche , n’a pas respiré et chassé son oxigène dans ses
cavités aériennes. É
Dans cet état de prismenchyme, les cellules ont con-
tracté une adhérence entre leurs parois mutuelles sur six
plans , rarement sur sept ou huit (cela est plus commun
dans les Musa rosacea, discolor, etc.). Ces adhérences
vont provoquer la formation des rayons des cellules stel-
liformes.
Tom. vr. 13
{ 182 )
Ea effet, quand l’actinenchyme se forme, on voit d’a-
bord trois méats ou interstices se creuser entre les points
de jonction de quatre cellules autour d’une cinquième
qui reste anguleuse d’un côté (fig. 2, L). Ou bien une
cellule se sépare des six qui l’environnent par six points
de contact , de sorte que ces dislocalions deviennent au-
lant de méats parfaitement triangulaires, où l'air s’accu-
mule et se condense. Les cellules se séparant ainsi, le
diaphragme ou la cloison du canal aérifère peut s’allon-
ger. En même temps , le diamètre des cellules augmente,
mais moins que la traction ne s'exerce entre elles au
profit des interstices. Ceux-ci perdent leur forme angu-
leuse par l'arrondissement des contours de la cellule
(fig. 2, p).
C'est l'adhésion des cellules. entre elles, sur six points
alors nettement circonscrits, qui devient la cause organi-
que de la formation de l’actinenchyme. Toutes les cellules
se liennent et toutes sont tiraillées également en tout sens;
la force de l'adhésion résistant en six points, la cellule
s’allonge en ces six directions, et les rayons (fig. 2,0,q)
sont formés. Dans le Musa coccinea, où le tissu prismen-
chymateux est moins régulier, il y a des cellules stellées
à quatre, cinq, six, sept, huit et même à neuf branches.
Cela vient de ce que la formalion des rayons a commencé
sur des prismes à quatre, cinq, six, sept, huit et neuf
faces latérales. M. Meyen cite des cellules à 14 rayons dans
l'Alisma plantago.
L'actinenchyme ainsi formé, montre toujours au mi-
lieu de deux rayons contigus la séparation perpendiculaire
à l’axe des rayons (fig. 2,0 ), séparation qui indique l'in-
dividualisalion des cellules. Cette ligne, vue par M. Trevi-
ranus, échappée à M. Kieser, est manifeste sur tous les «
rt
Cd
( 183 )
actinenchymes que j'ai étudiés. Plus tard, sur quelques
plantes et même sur le Musa paradisiaca ; on voit , dans
la force des fonctions des cellules, un petit renflement
aux extrémités des rayons (fg. 10, ), mais d'ordinaire
dans les Musacées il est peu développé.
Il suit évidemment de ces observations sur le mode gé-
nétique qui préside à la formation de ce beau lissu , que
l'actinenchyme doit son origine au prismenchyme, lequel
est d’abord de l'ovenchyme qui, à son tour, n'était primi-
tivement que du mérenchyme. L’éloile vient du prisme,
le prisme de l’ovoïde, l’ovoïde de la sphère. Ces métamor-
phoses prouvent donc encore une fois l'origine des formes
diverses hors d’une forme primitive et simple, hors de la
sphère, principe de tout l'organisme.
Il y a au jardin botanique de Bruxelles un Musa para-
disiaca qu'on a coupé immédiatement au-dessus de la
partie ensevelie de sa tige. On croyait par là faire périr la
racine qui gêne les autres plantes. Aucune partie ne croit,
en eflet, sur ce tronçon hormis le centre. Celui-là , tous les
deux à trois jours, monte de deux décimétres sous forme
d'un bâton arrondi et légèrement aplati, blanc et succu-
lent. La coupe montre que c'est un pétiole enveloppant un
autre péliole plus jeune, et une ou deux feuilles (limbes)
enroulées (fig. 1 ). Les rayons du pétiole extérieur , formés
par les vaisseaux, possèdent ces renflemens moniliformes
qui disparaissent dans les vieilles parties semblables. Le
suë qui découle de ce Musa est d’une amertume sliptique
des plus fortes. La végétation est telle que le centre, bien
qu'on le coupe tous les trois à quatre jours, recroil sans
cesse avec une nouvelle vigueur. J'avais mis un tronçon
semblable dans ma poche; il devint brun, puis noir , mais
en séchant, il exhala une excellente odeur d’'hvacinthe,
( 184)
trés-douce , et qui devenait plus forte en coupant des tran-
ches du pétiole.
Gette croissance si rapide est d’un décimètre par jour
ou de millimètres 4, 16 par heure. J'étais fort curieux
de disséquer cette partie blanchie pour savoir si quelques
faits auraient pu rendre compte d'une végétation aussi
énergique. La dissection répondit à mon attente. Toutes les
cellules mérenchymateuses, ovenchymateuses, prismen-
chymateuses, el l’actinenchyme tout entier, me montrèrent
dans les cavités des cellules un grand nombre de grains de
fécule bleuissant par l’iode et nettement distincts de petits
granules muqueux également contenus dans les cellules.
Jamais dans le tissu vert, tout formé, et dans l’actinen-
chyme adulte des Musa, je n'avais vu une organisation
semblable.
La fécule du bananier est ovoïde , pyriforme (fig. 5 et 6),
quelquefois un peu cornue ( fig. 4 ), et par-ci par-là on
voit des grains formés de trois parties distinctes ( fig. 8 ),
parfois réunies régulièrement ( fig. 7 ). Des stries concen-
triques se rencontrent sur celte fécule comme sur celle de
la pomme de terre; ses dimensions varient beaucoup, les
plus gros grains vont à 70 millièmes de millimètre, La fi-
gure 2 représente cette fécule renfermée dans les cellules.
Dans l’actinenchyme bien formé, elle occupe seulement le
centre de la cellule et non les bras.
Il y a deux genres de canaux dans le Musa, outre les cavi-
tés aériennes ; ce sont des canaux aérifères (fig. 2, 4, q, h),
et, des canaux sécréteurs d’une substance brunätre (f). Ces
derniers n’offrent pas de fécule; les cellules des paroïs des
canaux aériféres (fig. 2, g,h), n’en présentent pas non plus.
Dans les utricules étiolées du bananier j'ai pu trouver
ces granules toujours en mouvement et qui sont muqueux,
( 185)
ces premiers élémens organiques de la chlorophylle, alors
mobiles, signalés déjà à l'attention des naturalistes par
MM. Mirbel (1) et Decaisne (2) ( fig. 2, b). Ces petils cor-
puscules arrondis grouillent entre les grains de fécule et
semblent être des monades en agitalion. Dans une tige
verdie , il n’y a plus de trace de ce phénomène. Cette ob-
servation tend à prouver que les changemens organiques
qui se passent dans les cellules à l'époque de la germina-
tion, sont de même nature que ceux qui se manifestent
dans ces cavités lors de la croissance ultérieure des par-
ties. Ces jeunes granules de chlorophylle encore blanches,
se meuvent comme les propagules des conferves et des
algues en général.
L'âge adulte de l’actinenchyme se dénote par l’absence de
la fécule; elle a été absorbée, et c’est elle évidemment qui
est la cause de la croissance si rapide de la tige, croissance
dont nous avons parlé plus haut. Bien souvent les cloisons
du bananier , formées par l’actinenchyme, sout verdâtres ;
cela tient à la viridité qui s’est emparée des granules mu-
queux , mobiles dans leur jeune âge et maintenant verts et
immobiles. À cet âge, il n’y a point au milieu de ces cel-
lules de nucléus ou de cytoblaste, mais simplement des gra-
nules verts extrêmement petits (fig. 9 ).
"Arrive la seconde période de l’âge adulte ; je prends une
feuille bien développée du bananier , el qui ait fonctionné
pendant quelques mois. Alors, tous les granules verts ont
à leur tour disparu; quelques-uns sont restés, mais ils
(1) Mirbel, Mémoire sur le pollen des Cucurbitacées. — Observations
sur le Marchantia, etc.
(2) Decaisne, Recherches sur La garance, p. 10,
( 186 ) |
sont de nouveau décolorés, grisâtres, en général très-
rares. Alors encore, la cavité de la cellule est occupée par
uu grand nombre de cristaux appartenant au système pris-
matique. La forme la plus ordinaire est le prisme hexaëdre
tabuliforme. M. Unger a signalé dans la même plante,
le rhomboïde, l’octaèdre et le parallélipipède; je n'ai pas
trouvé les deux premières formes (1), mais j'y ai constaté
l'existence d'un plus grand nombre de déformations du
prisme hexaëdre, provenant de la jonction de plusieurs
cristaux entre eux (fig. 10,4, Æ). J'y ai vu le parallélipi-
pède (fig. 10, g), mais cette forme est rare, Les cristaux de
l'actinenchyme ne se forment pas autour des grains de
chlorophylle, et même ils ne se groupent pas entre eux en
calculs muriformes. En cela ces cristallisalions confir-
ment les objectious faites par M. Meyen dans son mémoire
couronné à Harlem, contre quelques travaux antérieurs.
En effet, les cristaux sont isolés, quoique fort nombreux
dans une cellule. Dans le prismenchyme qui devient acti-
nenchyme par l'allongement des bras, ces corps inerts
abondent encore (fig. 10e); mais dans le prismenchyme
non modifié, il n’y a plus qu’un ou deux cristaux dans les
angles et enfin dans l’ovenchyme il n’y a plus de cristaux du
tout (fig. 10, a, b).
Il suit de là que dans l’actinenchyme la succession des
matières contenues dans les cavités des cellules est la
suivante : granules muqueux mobiles et fécule; chloro-
phylle immobile ; globules inerts et cristaux. Ges matières
se forment peu à peu, se remplacent les unes les autres,
(1) Unger, Ueber Kristullhildungen in den l’flansenzsellen. Annales des
Wiener Museums. 2 vol. 1!e partie,
(187)
de manière que le contenu des cellules varie suivant l’âge.
La vie individuelle de la cellule , ses fonctions d’assimi-
lation , les travaux chimiques qui se passent dans son sein
saulent ici aux yeux.
M. Turpin a signalé, comme on le sait, de singuliers or-
ganes dans les Caladium, en ce qu'ils sont formés par
une cellule fort grande, perforée à ses deux extrémités,
et que son intérieur est rempli par des cristaux acicu-
laires. Il a nommé ces organes des biforines (1), pour
exprimer cette double solution de continuité. Dans le
Caladium rugosum, cel observateur a trouvé des organes
analogues, mais uniperforés , de sorte que pour rester
fidèle à sa nomenclature, il aurait dû nommer cet organe
uniforine. I a trouvé dans la même espèce , de ces cellules,
closes de toute part, ovoïdes et renfermant une botte
d’aiguilles cristallines. Des cellules semblables étaient
connues depuis fort long-temps, et tous les traités de PhAy-
totomie donnent leur histoire avec plus ou moins de
détails. Ge sont des organes évidemment analogues aux
biforines, et la seule distinction qui même existe entre
celles-ci et ceux-là, c’est que les premiers sont imperforés.
Van Leeuwenhoek , Rafn, Jurine, Link , Buchner,
Rudolphi, Kieser, Decandolle fils, Raspail, Meyen, Tre-
wiranus, etc., etc., ont tous observé et décrit ces cristaux
aciculaires renfermés dans ces cellules ovoïdes, et qu’on
avait nommés un instant raphides, les confondant avec
des poils intérieurs. M. Meyen dans sa Phytotomie (1),
(1) Turpin , sur les biforines. — Annales des sciences naturelles,
nouv, série , tom. VE, p. 1.
(2; Meyen, Phytlotomie, 1830, p. 172.
( 188 )
établit la différence entre les cristaux courts et les ai-
guilles en question , et reconnaît que ces dernières sont
renfermées dans une longue cellule toujours distincte de
ses voisines. Puisque les biforines sont des organes qui
méritent bien certainement un nom particulier, à cause
de leurs bouches éjaculatoires, ouvertures si rares dans
l'organisation végétale, il me semble que les organes
spéciaux, qui renferment ces cristaux aciculaires , mais
dépourvus de bouches, doivent aussi jouir d’une déno-
minalion particulière ; car on ne peut les confondre
avec les cellules cristallifères ordinaires; leur forme;
leur grandeur, leur position, leurs usages, leur génèse,
comme je le démontrerai , sont toujours différens des ntri-
cules qui servent de réservoirs aux cristaux non acicu-
laires. Je propose donc de les nommer cLesTinEs, pour
indiquer que la nature les tient fermés durant toule la
vie du végétal, de manière que les aiguilles cristallines
réunies en botte ne se rendent jamais dans les espaces
intercellulaires (1).
Je n’étudierai ici que les clestines du Musa paradi-
siaca, qui sont extrêmement remarquables.
Sur les très-jeunes cloisons des lacunes, quand leur
tissu cellulaire est ovenchymateux, la formation des cris-
taux aciculaires a lieu déja (fig. 8, e). Ge n’est donc nul-
lement un signe de vieillesse que ces corps inorganiques.
La clestine conserve la forme ovoïde pendant long-temps,
et comme elle occupe la superficie de la cloison (fig. 8),
elle reste simplement superposée au prismenchyme qui
devient peu à peu de l’actinenchyme. Son adhérence avec
(1) De zAcoc, qu'on tient fermé.
( 189 )
les cellules dont elle reçoit le suc vital a donc lieu tan-
tôt en un point , et alors elle reste ovoïde (fig. 13), tantôt
en plusieurs points, et alors tout en grandissant beaucoup,
de manière à devenir un long corps , trois, quatre et
même cinq fois plus grand que les cellules actinenchy-
mateuses, elle s'attache aux rayons de celles-ci par des
jambes ou prolongemens particuliers (fig. 10, v, u—0,p;
fig. 11,a,b,c,d,e, f,g,h) qui peuvent aller jusqu’au
nombre de 8 ou 10. Quand une clesline a été formée
aux limites du prismenchyme et à ses dépens, elle a la
forme d'un cylindre à deux trompes ( fig. 10, n, 0,p,
g, r). Les jambes sont rarement à ses extrémités.
Quand une clestine s'ouvre, les cristaux aciculaires
en sortent et leur botte se sépare par une divarication
lente, mais progressive ; on voit alors que ces cristaux sont
placés souvent en couronne ou en cylindre. J'observai
derniérement avec une grande attention les biforines du
Caladium lacerum ; je vis très-distinctement quelques
minutes avant la projection des aiguilles, un liquide
épais, comme muqueux, sorlir des bouches éjaculatoires
de ces organes, et quand les aiguilles se jetaient au
dehors, le liquide les suivait, comme s'il y avail eu une
adhérence entre lui et elles. Ces observations me firent
porter mon attention sur le contenu des clestines du ba-
nanier. Aux deux bouts de la botte des cristaux, j'aper-
çus des granulations (fig. 10, r, «) une matière nuageuse,
comme un liquide plus dense que celui du reste de l'or-
gane et plus dense que le fluide aqueux des cellules de
+ l'aetinenchyme. Je colorai des clestines par la teinture
diode; les bouts restèrent blancs ou faiblement colorés
en jaune (fig. 12), mais les grauulalions se montrérent
alors beaucoup mieux. J'ouvris des clestines au compres-
( 190 )
sorium , le liquide en question en sortit, car, c’est évi-
demment un liquide qui me semble muqueux. et tout au
moins plus dense que le fluide ordinaire des cellules.
On conçoit maintenant que l’endosmose s'établit faci-
lement au profit des biforines et des clestines ; mais chez
ces dernières, l'absence des trous empêche le vomisse-
ment, comme la résistance des parois ne permet pas leur
déchirement.
Dans les Musa discolor, rosacea et coccinea , les cles-
tines sont beaucoup plus petites que dans le Musa paradi-
siaca, et y offrent bien plus rarement les pieds dont nous
avons parlé.
EXPLICATION LES FIGURES.
Fig. 1. Coupe, grandeur naturelle, de la pousse centrale d’un Musa
paradisiaca. LA
Fig. à 2. Portion d’une jeune cloison encore féculifère.
a. Mérenchyme,
b. Globules muqueux mobiles. |
c. Fécule,
d. Cellule sans fécule.
e, Zone de cellules tabuliformes (pinenchyme).
f. Aires des canaux sécréteurs.
g. Zone de cellules sans fécule autour des canaux aérifères,
h. Parois cellulaires de ces canaux.
z. Ce canal.
k. Prismenchyme sans méats. Fr
1. Prismenchyme avec méats latéraux.
m. Prismenchyme avec méats tout à l’entour des cellules.
n. Méats triangulaires. Fa
0, 0. Premier rayons de l’actinenchyme naissant. L)
+. p. Méats orbiculaires.
9,g- Rayons de l’actinenchyme bien formé.
r. Méat bien formé.
#. Globules mobiles de Pactinenchyme
Bulletins de l'Academre Tage 190, Tome VI.
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MUSA PARADISIACA. Linn.
(191)
t. Fécule de lPactinenchyme.
Fig. 3,4,5, 6 et 7. Grains de fécule
Fig. 8. Jeune cloison encore ovenchymateuse.
a, b, c. Les trois plans de cellules ovoïdes.
” d. Cellule déjetée.
e. Clestine très-jeune.
Fig. 9. Cellule étoilée adulte.
a. Rayons.
b. Place de jonction d’un rayon avec son analogue d’une au-
tre cellule,
c. Grains verts de chlorophylle.
Fig. 10. Cloison vieille prise hors de la lacune aérifère d’un pétiole
de Musa puradisiaca.
a. Ovenchyme sans cristaux.
b. Prismenchyme très-peu cristallifére,
c. Cristaux occupant un des coins des cellules.
d. Globules muqueux immobiles.
e, Prismenchyme devenant de l’actinenchyme.
f. Cristaux prismatiques,
g. Cristal en parallélipipède rectangle.
h. Bras ou rayons de l’actinenchyme,
i. Cristaux déformés par leur jonction.
k, k. Deux cristaux réunis.
Z. Centre des cellules; cristaux vus à plat.
m. Cristal rhomboïdal, vu de côté.
0. Pied d’une clestine.
p. Sommet arrondi de la clestine.
g. Botte de cristaux aciculaires.
r, 8 Fluide granulifère intérieur.
Fig. 11. Clestine à un grand nombre de jambesa,b,c,d,e,f,gq,h,
liés aux rayons des cellules stellées. 2, À, sommets arron-
dis et libres de la clestine.
Fig. 12, Clestine colorée par l’iode.
u. Sommets peu colorés (parois).
b. Granulations du fluide intérieur.
ce. Botte de cristaux.
Fig. 18. Jeune clestine.
a. Botte de cristaux.
b. Paroi de l'organe.
(192)
HISTOIRE LITTÉRAIRE DE LA BELGIQUE.
Notice sur Jean-François Foppens, par le baron De
Reiffenberg, membre de l'académie.
Les deux François Foppens, pére et aïeul de celui dont
il est ici question , étaient des imprimeurs de Bruxelles,
qui relevaient encore leur honorable profession par leurs
connaissances. Versés dans le latin, l'espagnol et le fran-
çais, ils publièrent un grand nombre d'ouvrages en ces
trois langues, enrichissant quelquefois leurs éditions de
leurs propres remarques. Pierre-Ignace Foppens, frère
de l’auteur , et mort le 18 mars 1761 (1), marcha sur leurs
traces. Il avait, comme son père, le S'-Esprit pour enseigne.
Bruxelles alors s’efforcait, quoique de loin, de partager
avec la Hollande le commerce de la librairie, essayant déjà
quelque peu de celte contrefaçon qui excite tant de co-
ère aux bords de la Seine, mais d’une contrefaçon in-
telligente, qui ajoute un nouveau prix à l'œuvre qu’elle
reproduit. Ces typographes , en réimprimant plusieurs ou-
vrages curieux, où il y avait des choses hardies pour le
temps, se mettaient à couvert sous le voile de l’anonyme.
C'est ainsi que le supplément de Strada , donné en 1729,
par Pierre Foppens, et Liré d'un vieux manuscrit apparte-
nant au conseiller De W ynants, est annoncé commeimprimé
à Amsterdam par Pierre Michiels, et que la Satire Méni-
pée, de 1709 et de 1726, porte l'adresse de Mathias Kerner
de Ratisbonne, quoique l’inspeclion des caractères rap-
pelle le Commines de 1723, mis au jour par François
Foppens, père de notre auteur, et que les planches de
Harrewyn trahissent une origine bruxelloise.
(1) Annonce mortuaire imprimée,
(193)
Le Duchat, cet érudit passionné pour la scolie, et qui,
sans rien inventer, avait de l'originalité à force de connaî-
tre des choses singulières, était comme les Godefroy(1), en
correspondance avec les imprimeurs Foppens, et leur en-
voyait ses notes sur le Catholicon, l'Histoire du baron de
Féneste, le Journal de Henri III et d’autres livres sur les-
quels il faisait des commentaires et de ces espèces d’appen-
dices appelés par les doctes de la renaissance animadver-
siones , adversaria, conjectanea , symmictæ, variæ lec-
tiones , ou baptisés d’autres noms qui semblent burlesques
à nos littérateurs musqués, bien qu’ils soient de beaucoup
moins ridicules que les titres péniblement recherchés
de nos tristes brochures. C’est Le Duchat qui, lorsque
P. Foppens alla à Paris, le recommanda au P. Helyot et à
l’incomparable M. De la Monnoye (2).
Jean-François Foppens, naquit à Bruxelles le 17 no-
vembre 1689. Sa mère élait Jeanne de Surmont, fille de
Pierre de Surmont, et de Catherine Bosch, et nièce de
Pierre de Surmont et dé Françoise Le Mire, parente de
Jean Le Mire. évêque d'Anvers, veuve de Dominique deKer-
pen, licencié en droit, avocat au conseil de Brabant, admis
dans la famille patricienne ou lignage de T'Serhuygbs.
(1) 11 y a des documens sur les Godefroy, gardes des archives de
Flandre, dans la Votice de M. Le Glay, sur les archives du Département
du Nord. Lille, Danel, 1835, in-&, pp. 10 —16 ; autre plus étendue,
1839 , grand in-8, pp. 18-22.
(2) Voy. des lettres de Le Duchat aux Foppens dans les 'iBlobide
historiques de M. Le Glay, Lille, 1838, in-8, pp. 29, 31, 35, 37. Le
Duchat , dans une lettre du 15 février 1716, à P. Yoÿpent: lui dit, à
propos des mémoires de Commines : « Il n'appartient qu’à vous, Mon-
» sieur, de déterrer et de publier de si bonnes pièces , et en si grand
» nombre que nous en voyons sortir de dessous vos presses, »
( 194 )
Son parrain fut le célèbre chancelier de Brabant, Jean-
Baptiste Christyn, dont descendent les Ribaucourt d’à-
présent.
Outre Pierre-Ignace déja nommé, il eut encore un frère
et deux sœurs, savoir Dominique-Xavier Foppens (1), li-
cencié en droit, chanoine et doyen d’Anderlecht, décédé
dans la nuit du 17 au 18 mars 1767, Jeanne-Thérèse,
morte dans le célibat et Marie-Françoise, mariée à Jean
de Hulstere, marchand de vin, d’une famille dont descen-
dait un homme d'esprit et de talent, M. Pierre de Hulstere
de Bruxelles, qui vient de terminer sa carrière (2).
Il filses premières études chez les jésuites de Bruxelles,
el fut envoyé en 1704 à l’université de Louvain, où il
étudia deux ans la philosophie, au collège du Lys, appelé
de Lille par M. Boissonade (3). Avant sa dix-septième année,
c’est-à-dire en 1706, il fut promu le second parmi les
maîtres-és-arts. Vers la fin de l’année 1713, il fut choisi
(1) La Biog. Univ. XV, 234, nomme mal les frères de Foppens Fran-
çois et Pierre.
(2) I avait cultivé les lettres avec succès, particulièrement la poésie.
Ses vers, la plupart vers de salon et de circonstance , étaient tournés
avec facilité : les recueils de la société de littérature et le volume in-
titulé Poésies de Pierre Brabancon sont là pour en faire foi. Depuis
15 ans, M. De Hulstere était condamné à une immobilité complète, at-
tendu que par un phénomène inexplicable en médecine, toutes ses arti-
culations s’étaient ossifiées. Cependant, malgré cet affreux supplice, il
avait conservé toute l’aménité de son caractère, toute la fraîcheur de
son imagination, Il a succombé enfin le 10 janvier 1839, à sa longue
agonie , malgré les soins de ses trois sœurs, exemple touchant d’un dé-
çouement sans bornes. Il était âgé de 59 ans. Les armes de De Hulstere
sont d’or, au chevron renversé de sable accompagné de trois feuilles
de chéne de sinople, une et deux.
(3\ Biog. Univ:
D
(195 )
pour enseigner la philosophie dans ce même collége, et
atlira beaucoup d’auditeurs à ses leçons.
Il s’appliqua alors à la théologie, y fut reçu licencié en
1715 et se prépara sérieusement à embrasser l’état ecclé-
siastique. Il avait fréquenté d’abord le colléce de Van
Malderen , ensuite le séminaire de Liége. L'une et l’autre de
ces maisons lui avaient procuré d’excellens directeurs :
Augustin Hendrickx, archiprêtre du district de Louvain,
el Jean-François Sloupi, nommé plus tard doyen de la
collégiale de S'-Pierre.
La guerre excitée par le jansénisme était alors des plus
acharnées. Foppens, qui se piquait de la plus scrupuleuse
orthodoxie , oblint un canonicat de l’église collégiale de
S'-Martin, à Alost. Nommé le 22octobre 1721, chanoine
de la seconde prébende de la cathédrale de Bruges, en
remplacement d'Alexandre Van Volden, il fut depuis cette
année même professeur de théologie au séminaire de cette
ville jusqu'au 19 décembre 1729, qu’il devint chanoine
gradué de l'église métropolitaine et primatiale de St-Rom-
baut , à Malines, comme successeur de François Ricquaert
de Bruxelles. En 1732 on le créa archiprêtre de la partie
occidentale du district de Malines, et en 1737 péniten-
cier ; enfin, le 4 août 1740, il reçut la dignité d’archi-
diacre occupée en dernier lieu par J. Melchior, et la
charge de censeur de livres.
La douceur du caractère de Foppens, la pureté de sa doc-
trine , l'étendue de son savoir, la vivacité de son esprit,
lui gagnèrent les bonnes grâces du cardinal d'Alsace , ar-
chevêque de Malines, qui aimait et cultivait les lettres,
et se plaisait à augmenter chaque jour sa bibliothèque,
léguée après sa mort, à l'archevêché. Malines, siége prin-
cipal de l'église belgique et du premier corps judi-
( 196 )
ciaire du pays , comptait à cette époque plusieurs hommes
instruits. Foppens était particulièrement lié avec Jérôme
Stevart de Bruxelles, mort doyen du chapitre de Malines,
le 2 novembre 1750, et avec Corneille-Paul Hoynck Van
Papendrecht, archiprêtre comme lui, au moment où il
décéda, le 13 décembre 1753. Il ne pouvait éviter d’en-
tretenir, dans la même ville, des relations avec De Bors
d'Overen, qui méditait un ouvrage gigantesque sur la Toi-
son-d'Or, ni avec les frères Azevedo, H.-M.-F.-J. de Vivario,
les chanoines R.-N. Van den Eynde et Ch. Major, G.-J. De
Servais, G.-G.-F. Verhoeven, surnommé le docte épicier ,
les comtes P.-A.-L. de Coloma et G. de Guypers, tous
deux généalogistes, l’un descendant d’une ancienne fa-
mille, sans conteste, l’autre possédé de la manie de se
faire des aïeux , coûte que coûte, et tranchant du gentil-
homme à toute outrance. Le F. Norbert de St.-Julienne,
historiographe de l’ordre des Carmelites, était un de ses
correspondans (1).
La Belgique, sous le rapport littéraire, se trouvait dans
un état de décadence. C’est là un fait dont on peut con-
venir, sans mériter d’être accusé de calomnier son pays.
Triste patriotisme en effet, que celui qui, pour louer ce
qu'il aime , est réduit à altérer la vérité!
Le savoir n’était pas rare en Belgique, mais la philoso-
phie et le goût s’y découvraient avec peine, et l’imagina-
tion n’y avait que faire. De longues guerres, une mau-
vaise administration n'avaient pu remédier au mal. Il ne
faut pas néanmoins s’en rapporter à ce que disent sur la
condition intellectuelle des Belges, des écrivains enclins
{1) Bibl, Hutih. VI, n, 476.
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(19%)
à la satire (1). Dans sa longue carrière, Foppens fut le
contemporain d'un grand nombre de Belges qui tien-
draient partout une place honorable, mais qui malheu-
reusement agissaient sans ensemble, remuaient peu d'idées
(1) L’auteur cynique d’un livre que nous n’osons nommer ici et qui
parut en 1766, s’y exprime de la sorte : « Les Brabançons en général, ainsi
que les Flamands, ieurs voisins , sont le peuple le plussot, le plus vain,
le plus superstitieux de toute l’Europe. Pendant que l’on voit s’élever de
temps en temps chez les autres nations, même en Espagne, quelque
génie sublime, soit dans la littérature, les arts ou la philosophie, ces
animaux belgiques croupissent encore dans une léthargie, dans une in-
dolence qui fait honte à l’humanité. Les prétendus beaux esprits qui se
trouvent parmi eux , ne sont que de pitoyables bavards que le plus petit
philosophe crotté qui court les rues de Paris, mettrait & quia. Si le ha-
sard vient à y produire quelque plante qui promette quelque bon
fruit , la superstition l’étouffe aussitôt... » Et en parlant de l’université
de Louvain : « Au lieu de donner à ses élèves des principes qui puissent
élever leur esprit, au moins jusqu’au sens commun, elle n’est qu’un
cloaque d’inepties et d’absurdités, un réceptacle de mille subtilités sco-
lastiques et ridicules , où un jeune homme qui aurait les moindres dis-
positions en y arrivant, se pervertit le jugement sansressource, » Il traite
aussi mal Anvers. « Tout ce qui y respire ne mérite pas d’être vu ( faute
fréquente aujourd’hui pour rien de ce qui y respire ne mérite... ); ce qui
peut seul y intéresser un galant homme, ce sont les peintures exquises
que l’on y voit des Rubens, des Van Dyck, des Jordaens, de ces pein-
tres admirables qui, aprés avoir illustré leur siècle et leur patrie, ont
fait place à un tas de misérables barbouilleurs , à des rapetasseurs de
xieilles croûtes , à d’indignes charlatans qui trompent impunément le
trop crédule étranger, en lui vendant de mauvaises copies ou quelque
enseigne à bière, pour des tableaux originaux. »
Le caustique Chévrier, disait en 1762 : « Bruxelles est une ville à qui
tous les aventuriers donnent la préférence ; elle en fourmille dans tons
les temps... Les lettres et les arts y sont en vénération, il n’y manque
que des connaisseurs , des savans et des artistes. » Les amusemens des
dames de B**, Rouen, 1762, in-12, p. 12. Le baron de Poellnitz, en
1735, appelle les habitans de Louvain Zes moins civilisés des Pays-Bas.
Tom. vi. é 14
( 198 )
el vivaient en dehors de la société sur laquelle ils n'avaient
pas d'influence. Outre ceux que j'ai déjà nommés, je ci-
terai encore Corn. Van Gestel {mort le 19 janvier 1748), les
bollandistes Du Solier, Cuper, Janning et Baert, le baron
J. Le Roy ( m.1719),le P. Charles Delewarde (mm. 1724 ),
le jurisconsulte Z.-B. Van Espen ( m. 1728 }), le poète la-
tin Livin de Meyere (m. 1730), le comte G. De Wynants
(m. 1732), le théologien P.-L. Danes (m. 1738 ) (1),
J. Knippenberg ( m. 1742 ), Marc de Neny, pére du chef-
président du conseil privé (m. 1745 ), le P. B. De Jonghe
(m. 1749), P. Dolmans et le baron De Crassier ( m. 1751),
Ch.-Fr. Gustis (mort 1752), J.-B.-L. de Castillion ( mort
1753), le médecin Rega {mort 1754), etc. Lorsque
Foppens termina sa carrière, Nelis, Paquot, Des Roches
Le Plat et plusieurs autres commençaient déjà à se faire
connaître, et le gouvernement de Marie-Thérèse, par de
sages améliorations ou par des innovations prudemment
calculées, s’apprétait à donner aux études une direction
plus conforme à l'esprit du siècle. Dévoué comme il l'était
a son pays, Foppens eût salué avec transport celte aurore
d’un beau jour. Quant à la présence de J.-B. Rousseau et
de Voltaire à Bruxelles, c’étaient des événemens qui
n'avaient guère le pouvoir de le toucher : le théâtre, la
poésie autre que celle enseignée par Smetius, ne le re-
gardaient en aucune manière; il devait préférer de beau-
coup le P. Nicéron à l’auteur de Zaire, le P. Becanus
à celui de l'Ode au comte du Luc, et s'il accordait quel-
(1) Paquot a inséré une excellente notice sur la vie et les écrits de
Danes, en tête de la nouvelle édition de Generalis temporum ratio,
Louv., 1773, in-80.
( 199 )
que attention au mouvement littéraire de la France, pro-
prement dit, ce n’était sans doute que lorsqu'il semblait
mettre en péril les convictions religieuses.
Il s'éteignit au milieu de ses livres, le 16 juillet 1761,
à l’âge de soixante-douze ans (1).
On l'inhuma dans la cathédrale, près de l’auteljde 13
Vierge , devant l'entrée du chœur ; on lit encore au-dessous
de la statue de saint Jérôme, placée du côté de la porte , à
gauche, l'inscription suivante.
S. Hreronymo
EXxTREMI JUDICII PRÆCONI
Pos. s0Es Franc, Forpens
Brux. pgr. S. T.L.
Eccz. METROP. CAN. GRAD.
E POENITENTIARIO ARNCHIDIAC. -
Ori Eccz. Carta. BruG. Can.
Ur EJUS EXEMPLO TUBAM
NovissiMAM MEMORANDO,
IN DIE ILLA TREMENDA
NisERICORDIAM CONSEQUATUX.
Our 16 sur MDCCLXI,
R. L P.
Gilles-Joseph Smeyers, peintre de Malines, qui avait
de l'instruction et du talent (2), fit le portrait de Foppens,
(1) Paquot, Fasti acad. Louv. MSS., pp. 441 et 443. Bibl. Hulthem.,
VI, n° 805.
(2) 11 mourut à Malines, le 11 avril 1771. Le prévôt Azevedo, dont il
avait fait un beau portrait, était son protecteur et son ami; mais il
ne put cependant l’empêcher d’entrer à l'hôpital en 1769. Là du moins
il adoucit , autant qu’il était en son pouvoir , la position du malheureux
artiste. Après son décès, il voulut célébrer lui-même son service
funèbre. L'article de Marc Geeraerts inséré dans la Bibl. Lelgica, t. XI,
p. 838 , avait été fourni à Foppens par Smeyers, suivant une note de
G. D, De Azevedo, MS, Van Hulthem, 819.
( 200 )
M. Van Hulthem, persuadé qu'il méritait d'être gravé, es-
saya d’inutiles démarches pour le retrouver.
Par son testament, notre auteur fonda un anniversaire
dans la cathédrale, mais en interdisant toute sonnerie;
il légua une partie de ses manuscrits à Guillaume Van
Meldert de Malines, chanoine gradué dans l’un et l’autre
droits, et à qui il était uni par une amitié intime.
Le catalogue de sa bibliothèque parut à Malines en
1761, en un vol. in-8°. Celui de son frère, Pierre Foppens,
fut imprimé à Bruxelles en 1752, in-8. La bibliothèque
royale en possède un exemplaire tiré in-4° (n° 22529).
Jean-François Foppens avait choisi pour vignette de ses
livres un ange soutenant un écu parti d’or au double aigle
de sable coupé en pal, et de sable à trois faces ondées d’ar-
gent accompagnées en chef d’une gerbe d’or et en pointe
d’une hache de même posée en bande, avec la devise : Quod
vis videri esto.
La plupart des manuscrits de Foppens sont à la biblio-
thèque royale et beaucoup proviennent du fonds Van Hul-
them (1), ainsi que nous l’indiquerons tout à l'heure.
Après avoir tracé rapidement la vie de Foppens, vie
simple et unie comme ses mœurs, et avoir employé les
renseignemens que j'ai trouvés dans le MS. de Van Hul-
them n° 777, ainsi que ceux que M. De Ram m'a pro-
curés avec cette générosité littéraire qui va si bien à l’opu-
lence (2), il me reste à donner la liste des ouvrages de
Foppens, laquelle ne se rencontre nulle part complète, pas
(1) Voisin, liminaires du 6e vol. de la Bibl. Hulthemiana, p. vx, 1x.
(2) Vita et elogium Joannis Baptistae-Francisci Foppens, in-fol.,
6 pp. Notes diverses.
( 201 )
mème dans la Biographie universelle, où j'ai inséré un
supplément à l’article de M. A. Beuchot (1). Gelte liste an-
nonce du moins des travaux immenses.
OUVRAGES IMPRIMÉS.
1. Aistoria episcopatus antverpiensis, continens episcoporum se-
riem et capitulorum, abbatiarum et monasteriorum fundationes, etc.
Bruxellis, Franciscus Foppens, 1717, in-4°.
Un exemplaire avec des corrections manuscrites de l’auteur est indi-
qué dans le catalogue de Verdussen, p.229, n° 95. Il fut acheté 5 florins
de change par le chanoine Bruyninckx.
2. Historia episcopatus Sylvæducensis, continens episcoporum
el vicariorum generalium seriem et capitulorum, abbatiarum et
monasteriorum fundationes, etc. Ib., apud eundem, 1721, in-4°.
Biblioth. hist. de la France, 1, 9064.
On a une traduction flamande de ce livre.
5. Auberti Miræi opera diplomatica et historica , ediho secunda
auctior et correctior. Tom. I et II, Lovanii, Ægid. Denique, et
Bruxellis, Franciscus Foppens, 1725 ; tom. III, Petrus Foppens,
1754; tom. IV apud eundem, 1748.
- Bibl. hist. de la France, 1, 5088, III, 39319.
Les exemplaires où les pages 279-280 et 459-460 se trouvent avec les
cartons qui les ont remplacés , sont très-recherchés. Ermens , catalogue ,
no: 3811, 3812.
Le premier volume est dédié à François-Philippe, prince de Rubempré
et d'Everbergh, par une longue pièce latine, en hexamètres, signée
de François Foppens, imprimeur à Bruxelles et de Gilles Denique, impri-
meur de l’université de Louvain, qui s’étaient associés pour l’impression.
Quand Foppens commença cette publication, il était professeur à
Louvain, au collége du Lys. 11 la termina à Bruges, encouragé par
l’évêque Joseph Van Susteren, qui lui ouvrit ses archives avec empres-
———————_—_—— ——— ————————— .———— —————— — ————— <<<
(1) XV, 232-34. LXIV, 255-256.
( 202 )
sement, Il déclare encore avoir reçu des secours considérables du car-
dinal de Malines et de Joseph Godefroy, archiviste de la chambre des
comptes à Lille, ainsi que de Théodore Godefroy, son fils et son suc-
cesseur (1). Deux lettres de J.-F. Foppens à J. Godefroy, écrites en 1740
et 1741 et publiées par M. Le Glay, dans ses Analectes (2), contiennent
des détails sur ce point. Foppens ajoute (3) qu’un article des Actu eru-
ditorum de Leipzig, de l’an 1742, ne l’avait pas médiocrement soutenw
dans son entreprise.
En réunissant les quatre recueils diplomatiques de Miræus , il s'était
sérvi des corrections nombreuses que ce savant éditeur avait faites sur
les exemplaires à son usage. Malheureusement il ne put conférer le texte
imprimé avec les originaux, ni faire disparaître ainsi les altérations pré-
méditées, les passages mal lus et les lacunes qu’on doit moins imputer
à Miræus qu'aux copies qu’on lui avait communiquées , et qu’il n’avait
obtenues souvent qu'avec une peine extrême; les notes ne sont pas.
non plus toujours exemptes de fautes.
Le second volume contient environ 500 diplômes inconnus à Miræus.
Le troisième et le quatrième volume sont dédiés au cardinal d'Alsace
de Boussu et portent l’approbation d’Hoynck Van Papendrecht, le sa-
vant éditeur des Analecta Belgica, digne en tous points d’être le censeur
de Foppens. Ces volumes forment un supplément dont il est étonnant
que ne parle point M. Drouet, qui, en 1772, a mis au jour une nouvelle
édition de la méthode de Lenglet Du Fresnoy pour étudier l’histoire.
À la fin du troisième volume est une table pour ce tome et les deux
précédens; le quatrième en a une particulière.
Dans sa Bull. Belq., à l’article de Miræus, Foppens dit qu’il lui reste
encore un quatrième volume à donner. Il avait extrait plusieurs pièces
d’un recueil MS., gardé encore actuellement à l’archevéché de Malines
et intitulé : Amati Coriache, archid. et vic. gen. Mechl. miscellanea,
seu collectio monumentorum. 15 vol. in-fol. (4).
4. Oratio panegyrica in honorem S. Caroli Borromæi, exhibens
operarèum veangelicum, habita in die octava ejus in ecclesia cathe-
drali S. Donatiani Brugis , die 11 novemb. 1726, in-fol.
(1) Préface du 3e vol.
(2) Pp. 77, 79.
(3) Préface du 4e vol.
(4) Compte rendu des scances de la comm. roy. d'hist., 1, 177,
( 203 )
5. Oratio panegyrica exhibens S. Lucam evangelistam , medicum
corporum et animarum , dicta Bruxellis in ecclesia parochiali S. Ni-
colai , 18 octobris 1750, in-fol.
6. Oratio panegyrica exhibens S. Carolum Borromœum velut
alterum Judam Machabœum, habita Bruxellis, die 4 novembris
1729 , in SS. Michaelis et Gudilæ, ac rursum in octava sive 11
sequente in cathedrali ecclesia S. Donatiani Brugis, in-fol.
7. Compendium chronologicum episcoporum Brugensium, nec
non praepositorum , decanorum el canonicorum , etc., ecclesiae cathe-
dralis S. Donatiant Brugensis. Brugis, Jac. Beernaert, 1751,
in-8° ou in-12, 272 pp.
Foppens et Arents, chanoines de la cathédrale de Bruges firent ce
livre en société. Arents fut depuis archidiacre de Bruges. Ermens,
Bibliogr. histor. des Pays-Bas, MS. de la bibl, roy., Fonds Van Hulthem,
no 898, t. II, p. 412.
8. Bibliotheca Belgica, sive virorum in Belgio vitu scriptisque
illustrium catalogus librorumque nomenclatura, continens scrip-
tores a clariss. viris Valerio Andrea, Aub. Miraeo, Franc. Sweertio
aliisque recensitos usque ad annum 1680. Bruxellis, Petr. Fop-
pens , 1759, 2 vol. in-4°, figg.
Bibl. hist. de la France, IV, 45694.
Cet ouvrage est celui qui fait le plus d'honneur à Foppens et qui l’a
rendu cher aux gens de lettres. Il est aussi dédié au cardinal d’Alsace.
Dans la dédicace, l’auteur déclare qu’il doit à ce prince dé l'Église
plusieurs renseignemens écrits de sa main, et qu’il a puisé avec fruit
dans la bibliothèque archiépiscopale, commencée par l’archevèque
Jacques Boonen et augmentée de plus du double par Philippe d’Alsace.
Il transcrit même une partie de l’acte en vertu duquel ce dernier avait
attaché cette bibliothèque au siége de ses successeurs et au chapitre
métropolitain.
Dans la préface, il remarque que Valère André n’avait traité que d’en-
viron 2350 auteurs et que lui en a ajouté près de 560.
Cependant il s’en faut que lui-même soit complet.
Ermens a calculé que Foppens a parlé de 1954 écrivains qu’on ne
trouve pas dans les mémoires de Paquot, et que ce dernier donne les
articles de 1438 omis par Foppens (1).
(1) Catal, n° 3683, 3684.
( 204 )
Le Dictionnaire historique de Prosper Marchand (1) contient urr ar-
ticle critique sur l’ouvrage de Foppens. Malgré le mérite incontestable
de ce bibliographe on peut faire sur lui les observations suivantes :
1° 1l est loin d’avoir comblé les lacunes.laissées par ses devanciers,
et depuis qu’il a écrit on a accumulé d’ailleurs une quantité considé-
rable de matériaux qui pourraient servir aujourd’hui à le compléter
en le rectifiant.
2° Il a fait au travail de Valère André des corrections dont quelques-
unes métaient rien moins que motivées, des suppressions, telle que
celle de la Topographia belgica , et des mutilitations qui obligent d’avoir
et de consulter les éditions de 1623 et 1643.
30 Il y a entre celles-ci et celle de 1739 des variantes qui valent l&
peine d’être vérifiées, par exemple la date de la mort d'Abraham
Gorlaeus, est marquée de ces trois manières différentes :.
Valère André, 1623 ; 1610.
Le même, 1643; 15 avril 1609.
Foppens , 1739 ; 15 avril 1569.
Il serait facile de multiplier de semblables citations.
4° Foppens montre en général moins d’impartialité que Valère André:
5° Ses éloges, comme ceux de ce dernier, sont trop vagues ct distri-
bués souvent sans mesure,
6° Les détails biographiques ne sont pas assez nourris.
7° La partie bibliographique laisse beaucoup à désirer.
En effet, les notices devraient contenir la liste exacte des ouvrages de:
chaque écrivain, de leurs différentes éditions et traductions. Il faudrait
en outre que les titres, formats, nombres de volumes fussent marqués
avec exactitude et qu’on ne se contentät pas, comme le fait Foppens,
de traduire ou d’abréger en latin les titres en langues modernes.
8 Pour joindre à la Zrbliothèque belgique V'utilité de l'Onomasticon
de Sax, il serait bon d'ajouter, à la fn de chaque notice, l’indi-
cation des sources auxquelles on peut recourir pour connaître plus
amplement celui dont on crayonne la vie,
90 Enfin l’iconographie se compléterait également autant que possible.
M. Beuchot assure que Foppens n'avait pas promis, comme le dit
3.-F. Jugler sur Struvius (Z201. hist. literaria, p. 1236), de donner ur
troisième volume comprenant les auteurs belges depuis 1680, qu'ik
avait dit seulement qu'il remettait la suite de sa Pibliotheca belqicæ
(4) P. 101-109, note C. Cf, D. Clément, Bibl. curieuse , IL, 491 (85).
( 205 )
à d’autres temps, on même dans d’autres mains (posteriores aut con-
temporaneos aliis curis, seu meis , sive potius virorum eruditorum
relinquens ). Foppens s’est effectivement exprimé ainsi dans son aver-
tissement au lecteur bénévole ; mais dans la dédicace, il parle expres-
sément d’un troisième volume : xecdum attentis dis, qui ultimis nostris
temporibus vixerunt aut scripsorunt : quorum proinde ain tomo III
habenda est oratio. Sequetur is, Deo vitam, vires et temporis otium
donante. Cela suffit pour légitimer l’assertion de Jugler. D'ailleurs dans
le catalogue de la bibliothèque de Pierre Foppens, frère de notre
auteur, on lit, pag. 389 : Omnes qui opus hoc norunt, tomum tertium
ÿmpatienter expectant.
. Foppens ne fut pas exaucé dans son vœu. Cependant il conserva
un exemplaire de la Zibliotheca belgica , intercalé de papier blanc,
sur lequel il fit des corrections et des additions jusqu’à sa mort. Il
avait ébauché aussi, sur des feuilles séparées, un supplément dont
nous parlerons tout à l’heure, et qu’il laissa à Jacques Goyers, lec-
teur en théologie au séminaire de Malines, depuis curé de Haeren et
d'Hulmelshem, enfin chanoine d’Anderlecht. Outre l’exemplaire de
la Bibliotheca belgica dont je viens de parler, et où Goyers a inscrit
quelques notes, il y en a un second, pareillement en 4 volumes, avec
des notes de Foppens, de M. Van Hulthem et beaucoup de Goyers.
Ces dernières, dit M. Van Hulthem (Zibliogr. hist. d'Ermens, MS., II,
474), sont un véritable fatras, qu’il est cependant bon de conserver
ét de consulter dans le besoin. Ces trois ouvrages sont à la bibliothèque
royale, fonds Van Hulthem, nos 820, 821, 823 des MSS. La même bi-
bliothèque contient, sous le n° 819 de la section des MSS., un exem-
plaire de la Libliotheca belgica , partagé en 4 volumes, interfoliés de
papier bianc , enrichis de notes manuscrites et de portraits et d’épi-
taphes gravés, qui manquent dans les autres exemplaires.
L'auteur de ces notes, peu intéressantes au fond, auxquelles M. Van
Hulthem en a ajouté beaucoup d’autres plus substantielles, est Gérard-
Dominique de Azevedo Coutinho y Bernall, né à Malines le 4 août 1712,
prêtre , prévôt et chanoine de l’église collégiale de N, D. au delà de la
Byle, à Malines, mort dans la même ville, le 22 février 1782 , et frère
de J.-F.-A.-F. de Azevedo, le généalogiste, confondu avec lui dans le
supplément à la Biographie universelle (1).
(1) Foy. notre Bibl. historique el les notes sur l'introduction au 1er volume de
Philippe Mouskes, pag. cecLxx1v,
( 206 )
L’exemplaire de la bibliothèque de Louvain offre pareillement quelques
annotations manuscrites. La bibliothèque du Roi, à Paris, en possède
un exemplaire en 11 volumes, avec des notes de Henri Vanden Block,
chapelain de Ste-Gudule, à Bruxelles, dont les livres furent vendus
en 1807. M. Beuchot aflirme qu’elles sont de peu d’importance , mais
rien n’est indifférent en bibliographie, et M. Beuchot le sait mieux
que personne,
Un exemplaire, relié en 12 volumes, avec des notes et additions
manuscrites de J.-B. Verdussen , est marqué sur son catalogue, pag. 350,
n° 110; son cousin, Jérôme Verdussen, en fit l’acquisition au prix de
31 florins de change de Brabant, pour feu M. Van Wyn, alors conseil-
ler-pensionnaire de la Briele, en dernier lieu archiviste des Pays-Bas,
lequel y ajouta quantité de notes de sa main.
9. Oratio funebris in exequiis augustiss. imp. Caroli VI, habita
Mechliniæ , die 24 januarii 1741. In-4%, 16 pp.
10. Basilica Bruxellensis, sive monumentu antiqua, inscriptio-
nes et cœnotaphia insiguis ecclesiæ collegiatæ SS. Michaelis et Gu-
dilæ, editio auctior et emendativr. Mechliniæ , Laur. Vander Elst,
1745 , in-8°, 2 parties.
La première édition fut publiée en 1677 à Bruxelles, sous le nom
d'Amsterdam, par le chancelier Christyn, dont Foppens donne la no-
tice en tète de la seconde partie qu’il a ajoutée au recueil de cet
illustre magistrat, et qu’il a enrichie d’un traité fort rare de Théodore
Locrius à Stratis, sur les miracles du saint Sacrement.
11. Luctus ecclesiae Mechliniensis a die 5 jan. 1759, quo obiit
emin. ac rev. DD. Th. Philippus S. R. E. cardinalis de Alsatia.
Bruxellis, Petr. Foppens, 1759, in-fol., 15 pp.
12. Jubilaeum quinti saeculi canonicorum Zellariensium (car-
mine heroïco , Brux. apud eundem), 1760 , in-4°.
15. Chronologia sacra episcoporum Belqii, seu series eorumdem
præsulum nuper ab illustriss. D. J.-B.-L. de Castillon, Brugensi
episcopo, usque ad annum 1719 edita ; nunc ud tempus praesens
continuata. Bruxellis, Ant. D'Ours, 1761 (opus posthumum),
in-8° ou in-12.
En vers hexamètres.
Le P. Holvoet, docteur en théologie, suppléa à ce qui manquait à
«e travail, par suite de la maladie et de la mort de l’auteur.
( 207 )
14. Carmina varia , variis annis edita.
Foppens n’était pas grand poète, toutefois il a fait beaucoup de
vers. M. Beuchot cite : Applausus ecclesiae Mechliniensis D. archi-
episcopo suo D. Thomae Philippo de Alsatia. In-fol.
15. Butavia sacra.
Sax attribue à Foppens cet ouvrage, qui est de H.-F. Van Heussen,
et la note qu’il insère dans ses Analectes ne rectifie point cette faute,
car elle ferait croire que Van Heussen publia, la même année que
Foppens, un livre sous le même titre (1).
MA NUSCRITS.
1. De diminutione dierum festorum et bullue quaedam desuper.
In-fol.
2. Belgica christiana, in qua omnium Belqü episcoporum vitae
ad haec usque tempora, accurate describuntur , eorumque effigies et
insignia gentilitia exhibentur ; junctae sunt delineationes praecipua-
rum Belqii ecclesiarum et urbium , tabulae quoque geographicae
singularum Belqii dioecesium.
Ce curieux ouvrage, orné d’un grand nombre de portraits, gravés par
Pontius, De Jode, Hollaer, Neeffs, Pilsen, etc., est marqué dans le
catalogue de Van Meldert, légataire d’une partie des manuscrits de
Foppens , Malines, 1780, p. 116, n° 1371. Il est conservé maintenant à
la bibliothèque de l’archevêché (2). La Pelgica christiana MS. que
possède M. le baron De Stassart , gouverneur du Brabant, et qui pro-
vient de M, J.-J.-A. De Stassart de Noirmont, n’est pas de ce dernier :
e’est tout simplement une transcription de l’ouvrage de Foppens (3).
35. Mechlinia christo nascens et crescens.
Marqué in-fol. cat. de Major, 1767, p. 489, no 6816. Il fut vendu 10:
florins de change. Voy. Bibl. Hulthemiana, V1, n° 736, Ce dernier
exemplaire va de l’an 670 à 1561; on lit au bas du folio 284 : finis
(1) Onomasticon, VI, 247, 673.
-
(2) Compte rendu des séances de la Commission royale d'histoire, À, 178:
(3) Biograph. univ, , XLVWE, 479.
( 208 )
tomi primi. Item en 3 vol. in-4o, catal. de Van Meldert, Malines, 1780,
p. 126, n° 1494. Ce manuscrit autographe a été vendu chez M. Ant.
Nuewens, à Bruxelles, en avril 1811. Le 8 février 1817, l'abbé Brasseur
l’acheta 80 francs pour la bibliothèque de Bourgogne, où il est en-
core (1). Il y en a une copie à la bibliothèque de l’archevèché de
Malines (2) , faite et augmentée par De Servais, en 8 vol. in-fol. On sait
que J.-C. Dierexsens a publié sur Anvers un ouvrage avec le même titre.
4. Doctores theologiae ac professores qui supremum hunc titulum
adepti sunt Lovanii. In-fol.
Catat. de M. De Swerte, Brux. 1787, p. 5, no 54 ; vendu 7 florins à
G.-J. De Servais, chez qui M. Van Hulthem l’acheta, en 1808. Cut. VI,
n° 806. Le dernier propriétaire y a fait des additions jusqu’en 1812.
Ce précieux volume, écrit entièrement de la main de Foppens, est orné
d’armoiries enluminées. Première partie 67 feuillets, seconde 40.
5. Promotiones in artibus ab erectione universitatis Lovan. usque
ad annum 1766, ex libris originalibus facultatis artium collectæ.
Catal. de M. De Swerte, p. 5, n° 55; vendu 7 flor. à G.-J, De Servais
qui le continua. M. Van Hulthem, en devint possesseur et y fit, de son
côté, des additions (3).
Ce volume, qui a été un peu endommagé par un biscaïen, lors de la
canonnade du parc, en 1830, est accompagné de beaucoup de pièces
intéressantes pour l’histoire de l’université de Louvain.
G. Institutio archiepiscopatus el archiepiscopi Mechliniensis et
alia. In-fol. Voir n° 46.
Catat. de M. De Swerte, p. 6, no 66. C’est probablement l’ouvrage in-
titulé dans le MS. de M. De Ram: Zrectio archiepiscopatus Mechlinien-
sis ac vitae archiepiscoporum Mechliniensium , in-folio.
7. Bibliothèque historique des Pays-Bas, contenant le catalogue
de presque tous les ouvrages, tant imprimés que manuscrits, qui trai-
tent de l’hisloire, principalement des XVIT provinces, avec des
notes. In-fol.
_
(1) Introduction à Vander Vynckt, pag. xvI.
(2) Compte rendu des séances de La Commission royale d'histoire; X, 178,
(3) Bibl, Hulihemiana, VI. n° 807
( 209 )
Catat. de Cobenzl, Brux, 1771, p. 265. Il fut acheté chez ce ministre
au prix de 31 fl. de ch. pour la bibliothèque de Bourgogne, où il est avec
une copie. Ermens, qui rédigea le catalogue du comte de Cobenzl, et qui
avait eu, par conséquent, le loisir d'examiner ce manuscrit, en porte un
jugement assez peu favorable, et en effet, ce travail surtout aujourd’hui
est d’une insuffisance absolue. dl. Van Hulthem s’en était fait faire par
le sieur Temmermans une copie à son usage, Catal., VI, n° 893. Une
autre, provenant de M. Van Heurck, est chez M. Théodore De Jonghe,
à Bruxelles.
8. Supplementum bibliothecae Belgicae J.-F. Foppens , 5 vol.,
in-4° en feuilles (Foy. imprimés , n° 8).
NS. autographe avec de nombreuses additions du chanoine Goyers et
de M. Van Hulthem. Bibl. Hulth., VI, no 822.
J'ai déjà dit que Foppens avait , avant de mourir, confié tous ses maté-
riaux pour un supplément à la bibliothèque Belgique, à J. Goyers (1),
qui se proposait de les publier après les avoir revus et complétés ;
mais il n’exécuta point son dessein , et laissa en mourant ses notes au
P. Jacob, ex-capucin, natif de Lummen, et nommé dans son ordre
Pater Gisbertus Lummius (2), auquel M. Van Hulthem les acheta pres-
que toutes en 1811. Plusieurs parvinrent entre les mains de M. De Ram
qui les prêta à l’auteur des Lectures, ouvrage qui serait plus utile et
plus vrai, si l’auteur, en citant ses sources et en soignant son style,
n’avait souvent forcé le passé à devenir complice de ressentimens et de
petites colères auxquels rien souvent ne peut servir d’excuse.
9. Correspondentie-brief van den zeer geleerden heer Herman
Schomaker, secretaris der stad Zutphen (1764). In-4°, 12 pp.
(1) Biogr. Univ., LXV, 570—71. Dans cet article on a imprimé Krippenberg
pour Knippenberg et Gæthols pour Goethals. Ajouter aux écrits de Goyers que j'ai
indiqués dans la Biogr. Univ. : Quæstiunculæ duæ. Prima, an dum passio Domi-
nica in Dominica, in palmis et in duobus aliis diebus solemniter, in missa can-
tatur, luminaria omnia in altari extingui possint ? Secunda, an canonicorum
capitulum statuere possit, quod illi, qui certis diebus officio matutino et laudi-
bus ad finem usque interfuerint, et tum missam celebrabunt, plumbetis gaudere-
possint, licet aliquantisper serius (wat te lact) ad primam venerint. Brux. 1791,
in-12, 16 pp.
2) La donation fut faite par testament passé le 8 août 1807. Par ces dispositions
dernières, Goyers avait légué sa vaste bibliothèque au séminaire de Bois-le-Duc,
situé à Halder,
( 210 )
Bibl. Hulthem. , VI, no 823.
Relatif au suppl, que devait publier Goyers.
10. Annotata et literae RR. dominorum J.-F. Foppens et Jac.
Goyers. In-4°.
Bibl, Hulthem, VI, n° 824,
Concernant la Did]. Belgica.
11. Paquet de lettres adressées au chanoine Goyers par divers
savans et autres personnes , pour lui donner des renseignemens rela-
tifs à la Bisurorueca Beccica.
Bibl. Hulihem., VX, n° 825.
19. Paquet de lettres et d’autres documens sur le même sujet,
Bibl. Hulthem., NI, nc 826.
On y trouve, entre autres, la préface manuscrite du supplément à la
Billiotheca Belgica de Foppens.
15. Farde de notes du chanoine Goyers dont la plupart ont rap-
port au même travail.
Bibl. Hulthem., VX , no 827. .
14. Chronycke van Mechelen door den heere Foppens. In-4°.
Catal. de Van Meldert, p. 129, no 1525.
15. Analecta historica de vita et gestis Anton Perrenot de
Granvelle, primi Mechl. archiepiscopi, per eundem. In-4°.
Catal. de Van Meldert, p. 132, n° 1557. Bibl. Hulth., VL , nv 363, à la
suite de lettres du cardinal à Max. de Morillon et à d’autres.
16. Mémoires pour servir à l'histoire du conseil prive.
P
Catal. de Van Meldert, p. 132, n° 1559, Je possède une histoire du
conseil privé en deux gros volumes in-fol. MSS. ornés d’armoiries, par
M, Charlier, qui a profité des recherches de Foppens.
17. Analecta de Thomu Van Thielt, pseudo-abbate S. Bernardi
ad Scaldim. In-4.
Catat. de Van Meldert, p. 132, n° 1561. Voy. le Synopsis de Van-
develde.
( 211 )
18. Vecrologium Belgicum virorum Romano-Catholicorum ; Prae-
sertim ex academia Lovaniensi, qui infulis (Ermens a écrit insulis),
* doctrina , pietate, dignitate, libris editis, ac Praecipue sinqulari
erga sanctam sedem observantia claruerunt ab anno 1640 (1630),
usque ad annum 1759. Oppositum necrologio nuperis annis apud
Batavos edito, una cum triplici indice alphabetico, chronologico et
onomastico ad supplementum Bibliothecae scriptorum Belgicorum
prodromus.
Catal. de Van Meldert, p. 132, n° 1562. M. Van Hulthem l’acheta à la
vente de M. De Servais, à Malines, comme il le dit lui-même ( Bibl. hist.
d’Ermens, Il, 475) et non à celle de Nuewens, Bibl. Hulth., VI, no 472,
Ce MS. contient 293 pp. non compris les additions de Goyers.
Autre copie : cum additamentis, H. D. V. N.,in-80. Bibl. Hulth., VI,
473. Cet exemplaire, auquel M. Van Hulthem a fait quelques additiohs,
va jusqu’en 1763.
L'ouvrage avait déjà été mis sous presse et les huit premières pages
en sont imprimées.
19. Decani ecclesiae collegiatae sanctae Monequndis Chimucensis
in Hannonia. In-fol.
Premier catal. de M. de Santander, Brux. 1767, p. 23, no 247.
20. Instructio decanorum christianitatis divecesis Brugensis. In-4.
Tbid., p. 56, n° 650.
21. Ecclesia collegiata S. Petri in Anderlecht. In-4°.
Ibid. p. 56, n° 650.
22. Canonicorum Leodiensium series ab anno 1502, ad an. 1747.
In-8°.
Ibid., p.140, n° 1738.
25. Libellus vere famosus de admirandis Belgii turribus, earum-
que incendiis. In-4°.
De la main de Foppens, avec des pièces imprimées et des estampes
devenues très-rares. Bibl. Hulth., VE, no 211.
24. Jo.-Fr. Foppens, Br. opera poetica tam manuscripla quam
impressa. In-fol.
(212)
Collection unique, provenant de la bibl. de Nuewens. La plupart des
pièces sont écrites de la propre main de Foppens. Zéblioth. Hulth.,
VI, 214. Voy. n° 14 des imprimés.
25. Pièces manuscrites et imprimées , touchant le séjour des Fran-
çais en Belgique de 1745 à 1748, recueillies par J.-F. Foppens. In-4°
(voy - n° 50).
À la vente de feu M. Dotrenge, en mars 1838, j'ai acheté pour la bibl.
royale, un recueil analogue, in-fol.
À
.
.
26. Histoire ecclésiastique des Pays-Bas, par J.-F. Foppens,
servant de second volume à la même histoire par G. Gazet. 2 tom.
en 1 vol., in-fol., pp. 525 et 520.
M. Van Hulthem, dans une note MS., dit que le style de cet ouvrage,
qui jette un grand jour sur l’histoire ecclésiastique, est clair, concis et
se fait lire avec plaisir, bien qu’incorrect. Cette compilation commence
en 768 et finit en 1759, Il y a une lacune entre les années 1536 et 1569.
C’est le n° 28 du Cutal. des MSS. de Nuewens. Brbl. Hulth., VX, no 467.
L’original est pareillement à la bibl. royale.
27. Notice des archevéques et évêques des Pays-Bas, après leurs
créations l’an 1559, avec leurs armoiries et inscriptions sépulcrales ;
recueillies par J.-F. Foppens, avec quelques annotations de Jean
Bapt. Verdussen et des portraits. In-fol. de 256 pp., 22 portraits
gravés et environ 185 arm. dont 171 enluminées.
Le MS, autographe fut acheté par M. Van Hulthem chez Ant. Nuewens,
en 1811. Bibl. Hulth., VI, no 485.
28. Paquet de documens et notes historiques et autres , de la main
de J.-F. Foppens et du chanoine Goyers. In-4°.
Relatifs surtout à l’hist. ecclés. des Pays-Bas, Bibl. Hulth., NI,
n° 558. Û
29. Chronique abrégée de la ville de Brusselles, de 647 à 1760.
In-fol.
Le MS. autogr. est à la bibl. royale ainsi qu’une copie provenant de
M. Van Hulthem, Catal. VI, n° 699. L'abbé Mann, dans le premier vol.
de son histoire de Bruxelles , n’a guère fait que transcrire ce MS, (/’oy.
l’introd, de mon édition de Vander Vynckt , p. xvi).
(213)
50. Annales des choses mémorables advenuwes en la ville de
Bruxelles et dans ses environs, depuis 657 jusque 1756, par
J.-F. Foppens. Gr. in-4°.
MS. qui paraît autographe , avec des additions d’une main plus ré-
cente : le vol. s’arrète à l’année 1588. Bibl. Hulth., VE , no 700.
51. Chronique de Bruxelles , de 974 à 1775. In-fol.
Ce MS. de 254 feuillets paraît avoir appartenu à Foppens; on y voit
plusieurs pièces écrites de sa main, mais on a dü y faire des additions
depuis lui: il fut acheté par M, Van Hulthem, à la vente de Nuewens.
Ce ne sont que des extraits, pièces et matériaux pour servir à l’his-
toire de la capitale du Brabant, et qui seraient fort utiles à ceux qui vou-
draient concourir pour le prix fondé par le prince de Ligne.
52. Clari Mechlinienses. In-fol.
Notices biographiques de diverses mains, de Foppens, Van Gestel et
autres. Brbl. Hulth., VI, no 838.
35. Dissertatio de Bibliomania Belgica hodierna, quae specialiter
de libris agitur quos, anno 1755, placuit phϾnices librorum appel-
lare. In-8°.
Dirigé contre Ch. Major. Bibl. Hulth., VI, n° 884,
34. Historia et series doctorum Academiae Duacensis ab anno 1562
ad ann.1750 ; auct. J.-F. Foppens. In-4°.
NS. autogr. provenant du chanoine Goyers. Bibl. Hulth., VI, no 818.
Entre autres choses intéressantes, on y lit une histoire du CoZlége An-
gluis, à Douai.
55. Histoire du conseil de Flandre, depuis son érection en 1585,
- jusqu’à l'an 1758.
Le MS. autogr. de 274 pp. in-fol., sans la table, est à la bibl. royale.
Voy. V'introd. à mon édit. de Vander Vynckt, p. xvi.
36. Epitaphia Brugensia quae extant in diversis ecclesiis; nec
non Ostendana, Dixmudana , et in ecclesiu purochiali de Poucques.
Collegit J.-F. Foppens.
Ce MS, in-fol. de 238 pp. sans la table, est à la bibl. royale. Voy, l’in-
troduction à mon édition de Vander Vynckt, p. xviij.
, Tou. vr. 15
(214)
571. Collectanea sacra Brugensia et Ostendana. Yn-fol.
Mème dépôt.
58. Collectanea sacra Namurcensia. In-fol. J
Même dépôt.
59. Fasti seu natales sanctorum Belqi a Jo. Molano, Aub.
Miræo, Arn. Raissio, Aut. Sandero, Barth. Fisenio, aliis hagio-
graphis collecti, auctore J.-F. Foppens, 5 vol. in-4°, portraits.
Avec des tables alph., topogr. et chron., à la bibl. royale. Voy.
V'introd. à mon édition de Vander Vynckt, p. xvi.
40. Acta et facta ucademicorum Lovaniensium edita et manus-
cripta.
NS. de M. De Ram. ;
41. Doctores artium Lovan. In-fol.
Idem. =
42. Doctores facultatis medicinae Lor. In-fol.
Idem.
43. Doctores utrinsque juris Lov. In-lol.
Idem.
44. Status dioecesis Buscoducensis ex originalibus et aliis missis
Romam. In-fol.
Idem.
45. Additiones el correctiones ad historiam sacram et prophanam
archiepiscopatus Mechl. R. D. Van Gestel. In-fol.
Idem.
46. Status ecclesiae et capituli D. Rumoldi Mechl. cèrca ann. !
1250, nec non ordo ac series praepositorum , decanorum Celerorum-
que canonicorum ejusdem ecclesiae jam pridem collegiatae, munc
autem ab anno 1559 metropolilunae. Ab anno 1100 usque ad
ann. 1760. In-fol. (7oy. n° 6). |
MS. de M, De Ram,
|
(215 )
47. Ordo praebendarum et canonicorum ecclesiae S. Rumoldi ab
anno 1400, usque ad nostra tempora 1754. In-fol.
Idem.
48. Reflectiones circa mutationem faciendam in officiis propris
ecclesiae metropolitanae. In-8°.
Idem.
49. Disserlationes historico-canonicae de canonicis et pruebendis
graduatis. In-8°.
Idem.
50. Journal de ce qui s’est passé à Malines , tandis que le roy de
France Louis XV en élait le maître, depuis le 12 may 1746 jus-
qu’au 25 janvier 1749, avec les actes vérificatifs. In-fol.
Idem, voy, n° 25.
51. Coloniensia, Moguntinensia, etc, quaedam. In-fol.
Idem.
52. Carmina concernentia canalem Lovaniensem. In-fol.
Idem.
55. Histoire du conseil de Brabant (1326—1760 ), in-fol., 418
feuilles avec la table. A partir de la page 597, le MS. n’est plus de
la main de Foppens.
À la bibl. royale. Introd, à mon éd. de Vander Vynckt.
54. Histoire du grand conseil de S. HI. In-fol. 551 feuil. avec les
. tables.
À la bibl. royale. Introd, à Vander Vynckt , p. xvi.
55—58. Dans les sommaires ajoutés par Foppens aux Lettres
secrètes de Marquerite de Parme, MS. de la bibl. royale dont je
vais donner une édition pour la société des bibliophiles de Bel-
gique , cet auteur renvoie à ses manuscrits relalifs, Î au concile de
… Trénte; W à l'inquisition et IT au procès du comte d'Egmont.
Je wai pu les découvrir jusqu'ici. Introd. à Vander Vynckt, p.xxix.
59. Bombardement de Bruxelles, par un témoin oculaire, avec les
estampes d’ A. Coppens et de R. Van Orley. In-4°.
De la main de J.-F Foppens. Voy. mes Archiv. philol., 1, 89 , où j'en ai
donné un extrait.
(26)
60. Miscellanées historiques concernant les diverses provinces des
Pays-Bas Autrichiens. In-fol.
Bibl. Hulth., VA, 239, no 796.
61. Oratio funebris arch. Marie Elisabethæ (1741).
Note MS. de Goyers.
62. Différens recueils pour l’histoire ecclésiastique, civile et
litéraire des Pays-Bas.
J'en ai vu plusieurs chez les demoiselles De Hulstere, à Bruxelles,
notamment un retueil de facéties sur la bière, le tabac, les formes
académiques, etc. Il se trouve encore ailleurs des papiers de Foppens.
M. Gyseleers-Thys , à Malines, en possède quelques-uns.
IISTOIRE ANCIENNE.
Recherches sur les associations politiques chez les Ro-
mains ; par M. Roulez , membre de l’académie.
Les associations et les partis politiques, qui se forment
soit en faveur de certains hommes, soit pour le triomphe
ou la défense de certains principes, ne sont pas le fruit
du régime constilutionnel des temps modernes. Rome,
pour ne pas parler d’autres États anciens, les a aussi con-
aus : les Coriolan, les Appius, les Cæson, les Gracches
y ont eu leurs coteries, comme aujourd’hui, tel chef de
parti ou tel représentant d’un système polilique s'appuie
sur la sienne. Dans l’ancienne Rome, où le recours à la
force matérielle fut souvent l'argument décisif que la lo-
gique des partis employa , pour entrainer les convictions,
un citoyen pouvait bien compter en général sur le sou- .
tien des membres de son ordre ; ainsi, lorsqu'il s'agissait
de maintenir ou d'étendre le monopole des priviléges aris-
tocratiques, le patricien prêtait main-forte au patricien. |
( 217 )
Mais 1l devait arriver aussi que les partis se fractionnas-
sent , faute de s'entendre sur les moyens d'atteindre un
but commun, ou bien parce que tout le monde ne vou-
lait pas se mettre au service d’ambitions individuelles.
L'institution de la clientèle, et, dans certains cas , aussi
celle des gentes , offraient encore un appui assuré. Mais
on n'aura pas tardé à comprendre qu’en politique il n’est
pas de prosélytisme plus ardent , de dévouement plus ac-
tif que celui qui prend sa source dans la communauté de
principes. Rome vit donc de bonne heure s'élever dans
son sein des associations libres ayant leurs modes de con-
stitution et de dissolution, et dont les membres étaient
tenus à des devoirs réciproques. Les savans qui se sont oc-
cupés de l’histoire du gouvernement romain , ont entière-
ment négligé ces associations. Le célèbre jurisconsulte al-
lemand Walter est le seul, que nous sachions, qui en ait
dit quelques mots dans son Histoire du droit romain (1).
Quoiqu’elles n'aient pas eu une existence légale, elles
mérilent cependant de fixer l'attention de l'historien, à
cause de l'influence qu’elles ont exercée sur les destinées
de l’État. Nous allons en rechercher les vestiges qui se sont
conservés dans les monumens historiques.
Les membres des associations dont nous voulons par-
Jer, sont appelés du nomde sodales (2), ou d'amici [éraipe,
(1) Walter, Geschichte der roemischen Rechts bis auf Justinian.
B, I, cap. [, s. 60.
(2) Voir sur l’étymologie de sodalis les diverses opinions rapportées
par Doederlein, Lateinische Synonymik, AV Th., s. 205 fg. Cf. Lindemann,
Commentarii in Pauli diaconi excerpta de signific. verbor., p. 667.
Festus (sub voce ) explique les deux principales acceptions du mot,
… Voici celle qui appartient à cet endroit : Ai (sodales dictos putant)
“qjuod inter se invicem suaderent quod utile esset.
( 218 )
gi (1)], et les associations elles-mêmes sont désignées
par les mots sodulitates, sodalicia, amicitiæ (éraipuou).
Observons toutefois que ee nom de sodales s’appliqua chez
les Romains aux membres de réunions de diverses espèces :
non-seulement on l'employa pour désigner les membres
de certains colléges de prêtres (2) ou des corporations d’ar-
tisans (3), mais, à partir du milieu du VI siècle de Rome,
on le donna encore à des personnes qui , en certaines cir-
constances et à l’occasion de certaines fêles, se réunis-
saient en un banquet (4). Cicéron fait dire à Caton l’an-
cien que ces réunions (sodalitates) prirent naissance sous
sa questure, lors de la célébration des fêtes en l'honneur
de la grande déesse (5).
Revenons aux associations politiques. Les traces les
plus anciennes que nous en rencontrions dans l’histoire
remontent à l’époque du dernier roi de Rome. Au rapport
de Denys d'Halicarnasse (6), Sextus, fils aîné de Tarquin,
feignant une inimitié ouverte avec son père, passa chez
les Gabiens , et amena avec lui un grand nombre de ses
(1) Denys d’Halic. emploie ordinairement le mot Étapes pour amis
politiques ; cependant 2/1 a quelquefois chez lui la même acception :
une preuve de cela, c’est que dans un passage (IX, 15), où il s’agit
des partisans des Fabii, il se sert successivement de l’un et de l’autre,
mot. J
(2) Voy. Orelli, Znscriptt. lat, selectar.amplissima collectio. 2364 sqq.
3) Voy. Orelli, #bid., 4056, 4207.
(4) Festus, loc. cit. : Sodales quidam dictos putant quod una sede-
rent, essentque, alit quod ex suo dapibus vesci soliti sint. Auctor ad
Herenn., IV, 51. Venit in œdes quasdam in quibus sodalitium erat
eodem die futurum. Perspicit argentum, vidit triclinium stratum , etc.
Cf. Stuckius, Antiquitat. convivalium, lib. I, c. 31.
(5) Cic., de Senvctut., ©. 13.
(6) Archæolog. roman. , AV, 54, p. 775, éd. de Reiske.
( 219 )
amis politiques et de ses cliens. Ce sont les amis politiques
des Tarquins que nous voyons à la tête de la conspiration,
qui avait pour but d'introduire secrétement dans la ville la
famille déchue (t). Denys fait plusieurs fois encore allu-
sion à ces associations durant les premiers siècles de la
république : il en est question lors de la troisième tenta-
tive faite par les Tarquins pour remonter sur le trône (2) et
à l’occasion de la retraite du peuple sur le mont Sacré (3).
C'est sur de semblables associations que s'appuyérent et
Coriolaän bravant la colère et les menaces du peuple, dout
il voulait anéantir les libertés (4), et les jeunes patriciens
Cæson Fabius et L. Valerius Publicola, lorsqu'ils inten-
térent une accusation contre Sp. Cassius , auteur de la loi
agraire (5) , et enfin le fils d’Appius Claudius, lorsqu'il se
porta candidat au consulat, lan 273 de Rome, au mi-
lieu de violentes dissensions entre les patriciens et les plé-
béiens (6). Quand les Fabiens se chargèrent de soutenir
seuls et à leurs dépens particuliers, la guerre contre les
Véiens, ils eurent pour auxiliaires non-seulement leurs
cliens, mais encore les membres des associalions dont ils
faisaient partie (7). C'est avec l’aide de leurs cliens et de
leurs amis politiques que les chefs du parti aristocratique
essayérent de provoquer le rejet des lois de Voléron (8),
et plus tard la loi agraire reproduite par les tribuns de
(1) Tit.-Liv., Il, 3: Æquules sodulesque adolescentium Tarquiniorium.
(2j V1, 74, p. 1210 et sq.
(3) VI, 46, p. 1143.
(4) VAE, 21, p. 1361, Zbid.. 54, p. 1436. Ibid. , 64, p. 1463.
(5) VUE, 76, p. 1695.
(6) VIH, 90, p 1732. ;
(7) 1X, 15, p. 1780.
(8) IX, 41, p. 1856.
(:3209) ;
Fan 301. Enfin ce furent encore ces mêmes amis qui
prêtèrent l'appui de leurs bras aux actes iniques qui signa-
lérent les derniers momens de la puissance des décemvirs
et en précipitérent la chute (1). Denys d'Halicarnasse est
de tous les historiens de Rome celui qui paraît avoir ob-
servé le plus attentivement le rôle important que les as-
sociations politiques ont joué dans les affaires de l'État.
Nous ne devons pas douter qu’il ne teur ait donné la même
attention pour les temps postérieurs , et que si la suite de
son ouvrage fût arrivée jusqu'a nous, elle ne nous eût
fourni des renseignemens ultérieurs sur l’histoire de ces
clubs. Ce n’est pas toutefois que Tite-Live les ail entiére-
ment perdus de vue. À la vérité les clubistes, suivant
Denys, qui s’opposérent à la loi de Voléron ou se firent les
supports de la tyrannie décemvirale, l'historien latin les
désigne sous la dénomination générale de jeunes nobles,
jeunes patriciens (2) ; cependant, dans un autre endroit,
il tranche le mot et nomme les amis politiques de Cæ-
son (3).
Mais nous devons nous hâter de dissiper les doutes qui
pourraient s'élever dans l'esprit du lecteur. En effet, il se
demandera peut-être si ces sodales (érapor) ne sont pas des
amis de cœur, et si ce n’est pas notre imaginalion qui les
transforme en membres de clubs. Un texte de Denys (4)
(1) X, 60, p. 2152. XI, 22, p. 2209. Jbid., 30, p. 2241. Jbid., 86, p. 2248.
(2) IL, 56 : Adolescontes nubiles. III, 37: Patriciis juvenibus sep-
serant lateru.
(3) IT, 14 : Juniores , id maxime quod Cwsonis sodalium fuit.
(4) XI, 22, p. 2210. La distinction entre lJ’ami ordinaire et l'ami
politique ressort nettement du passage suivant de Plaute (Casin. IH ;.
3, 18): Hic sodalis tuus amicus optimus.
(22)
prouve à l'évidence que nous ne prenons point le change
sur la nature de ces relations : il v est dit que les séna-
teurs, qui désapprouvaient le gouvernement des décem-
irs et qui voulaient y mettre fin , se recrutèrent des amis
(étapouc) pour contrebalancer l'appui que les décemvirs
recevaient des leurs. Or , dans le train ordinaire de la vie,
des amitiés nombreuses ne se forment pas subitement,
mais sont l’œuvre d’une longue suite d'années ; il est done
clair qu'il ne saurait être question ici que d’amis politi-
ques. |
Une seconde question se présente ici : ces amis politi-
ques étaient-ils liés entre eux par des engagemens réci-
proques, en d'autres termes, y avait-il association ? La
chose ne paraît pas souffrir le moindre doute. Dans la
plupart des textes invoqués jusqu'ici, les sodales sont
nommés à côté des cliens et semblent avoir à remplir des
devoirs (1) aussi sacrés et aussi étendus que ceux de la
clientéle. Tantôt ils passent à l'ennemi ou s’expatrient
avec leurs fzmilles (2); tantôt ils prennent les armes et
exposent leurs jours (3), et cela pour rester fidéles à la
nn EU,
(1) Cie. Verr., 1, 37, p. 173, éd. Zumpt : Aës te officia tutelæ,
sodalitatis, familiaritatisque flugitet.
(2) L'exemple précité des amis de Sextus Tarquin. Suivant le té-
moignage de Denys (V, 40, p. 936), T. Claudius, citoyen de la ville
sabine de Regillum , ayant quitté sa patrie à la suite de dissensions
politiques, vint s'établir à Rome avec ses parens, ses amis et ses
cliens, qui y amenèrent toutes leurs familles. Quoique ce dernier
exemple soit étranger à Rome, je n’ai pas hésité cependant à en faire
usage, parce qu’il est probable que ces institutions étaient les mêmes
chez les Sabins et chez les Romains ; en effet Denys parle encore des
amis politiques du roi Tatius (Il, 51, p. 344) et de ceux d’un autre
Sabin nommé Herdonius (X, 14, p. 2020). Ww
(3) Les amis des Fabiens (voy. ci-dessus pag. 219, note 7) et ceux de
Scipion, Voy. Appian. Hispanic., 84. .
fortune de l'un des leurs. Ailleurs nous les voyons se cotiser
pour payer l'amende infligée à l’un d’eux (1). Il est donc
évident que non-seulement les membres de ces associalions
avaient les mêmes amis et les mêmes ennemis, mais qu’ils
mettaient encore au service les uns des autres leurs person-
nes et leurs biens. Des auteurs anciens (2) nous ont conservé
la mémoire de la fidélité et du courageux dévouement de
Blosius, de Pomponius et de Lælorius aux Gracques, et
la manière dont s'expriment plusieurs écrivains, prouve
que les devoirs et les liens de la sodalité étaient même
presque aussi sacrés que ceux de la parenté (3). Les pa-
triciens invoquant , dans un moment de détresse, l’assis-
tance des plébéiens, les adjurent, avant tout, au nom de
(1) Voy. Dion. Cass., ÆExc., Mai., 25. Appian., De rebus italicis.
Exc., VIII, 2. Tit.-Liv., XXXVIII, 51, 60; textes qui se trouvent
déjà cités par M. Walter, /oc. cit., note 54.
(2) Voy. Cic., Lœlius, c. XI; Valer.-Maxim., IV, 7, 1,2. Ces hommes
peuvent avoir été non-seulement des amis politiques, mais encore des
amis de cœur des Gracches. Il paraît indubitable toutefois que Île fa-
natisme politique fut, plus que l’amour, le mobile de leur conduite.
(3) Terent., Adelph., IV, 5, 74 : Si frater aut sodalis esset qui magis
morem gereret. Cic., De orat., 11, 49 : Pro meo sodali, qui müihi in
liberorum loco more majorum esse deberet. Mais ce dévouement de
l'amitié politique ne peut recevoir la sanction de la morale, que pour
autant qu’il a un but honnête. La tirade suivante de Cicéron paraît
dirigée surtout contre les clubistes (Læ/., c. 12): Hœc igitur lex in
amicitia sanciatur ut neque rogemus res turpes , nec faciamus rogati.
Turpis enim excusatio est et minime accipienda quum in ceteris pec-
catis, tum sè quis contra rem publicam se amici causa fecisse fateatur….
Quorsum hæc? quia sine sociès nemo quidquam tale conatur. Præci-
piendum est igitur bonis , ut, si in ejusmodi amicitias ignari casu aliquo
inciderint , ne existiment ita se alligatos, ut ab amicis in republica pec-
cantibus non discedant.…… Quare talis improborum consensio non modo
excusatione amiciliæ tegenda non est... etc.
( 233 )
leurs anciennes sodalités (1). Du reste, ces devoirs étaient
réciproques : le service que l'on rendait à un confrère, on
avait droit, le cas échéant , de l’attendre de lui (2).
Maintenant reste à chercher si les membres des clubs
n'étaient liés entre eux que par une simple promesse, ou
si un nœud plus fort resserrait leur union, et, dans les mo-
mens critiques, entraînait les timides et empêchait les
défections. On ne peut guère douter de l'existence d’un
pareil lien, et, selon toute probabilité, c'était le serment.
Nous partageons donc entiérement l'opinion de M. Wal-
ter (3), qui n’hésite pas à reconnaître dans la formule du
serment que Philippe prête à Drusus un reste de celle qui
était adoptée dans les clubs (4). D'un autre côté pour-
(1) Voy. Denys, VI, 74, p. 1210. La mention d’amitiés politiques
entre des patriciens et des plébéiens aurait droit d’étonner, si lon
ne faisait attention qu’il s’agit de l’époque de la domination du der-
nier roi de Rome, d’une de ces époques qui produisent les coalitions.
Au reste, il paraît que les plébéiens eurent leurs associations comme
les patriciens. Voy. Dénys, XI, 28, p. 2230; sbid., 29, p. 2236.
(2) Denys, X, 60, p. 2153, Ka) dixastors Ex T@y étaipwy drodei-
xybueya , oi dippeiBoyto 4ARGROIS LaTayuolbouevor Tüs dixas.
(3) Loc. cit., note 52.
(4) Cette formule nous a été conservée dans un fragment de Diodore
de Sicile, venu au jour depuis un petit nombre d’années ( £Zxcerpta
Vaticana, 1. XXXVII-XL, vol. IL, p. 116 de la Script. Vat. nov. col-
lectio, éd Mai; vol. HI, p. 128 du Diodore de Deindorf) ; elle est trop
remarquable pour que nous ne la reproduisions pas ici : Ogyuui Tèy
Aix rèv Karer@)uoy na) ryv Écriuy vis ‘Péuys al rèy rarpwoy atÿc
“Apyy na Tày vevépoye yhucy mad Ty Évepyétir Cour TE nai quray vhv,
Êri dè rods arioras yeveryuéyouc tac Péuys YiSéous 2a rod cuvauËp-
guyras rhv Yyemorlur ads Ypouc, rèy adrèy plAoy ua rohËIOY Yy/ÂTET-
Seau Apoôcw , #4) pre Blou pre téxyov ka yoréwy ydemiäis oelouoèai
Vuwñe, £a my cumopy Apobre ve mai rois rèy aûréy Cpkoy Okéauoi.
dy dè yéraua rolirys To Apobgou voue, rurpidn yyooueu Thy Pouyv
( 224)
tant, il n’est pas de la nature d'une liaison reposant sur un
terrain si mouvant que l'arène des intérêts et des passions
politiques , d'être indissoluble ; aussi paraît-il qu’on pou-
vait s’en détacher par un renom (1), dont toutefois nous
ne connaissons ni la forme ni les conditions de validité.
Chaque association avait son chef particulier (ye-
pv) (2). C'était un sujet d'orgueil en même temps qu’un
calcul d’ambition pour les jeunes patriciens, que de se
trouver à la têle d’une association nombreuse, et c’est à
celte source qu'ils puisaient la principale force de leur
influence politique (3). Ces associations tenaient des réu-
nions dans lesquelles on délibérait sur les affaires du
moment (4). Ces réunions paraissent avoir été d’abord to-
lérées par l’État, sans aucune entrave, à moins cependant
qu'elles ne dégénérassent en complot et ne constituas-
aa méviotoy edepyétyy Apodooy. xai Ty Cproy TOydE rapadéow Cis &y
mähiora æAsiotos duyoga T@y ToliToy. xui EdopxoDYTI Hé (OI ÉTIK-
TYGIS Eiy TOY yaTy , ÉriopkoDyTi dÈ Téyaytis.
(1) Tacit., Annal,, VI, 29: Morem fuisse majoribus quoties diri-
merent amicitius interdicere domo. Sueton, Caliqul., 3 : Ut amicitiam
ei more majorum renuntiaret. Voy. Ernesti sur ce passage, et prin-
cipalement Lipsius, ad Taciti Annal., 11, 70; Excurs., XI. Cf. Walter,
loc. cit., not. 53.
(2) Denys, XI, 22, p. 2210. Toüray dè roy Étaiplüy Yyemuéves you.
Ibid., p. 2211. veu dÈ roûroy. XI, 28, p. 2216. Oùs Eoyv Yyemévac
Eivau TOY GpioTonpatixGy ÉTIpEIG.
(3) Denys, VIL, 55, p. 1440 ‘Or rAoûrTo vai Éraipius ÉrapSéiou
(éuvapuls). NI, 77, p. 1695. Karè räs Écaupioc te xai m'hoÜTouc méya
duyéueyor. NII, 90, p. 1732. ‘Evtatpois te xu) reAdrais GrdyToy mAEO-
Toy TOY LAS YAIXIAY dUYÉÂMLEYOS.
(4) Denys, XI, 3, p. 2163. (oi déxa) rerapayuéror cuvexédouy Ts
+ ; y » “J x % rubæn)
ETAIDEIRE ; RAI HETA TOUT OY CTI SE TOATTEI/ EGKHOTOUY.
sent alors un cas du crime de perduellion (1). Leur
liberté fut resserrée dans de certaines limites par la dispo-
sition de la loi des XII Tables, qui défendit les assem-
blées nocturnes (2), et ensuite, par la loi Gabinia , qui
prohiba les réunions clandestines (3). Il fut donc tou-
jours permis aux associations de se réunir , à la condition
(1) L. 5, pr. C. h.t. (9, 8) : Zn crimine majestatis eadem severitate
voluntatem sceleris, qua effectum puniri jura voluerunt. Cf. Dieck,
Historische Versuche ueber das Criminatrecht der Rœmer. Halle, 1823,
p. 6 sv. Sur les caractères du complot, voir Weiske, Hochverrath und
Majestætsverbrechen, das Crimen majestatis der Ræmer. Leipz., 1836,
p. 89 svv.
(2) Tab. VIII, fr. 26, d’après Porcius Latro, Declamat. in Catilinam,
c. 19 : Primum XII tabulis cautum esse cognoscimus , ne quis in urbe
cϾtus nocturnos ayitaret. Cf. Dirksen, Uebersicht der bisherigen Ver-
suche sur Kritik und Herstellung des Textes der Zwülf-Tafel-Frag-
mente, pag. 622 svv. Ce texte prouve clairement que la défense des
réunions nocturnes ne remonte pas plus haut que l’époque de la lé-
gislation décemvirale. Cf. S.-H. Van Idsinga, Variorum juris liber
singular., cap. I, p. 8. Harling., 1738; et Dirksen, Versuche sur
Kritik und Auslegung der Quellen des Rômischen Rechts. Leipzig,
1823, Abh. VI, cap. III, p. 263. Cette loi des Douze-Tables n’appar-
tient donc pas non plus, comme l’a cru M. Lelièvre (Comment. de leg.
XII Tubul. patria. Lovan., 1827, p. 159), aux Zeges Majestatis anté-
rieures ; et nous ajouterons qu’elle n’appartenait pas même à ces lois,
puisque à cette époque l’idée attachée au mot majestas n'existait pas
encore.
(3) Porcius Latro, loc. cit. : Lege Gabinia promulgatum, qui coi-
tiones ullas clandestinas in urbe conflavisset more majorum capitali
supplicio multaretur. Voir sur l’époque de la promulgation de cette
loi Heineccius, Antiquit. Roman. , XV, 16, 47, p. 776, éd. Haubold,
et Dieck, ouv. cit., 6 32, p° 73 sv. Du reste, nous ne pouvons pas
nous dissimuler que les mots more majorum indiquent que la prohi-
bition des assemblées clandestines avait existé dans des temps plus
anciens.
( 226 ) A
que leurs assemblées ne se tinssent ni de nuit, ni clan-
destinement. Nous croyons pouvoir conclure d’un pas-
sage de Plaute (1), que, vers le milieu du VI: siècle , les
clubs furent frappés d’une interdiction absolue. Désor-
mais la simple participation à une pareille association fut
considérée comme un acte criminel, punissable de l'exil,
c’est-à-dire de l'interdiction de l’eau et du feu. Nous ne
devons pas négliger une remarque qui se présente ici :
il y avait identité entre la peine du crime de perduellion
et celle de la loi des XII tables précitée et de la loi Ga-
binia : l'exil, dont punissait la loi incertaine à laquelle
Plaute fait allusion, est aussi la peine que prescrivit d’abord
la loi Julia majestatis (2), et qu'on appliqua dans la
suite aux membres des colléges non autorisés (3). Ne pour-
rait-on pas tirer la conséquence que les deux premières
de ces lois doivent être rangées parmi les /eges perduel-
lionis , et celle que Plaute a eu en vue parmi les /éges ma-
jestatis ?
Quant à la loi Zicinia de sodaliciis, de l’année 698,
elle a rapport à une espèce d'association politique toute
particulière, et appartient aux leges de ambitu. Les hom-
mes que l’on décorait du nom de sodales , n'étaient que
des agens de corruption, des courtiers de suffrages, gagnés
par le candidat, et à chacun desquels il assignait la por-
(1) Pers., IV, 4, 12, Tu in illis es decem sodalibus : Te in exi-
lium ire hinc oportet.
(2) Pauli, Sentent., V,29, 1, is antea in perpetuum aqua et igni
interdicabatur. Cf. Weiske, Hochverrath und Majestætsverbrechen ,
6 39, p. 138 sv. s
(3) Fr. 2, D. de collegüis et corpor. (47, 22). CT. Heineccius, De col-
legiis et corporibus opiicum, cap. 1, $ xxn (Oper., tom. If, p. 396
sq. Genève, 1766, in-4o.)
( 227 )
tion de tribu dont il avait à marchander ou à violenter
les votes. La punition était la même que pour les associa-
tions ordinaires (1).
Il est dificile que, sous un régime comme celui de la
république romaine , les associations même les plus étran-
gères à la politique ne finissent par s’en occuper plus ou
moins. C'est ce qui arriva aux colléges ou corporations
d'artisans qui se firent les instrumens aveugles des me-
nées démagogiques. L'an 585 de Rome, sous le consulat
de L. Cæcilius et de C. Marcius, on les supprima, à l’ex-
ception de quelques-uns, par un sénatus-consulte (2).
Dans la suite, P. Clodius les rétablit et en créa même
de nouveaux (3). Mais César les abolit à son tour, et
ne laissa plus subsister que ceux qui avaient une origine
ancienne et se trouvaient dûment autorisés (4). Sous Au-
guste, les factions, pour mieux déguiser leurs machina-
tions, s’entourérent des formes de collége , de sorte que,
pour les atteindre, ce prince dut renouveler la mesure
prise par Jules César (5). Du temps de Trajan encore, il
(1) Voir sur cette loi la dissertation spéciale de M. E. Wunder (Pro-
legomen. ad Plancianam , lib. IL, c. 3), reproduite en entier par
Orelli, dans son Onomasticon Tullianum , P. III, index Legum, pag.
200-210.
(2) Asconius, ad Cicer. in Pisonian., p. 2063 (p. 7 ed. Orellii). Cf.
idem 2x Cornelian., p.1312 (p. 75 ed. Orellii) : Frequenter tum etiam
cœtus factiosorum hominum , sine publica auctoritate, malo publico
fiebant ; propter quod postea colleyia se. et pluribus legibus sunt sublata.
(3) Dion. Cassius, XXXVIIE, 13, avec la note de Fabricius, t. V,
p. 179, éd. Sturz; Cic. , in Pison., 4; Pro Sextio, 25; Asconius,
in Pisonian., p. 8 et 9 ed. Orellii.
(4) Sueton. Cæsar., c. 42.
(5) Sueton. August., c. 32, Et plurimæ factiones titulo collegii
novi, ad nullius non facinoris societatem coïibant, etc
(228 )
ne se formait pas une association, quel que fût son nom
et le but pour lequel on l’autorisât , qui ne se changeât
bientôt en véritable club; aussi fixérent-elles toute l'at-
tention de l’empereur , qui les prohiba jusque dans les
provinces (1); enfin un fragment du jurisconsulte Mar-
cien (2) montre combien de soin les empereurs suivans
apportèrent à étouffer ces associations dans toute l’éten-
due de l'empire.
OUVRAGES PRÊÉSENTÉS.
Compte de l’administration de la justice criminelle
en Belgique pendant l’année 1835, présenté au Roi par
le Ministre de la justice. Bruxelles, 1839. 1 vol. in-4°.
Comptes rendus des séances de l'académie des sciences
de Paris. 1% sem. 1839. N° 6 à 8. Paris, 3 broch. in-4°.
Annales et bulletin de la société de médecine de
Gand. Année 1839. — 5° vol. — 2me Jivr. — Février.
Gand, broch. in-8°.
(1) Plin., Epist., X, 96, t. IL, p. 516, éd. Gierig. Trajan écrivait
à Pline (25:d., ep. XXXVI, p. 441) : Quodcumque nomen ex quacumque
causa dederimus is , qui in idem contracti fuerint, hetwriæ , quamvis
breves, fient.
(2) Fr. 1, D. de coll. et corp (47, 22). On peut lire sur ces suppres-
sions de colléges Heineccius, De coll. et corporib. opificum, $ XIH-
XIX, p. 385 sqq.; Heubach, De politia Romanorum , p. 63 sq. ; E. Plat-
ner, De colleg. opific., disput. IT, p. 6.
( 229 )
Discours prononcé à la société industrielle d’ Angers,
par son président M. Guillory aîné. Séance du 14 janvier
1839. Angers, 1839, Broch. in-8e.
Annales de la société des sciences médicales et na-
turelles de Bruxelles. Année 1838. Bruxelles, 1839,
1 vol. grand in-8.
Notice topographique et statistique sur le grand hos-
pice de l’infirmerie de Bruxelles; par J.-R. Marinus.
Bruxelles , 1839. Broch. grand in-8°.
Considérations critiques sur la phrénologie et la cra-
nioscopie; par F.-J. Matthyssens. Bruxelles, 1839. Broch.
in-12.
Petite dissertation sur lu liste des chanoines de la
cathédrale de Saint-Lambert à Liége, en 1131; par
M. E. L. A. A. L. V. D. L. Liége, 1839. Broch. in-80.
Société d'agriculture et de botanique de Louvain.
Salon d'hiver 1839. 38%° exposition publique. Louvain,
broch. in-&. :
Ouvrages divers en prose suivis de mes soixante ans,
par Me la princ. Const. De Salm. Paris, 1835. 2 vol.
in-12.
Poésies de M° la prince. Const. De Salm, Paris, 1835.
3° édition, 2 vol. in-12.
Pensées. Par M: la prince. Const. De Salm. Paris, 1835.
2e édition, 1 vol. in-12.
Journal de la société de la morale chrétienne. Tom. XV.
— N°1 et2. Paris, janvier et février 1839. 2 Broch. in-8&.
Proceedings of the geological society of London. Vol. 3,
1838. N° 59, — Titlepage aud index of vol. IT. London,
1838. 3 feuilles in-8°.
Proceedings of the royal irish academy. 1838-1839.
N° 14. 2 feuilles in-8&.
Tom. vr. 16
( 230 )
Programme des cours de l’université de Liége. Se-
mestre d'été, 1838-1839. 1 feuille.
Faits et vues détachés sur certains points de théorie
chimique, etc. Feuilles 17 et 18. Par M. Van Mons.
Précis des antiquités romaines, par P. Bergeron.
Bruxelles, 1835. 1 vol. in-&.
OEuvres complètes de Térence, traduites, pour la
première fois, en vers français, avec le texle en regard,
par M. P. Bergeron, 2° édition. Bruxelles, 1834, 3 vol.
in-8°.
Le député d’une nation libre, ct autres poësies , par
P. Bergeron. Bruxelles, 1832. 1 vol. in-8°.
Some account cf the art of photogenic drawing, etc.
By H. F. Talbot. London, 1839. Broch. in-#°.
Huit jours à Newcastle, en 1838. (Seconde partie.)
Par Ch. Morren. Broch. in-12.
ERRATA.
Page 99, ligne 22, au lieu de Deux, lisez : Dix.
— "1405, — 19, —_ orceille , lisez : orseille.
— 107, — 12, — phloritine , lisez : phlorétine.
— il, — 19,27 et 31, même faute.
— 108, — 10, au lieu de Perie, lisez : Piria.
— 148, — 4, — 9, lisez : 12.
BULLETIN
DE
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES
ET BELLES-LETTRES DE BRUXELYES.
1839. — Ne 4.
Seance du 6 avril.
M. le baron De Stassart occupe le fauteuil.
M. Quetelet , secrétaire-perpétuel.
CORRESPONDANCE.
M. Romain Mahieu de Tournai, adresse à l’académie un
paquet cacheté dont il lui demande d'accepter le dépôt. Ce
paquet, dit-il, contient les plans d'une presse à imprimer
dont il est l'inventeur, et dont la simplicité du méca-
nisme est telle que la force d’un homme suffit pour tirer
cent à cent cinquante exemplaires à la minule. Le dépôt
est accepté.
M. Ed. De Selys Longchamps communique la première
partie d'un mémoire manuscrit intilulé : Revue des mam-
mifères européens des genres Mus, Arvicora et Sorex.
… La partie de l'ouvrage présentée concerne le genre Mus.
Tow. vi. 17
M. X. Heuschling présente une note manuscrite inti-
tulée: Statistique nationale, contenant nne classification
des documens statistiques du royaume. ( Commissaires :
MM. le baron De Reïflenberg et le baron De Stassart.)
M. Robert Carr Woods, membre de la société météo-
rolegique de Londres, écril au sujet des étoiles filantes
qu'il a observées en Angleterre à l'époque du 12 novembre
dernier, et fait remarquer qu’il n’y a point identité entre
le phénomène observé par Jui dans la nuit du 12 au 13,
et le phénomène de l'aurore boréale observé par sir John
Herschel, dans la nuit du 12, qui doit être considérée, dit-
il, comme la nuit du 11 au 12. (Po. dans les Pulletins de
l’académie , tom. VE, p. 13, et tome V, page 732, la lettre
de sir John Herschel à M. Quete!et.) M. Carr Woods donne
en même temps les extraits de différentes lettres d'autres
observateurs qui out remarqué, comme lui, la fréquence
des éloiles filantes à l'époque qu'il indique.
Ontre la lettre de M. Carr Woods, M. Quetelet dit
avoir reçu, sur les étoiles filantes, plusieurs nolices de
M. Edward C. Herrick de Newhaven , aux États-Unis. Il
résulte de ces communications qne les méléores du 9 et
du 10 août 1838 , ont été vus en Amérique comme en
Europe , et que l’on a pu constater aussi , sur le premier
continent, une grande fréquence d'étoiles filantes dans la
nuit du 7 décembre de la même année.
M. le major Ed. Sabine , correspondant de l'académie,
écrit que l'aurore boréale du 19 janvier dernier, dont il
est parlé dans les Pulletins de l’académie , a été vue en
Angleterre et en Irlande, et que ce phénomène a mani-
festé son influence sur la direction et l'intensité de force
de l'aiguille magnétique. M. H. Lloyd, qui a présenté à
l'académie royale de Dublin une notice sur ce phéno-
( 233 )
mène , donne également des renseignemens sur les appa-
rences remarquables qu'il a présentées.
Le secrétaire donne communication de plusieurs autres
lettres de savans anglais, el en particulier d’une lettre de
M. Phillips, directeur du musée d’Yorck, au sujet de l’u-
domètre et des quantités de pluie qui tombent annuelle-
ment. Ce savant écrit qu’il fait construire actuellement à
Yorck un bâtiment dans lequel il se propose de renou-
veler ses observations sur la pluie.
RAPPORTS.
Chimie. — Rapport de M. Van Mons sur une note pré-
sentée par M. Urbain Hensmans, fils, docteur en médecine
et en pharmacie, concernant un principe cristalli-
sable trouvé dans l’écorce de la racine du peuplier
de Canada.
La communication qui vous a été faite par M. Urbain
Hensmans, et sur laquelle vous m'avez chargé de vous pré-
senter un rapport, roule sur un principe cristallisable,
amer, qu'il a extrait de l’écorce des racines du peuplier
de Canada, et auquel il a donné le nom de canadine, nom
tiré de celui de l’espèce d’arbre qui le lui a fourni.
« Ce fut » dit M. Hensmans « pendant l'hiver de 1836
que, dégustant l'écorce fraîche d’une racine de peuplier
de Canada , je remarquai que cette écorce avait une saveur
intensement amère et en même temps astringente, et j'en
conclus qu’elle pourrait bien contenir une de ces sub-
stances cristallisables dont les analogues ont déjà été trou-
( 234 )
“és dans u autres plantes et parties de plantes. Je fus engagé
par là à la soumettre de suile à un examen analytique,
examen qui m'a conduit à y découvrir une substance du
genre de celles que j'avais soupçonné y exister, el que,
par un grand nombre d'expériences, j'ai reconnue pour
être un principe particulier, essentiellement différent de
la phlorizine et de la salicine par une amertume beaucoup
plus prononcée, et de plus, de cette dernière, par l'ab-
sence du goût de saule, qui est si désagréable et qui reste
si long-temps dans Ja bouche après avoir dégusté la sali-
cine. Mon principe diffère encore plus de la populine
trouvée dans les écorces de l'arbre et dans les feuilles du
peuplier-tremble , dont le goût , comparable à celui de la
racine de réglisse quelque temps mâchée, est douceätre au
lieu d'être amer, et qui est infiniment moins soluble dans
l'eau, tant chaude que froide, que la substance contenue
dans le peuplier de Canada. L’amer dont le goûl de la nou-
velle substance se rapproche le plus, est celui du sulfate
de quinine, ce dont l'académie pourra se convaincre par
l'échantillon de la matière que j'ai l'honneur de Jui sou-
mettre.
» Le procédé à l’aide duquel je suis parvenu à isoler le
principe eristallisable du Canada a été le suivant : l'écorce
fraiche, découpée, a été, à deux reprises, bouillie avec suf-
fisamment d’eau pour la submerger, la première fois pen-
dant deux heures , et la seconde fois pendant une heure.
On réunit les deux décoctions et on y délaie de la chaux
éteinte, La chaux enlève le tanin, auquel elle se sur-
combine ;'et entraîne en même temps le colorant. On filtre
et'on évepore en consistance de sirop. On ajoute de l'al-
coco), qui sépare la gomme. On filtre encore, et, au moyen
dela distillation ; on retire la moitié de l'alcool; on rap-
( 235 )
proche de nouveau pour faire cristalliser; on décante le
liquide de dessus les cristaux, et par des concentrations
successives on parvient à en séparer une quanlilé supplé-
mentaire et notable de cristaux. Les cristallisations réunies
sont alors dissoutes à chaud dans de l’eau ou dans de l'al-
cool, et la solulion est mise à bouillir avec un peu de
charbon animal. On la filtre bouillante. Par le refroidis-
sement elle dépose des cristaux qui, de prime-abord , sont
blancs. »
L'auteur a suivi la méthode qu’on nomme par la
chaux, laquelle, à moins de procéder constamment trés à
chaud, exclut la populine du produit. Pour la préparation
de la canadine à l’usage des expériences que nous nous
proposions de faire, nous avons fait emploi du procédé dit
par l’acétate de plomb , qui laisse la populine dans l’eau-
mère. Les décoclions ont été débarrassées de tanin et d’in-
ficient colorant à l’aide d’acétate tribasique de plomb. Ce
sel, devenu neutre, a été décomposé par de l’acide sulfu-
rique prudemment ajouté, ménageant une faible portion
du sel, de crainte d'introduire un excés d'acide. Cette
portion de sel est ensuite décomposée par du gaz acide
hydrosulfurique. L’acide acélique, exempt de métal , reste
dans la liqueur, Si, dans la racine du canada, de la popaline
s'était trouvée, elle aurait été prise en solution par l'acide
acétique, qui, pour cela, n’a pas besoin d’être bien fort,
et empêchée de se concréter dès le commencement de
l'opéralion , ainsi que cela arrive lorsqu'on procède avec
la chaux. Elle serait restée dans l’eau-mère des cristalli-
salions. On peut assurer qu’elle ne s’y est pas trouvée,
quoiqu'on n'ait rien fait pour l'en extraire en nature, mais
celle eau-mére a jusqu'à sa dernière portion fourni diffé-
rens composés qui ne pouvaient être formés que de cana-
(236 )
dine supposée salicine. La liqueur délivrée de tout plomb
a été dépurée comme d'habitude, blanchie par du charbon
animal et mise à cristalliser. :
«€ Pour éviter que l’on ne confondiît le principe propre
au peuplier de Canada avec celui qui est fourni par le
peuplier-tremble, et qui a été nommé populine , J'ai cru
convenable de lui donner le nom de canadine, nom qui
rappelle l’espéce de peuplier d’où il dérive. J'ai été d'autant
plus porté à lui donner ce nom, qu’examinant l'écorce de
la racine du peuplier-tremble, en même temps que j'opé-
rais sur celle du peuplier de Canada, je me suis assuré que
le principe contenu dans la première de ces racines, loin
d’être amer ,a une saveur sucrée, qui sera due à l’associa-
tion de la populiné, que l’on sait avoir cette saveur , à un
autre principe cristallisable dénué de saveur , plus soluble
que la populine et auquel on pourrait donner le nom de
trémuline.
» Ce qui précède rend probable que les diverses espèces
du genre peuplier seront trouvées contenir un principe
cristallisable propre , et plus ou moins différent dans cha-
cune d'elles. Si cependant , dans un examen que plus tard
je me propose d'entreprendre sur les racines de quelques
autres espèces de peuplier, il était, contre mon attente,
reconnu que, dans quelques-unes, ce principe est identi-
que, il serait temps encore de changer les deux noms
de canadine et de trémuline en des noms plus appro-
priés.
» Quand on échaufle la canadine, elle commence par se
fondre et abandonne de l’eau de cristallisation. En exhaus-
sant un peu la température, la fonte devient complète. »
Dans des expériences entreprises à l’occasion du pré-
sent rapport, et qu'avait nécessitées l’intime relation de
RL) pli. - 7 =iût Dr RSS Se RSS DS 2 ns
en
( 237 )
plusieurs des caractères physiques de la substance obtenue
par l’auteur avec les mêmes caractères de la salicine , on
a trouvé que la température à laquelle la canadine se fond
dépasse les 195° centig. On a, en même lemps, et comme
objet de comparaison , vérifié la fusibilité de la salicine , la-
quelle avait été fixée à un peu au-dessus de 100°; elle a
été reconnue être la même que celle de la canadine.
« Desséchée à l’air libre et soumise ainsi à l’action de
la chaleur, la canadine se fond à environ 195° c. sans
perdre de l’eau. La matière fondue est légèrement co-
lorée en jaune. Par le refroidissement , elle se prend en
une masse cristalline incolore. Cette masse, redissoute
dans l’eau, reproduit la canadine intacte avec toutes ses
propriétés.
» À la température ordinaire , la canadine est trés-peu
soluble dans l’eau, l’alcool et l’éther, mais, à l’aide de
l'échauffement, elle se dissout en toute proportion dans les
trois liquides. La solution fait des progrès dans le même
rapport que la chaleur augmente. »
La solubilité de la canadine dans l’éther aurait été ca-
ractéristique pour la distinguer de la salicine, qui n’est
aucunement soluble dans ce menstrue, si elle avait pu
soutenir l'épreuve de l'expérience ; mais dans l'essai qui en
a été fait, son insolubililé n'a pas été moins absolue que
celle de la salicine. La canadine est donc encore, sous ce
rapport, identique avec celle-ci.
La note s'exprime ainsi sur les résullats des expériences
faites pour constater les trois solubilités de la canadine:
« Elle est assez soluble dans l’eau froide; elle est très-so-
luble dans l'eau bouillante, ainsi que dans l'alcool froid et
chaud; elle est parfaitement insoluble dans l’éther anhydre.
» Quand au fond d'un vase contenant de l’eau froide,
( 238 )
on place de la canadine, que nous avons dit être très-peu
soluble dans ce liquide froid, et que goutte à goutte on y
fait tomber de l'acide sulfurique, une dissolution presque
enlière s'opère. Échaufle-t-on cette solution jusqu’à la
faire bouillir, de claire qu'elle était, elle devient trouble,
et, par le refroidissement , une poudre blanche s’y dépose.»
Cette poudre est de la même nature que le corps par-
ticulier que M. Pirria a obtenu en acidulant, par le même
acide, une solution bouillante de salicine dans l’eau , et
auquel il a donné le nom de salirésine (résine de salicine).
Sous l'influence d’un acide faible et bouillant, ou bien sous
celle d’un acide fort qui la dissout à froid et sans l'altérer,
la salicine se partage en ce corps et en sucre de raisin. Le
précipilé cristallin que, par le refroidissement, la salicine
dissoute dans de l'eau chaude aiguisée par de l'acide sul-
furique, a fourni à M. Braconnot, était de la salicine inal-
térée. La forme cristalline paraît distinguer celle-ci de la
sahrésine, mais non de la phlorirésine de M. Stas, qui aussi
a, suivant son expression, dédoublé la phlorizine en celle-ci
et en sucre de raisin, laquelle est seulement difhcilement
cristallisable, et n'exige pas d’ébullition avec un acide
affaibli pour se former. |
Au sujet de la réaction de l'acide sulfurique affaibli sur
la canadine, on lit dans la note: « L'acide sulfurique étendu
de 20 fois son poids d’eau la décompose à chaud, et pro-
duit un corps résinoïde insoluble dans l’eau et dans l’am-
mouiaque; soluble dans l'alcool, dans l'éther et dans les
alcalis fixes. »
— La salicine est connue pour se comporter d’une ma-
nière analogue. Si la canadine avait été un principe parti-
culier, la substance résiniforme qu’elle fournit aurait dû
porter le nom de canadirésine.
É -
| à
_
( 239 )
« L’acide hydrochlorique concentré et libre de mélange
dissout la canadine sans l’altérer. Au bout de 24 heures,
un dépôt consistant en une poudre grisâtre y est remar-
qué: »
La salicine n'avait pas été reconnue se conduire ainsi
avec l'acide hydrochlorique concentré. La poudre recueil-
lie aura été de la canadirésine, à en juger d’après sa forme
et sa couleur. Il en résulterait que, pour la production des
résine-composés, certains acides forts et agissant à froid
sont les équivalens de la plupart des acides faibles chauf-
fés au degré de l’ébullition. Quand la précipitation doit
être déterminée par l’eau ou un alcali, il n'y a pas de résine-
formation. La note porte : L’acide hydrochlorique con-
centré dissout la canadine, d’abord sans altération ; mais,
par un contact prolongé de 24 heures, la dissolution laisse
précipiter un corps pulvérulent légèrement grisätre. La
note apprend de plus, que l'acide hydrochlorique, étendu
de 20 fois son poids d’eau , la décompose à chaud en pro-
duisant, ainsi que nous avons dit que le fait l'acide sulfu-
rique dilué au même degré et chaud, un corps résinoïde
insoluble dans l’eau et dans l’'ammoniaque, soluble dans
Valcoo!, l’éther et les alcalis fixes.
« L’acide sulfurique concentré ne dissout pas de suite
la canadine. Au fur et à mesure que la solution s'opère,
Vacide se colore en rouge-pourpre. La réaction est accé-
Jérée par l'administration de tant soit peu de chaleur.
Après 24 heures, un précipité rouge-brunätre s’y trouve
formé. »
La propriété de former avec l'acide sulfurique concentré
. une coloralion rouge-pourpre appartient à la salicine
comme à la canadine, mais celle de laisser précipiter le
colorant rouge sans que la précipilation ait été l'effet d’eau
( 240 )
attirée de l’air,et par la seule circonstance d'avoir éprouvé
un échauffement très-léger, serait particulière à la cana-
dine et dislinctise pour elle.
L'expérience faite ici a constaté la coloration rouge
entre l’acide sulfurique et la canadine : « mise en con-
tact avec l'acide sulfurique concentré, la canadine s’y
dissout en colorant l'acide en rouge-cramoisi. Cette dis-
solution, abandonnée à l'air libre ( et humide ), laisse
précipiter un corps floconneux d’un rouge foncé. — En
imbibant très-légérement d'acide sulfurique concentré
la face interne froissée d’une écorce fraîche de racine
de peuplier de Canada, nous avons vu se faire une co-
loralion en rouge de sang très-foncé. Gelte coloration
pourra servir de réactif pour interroger des parties de
plantes dont la saveur est amère, sur leur contenu en
principe rougissable par l'acide sulfurique.
« L'acide nitrique blanc, versé sur la canadine, la colore
immédiatement en jaune et la dissout presque entière-
ment. Aidée par la chaleur, la dissolution s’opére de suite.
Après 24 heures, un précipité jaunâtre s'y fait remar-
quer. »
La salicine éprouve un effet semblable de la part de
l'acide nitrique; il est apparent que la solution faite de
l’un ou l’autre des deux principes dans de l’acide nitrique
blanchi par la chaleur et à l’air libre, dont la composition
est si ferme, étant diluée d’eau aussitôt aprés la solution,
laissera précipiter une matière qui, en raison de la con-
centration de l'acide, pourra être un résine-composé. Dans
un acide blanc, l'acide carbazotique ne se forme qu’à la
faveur de l’'échauffement. ”
« L'acide nitrique concentré détruit la canadine en
produisant de l'acide carbazotique.
( 241 )
» L'ammoniaque , le sous-acétlate de plomb et l’eau de
chaux dissolvent la canadine sans l’altérer. »
La salicine se dissout également dans les liquides alca-
lins sans en être allérée. Seulement, elle ne peut plus cris-
talliser, et demande pour s'en séparer qu’un acide sature
l'alcali : «Les dissolutions de potasse , de soude, de chaux,
de baryte, d’ammoniaque, quel que soit leur état de con-
centration , dissolvent abondamment la canadine. »
— Quant à la solubilité de la canadine dans le sous-acé-
tate de plomb, elle peut dépendre de ce que le composé
qui se forme est soluble dans le liquide restant , ou que, ne
décomposant pas le sel, elle est soluble dans la solution
de celui-ci. L'auteur n’a pu emprunter l’idée de faire
cette expérience à M. Pirria, qui la rapporte dans son appli-
cation à la salicine, le mémoire de ce chimiste venant
seulement de paraître. M. Pirria dit que le précipité formé
par l’acélate tribasique de plomb dans une solution sa-
turée et chaude de salicine dans l’eau, alcalisée par quel-
ques gouttes d'ammoniaque , lequel précipité est du sali-
cinate de plomb, est soluble dans l'acide acélique, et il
ajoute : «aussi dans une solution de potasse.
« La solution de canadine ne précipite aucune disso-
lution métallique; elle produit un précipité dans la dis-
solution de l’acétate tribasique de plomb ammoniacal,
lequel précipité se dissout facilement dans l'acétate neutre
de plomb. »
— La salicine exerce sur les dissolntions métalliques et
sur celle ammoniacale d'acétate tribasique de plomb des
réactions absolument semblables.
La canadine se présente sous la forme de petites aï-
guilles parfaitement blanches. Elle a une saveur amère
franche; elle est inodore , sa solution est sans action sur
( 242 )
les dissolutions du tanin et de la gélatine. L'acide acé-
tique concentré la dissout à froid et sans l'altérer.
Soumise à l’action oxydante d’un mélange de bichro-
male de potasse , d'acide sulfurique et d’eau, elle produit,
par la distillation , un corps huileux d’une odeur rappelant
l'huile de salicine, rougissant vivement la solution du per-
chlorure de fer, produisant un précipité cristallin dans
l'eau de chlore, lequel composé chloré jaunit sous l'in-
fluence des alcalis.
L'analyse élémentaire de la canadine, faite au moyen
de l’oxyde de cuivre avec addition d’une quantilé conve-
nable de chlorate de potasse fondu, a donné les résultats
suivans :
EL 0r:,370 canadine desséchée à l'air libre ont donné
05,216 eau et 05,734 acide carbonique.
IL 08':,400 même ont donné 06":,221 eau et 0#",793 acide
carbonique.
D'où l’on tire en centiémes :
I. IL.
Carbone. . . . .. 54,88 54,83
Hydrogène . . .. 6,4 6,1
DXVSEN EU Se 38,7 39,1
100,0 100,0
En résumé :
De l’ensemble des propriétés de la canadine et de l’ana-
lyse élémentaire de cette substance, comparées aux pro-
priétés et à la même analyse de la salicine, on peut con-
clure que la canadine n’est que de la salicine parfaitement
pure. En effet, la nouvelle matière se fond à 195° sans
perdre de l’eau, et la salicine jouit de ces propriélés-la,
Comme elle , elle rougit par l'acide sulfurique concentré;
AE ol
( 243 )
comme elle, elle est parfaitement insoluble dans l’éther
anhydre. De même que la salhicine , elle produit sous l'in-
fluence des acides dilués bouillans le corps résinoïde
insoluble dans l’'ammoniaque ; comme la salicine, elle se
convertit en acide carbazotique par l'acide nitrique. De
même que la salicine, elle ne précipite point l’acétate tri-
basique simple de plomb, mais bien l’acétate tribasique
ammoniacal du même , lequel précipité est soluble dans
Vacétate neutre de plomb comme le salicinate de plomb
lui-même.
Comme la salicine, elle produit sous l’action oxydante du
bichromale de potasse, le corps remarquable de M. Pirria,
lhydrure de salicine, se combinant au chlore, au potas-
sium, elc., el se colorant en rouge par la solution d’un
persel de fer.
Et, en dernier lieu, les résultats de l'analyse élémen-
taire s'accordent exactement avec ceux de la même analyse
faite derniérement sur la salicine parfaitement pure.
La seule différence que l’on trouve entre la canadine et
la salicine est que la première ne possède pas le goût de
saule que présente toujours la dernière , mais cela semble
tout bonnement nous prouver que le goût de la salicine
nest pas propre à la salicine elle - même, mais bien
à un corps étranger qui souille la salicine extraite des
saules.
Peut-être doit-on attribuer à ce corps étranger le léger
excès de carbone que MM. Pelouze, J. Gay-Lussac et Pirria
ont obtenu dans leur analyse de la salicine du com-
merce.
L'auteur termine son mémoire en portant à la connais-
sance de l'académie que, pour l'extraction de la populine
et de la trémuline contenues dans l'écorce des racines du
( 244 )
peuplier-tremble , il a suivi la même méthode que celle
dont il a fait usage pour l'extraction de la canadine. Par le
refroidissement de la liqueur alcoolique, la populine cris-
tallise la première et se dépose sur les parois latérales du
vase, et, quelque temps après, la populine se concrète
cristallinement au fond du même vase, en laissant un
intervalle notable entre elle et la populine.
— Je n'ai pas dit que les résultats des expériences de
vérification et de comparaison qui ont été entreprises à la
fois avec l'échantillon de canadine présenté à l'académie
par l’auteur, et avec la canadine que nous avons nous-
mêmes préparée, ont été contrôlés en grande partie par
les mêmes expériences exécutées avec de la salicine de
saule.
Lors même, ce qui ne paraît pas douteux, que la cana-
dine et la salicine seraient une seule et même substance,
il n’en resterait pas moins à l’auteur le mérite d’avoir dé-
couvert une nouvelle source , et une source qui le fournit
dégagé de tout mélange avec une matière analogue, d’un
principe qui a déja donné les produits les plus extraor-
dinaires, qui en promet encore d’autres non moins re-
marquables, et qui , avec la phlorizine, peut être proclamé
le corps le plus important que jusqu'ici la chimie orga-
nique ait possédé. Son travail ne pourra donc qu'être très-
favorablement accueilli par ceux qui s’occupent de cette
branche particulière de la science chimique. "
(26)
ANATOMIE.
Rapport sur l'ouvrage intitulé : ANATOMIE DU CHEVAL,
par M. Charles Phillips de Liége. (Commissaires :
MM. Cantraine, Wesmael et Morren, rapporteur ).
«Monsieur Charies Phillips a présenté à l'académie, dans
sa dernière séance, le manuscrit de son nouvel ouvrage
sur l'Ænatomie du cheval, désirant avoir l'avis de la com-
pagnie sur sa valeur scientifique, avant de le livrer à
l'impression. El n'a communiqué que la première partie,
qui formera un volume d’environ 200 pages, accompagné
d'un atlas de 40 planches in-4°, enluminées, avec leur
explication. Ces planches ont Loutes été dessinées et colo-
riées par l’auteur, d’après des préparations qui ont servi
a ses leçons sur la matière ; son talent sous ce rapport nous
était déja connu par son Traité sur les umputations dans
la contiquité des membres , qu'il a offert également à l’a-
cadémie lors de sa publication.
Depuis que la Belgique voit les sciences vétérinaires
s'enseigner dans quelques-unes de ses grandes villes, des
ouvrages nationaux, dus à des plumes belges, ne pou-
vaient manquer d’être bien accueillis par nos écoles, nos
artistes vélérinaires et les personnes qui s’occupent d’hip-
piatrique. Le succès de plusieurs ouvrages publiés chez
nous sur ces sciences a prouvé cel empressement , qui
doit encourager les jeunes auteurs. À notre avis, le nou-
veau traité de M. Phillips est digne sous tous les rap-
ports de fixer l'attention des anatomistes, et d'être recom-
mandé comme un vade mecum nécessaire aux jeunes gens
qui suivent les travaux de l’amphithéâtre, En cffet, c’est
( 246 )
un ouvrage conçu d’après un plan neuf, mais tout ra-
tionnel. C'est une anatomie des régions, la seule qui
puisse servir de base aux opérations chirurgicales. Dela-
fosse, Bourgelat, Girard et Gurlt, les premiers, en fran-
cais, le dernier, en allemand, n’ont donné que la partie
descriptive des organes isolés, sans faire ressortir les
rapports qui existent entre eux, ce qui pourtant était de
la plus haute utilité. Girard était plus complet que ses
prédécesseurs ; mais si, par exemple, on jette les veux sur
sa myologie, on n’y trouve que les attaches, la grandeur
et le volume des muscles. De leurs rapports avec les au-
tres oïganes voisins, il n'en est pas dit un mot, etilest
évident que, pour les opérations, c’est là une immense la-
cune. M. Phillips l’a comblée, et il faut le dire, avec un
talent remarquable; son habileté à manier à la fois le
scalpel, le bistouri et le crayon, lui a été fort utile pour
rendre avec bonheur la structure des régions, de maniêre
à conduire avec sécurité l'élève qui n’a pas loujours dans
ses disseclions le professeur à ses côtés pour le guider.
Cetie première partie de l'ouvrage de M. Phillips con-
tient la description du squelette, des os, des muscles et
des ligamens. Pour l'ostéologie, ses descriptions sont
plus complètes que celles des auteurs qui l'ont précédé
dans la carrière, Nous prendrons un exemple dans celle
du sphénoïde, où l’on ne signalait que deux faces, l’anté-
rieure et la postérieure ; plus les ailes. M. Phillips partage
le corps de los en six faces, indépendamment des ailes,
faces qu'il décrit chacune à part, etc. L'élude des fosses
du crâne n’avait été faite par personne : il s’y attache avec
soin et entre dans tous les détails sur les orbites, les
fosses zygomatiques, palatine, nasale et sphéno-maxillai-
res. La description du pied du cheval a été faite d'aprés
( 247 )
les récens travaux de Bracy-Clarke, innovation qui ne se
trouvait pas encore dans un ouvrage élémentaire.
Pour la myologie , les rapports entre les muscles étaient
ce qu'il y avait de plus intéressant à faire ressortir, et
l'auteur s'y attache particuliérement; il donne moins
d'attention aux descriptions des parties charnues, pour
s'appliquer davantage aux attaches, aux connexions et
aux dimensions. Toute celte partie est entièrement neuve;
les descriptions ne sont point écrites d’après des livres,
déplorable système trop suivi encore dans les Manuels,
mais d’après la nature. Aussi l’auteur a-t-il, par ce moyen,
découvert le nouveau muscle, le petit cubito-prépha-
langien, sur lequel il a récemment attiré l'attention de
l'académie (janvier 1839) dans son intéressante commu-
nicalion.
L'idée qui a présidé à la rédaction de cet ouvrage a
droit sans doute de mériter l'approbation de l'académie;
son exéculion est non moins digne d'éloges. Nous enga-
geons la compagnie à faire connaître son suffrage à l’au-
teur, et à l'encourager dans les travaux d'anatomie com-
parée qu'il a commencés avec tant de succès. »
Ces conclusions sont adoptées.
— L'académie, après avoir entendu l'avis de ses com-
missaires MM. Crahay et Quetelet, ordonne ensuite l’im-
pression du mémoire de M. Martens, Sur la pile
galvanique et sur la manière dont elle opère les décom-
positions des corps , présenté à la séance précédente.
Tom. vr. 18
( 248 )
LECTURES ET COMMUNICATIONS.
GÉOMÉTRIE.
Propriétés des surfaces du second degré analoques
aux théorèmes de Pascal et de M. Brianchon , par
M. Chasles , correspondant de l'académie.
La recherche de ces propriétés avait été provoquée par
l'académie de Bruxelles, qui en avait fait le sujet d’une
de ses questions proposées pour le concours de 1826. J'ai
énoncé dans mon Æperçu historique des méthodes géomé-
triques ( pp. 400-402 ), deux théorèmes qui paraissent
salisfaire à la question ; ce sont ces deux théorèmes que
je me propose ici de démontrer.
Mais il faut rappeler d’abord le point de vue nouveau
sous lequel j'envisage les théorèmes de Pascal et de
M. Brianchon, c’est-a-dire les énoncés sous lesquels je
les exprime , pour en faire ensuite l'application , par ana-
logie, aux surfaces du second degré.
Le théorème de Pascal consiste, comme on sait, en
cette propriété de tout hexagone inscrit dans une coni-
que, savoir que: les trois points de concours des côtés
opposés de l'hexagone sont en ligne droite.
On peut considérer la figure d’une autre manière, et
comme composée d'un triangle formé par les trois côtés
de rang impair de l'hexagone, et des trois cordes de la co-
nique, comprises respectivement dans les trois angles de
ce triangle. Le théorème de Pascal exprime alors que ces
‘trois cordes rencontrent respectivement les trois côtés
( 249 )
opposés du triangle, en trois points qui sont en ligne
droite.
Aïnsi l’on peut considérer le théorème de Pascal comme
exprimant une propriété générale du système d’une co-
nique et d’un triangle tracés dans un même plan.
Sous ce point de vue, la généralisation du théorème
au cas de l’espace, se présente naturellement; ce sera
une propriété du système d’une surface du second degré
et d’un tétraëdre quelconque, dont les arêtes rencontrent
la surface.
Voici quelle est cette propriété :
Quand les six arêtes d'un tétraëèdre placé d’une ma-
niere quelconque dans l’espace, rencontrent une sur-
face du second degré en 12 points, ces douze points
sont, trois à trois, sur quatre plans, dont chacun con-
tient trois points appartenans aux trois arêtes issues
d'un même sommet du tétraëèdre ;
Ces quatre plans rencontrent respectivement les faces
du tétraëdre, opposées à ces sommets, suivant quatre
droites qui sont les génératrices d'un même mode de gé-
“ nération d’un hyperboloïde à une nappe.
…._ On peut former plusieurs systèmes de quatre plans qui
— contiennent, trois par trois, les douze points de ren-
contre des arêtes du tétraèdre et de la surface; le théo-
rème aura lieu pour chacun de ces systèmes. Par exemple,
si les quatre sommets du tétraëdre sont dans l'intérieur
- de la surface, on pourra prendre les quatre plans en
4 de manière que chacun d'eux contienne les
trois points où les arêtes issues de chaque sommet, respec-
tivement (et non les prolongemens de ces arêtes), ren-
— contrent la surface.
Cette propriété du tétraèdre considéré par rapport à
_ de dé LL
a 1
d
G
À
( 250 )
une surface du second degré, correspond, comme on
voit, à la propriété du triangle tracé dans le plan d’une
conique qui exprime le théorème de Pascal. C'est sous ce
point de vue que nous présentons ce théorème comme
l'analogue, dans l’espace, de celui de Pascal.
Pour démontrer ce théorème, nous nous appuierons
sur-le lemme suivant, qui se rapporte à la théorie de l’in-
volution de six points, mais qui ne s’y est point encore
présenté.
Lemme. S3 l’on a sur une droite deux systèmes de
deux points, À, A'et B, B'; et qu'on prenne les deux
points E, F qui sont conjugués harmoniques par rap-
port à chacun de ces deux systèmes, on aura entre les six
points À, A", B,B',Eet F, la relation :
AE.AF AA’. AB
BE. BF BB’, BA’
Démonstration. La condition pour que les deux points
E, F soient conjugués harmoniques par rapport aux deux
A, A’ s'exprime par l'équation
EA Fe
ELITE"
d’où l’on tire, comme on sait , celle-ci :
2 1 1 AE + AF.
AA’ AE AR AITENRE AE"
ou , en appelant O le point milieu du segment E,F,
1 AO
AA’ AE. AF
( 251 )
Les deux points E, F étant conjugués par rapport aux
deux points B, B’, on a semblablement
1 BO
BB’ BE. BF
On a donc
AA’ AE. AF BO
BB’ BE. BF AO
Or on sait qu’on a
BO A'B
CET (4perçu historique, pag. 312.)
Il vient donc
AE. AF AA’. AB’
BE. BF BB’. BA’
COS AD:
Passons à la démonstration du théorème énoncé ci-
dessus.
Concevons une surface du second degré et un tétraëdre
dont les sommets soient A ,B, C, D. Que les trois arêtes DA,
DB et AB rencontrent la surface en des points a, a’ pour
la première, b, b’ pour la seconde, et e, e’ pour la troisième.
Considérons sur l’arête AD les deux segmens Aa’ et Da;
et prenons les deux points =, p: qui divisent harmoni-
quement chacun de ces deux segmens; c’est-à-dire, de ma-
nière qu'on ait les deux relations
( 252 }
on aura, d’après le lemme, l'équation
- Am. Au Aa'. Aa
Dm. Du Da. Da’
D
Prenons semblablement sur l’arête DB les deux points
n, v qui divisent harmoniquement chacun des deux seg-
mens Bb’ et Db; on aura
Dr. D: Db. Db’
Br, B> Bb. Bb 4
Enfin considérons sur l’arête AB les deux segmens Be,
Âe’ , et prenons les deux points p et 7 qui divisent cha-
eun d'eux harmoniquement ; on aura l'équation
Bp.Br' Be. Be’
Ap. Ar de. Ae’
Or les six points a, a’, b, b',e, e’ sont les intersections
des trois côtés du triangle DAB et de la conique provenant
de la section de la surface par le plan de ce triangle; il
s’ensuit, d’après le théorème de la Géométrie de position
de Carnot (p. 293 ), que le produit des seconds membres
des trois équations ci-dessus est égal à l'unité: le produit
des premiers membres est done aussi égal à l'unité. Ainsi
l'on a (
Am. Au. Dn. D. Bp. Br
Dm. Du. Bn. B>. Ap. Ar
Cette équation prouve, d’après le même théorème cité,
que Les six points m, bn, 7, pet tr, pris sur les trois
( 253 )
côtés du triangle DAB/ sont sur la circonférence d'une
conique.
Gela posé, déterminons sur l’arête DC deux points r et p
par les mêmes considérations que les deux points m, x
sur l’arête DA; et prenons semblablement sur l’arête AC
deux points s et 5. Les six points m,,r,p, s et o seront
sur une conique.
Enfin, prenons semblablement deux points £ et + sur
l’arête BC ; les six points x, v, r, p, t et 7 seront sur une
troisième conique.
Ges trois coniques passent, deux à deux, par deux
mêmes points. Car les deux premières passent par les deux
points m, x; la première et la troisième passent par les
deux points #, »; et enfin la seconde et la troisième pas-
sent par les deux points r, e. Il s'ensuit que ces trois
courbes sont sur une même surface du second degré.
Car par deux de ces courbes, puisqu'elles se rencon-
trent en deux points, on pourra faire passer une infi-
nité de surfaces du second degré : si l’on détermine une
de ces surfaces par la condition qu’elle passe par un point
pris sur la troisième courbe, elle aura cinq points com-
uns avec celte courbe, puisque cette courbe rencontre
chacune des deux premières en deux points; celte courbe
sera donc tout entière sur la surface. Ainsi nos trois Co-
niques sont situées sur une même surface du second de-
gré. Donc /es douze points M LM PT M P8,0,Letr
sont sur une même surface du second degré.
L'équation ci-dessus,
am Dm
FN Dx ?
prouve que le point a est sur le plan polaire du point D,
( 254 )
pris par rapport à la nouvelle surface. Pareillement le
point b est sur ce plan polaire. Il en est de même de l’un
des deux points où l’arête DG rencontre la surface pro-
posée. On voit ainsi. que les douze points où les arêles du
tétraëdre rencontrent Ja surface sont, trois à trois, sur
quatre plans qui sont les plans polaires des sommets du
tétraèdre, pris par rapport à Ha nouvelle surface.
Or, j'ai démontré que les plans polaires des sommets
d’un tétraèdre, pris par rapport à une surface du second
degré, rencontrent respeclivement les faces opposées du
tétraëdre, suivant quatre droites qui sont des génératrices
d'un même mode de génération d’une surface du second
degré (Annales de mathématiques, 1. XIX, p. 76, et
Aperçu historique , elc., p. 692); donc, les quatre plans
qui contiennent , trois par trois, les douze points d’in-
tersection de la surface proposée par les arêtes du té-
traëdre ABCD, rencontrent respectivement les quatre
faces de ce tétraèdre, suivant quatre droites qui sont
des génératrices d’un même mode de génération d'un
hyperboloïde a une nappe.
C’est le théorème que nous nous proposions de dé-
montrer, comme correspondant à l’hexagramme de Pas-
ca}.
Passons au théorème de M. Brianchon.
Ce théorème consiste en ce que : dans tout hexagone
circonscrit à une conique , les trois diagonales qui joti-
gnent un a un les sommets opposés, passent par un 4
même point. Ghangeons l'énoncé de ce théorème, en sub-
stituant à la considéralion d’un hexagone celle d’un «
triangle ayant pour sommets les trois sommets de rang M
impair de l'hexagone. Les sommets de rang pair seront
considérés comme les points d’intersection des tangentes
( 255 })
à la conique menées par les trois sommets de rang im-
pair; et le théorème prendra cet énoncé :
Un triangle étant décrit dans le plan d'une coni-
que, si l'on circonscrit a la courbe trois angles qui
s'appuient respectivement sur les trois côtés du trian-
gle, les droites qui joindront les sommets de ces angles
aux sommets du triangle opposé à ses côtés respective-
ment , passeront toutes trois par un même point.
Voici quel est le théorème correspondant dans l’espace.
Étant donnés une surface du second degré et un té-
traèdre quelconque ; si l’on circonscrit à la surface
quatre angles trièdres soutendant respectivement les
quatre faces du tétraëdre ;
Les quatre droites qui joindront respectivement les
sommets de ces quatre angles aux sommets du tétraëdre
opposés aux faces qu'ils soutendent, seront quatre gé-
nératrices d’un même mode de génération d’un hyper-
boloïde a une nappe.
Nous pourrions démontrer ce théorème par des considé-
rations semblables à celles par lesquelles nous avons
passé pour démontrer le premier; mais ce serait, en
quelque sorte, une répétition, qu'on évite en faisant usage
du principe de dualité : car les deux théorèmes sont cor-
rélatifs l'un de l’autresuivant ce principe. La démonstration
directe du premier sufhit donc et est aussi, par elle-même,
une démonstration du second.
Les deux théorèmes sont susceptibles de plusieurs co-
rollaires qu'on obtient en supposant que le tétraèdre
prenne diverses positions parliculières pâr rapport à la
surface du second degré. J'ai énoncé déjà ces corollaires,
que je ne reproduirai pas ici. ( Voir Aperçu historique,
pp. 401, 402.)
| ( 256 )
ANALYSE ALGÉBRIQUE.
Note sur la théorie algébrique des logarithmes, par
M. Pagani, membre de l'académie.
+
L'origine la plus naturelle et la plus élémentaire en
même temps que l’on puisse assigner aux logarithmes,
consiste à considérer ces quantlilés comme les termes
d’une progression arithmétique dont le premier terme est
zéro, correspondant aux termes d’une progression géo-
métrique, dont le premier terme est l’unité.
Soit 1 + « la raison de la progression géométrique, d'la
raison de la progression arithmétique. Le terme général
de la première progression aura pour expression
(1+a)",
en désignant par n un nombre entier positif. Le terme
correspondant de la progression arithmétique aura pour
valeur
nd,
D’aprés la définition, la quantité nd est le logarithme
du nombre (1 +2)".
Maintenant si l’on suppose que « converge de plus en
plus vers zéro, les termes de la progression géométrique
que nous considérons , donneront les valeurs de plus en
plus approchées de toute grandeur comprise entre 1 et =
On peut donc admettre l'équation
(LME. - : limite (l+a) =Yy,
où le premier membre indique la limite vers laquelle
converge la quantité (1+4x)", « convergeant vers o et n
convergeant vers =; la lettre y dénote une grandeur po-
silive quelconque. Or, on ne changera point la généralité
( 257 )
de l'équation (1) en faisant :— uz, et en admettant que
la lettre y désigne un nombre déterminé auquel on donne
le nom de module. Par conséquent nous pouvons établir
la proposition suivante :
LA
Étant donnée l'équation (1), on en conclut
Ti -himriel nca log.:y:
0° Y
Cela posé, on peut employer les équations (1) et (2) de
deux manières : en considérant d’abord &« comme une
fraction excessivement petite mais constante, et en lais-
sant indéterminés les nombres n et y. On conçoit, en effet,
que, quel que soit le nombre y, il existe toujours un nom-
bre # suflisamment grand pour que l’équatiof
(ay =y
soit satisfaite avec une approximation d’autant plus grande
que la fraction constante x sera plus petite; ce qui dé-
montre comment, le nombre y étant donné, on peut en
obtenir son logarithme nu«, et réciproquement. On voit
en outre que si l’on a
(l+a) =7y
(Are)'=y,
il doit en résulter
A ta
sn LÉ
et que par conséquent le logarithme du produit de deux
nombres est égal à la somme des logarithmes de ses
facteurs ; théorème fondamental dans cette théorie.
En considérant les équations (1) et (2) sous ce point de
vue arithmétique, on est conduit à la théorie arithmé-
tique des logarithmes , telle à peu près qu’elle a dû se
présenter à l'esprit des géomètres qui se sont occupés les
premiers du calcul de ces quantités. Mais il y a une au-
( 258 )
tre manière d'employer les équations (1) et (2), en con-
sidérant l’exposant # comme un nombre excessivement
grand et donné, et en laissant indéterminées les quan-
tités « et y. Posons à cet eflet «— =, la lettre x dénotant
une grandeur finie variable. Les équations (1) et (2) de-
viendront
fa {ET CO AM limite (a + ©) ddr
CE ee street = log: ge
Les équations (3) et (4) expriment les relations entre
les nombres et les logarithmes. Mais la dernière étant
l'inverse de la précédente, on peut dire que la théorie
algébrique des logarithmes est complétement définie par
l'équation (3). Il est aisé de démontrer, en effet, qu’au
moyen de cette relation on doit avoir
log. yy = log. y + log. y.
Pour y parvenir, multiplions membre à membre, l'é-
quation (3) et celle-ci qui lui est analogue
. . z' ‘é 1
limite ( PERTE
nous aurons
x+2 at" d
limite É Œ ——— (1 “res —)| — y.
n n(x+x')
Mais cette équation est évidemment la même que
A z+x
limite (1 + ne, = Yy ;,
n
xx!
’ é I
attendu qu'en faisant Fe le facteur 1 Ce)
réduit à l'unité. Ce qui démontre la proposition énoncée.
En résumé, la théorie algébrique des logarithmes re-
EUR
(239 )
pose sur l'équation binome (3), considérée à la limite
qui correspond à = — 0.
Le problème dont la solution fait l'objet principal de
cette note . consiste à résoudre l'équation (3), l'inconnue
étant x. En d’autres termes, le nombre étant donné, et
le module, trouver le logarithme correspondant.
Soit l'équation binome
z" = r(cos. 8 + 2 sin. 8),
dans laquelle r désigne une grandeur réelle et positive, Ÿ
un arc de cercle dont le rayon est l’unité, et à le sym-
bole V”—1. On aura, comme on sait,
2
me — 9 + 2kr ME CRT
sr. ( cos. ———— +isin. ):
m m
Dans le second membre de cette formule VT exprime
la grandeur arithmétique réelle et positive qui , élevée à
la puissance m, doit produire r; la lettre k désigne un
nombre entier quelconque, positif ou négatif, zéro compris.
Si nous faisons maintenant
à
m—=n,z—=1l+—, y—r(cos. 4+2sin.4),
n
nous trouverons, en vertu de la formule précédente
log. [r(cos.4 + à sin. 8)] —
es 8+ 2% 8 + 2%
limite un [V7 (cos. Lu AS AT ra =) = 1 :
n
Reste maintenant à trouver la vraie valeur du second
membre de cette formule.
Tant que l'arc 9 et le nombre k conservent une valeur
finie, on a
0+2kr 414 2kr 0+2kr
COS, —— = 1, CI re
n n n
?
( 260 )
en négligeant les termes infiniment petits du second ordre.
Partant
log: [r(cos. 8 + isin. 8)] —
HF UTE We ô -
limite un Le (1 far i) u£ | }
ñn
ou bien
log. [r(cos. 8 + à sin. 8)] —
limite un (V/r — 1) + limite mY/r (8+ 2kx) à.
Posons, pour abréger,
limite n (V/r —1)=tr,
en dénotant par / le logarithme arithmétique naturel du
nombre positif r; l'équation précédente donnera, en
observant que limite VT is
log. [r(cos. 8 + 2 sin. #)]=wl tr + (8+2kr)i].
Le second membre de cette formule nous donnera les
logarithmes des quantités réelles, en y faisant 0 égal à
un multiple pair ou impair de 7, suivant que ces quan-
tités sont positives ou négatives. Nous voyons par cette
formule, qui coïncide avec les résultats découverts par
Euler, que les solulions qu'elle renferme ne sont pas
toutes celles que comporte la question, et que ces solu-
tions correspondent aux valeurs finies de 9 et de k. Pour
avoir donc la solution complète de l'équation (3), il faut
recourir à d'autres méthodes, et particulièrement à celle
que j'ai employée dans une question plus générale, et que
j'ai eu l'honneur de soumeltre à l'académie, dans une
note sur la résolulion de l'équation binome
Fa ie
( 264)
P.5. Apres avoir rédigé cette note, j'eus l’occasion de
voir, dans un rapport publié à Londres en 1835, et que
notre savant confrère M. Quetelet a eu l’obligeance de
me prêter, que M. Graves avait donné en 1828 la solution
complète de l'équation binome. Mais j'ai pu me convain-
cre que la marche suivie par ce savant est différente
de celle que j'ai suivie dans la note publiée dans le
tome XI des nouveaux Mémoires de l’académie, et je
dois ajouter que j'ignorais complétement que d’autres
géomètres eussent trailé le même sujet, avant d’en avoir
trouvé la solution.
— M. Pagani présente ensuite un mémoire #ur quel-
ques transformations générales de l’équation fondamen-
tale de la mécanique. (Commissaires : MM. Timmermans
et Garnier.)
— M. Garnier communique un écrit contenant des
développemens et propriétés de quelques fonctions trigo-
nométriques.
MÉTÉOROLOGIE.
L'académie reçoit communication des observations mé-
téorologiques horaires faites à Bruxelles, Louvain, Alost
et Gand, à l’époque de l'équinoxe du printemps (1839).
Ces observations, continuées d'heure en heure depuis le
21 mars dernier à six heures du matin jusqu'au 22 à six
heures du soir, s'accordent à présenter une grande con-
formité de résultats. Ainsi la pression atmosphérique,
indiquée par l’état du baromètre et représentée par la
carte figurative ci-jointe, a subi à peu près exactement les
… mêmes oscillations dans les quatre localités mentionnées,
( 262 )
Observations météorologiques horaires faites à l'équinore
du printemps (1839).
BAROMÈTRE RÉDUIT A O°. VENTS.
ne A Ne LT RERO RES Re ee
a n È
DATE, = à k 8 É à
20 Le 0 AO Ne EME OUR
| Le] < [2] a pe < [2]
21mars.
mm mm mm mm
6 h. m. À 750,67 | 752,383 | 753,50 | 753,389 À O. | O. |ONO.| SS0.
T7 — 50,51 | 52,109 | 53,39 | 53,289 À SO. | O. |ONO.| So.
8 — 50,32 | 51,946 | 53,25 | 52,975 ee O. |SS0. | SSO.
9 — 50,06 | 51,608 | 52,91 | 52,760 | 50. | O. |SSo.| so.
10 — 49,97 | 51,532 52,82 52,733 JOSO.| O. |Sso.| so.
11 — 49,75 | 51,417 | 52,75 | 52,605 4 O. |SSo. | SSso
12 — 49,62 | 51,182 | 52,33 | 52,565 À SO. | O. | SSO. | SO.
1h.s. 49,45 | 51,182 | 52,32 | 52,294 | SO. | O. | So. | 080.
2 — 49,34 | 50,996 | 52,10 | 52,069 À SO. | O. | So. |oso
FU 49,04 50,733 52,02 51,929 l0/SO.| O. | So. |oSoO
4 — 48,84 | 50,327 | 51,62 | 51,778 | O. |0S0O.| So. | o.
5 — 48,80 | 50,447 | 51,55 | 51,778 À O. | O. | So. | o
6 — 48,91 | 50,433 | 51,91 | 51,878 Joso.| Oo. |o050.|0s0
7 — 48,90 | 50,471 | 51,54 | 51,929 EOSO.| O » |OSO.
B — 48,94 | 50,434 | 52,21 | 52,029 IONO.| O » | »
9 — 48,94 | 50,447 | 51,90 | 52,029 L » » » »
10 — 48,87 50,409 | 51,85 | 52,016 À » » » »
11 = 48,67 | 50,309 | 51,63 | 51,916 À » » » »
121 48,70 » 51,58 | 51,881 » » » »
(1) Quoique les nuages soient venus constamment du NNO, la direction du
vent a été três-var. dans les régions infér., fréquemt la girouette a marqué E.
(2) Le vent change.
(3) Par intervalle vent assez fort.
22mMARrs.
mm mm
1h. m. | 748,50 ».
pe = 48,39 »
3 — 47,90 »
4 — 47,46 »
nm — 47,18 | 748,586
6 — 47,01 48,561
T — 47,17 48,536
8 — 47,44 48,761
9 — 48,01 49,211
10 — 48,82 50,047
Il — 48,93 50,268
12 — 49,23 50,368
1h. 49,19 50,508
2 — 49,16 50,358
3 — 49,37 50,682
4 — 49,64 50,850
| 5 — 49,90 51,219
(1) Jusqu'à 5 h. du matin, il y a eu par intervalle d'assez forts coups de vent.
(2) Le baromètre oscille.
rm
751,56
51,18
50,86
50,43
50,11
50,18
(3) Vent fort entre 10 et 11 heures.
(4) Entre 10 heures du matin et 5 heures du soir le v ent a soufllé avec force,
(5) Entre midi et 1 heure le vent redevient fort par intervalle.
Tom. vr.
mm
751,657
51,336
50,958
50,580
50,430
50,430
50,567
50,891
51,794
52,368
52,488
RBUXELLES,
VENTS,
LOUVAIN.
» » » ( 1 ) » [
» » » »
» » » »
» » » »
» oo » »
ONO.|ONO.|ONO.|ONO.
ONO.|ONO.|ONO.| o.
ONO.|ONOQ.|0S0. | Oo.
NO |ON0. oN0.
NO_|0s0.| o.
O. | 0S0./0N0O.
O. | NO. O.
( 264 )
Observations météorologiques horaires faites à l'équinoxe
du printemps (1839).
BRUXELLES, R LOUVAIN ALOST. GAND.
DATE.
en,
THERM.' HYG. THERM. ÎTHERM.| H\YG, THERM.| HYG.
a) | (2) (a)
21 mars.
6 heures matin, 43,6 89/424-13937 | 70,0
7 — 4,0 72,0
8 _ 4,2 73,0
9 = 5,1 72,0
10 — 5,0 71,3
11 2 5,3 68,5
12 "1 5,9 64,3
1 heure soir. . 6,3 61,5
2 = 6,7 62,5
3 Æ 8,0 62,3
4 — 7,5 65,3
5 — 8,0 66,0
6 — 7,8 70,3
TEMPÉRATURE.
Maximum. Minimum,
(1) Du 20 au 21 mars, à midi . . . + + : . + 855 11 378
Du2lau22 — _— 2 Ps PAPE ER LE 8,0 6,1
Tin PETI CE nest QUE AU ARR AN es og LL 10,1 4,8
(2) Nuit du 21 au 22 mars . SAS LAS: EL AANERS » 5,8
ee 2imers L. 4 de {Se ea Ton 9,1 3,1
ME nl N'ramgeret et lb ot SELS Et 9,4 6,1
(4) Du 21 au 22 mars, did, 0 RU PUS 10,75 6,25
Du 22au23 — RP MST LEON PRE. 4,87
QUANTITÉ D'EAU TOMBÉE.
Du 20 au 21, à midi. | { 1,40 Pendant les observati. ( Alost.) 3,32
Du2lau22, — Ÿ Bruxelles. } 1,91 Du 20 au 21, à midi, A 4,05
Du22au23, — 0,76 Du2lau22, — and. } 4,23
Pendant les observat. (Louvain.) 2,90
in
DATE.
heures soir
22 MARS.
1 heure matin .
2
3
11
12
heure soir.
( 265 )
BRUXELLES.
a ——
THERM.| HYG.
72 | 920
7,0 | 94,5
7,0 | 95,0
7,0 | 96,0
7,0 | 96,0
6,7 | 97,0
6,7 | 97,0
6,3 | 95,0
6,0 | 95,0
6,1 | 94,0
6,0 | 97,0
6,0 | 97,5
6,2 | 97,0
6,7 | 96,0
6,7 | 85,0
6,8 | 79,0
6,8 | 70,0
7,5 | 69,5
7,5 | 68,0
8,7 66,0
8,4 | 69,0
8,5 | 69,5
AT |174,0
7,0 79,0
LOUVAIN
THERM.
ALOST.
THERM.| HYG.
180 |93°83
7,7 |92,32
7,5 |94,74
7,4 |98,48
7,4 |98,45
7,2 |99,16
6,9 |98,13
6,9 |93,93
6,7 |95,39
6,7 |96,68
6,5 |98,49
6,4 |99,45
6,9 |99,60
7,5 |94,25
7,2 |80,23
6,8 |82,67
7,0 |63,78
8,1 |65,06
9,2 |63,62
9,0 |60,30
8,7 |63,78
8,6 |66,35
8,0 |72,16
8,4 |74,42
GAND.
ee
THERM.| HYG
-4-7000 | 74°0
7,12 | 75,0
6,87 | 76,0
6,87 | 77,5
6,87 | 77,0
6,50 | 78,0
"a
6,75 | 78,0
6,87 | 75,5
| 6,62 75,0
6,75 | 75,5
6,75 | 77,3
6,87 | 78,0
6,87 | 77,0
7,62 | 66,0
7,75 | 55,7
7,12 | 44,5
7,87 | 41,5
8,62 | 37,0
9,37 | 35,0
9,12 | 35,5
10,00 | 38,5
9,25 | 42,5
8,12 | 47,5
7,50 | 56,0
( 266 )
Observations météorologiques horaires faites à l’équinoxe
du printemps (1839).
ÉTAT DU CIEL.
BRUXELLES. LOUVAIN.
21 Mars.
, 4 PA
6 h. mat.fÉclaircies rares.| Légères éclaire. Couvert. Cou. pl. fine.
et
à l'Est.
À peu prés unif, Couvert. Id. Id.
couvert,
Couvert. Couvert, pluieet| Pluie fine. Id,
un peu deneige.
ds pluie. Éclaircies. Couvert Couvert.
Id. pluie tranq.| Écl., pluie fine, Pluie fine. Id.
Couvert, Éclaircies. Couvert. Nuages.Entre 10
et 11 h. pluie.
Couvert. Id. Nuages.
Id, 6 Qq- écl. au N,
Id, Éclaircies rares.
Éclaircies rares. Écl., un peu de : Gros nuag.auN;
pluie fine. écl. à l'O.
Éclaircies. _ Éclaircies. Cirr.-cum. Écl. au Setàl’O;
pl.; arc-en-ciel.
5 — Cum.-strat. Nuages. Cum., bel arc-en-| Grosnuag.au N;
ciel. écl. auS; pluie.
6 — Éclaircies. Id. Cirr.-cum. Nuages,
T7 — Couvert. Couvert , pluie. Cumulus. Écl. Entre 6 et 7
heures pluie.
8 — Écl., cum,-str. Couvert. Couvert, Nuages.
9 — Couvert, Éclaircies rares. | Id. Id.
10 — Id. Id. | Id. Nuages, pluie.
l
Observations horaires de la pression atmosphérique
a l'équinoxe du printemps, 1889.
SE non Avril Fage 267, Tome VI.
&s
15
058 10 12028 CNE: Gon2, D 14 6 BIO TONER
M . Miraut Hd
u Mars 22 Mars
DATE.
11 h. soir.
U12
12
t
t
1
h. soir.
ÉTAT DU CIEL.
PP
BRUXELLES, LOUVAIN.
Couvert. Couvert.
Id, Id.
Id. Id,
Id. Id.
Id. ld.
Id. Id.
Couv., pl. entre Id.
4et 5 heures.
Couvert , nuages Id.
très-bas.
Couvert. Couvert, pluie.
Éclaircies rares Couvert.
id. Éclaircies.
Éclaircies. Couv.,grosnuag.
Stratus. Couvert,
. LA .
Stratus et nimb., | Éclair. et couv.
beaucoupdenu-|alternativement.
ages.
Strätusautour de Éclaircies.
l'horizon,
Cum.-str. Nuages.
Stratus. Id,
Qq. rares écl. |Éclaircies, pluie.
Couv.,nimb., pl.| Couvert, pluie.
etgréleà4h.;.
Couv., nimb, Id,
ALOST,
Pluie fine.
Id.
Id.
Couvert.
Id,
Id.
Pluie,
Pluie fine.
Couvert.
Æ
Eclaircies,
Couvert.
Cirr.-cum,
Id.
Cumulus,
Cirr.-cum.
Id.
Id.
Giboulée.
Cumulus.
Couvert.
GAND,
Nuages.
Qq. éclaircies.
Couvert, pluie.
Id.
Nuages.
Id.
Éclaircies rares.
Éclairciesau NO.
Éclaircies
Id.
Id,
Id.
Nuages,
Id.
Id.
Couvert.
‘ Gros nuages,
( 268 )
MAGNÉTISME TERRESTRE.
M. Quetelet présente un mémoire dans lequel il exa-
mine les résultats des observations qu’il a faites depuis
douze années, sur l’état du magnétisme terrestre à |
Bruxelles. Il résulte de l’ensemble de ces observations que
l'aiguille aimantée s’est constamment rapprochée de la
ligne méridienne , c’est-à-dire que la déclinaison et lin-
clinaison ont diminué d’année en année, contrairement à
ce que l’on avait observé précédemment, du moins pour
la déclinaison magnétique. Les résultats observés ont été
les suivans :
LA
EPOQUES. DÉCLINAISON. | INCLINAISON.
1827 octobre . . . RC AUE 220 28'8
1830: finldemarsitsfei à jen 22 25, 3
| 1832 — PRET MOT. Te 22 19,0
1833 — SE CA TT 22 13,4
1834 commencement d'avril, . . 22 15,2
1835 fin MANS 0 171 Ce PRET 22 6,7
1836 M td NT 22 7,6
1837 PR! PEU OU 22 4,3
| 1838 NE AN 3,7
1839 AU IPN RUE 53, 6
Les observations de celte année ont été faites, pour la
déclinaison, le 29 mars. La valeur indiquée est la moyenne
de deux séries d'observations qui ont donné successive-
(208: )
ment 21°53’,1 et 21°54,2. Des observations semblables
avaient été faites la veille, dans des circonstances moins
favorables à cause de l’agitation de l'air. Celles-ci avaient
donné pour la déclinaison 21°51”,3 et 21°51’,1 : on a cru
devoir donner la préférence aux premières, Dans ces diffé-
rentes séries d'observations, le méridien élait déterminé
en plaçant préalablement l'appareil magnétique de ma-
niére que la lunette pouvait à volonté être dirigée vers
le fil du milieu de la lunette méridienne de la salle d'ob-
servation, qui servait de mire.
La valeur de l'inclinaison est la moyenne des Lrois va-
leurs suivantes 68°22°,25,68°22’,67,et 68°22,25, obtenues
successivement le 31 mars. Ces observations ont été faites
dans des circonstances très- favorables. De même que les
années précédentes, on a cru devoir faire les différentes
observations pour la déclinaison et l'inclinaison à la
même époque de l’année et vers les mêmes heures du jour.
Commissaires, MM. Plateau et Crahay. |
ÉLECTRICITÉ.
Notice sur des expériences d'électricité par influence ,
par J.-G. Crahay, membre de l'académie.
Dans les expériences avec le condensateur à lame de
verre, on observe quelquefois des phénomènes dont la
Cause est instruclive à rechercher. La présente notice a
pour but d'en signaler quelques-uns dont les auteurs de
physique ne font pas mention.
Nommons 4, B, les deux plateaux métalliques d'un
(270 )
condensateur, lesquels doivent , pour l'objet en question,
pouvoir être tous les deux isolés et placés à diverses dis-
tances soit entre eux, soit à la lame de verre intermé-
diaire ; il convient aussi que cette dernière soil vernie,
afin de mieux isoler.
Employons d’abord l'appareil sans la lame de verre,
Mettons les plateaux à la distance de un à deux centimètres
l'un de l’autre, et pendant que l’un d'eux, par exemple,
est en communication avec la terre, donnons à l’autre une
charge que nous supposerons vitrée, après quoi isolons le
plateau 2. Au premier moment après l'isolement, ce der-
nier plateau ne possède point de fluide libre, toute son
électricité, qui est résineuse, est neutralisée à distance
par la vitrée de 4, laquelle a conservé en partie sa liberté,
et fait diverger l’électroscope dont ce plateau est muni;
mais bientôt l’action absorbante de l’air et le défaut d’iso-
lément complet de la part du support, enlèvent une partie
de cèlte électricité libre de A, ce qui fait qu'une partie
correspondante du fluide résineux de 2 acquiert aussi la
liberté, et fait diverger son électroscope; après quelque
temps, l'appareil arrive à avoir à l’état de liberté une
égale quantité d'électricité sur chacun de ses plateaux,
mais de nature différente de l’un à l’autre. Depuis ce
moment les déperditions de fluide libre sont égales de
part et d’autre; elles amènent la décharge complète de
l'appareil après nn temps plus ou moins long, suivant
l'état hygrométrique de l'atmosphère.
Éloigne-t-on l'an de l’autre les deux plateaux chargés,
leurs électroscopes divergent davantage , parce que l’at-
traction mutuelle des fluides de nature opposée étant di-
minuée, une portion plus grande de leurs électricités
dissimulées devient libre. Et pour une raison semblable
(274)
les électroscopes divergent moins quand on Hi Le les
disques.
Il est encore connu que , les disques restant à une même
distance, si l’on touche l’un d’eux, aussitôt l’électroscope
de l’autre acquiert un beaucoup plus grand degré de di-
vergence, parce qu'en diminuant la charge du premier,
le fluide du second en est moins fortement atliré, et
conséquemment une partie de celui qui était dissimulé
doit se mettre en liberté et faire augmenter la divergence
de l’électroscope, en se joignant à la portion qui jouis-
sait déja de l'état de tension.
Enfin, si l’on établit une communication ne les deux
air, leurs fluides de nature opposée se combinent ;
et si ces fluides étaient égaux en quantité, ou si, élant
inégaux , l'excès pouvait se perdre en terre pendant que la
communication est établie, les deux plateaux rentrent dans
l'état naturel. Quand ensuite la communication des pla-
eaux entre eux et avec la terre est interrompue, et qu’on
abandonne l'appareil à lui-même, les électroscopes ne
manifestent plus le moindre signe d'électricité après un
temps quelconque.
Tous ces faits sont bien connus et faciles à expliquer.
On sait également que lorsque , comme nous venons de le
supposer, les deux plateaux ne sont séparés que par une
lame d’air, leurs fluides ne tardent pas, si l’on continue
à charger Z, à franchir l’espace en se combinant sous
forme d’une étincelle brillante. Pour empêcher cette trop
facile combinaison, on interpose entre les deux disques
une lame moins aisément percée par l'électricité que celle
d'air; le verre remplit fort bien ce but. Fixons-en une
lame entre les deux plateaux que nous amênerons en con-
tact de part et d'autre avec elle, et rechargeons le conden-
(272)
sateur comme tantôt, en fournissant du fluide vitré à À,
pendant que Z est lié avec la terre, puis isolons l’un et
l'autre plateaux. Les phénomènes cités plus haut se repré-
senteront encore celte fois-ci, sauf que maintenant, si
l'on abandonne l'appareil à lui-même après que les deux
plateaux ont été mis en communication, puisaussitôt isolés
l’un d’avec l’autre et d'avec la terre , leurs électroscopes,
réduits d’abord à l’état neutre, manifesteront peu à peu
des signes d'électricité que l’on trouvera être de même
nature que celle des charges que les plateaux avaient pos-
sédée respectivement ; savoir vitrée pour À, résineuse pour
B. Ce phénomène se conçoit quand on considère que pen-
dant l'accumulation, les électricités se séparent en majeure
partie des deux plateaux, par leur tendance à se rappro-
cher, et vont se placer sur les faces opposées de la lame de
verre, laquelle, par sa résistance, les empêche de se rap-
procher davantage. Cette séparation des électricités d'avec
les plateaux s'opère toujours, que la lame de verre soit
nue ou enduite de vernis, pourvu que les plateaux aient
leurs surfaces à l’état métallique, ou simplement recou-
vertes d’une couche mince de ce vernis, qu’on applique
ordinairement sur les instrumens en cuivre; la charge
électrique étant d’ailleurs supposée assez forte pour sur-
monter les légères résistances que les fluides éprouvent à
passer d’une surface à une autre, fussent-elles même toutes
deux métalliques, ensuite pour franchir dans quelques
endroits la mème couche d'air interposée entre le verre
et les disques métalliques, et pour se propager de point en
point sur la surface du verre même, en s'étendant autour
des endroits où le passage a eu lieu du métal au verre.
Cela posé, établit-on momentanément la communica-
on entre les deux plateaux? les fluides qui étaient restés:
( 273 )
répandus sur eux et Ja plus grande partie de ceux qui
s'étaient portés sur la lame de verre, se précipitent l’un
vers l’autre et rentrent à l’état naturel; mais il en reste
une portion sur les deux faces de la lame isolante, surtout
aux endroits un peu éloignés des points où les plateaux
touchent immédiatement la surface du verre; c’est la por-
tion qui, par la diminution de tension qui a lieu à mesure
que l'écoulement s'opère , n’a pu surmonter assez vite les
obstacles qui s’opposaient à son mouvement, et se joindre
à la précédente ; cependant, par leur tendance à se distri-
‘buer également, les fluides restés sur la lame se portent
peu à peu vers les points où l'accumulation est moindre,
passent aux plateaux métalliques et de là se€ommuni-
quent aux électroscopes qu'ils font diverger. Enlève-t-on ces
fluides aux plateaux? les électroscopes de ceux-ci divergent
de nouveau aprés quelque temps, par les électricités qui
élaient restées sur le verre et qui, par le départ de celles
des plateaux, se propagent encore aux points de contact
métallique. Ce phénomène se répète un grand nombre de
fois, quoique avec une intensité décroissante, car les
fluides répandus sur les deux faces de la lame y sont con-
densés en partie par leur attraction mutuelle, de sorte
qu'à chaque instant il n’y en a qu’une portion seulement
qui puisse passer aux disques ; aussi lorsque l’on se borne
à en dépouiller un seul des disques, l’état électrique de
l’autre devient immédiatement plus fort.
Cette recharge spontanée du condensateur par les
fluides qui avaient quitté les armatures, s’observe aussi
dans des bouteilles de Leyde. Celles-ci, quand elles
sont un peu grandes ou réunies plusieurs ensemble, re-
preunent par cet effet assez de force pour donner une
commolion à la personne qui s'établit entre les deux arma-
( 274 )
tures. Quoique dans les bouteilles de Leyde les armatures
soient appliquées immédiatement contre le verre, cepen-
dant il n’y a contact métallique que dans quelques points
et souvent nulle part, la matière collante se trouve inter-
posée partout ailleurs; puis, dans tous les cas, il y a
changement de surface, par conséquent résistance au
mouvement de l'électricité.
La recharge spontanée dont il est question ici, doit être
distinguée du résidu que conservent les bouteilles lors-
qu’on a placé dans le circuit un corps qui retarde l’écoule-
ment des fluides. Ce résidu maintient l’électroscope à un
degré plus ou moins grand de divergence, tandis que
l'électricité dont nous nous occupons actuellement se
montre, après que la communication des deux armatures a
été établie par un bon conducteur, de telle sorte qu’aussitôt
après la rupture de la communication, l’électroscope n’é-
prouve pas la moindre divergence; ce n’est que quelques
instans après qu'elle a lieu et augmente progressivement.
Quelques physiciens supposent que l'électricité non-
seulement quitte les armatures métalliques pour s’accu-
muler sur les faces du verre, mais qu’elle pénètre même
plus ou moins profondément dans l’intérieur de la lame,
pour ne s’en dégager que peu à peu après que la décharge
des armatures sera opérée. Cette pénétration de l’élec-
tricité dans la masse du verre ne peut être admise, au
moins dans le cas présent, car lorsqu'après avoir Ôté la
lame de verre d’entre les deux plateaux du condensateur,
on la touche soigneusement sur tous les points à l’aide
d’un corps conducteur flexible qui s'applique exactement
contre sa surface, comme les mains légèrement humides
par la transpiration, ou des morceaux de toile de lin,
qu’en outre on ait l'attention de toucher simultanément
Là
( 245 )
les points opposés des deux faces, on enlévera par ce
moyen toute l'électricité de la lame, de sorte qu'après l’a-
voir replacée entre les deux plateaux, ceux-ci ne donne-
ront plus de signes d'électricité. Or, si les fluides avaient
pénétré dans la substance du verre, un contact superficiel
et momentané n'enléverait que la portion résidant sur la
surface ou à une légère profondeur, le reste apparaîtrait
ensuite. Si les faces n’ont pas été touchées avec le soin
nécessaire, il y aura des points avec lesquels le conduc-
teur n’aura pas élé en contact, qui auront conservé leur
charge en partie ou en totalité, et qui suffira pour faire
naître ensuite des signes d'électricité dans les plateaux.
Voici maintenant quelques phénomènes que je ne me
souviens pas d’avoir vus décrits dans aucun ouvrage de
physique.
Après avoir chargé suffisamment le condensateur, puis
l'avoir déchargé; si, avant que les électroscopes donnent
des signes d'électricité, on écarte les deux plateaux de la
lame de verre, on verra les électroscopes diverger gra-
duellement de plus en plus à mesure que les plateaux
seront plus éloignés de la lame, et l’on trouvera que cette
fois ils sont chargés de fluides de nature opposée à ceux
qu’ils possédaient avant la décharge, c'est-à-dire qu'il sera
résineux pour le disque À, vitré pour 2.
Ces fluides proviennent d’une action qu’exerce sur cha-
que disque métallique l'électricité qui garnit la face vi-
treuse avec laquelle il était en contact, action analogue à
celle d’un électrophore. Ainsi l'électricité vitrée de la
face en contact avec le disque 4, et qui n’a pu encore se
dégager de cette surface vitreuse, agit par influence sur
le disque en attirant du fluide résineux et en repoussant
» du vitré; ce résineux, qui aura été fourni, du moins en
(276 )
partie, par le disque B, pendant que la communication
était établie entre les deux plateaux, se fixe sur 4, tandis
que le vitré de À s'écoule vers B, où il est aussi en partie
neutralisé à distance par le résinenx aitaché de ce côté à
la lame de verre. Sépare-t-on ensuite les disques d'avec
la lame de verre? les électricités, résineuse sur À, vitrée
sur 2, sont mises en liberté et font diverger les électros-
copes.
Supposons qu'on enlève ces électricités pendant que les
disques sont écartés de la lame de verre, el qu'ensuile on
les en rapproche, on verra de nouveau les électroscopes
diverger , et cette fois, il y aura une seconde inversion
dans la nature des fluides : 4 montrera du vitré, B du
résineux. En effet , les électricités des faces de la lame de
verre agiront sur le fluide naturel des disques, repous-
seront ceux de même nature qu'eux et attireront ceux de
nature opposée : de là provient que chaque disque doit ma-
nifester une électricité de la même espèce que celle de la
face de verre avec laquelle il est en regard.
D'après ces considérations , il est aisé de rendre raison
des phénomènes électriques que montrent les disques
dans les cas suivans : 1° Les plateaux étant remis en con-
tact avec la lame de verre, et leurs électroscopes diver-
geant par les mêmes espèces d’électricités que celles qui
garnissent les faces de la lame avec lesquelles ils sont res-
pectivement en contact, si on les écarte ensuite graduel-
lement , la divergence des électroscopes diminue, devient
nulle , et ensuite recommence par une électricité opposée,
lorsque les disques sont arrivés au delà de la distance où
ils étaient lorsqu'on les a dépouillés de leurs fluides libres ;
dans la supposition que cette distance ne soit pas plus
grande que celle à laquelle l'électricité de la lame de verre
(:272 )
peut étendre son influence. Ceci s'explique en remarquant
qu'à mesure que l'on écarte les disques, leurs électricités
dissimulées sont mises en liberté; elles neutralisent d’a-
bord les fluides de nature opposée qu’elles rencontrent en
liberté; de là la convergence des électroscopes. Aprés que
les fluides préexistans sont réduits à l’état naturel, ceux
qu'un plus grand écart des disques fait dégager restent
et manifestent leur présence, de là l’inversion.
2° Les deux disques étant en contact avec la lame de
verre, et n'ayant point de fluide libre, si l’on éloigne
l'un d’eux, par exemple À, l’autre, B, restant en contact
. avec la lame, non-seulement le premier, mais encore le
second, manifeste de l'électricité de nature opposée à celles
des faces de la lame de verre qui leur correspondent. Il
semblerait qu'il n’y ait pas de raison pour que maintenant
B acquiére aussi de l'électricité libre, puisqu'il ne s’est
pas séparé du fluide qui attirait le sien, et qui était la
cause de la fixation; mais il faut remarquer qu'il y a des
réactions électriques non-seulement entre les fluides ré-
pandus sur les faces en regard, maïs aussi entre ceux des
faces plus éloignées.
Ainsi le vitré de l’une des faces de la lame de verre M,
attire à la fois, mais avec des intensités inégales dépen-
( 278 )
dantes de la différence des distances, le résineux de l'autre
face de M, et celui du disque À, et il repousse le vitré
du disque Z ; de même, le résineux de la seconde face
de M attire le vitré de la première face, ainsi que celui
du disque Z , et il repousse le résineux de 4. Pareille-
ment, le résineux de 4 agit par attraction sur le vitré de
la surface de M qu'il touche et sur celui de l’autre disque,
et par répulsion sur le résineux de la deuxième face de W.
Enfin, le vitré de Z agit sur les fluides de la lame de verre
et sur celui de la plaque Z. D'après cela, si l'on éloigne
le disque À de la lame de verre, il en résultera d’abord
que son fluide résineux, en attirant avec une moindre in-
tensité le vitré de la face de F7 qu'il touchait, laissera plus
de liberté à celui-ci pour agir par attraction sur le rési-
neux de la deuxième face de M, conséquemment une
plus grande portion de celui-ci sera condensée, et perdra
la faculté d'agir sur le vitré de PB; de là qu'une partie
de ce dernier sera mise en liberté. En second lieu, le
vitré de M, abandonné à lui-même par l'éloignement de
À , agira encore par répulsion sur le vitré de 2 ; enfin ce
vitré de Æ sera moins fortement attiré par le résineux de
A. Ges trois causes se réunissent pour mettre en liberté
sur le disque B une certaine portion de fluide vitré.
3° Par la même conséquence, si , aprés avoir éloigné les
deux disques de la lame de verre, el que l’électroscope de
PB diverge par du fluide vitré, Z par du résineux, à l'ins-
tant où l’on touche l’un des disques, la divergence de
l'électroscope de l’autre augmente.
4 De là encore le phénomène suivant : le plateau B
ayant été séparé de la lame de verre, déchargé du fluide
vitré qui y aura paru par suite de celle séparation , puis
ramené vers la lame , son électroscope divergera alors par
C0 279.)
de l'électricité résineuse, ainsi que cela a été expliqué
plus haut. Si actuellement on éloigne progressivement le
plateau Æ seul, la divergence de l’électroscope de Z di-
minuera , et après qu'il sera revenu à l’état naturel, il
divergera de nouveau, mais par du fluide vitré.
Les explications restent les mêmes, si les diverses opé-
rations décrites ci-dessus , au lieu d’être faites sur l’un des
disques, l’élaient sur l’autre, il n’y aurait que les dénomi-
nations des fluides à changer.
ETINOGRAPHIE. F
Note sur la classification des races humaines , par
J. J. d'Omalius d'Halloy, membre de l'académie.
Un petit ouvrage dont je m'occupe m’a mis dans le cas
de composer un tableau des races humaines, que je crois
devoir présenter à l’académie , non pas que j'aie la préten-
tion d'y voir quelque chose de neuf, les travaux de ce
genre pouvant être considérés comme des compilations qui
se succèdent avec de légères variantes; mais il m'a paru
que cette communicalion pourrait donner lieu à des re-
marques qui me mettraient à même d'introduire quelques
améliorations dans ce premier essai.
On sait que l'étude zoologique du genre humain a fait
connaître que l’on peut y distinguer trois modificalions
bien caractérisées, que l’on désigne souvent par les noms
de race blanche, de race jaune et de race noire ; mais,
soit que les causes auxquelles on doit l'existence des Lypes
de ces trois divisions, aient aussi produit d’autres modi-
_fications moins prononcées ; soit que la faculté qu'ont
Tom. vr. 20
La 4
L
4
F
( 260 )
tous les hommes de se reproduire entre eux , ait donné
naissance à des nuances intermédiaires , ces trois races se
fondent l’une dans l’autre de manière que les lignes de
démarcations sont extrêmement difficiles à tracer, et que,
si quelques auteurs font rentrer tous les peuples de la
terre dans les trois divisions indiquées ci-dessus , d’autres,
au contraire , en ajoutent un nombre plus ou moins con-
sidérable. Sans prétendre que la marche adoptée par les |
premiers soit moins rationnelle que celle des seconds,
j'ai cru devoir suivre l'usage le plus ordinaire , qui admet
deux autres divisions de même rang sous les noms de
race rouge et de race brune.
On sent que les traits qui peuvent servir à distinguer
les hommes d’une même race étant moins importans , et
que les mélanges entre ces hommes devant être plus fa-
ciles et plus fréquens que ceux entre des hommes de
races différentes, l'établissement des subdivisions , d’après
les caractères zoologiques , devient très-difiicile; aussi la
plupart des ethnographes ont-ils eu recours, pour cette
fin, aux notions tirées du langage et de l’histoire ; mais il
est à remarquer que, d’un côté, il existe beaucoup de peu-
ples dont le langage ne nous est pas suffisamment connu,
ou sur l’origine desquels on n’a aucun renseignement
historique, et que, d’un autre côté, ces notions sont
quelquefois dans le cas d’induire en erreur, l'expérience
prouvant qu'un peuple peut prendre la langue ou le
nom d’un autre peuple, qui, dans la réalité, se fond au
milieu de celui qui perd ainsi ses caractères sociaux,
lequel étant plus nombreux que l’autre, imprime bientôt
à la nouvelle association ses caractères zoologiques. C'est
ainsi, par exemple, que si l'on n'avait égard qu’à la
langue, on devrait considérer les nègres d'Haïti pour des
( 261 )
Français, et que, si l’on n'avait égard qu’à l’origine du
peuple qui a donné le nom, les Français, les Bourgui-
gnons et les Lombards actuels , devraient être rangés parmi
les peuples germaniques; cependant, lorsque l’on com-
pare les traits et les langues de ces peuples, on est con-
yainçu que les anciens Francs, Bourguignons et Lombards,
n’ont formé que la moindre partie de la population des
pays qu’ils ont conquis, et qu'ils se sont bientôt fondus
dans cette population. En effet, si l’on fait attention à la
persistance dont les caractères zoologiques sont doués,
dans l’état actuel du globe, on sent que quand un peuple
présente les formes d’une race différente de celle annon-
cée par sa langue ou par l’histoire, cette circonstance
prouve que les croisemens successifs des individus de
cette race avec ceux d’une autre race ont été tels, qu'il y
a maintenant dans les veines de ce peuple plus de sang
de cette dernière race que de celui de l’autre. C’est ainsi,
par exemple, que les descendans des premiers Portugais
établis au Congo , qui, en s’unissant successivement avec
des négresses, ont pris tout-à-fait les caractères des Né-
gres , doivent être rangés par le naturaliste et par l’eth-
nographe avec les Nègres, quoiqu’ils aient soin de se
faire considérer politiquement comme Portugais, à cause
des avantages attachés à ce titre, Ce n’est pas toutefois que
… je veuille dire que l’ethnographie doit négliger les rensei-
gnemens tirés du langage et de l’histoire; je conviens, au
contraire, qu'il est un grand nombre de circonstances
où ils doivent être suivis; je dis seulement que quand on
peut faire usage des caractères zoologiques, ceux-ci doi-
rent toujours dominer sur ceux-là. Il est plus difficile
d’asseoir son opinion lorsque, les caractères zoologiques
ne pouyant être d'aucun secours, les renseignemens tirés
( 282 )
de l'histoire ou du langage , se trouvent en opposition ;
c'est ainsi, par exemple, qu'il est bien difficile de juger s’il
y a plus de sang celte que de sang latin parmi les peuples
qui parlent maintenant le français, l'espagnol et le portu-
gais. Or, il m'a paru que dans ces cas il était préférable
de faire le classement d’après le langage, plutôt que de
se lancer dans des recherches plus ou moins hypothé-
tiques.
J'ajouterai enfin qu'il est un troisième ordre de con-
sidérations auquel il doit être pris égard dans le classement
des peuples , c’est la position géographique des contrées
où ces peuples se sont originairement développés, et l'on
verra que j'ai souvent fait usage de celte considération
dans l'établissement de mon tableau.
Lorsque l'on examine la race blanche sous le rapport
purement zoologique, on peut y reconnaître quatre types
principaux : les hommes à cheveux blonds, yeux bleus
et teint trés-blanc; les hommes à cheveux roussâtres ; les
hommes à cheveux et yeux noirs et à teint blanc; les
bommes à cheveux et yeux noirs et à teint plus ou moins
basané ; mais, lorsque l'on veut classer les peuples d’après
cetie distinclion , on trouve qu'il y a lant de mélange,
et que l’on rompt tant d’autres rapports, que l’on a assez
généralement recouru aux considérations linguistiques ;
et, sous ce dernier point de vue, la science moderne a
fait une découverte bien importante lorsqu'elle a reconnu
que presque toutes les langues européennes, ainsi que
celles des Persans et des Hindous, avaient des rapports
avec le sanskrit, langue des anciens livres sacrés des
Hindous. Mais en déduisant de cette circonstance la réu-
nion de tous ces peuples dans un même rameau, on
groupe ensemble les hommes les plus blancs et les plus
__—
( 283 )
bruns de la race blanche ; on comprend les peuples qui se
trouvent à la tête de la civilisation moderne dans la même
division que d’autres qui en sont bien éloignés, et on
fait disparaître de la science le groupe européen qui est
si généralement admis par les personnes qui ne font pas
des classifications systémaliques. Or, il m’a semblé que
l'on pouvait éviler ces inconvéniens en envisageant comme
des rameaux particuliers la partie européenne et la par-
tie asiatique de l'immense division des peuples parlant
des langues sanscriliques; de cette manière, sans s’écar-
ter sensiblement des classifications les plus généralement
reçues, on obtient une division en quatre rfmeaux que
l'on peut considérer comme géographiques , puisqu'ils
se composent respectivement de peuples qui se sont ori-
ginairement développés au nord-ouest, au nord-est, au
sud-est et au sud-ouest du Caucase , et qui cependant sont
en rapport avec les considérations linguistiques et histo-
riques. Je ne dissimule pas cependant que l'on contestera
peut-être cetle dernière asserlion , par suile de l'opinion
si généralement reçue qu’une grande parlie de la popu-
lation de l'Europe est due à des asiatiques qui s’y seraient
introduits depuis les temps historiques ; mais, sans exa-
miner ici dans quelle proportion les descendans de ces
Asiatiques concourent à la population actuelle de l’Eu-
rope , je crois qu'il est démontré que tous les peuples que
je range dans le rameau européen, existaient en Europe
dès les temps historiques les plus reculés.
La circonstance que la civilisation s’est développée au
sud du Caucase plus tôt qu'au nord, est cause que l’on
place souvent le rameau araméen en têle de la série , ce
qui rompt toutes les affinités zoologiques et sociales, puis-
qu'alors on place des peuples aussi bruns et aussi bar-
( 284 )
bares que les nomades du grand désert d'Afrique, avant
les peuples les plus blancs et les plus civilisés de la terre.
Mais il me paraît que l’on doit avoir bien plus d’égard à
l’ensemble du développement de la civilisation qu’à son
époque, car cette époque peut tenir à des circonstances
accidentelles , tandis que l’ensemble doit tenir à des cou-
sidérations d'aptitude. Or, lorsque l’on fait attention à
l'état où sont maintenant retombés les Araméens et au
point où se sont élevés les Européens, on doit admettre
que ceux-ci ont plus d'aptitude que ceux-là pour la civi-
lisation. De sorte qu'en plaçant le rameau le plus blanc à
la tête de la race blanche , de même que l'on place celle-ci
avant les races colorées, on obtient, pour les qualités
intellectuelles aussi bien que pour celles dites physiques,
une série décroissante aussi régulière que possible.
Je me sers de cette dernière expression parce que les
naturalistes savent que la disposition réticulaire des
rapports qui existent entre les êtres, forcent à chaque in-
stant de rompre certains rapprochemens accidentels, et,
lorsque je mets dans mon tableau trois rameaux entiers
entre les Noghaïs et les Kalmouks ou Eleuths, je ne romps
pas plus la série naturelle que quand les zoologistes pla-
cent les deux grandes classes des oiseaux et des reptiles
entre les marsouins et les requins, où le vulgaire ne voit
que deux espèces de poissons ; car, de même que certaines
ressemblances de formes entre quelques mammifères et
les poissons ne changent rien à l’ensemble des rapports
qui caractérisent les quatre grandes classes d'animaux
vertébrés, la ressemblance de quelques peuples du rameau
scythique avec la race jaune, ne doit pas nous obliger de
mettre ce rameau à la fin de la race blanche. D'ailleurs,
ce n’est point dans l’ancien empire de Gengiskhan que
»
FARetesez
mm
( 285 )
nous devons aller chercher les véritables rapports du
raméau scythique, c’est plutôt chez les Quaines, qui ont
porté la culture des céréales jusque près des glaces du
cap nord, et chez qui nous retrouvons ces cheveux rous-
sâtres que les historiens chinois nous apprennent avoir
caractérisé les peuples turcs avant qu'ils n’eussent été
soumis par les Mongols. Il est à remarquer au surplus que
si le rameau scythique se lie avec la race jaune, les ra-
meaux araméen et hindou se lient avec la race noire.
Je n’ai rien à dire touchant la subdivision de la race
jaune en trois rameaux qui ont respeclivement pour
types les Chinois, les Mongols et les peuples de petite
taille des régions voisines du pôle boréal, cette marche
étant la plus généralement adoptée; mais je ferai remar-
quer que je me suis écarté de l’opinion de ceux des ethno-
graphes qui, à cause de quelques rapports dans le langage,
rangent les Lapons dans la famille finnoise, parce que les
caractères zoologiques de ces deux races sont si différens,
qu’il me semble absolument indispensable de les séparer,
d'autant plus que l'identité de langue est loin d’être
démontrée , et qu’il est probable que les ressemblances in-
diquées ne consistent que dans l'introduction dans le lan-
gage des Lapons, d’un certain nombre de mots finnois,
effet qui a ordinairement lieu quand un peuple sauvage
se trouve en relation avec un peuple plus avancé. D'un
autre côlé, les Lapons ne devant jamais s’être trouvés sur
le chemin des conquérans mongols, il ne me paraît pas
possible que l’on puisse voir en eux des finnois qui au-
raient été modifiés par leur mélange avec des peuples
mongols, tandis que les Finnois qui les avoisinent , et qui
sont géographiquement plus rapprochés des peuples de la
race jaune, ont conservé leurs caractères distinctifs. Je
( 286 }
sais donc porté à croire que les Lapons descendent d’une
tribu de Samoièdes qui, séparée du groupe principal par
les progrès des Finnois, aura tellement modifié son lan-
gage, par ses relations avec ceux-ci, que maintenant om
n’y reconnaît plus son origine.
J'ai laissé, d’après l'usage le plus ordinaire, les Aïnos
dans la race jaune et les Abyssiniens dans la race blanche;
mais je suis porté à croire que ces derniers seraient mieux
placés dans la race noire, et quant aux premiers, ils sont
si peu connus que l’on n’a, pour ainsidire , que des notions
négalives à leur sujet.
La division de la race rouge en deux rameaux est pu-
rement géographique, et la subdivision que je donne du
rameau méridional est la copie de celle que M. A. d'Or-
bigny a présentée dernièrement à l'académie des sciences
de l'institut de France.
Les trois rameaux que j'indique dans la race brune
correspondent aux trois divisions proposées, il y a quelques
années, par M. Dumont d’Urville, auxquelles je n’ai fait
d’autres changemens que de remplacer l’épithète de po-
lynésienne , qui ne concorde pas avec l'étendue que l’on
donne ordinairement à la Polynésie, par celle de ta-
bouenne, tirée de l’usage du fabou, que M. d’'Urville
signale comme l’un des caractères les plus tranchés de son
groupe polynésien.
Enfin, j'ai divisé la race noire en deux rameaux géogra-
phiques qui paraissent avoir des types assez distincts, mais
dout l’un et l’autre offrent des modifications qui se
rapprochent plus ou moins des autres races, el j'ai réuni,
sous le nom d'Endamènes, proposé dans ces derniers
temps , loutes ces peuplades refoulées dans quelques mon-
tagnes du sud-est de l'Asie, ou errantes dans des solitudes
( 287 )
de l'Australie, dont la plupart sont presque inconnues , ei
qui présentent le dernier degré de dégradation du genre
humain.
Les chiffres portés au tableau pour indiquer les popu-
lations approximatives , sont en grande partie établis d’a-
près les évaluations de M. Balbi.
Tableaux de la division du genre humain en races, rameaux,
familles et peuples, avec lindication approximative des po-
pulations.
I. Division en races et en rameaux.
f Rameau européen. . . . . 233,000,000 )
— scythique . . . . . 21,000,000
M Manche, 0100 Aro 442,000,000
— hindopersique. . . 155,000,000 \
— araméen. . . .. . 33,000,000
— sinique . . . .. . 218,000,000
Race jaune, . . .. — mongol. ..... 2,000,000 220,000,000
— hyperboréen . . . 200,000
— septentrional . . . 3,000,000
Race rouge. . . . . : 5,000,000
— méridional. . .. . 2,000,000
— tabouen. ..... 1,000,000 |
Bace brune. . . . . — micronésien. . , . 100,000 17,000,000
— malais, . . . . . . 16,000,000 (
, — occidental. . . . . 43,000,000
Race noire. , . .. 43,000,000
— oriental. . .. .. 100,000
Hybrides tels que métis, mulâtres , zambos, ele . . . . . . . . .. 10,000,000
TOTAL, . . .. : « 737,000,000
( 288 )
IT. Subdivision du rameau kUROPÉEN en familles et en peuples.
Suédôis . . .
Scandinaves. .{ Norwégiens.
Danois . . ..
Allemands. .
F.Teutonne , . Cher :
Neerlandais.
{ Anglais p. d.
—
Anglais. . .,
5 l Écossais. .
( Irlandais , .
F, Celtique . . . . Celtes. . . .
(l Gallois .
Bas-Bretons.
F. Basque . . . . Basques . ::. . 4 se
Highlanders. .
. 8,000,000
. 1,000,000
1,500,000
° À 41,000,000
.)
l 28,000,000
. 8,000,000
500,000
s. 500,000
. 1,000,000
Français p. d.)
Français. . . ./ Wallons. . .
Romans. ,.
{ Espagnols. .
F. Latine. . .. - 3
Hispaniens . .
Portugais. . .
ATADENS MER A ete ST TE 0e PE e
Valaques . ...
F. Grecque. ..
+ Alhanais 40 2
Serbes... #..
LES CNP EL CAR EC ES
.-) 33,000,000
° 22,000,000
17,000,000
.. 3,500,000
5,000,000
e 500,000
2,120,000
Bosniens . ..
Bulgares. . .
Serviens, ...
Dalmates . . .
Croates
Russes . , . .
Rousniaques. .
2,250,090
. 2,370,000
1,473,000
2,900,000
8,600,090
45,000,000
Cosaques . . .
Lithuaniens .
{ Lithuaniessp.d.
! Bohêmes. . .
Tchèqués . . ./ Moraves. . . .
Sl NU
EF: Slave 1. LEA
Polonais. ..,.
| Russes p. d.
j | Lettons . . ..
1,650,000
620,000
74,500,000
10,000,000
400,000
75,500,000
5,500,000
67,000,000
. 233,000,000
PP
( 289 )
IL. Subdivision du rameau scYTHIQUE en familles et en peuples.
F. Finnoise, .
F. Turque. ..
F. Ciresssienne.
|
|
Quaines ., .
Finlandais. .
Finnois p. d. Lt ES 1.865.000
Ischores . . . dix
Esthes . . ..
Eve a
Permiakes . . 34,000
Permiens, . . | Sirianes . 30,000
7,000,000
Votiakes. .. 141,000
Tchouvaches. 370,000
Tchouvaches. Tchéremisses, 190,000
Morduans , . 92,000
Magiars .. . LE 4,000,000
Szecklers, . .
EE PM D Vogouls . . . 12,000
Ostiakesd’Obi 107,000
XaKoutes. 47." L ie en. 88,000
TONTANIENS EEE MEN ES PEN Se 30,000
Bachskirs 140,000
Bachskirs . . Metschériaques 37,000
Teptiaires . . 114,000
Noghaisultsh 1640 de) lie) 4 Le gébienge ip Ë
Koumyckes "VU NM ni dre 14,000,000
Kire li. 00.0 "Tr 900,000
Usbecks . ..
6 if Karakalpacks 000,00
Murconansi 1. mie 1,500,000
Onnanlis at «ALU REX 7,000,000
Tobeckesses, : lama. ;
TelscOnab re CRM TMQIDIS LI. “2 tree uues
APR 5 NÉ . ; 200,002
1 DEMO TORRENT RTS
SA RE 21,000,000
(290 )
IV. Subdivision du rameau HINDOPERSIQUE €7 familles et en peuples.
2
Géorgiens p.d.....-::
F. Géorgienne . { Mingréliens. . - :. +++: °°" 500,00
A PÉTER CO CSC ACT CT !
Arméniens « + «+ + £ 2,000,000
Curdesp. d. . 600,000
Curdes. . + .
Loures. . : . 140,000
Tadiiks ..-0 eee ton 10,000,000
F. Persanne . . / Ossètes « « « o «+ + + + À 4 22,000 24,500,000
| Afghans p.d. 4,000,009
Bél MS Tel 2,000,000
Afghans . . . FOUR A Pis
Robillas . . .
eh en OR à 6,000,000
Un grand nom-
Ébdous bre de peupls
Fe y compris les
Zi à
F. Hindoue . | in à .... 130,000,000
Malabarsp.d.
Malabars. . . Tamoules . .
Telingas . . .
TOTAL 0 ol 5 155,000,000,
V. Subdivision du rameau ARAMÉEN en familles et en peuples.
RAADES 7. GS Si fererets een
EF. Sémitique.{- {Juifs . |. 1.0 + » UE 24,000,000
Druses, etc...
| Cabyles . . .
Amazirghs . .
Betbers . ..
F. Atlantique, : Touaricks . + 7,000,000
Tibbous . . .
Barabras 4. eve ue à ERA 9,000,000
? Abyssiniens. . . . - . AAGES 2,000,000
————
TOTAL helene 33,000,000
(291 )
VE. Subdivision de la RACE JAUNE en rameaux , familles et peuples.
Rameau Sinique.
Rameau Mongol |
R.Hyperboréen.
1
F. Thibétaine. . Thibétains. . .
| Birmans. . ..
F. Indochinoise te MO
Siamois . . . .
Annamites. . .
F. Japonaise, , . Japonais .
F. Chinoise . . . Chinois . . . .
F.Coréenne , . Coréens . . . .
Mongols p. d .
F. Mongole. . { Eleuths . . . .
Bouriats. . . .
Mandchoux . .
F. Toungouse.
Toungouses. .
F. Laponne. . . Lapons . . . .
F.Samoiède, . EU EIRE à
Soïotes .
F. Jenisséenne . Jenisséens. , .
F. Kamtchadale. Kamtchadales .
F. Koriaque . . Koriaques . .
F. Jukagire. . . Jukagires . . .
Tchutskis. . .
Tchougatches .
F. Eskimale. . { Aléoutes, etc. .
Eskimaux, . .
Groënlandais .
F. Kourilienne . Aïnos . . . . .
2,000,000 |
4,000,000 |
3,000,000
4,000,000
12,000,000
25,000,000
160,000,000
8,000,000 !
500,000
1,000,000
120,000
600,000
60,000
16,000
20,000
10,000
38,000
9,000
8,000
30,000
12,000
218,000,000
2,000,000
240,000
220,000,000
VIL. Subdivision de la RACE ROUGE en rameaux , familles et peuples.
Rameau septen-
trional, . . .
Ce rameau se compose d’un |
F. Lennappe. grand nombre de petites
F. Iroquoise .
peuplades qui ne sont pas
{outes connues. La famille
F.Floridienne astèque, quicomprend près
; des deux tiers de cette po-
F. Astèque. . pulation, est la seule qui
| TEUNENNSR forme un peuple considé-
LICE PORTER IPN
À REPORTER , .
3,000,000
3,000,000
( 292 )
REPORT
NOESIS
À
3,000,000
Aymaras. .
F, Quichuenne.
Changos . . + . . -. , « - :
Atacamas: london rain « 74
| Vuracarës Mes us = ee 0 04
Mocetenès , . . « « e + + « +
F. Antisienne .{ Tacanas . . .. . . . + - .
Maropas . . . . . .. . . ..
Apolistas. . . ....... È
FAR RES AUCRSS 00600 a 0 NIMES ds
Fuégiens.L ........:
Patagons. : . . .- . . . . ..
Puélches M cs-hstir ee
GCDATEURS ES de ete
F.Pampéenne.{ Mocobis . . . ........
Mataguayos . . .: . . . . : s
Abipones. . ... ... .. Ë
Lenguas . . . . . .. . - ..
Samucuns . . . . . “per CP
Rameau méri-
dional . ..
Chiquitos. . « « “+ 2,000,000
Saravecas . . + . «ee $
CHARS ble ee lice
Curuminacas. . + «+ «+ + «
F. Chiquitéenne / Covarecas . . . . . . . . . .
Curaves ue Nas Re
Tapus .. . .. «+. « » »
Curucanecas . . . . + + DR
PAICOnECES . 3 he me cette
| CRE Lis era NE RE
MOxOS A UAEECEe shot
Chapucaras , . . + « « . . :
Itonamas, £'. ue, se el ve à
Ganichanas Sale Lee à
F. Moxéenne. .!
Movimas..{. + ee à «0. +
Cayuvavas . . . . . . .. A
Pacaguaras. . . . . . .. Er
Mens rss 2 cu
Guaranis, « . . , . » + se {
F.Guaranienne.
Dot La As etes sue ue
MOTAL, 500) TUE 5,000,000
( 293 )
VIII. Subdivision de la RACE BRUNE en rameaux et en peuples.
Néozélandais. . . . . . . . .
OCT EE OR EE
Bougainvillois , . . . . . .,
Rameau Tabouen. . . . . . . .. Sous : 1,000,000
ETC: COMENT
Pomotouens. . . , . . . . ,
Marque NS ts Eee
Sandwichois . ... . . ...
Anbonienste ILE 01, CN :
Magellaniens. , .. . . . ..
Rameau Micronésien . . . . . . . Mananaisihe 1-1 Rte 1,000,000
GCaroliniens 2-1. 1. :
Mulgraviens 220,0. 1.2 .12%
Pagales ct TN: CF MT
Biss4YOS eine tendent à
DAYARS ET Ua
PIE ON NE MN
a
Rameau Malais. ... ...... SRE ET 16,000,000
ï Madasiatet 02: QUE CE BR
JAVA AL ren © ddr
BAUER . Ca IC ES
MEME EN Ets iate = let stat US
HOVAS TL RM UNIT AN
TOTAL Aer ste et AS : 17,000,000
IX. Subdivision de la RAGE NOIRE en rameaux , familles et peuples.
F. Fellanne . . - ne
F, Cafre. . . . À Une immense quantité de peu-
plades dont plusieurs sont 43,000.000
encore inconnues , , , . .
aid
Rameau occidti, | FA Hotentote
F. Nègre. . ,.
FINS 6 2e Loic
Néocalédoniens , , ... ..
!
F. Papouenne . { Néohébridiens . . .
Salomoniens , .
E. des Andaman. . .. ... 100,000
Papous
Rameau orient}.
(OR Endamenc, . JE de Luzon. . . ,. . .
5 E. de la Nouvelle-Guinée . .
E. de la Nouvelle-Hollande .
E. de Van Diemen . .,..
—————__—
FOTAL Es see) 7 à NI Q 43,000,000
( 294 )
MOLLUSQUES.
Exercices zootomiques, par P.-J. Van Beneden,
correspondant de l'académie.
Comme suite aux mémoires précédemment communi-
qués, j'ai l'honneur de présenter aujourd’hui trois nou-
veaux mémoires : l’un sur la Cymbulie, l'autre sur un
genre inédit, voisin du précédent, et qui provient du
golfe de Naples, un troisième sur l’Æyale, le Cléodore et
le Cuviérie.
Péron a découvert la Cymbulie il y a une trentaine
d'années, et l’on ne connaît cependant rien encore sur
l'organisation de ces curieux animaux. Je crois remplir
une véritable lacune, en faisant l'histoire de chacun de
leurs appareils. Tous les zoologistes ont senti l'importance
de ces animaux sous le rapport de leur organisation, et
dans la seconde édition du Regne animal, publiée en 1829,
Cuvier s’énonce encore avec doute sur la classe à laquelle
ils doivent appartenir.
Le second mémoire contient l’anatomie d’un genre
nouveau , dédié au célèbre professeur d'anatomie d'Hei-
delberg, M. Tiedemann. Comme on peut le voir par tous
les détails de l’organisation , il a beaucoup d’affinité avec
les Cymbulies ; mais il paraît aussi en avoir d’un autre
côté avec le genre Gastropteron de Meckel, qui est placé
parmi les gastéropodes.
Dans le troisième mémoire, je donne une nouvelle
anatomie de l’Æyale. On connaissait déjà en grande partie
l'organisation de ces animaux, mais cependant il restait
encore différens doutes à lever. L'appareil branchial , par
exemple , sur lequel personne n’est d'accord, ne sera plus
ÉD S S S es ÉE
momie EE Pt
= a
( 295)
le sujet de nouvelles contestations. M. De Blainville re-
prochait à M. Cuvier d’avoir pris des fibres musculaires
pour des branchies, et il a décrit une branchie située dans
une tout autre région. Ces- deux célèbres anatomistes
avaient bien vu cependant tons les deux, mais ils n'avaienr
point vu l'appareil branchial au complet. C’est la la cause
de leur divergence d'opinion. M. De Blainville en avait
vu une partie en dessus de l'animal, et M. Cuvier en avait
vu une autre en dessous.
On ne connaît encore rien de l’animal du C/éodore.
Comme nous en avions un individu, ainsi que du genre
Cuviérie, nous avons fait suivre l'anatomie de l’Ayale
des détails d'organisation que nous avons observés dans ces
deux genres.
Ajoutons aussi que nous avons signalé , le premier, les
nerfs sympathiques dans les Ptéropodes, et dans les dif-
férens genres dont nous nous sommes occupé ici, nous
avons trouvé les mêmes nerfs dans ces différens genres.
Commissaires : MM. Dumortier, Cantraine et Wesmael.
ORNITHOLOGIE.
ilédon de la
de Ghisignies,
a NS,
Description d’une nouvelle espece de P
Nouvelle-Zélande , par M. B. Dubus
membre de la Chambre des Représen
PHILÉDON A ÉCHARPE.
MELIPHAGA CINCTA.
Meliphaga capite toto, collo, pectoreque nigris ; fasciculo
postoculari niveo; fascia pectoralhi et humeris flavis ; pa-
To. vi. 21
( 296 )
rapteris, tectricibus mediis alarum prioribus e& dorso ni-
gris, plumis sinqulis flavo marginatis ; posterioribus
alarum tectricibus mediis albis, speculum formantibus ;
remigibus et rectricibus fusco-nigris, pogontis externis
flavo marginatis ; abdomine pallide brunnescenti-cano.
Ce philédon est remarquable par la longueur des poils
qui garnissent la commissure du bec et le front, à la nais-
sance des fosses nasales. Ces poils sont assez raides et s’é-
tendent jusqu'aux trois quarts de la longueur du bec, qui
est grèle, légèrement arqué et déprimé à sa base. Les
ailes sont arrondies; la première rémige est très-courte ;
la seconde est beaucoup plus courte que la troisième , qui
est à peu prés égale à la quatrième; la cinquième est la
plus longue de toutes. La queue est carrée, à rectrices ter-
minées en pointe.
La distribution des couleurs du philédon à écharpe
en fait une des plus jolies espèces de ce genre. La tête , le
cou , la poitrine et la partie supérieure du dos sont d’un
beau noir velouté. Deux petits bouquets de plumes trés-
blanches et longues d’un demi-pouce naissent dernière
les yeux. Le pli de l'aile et les petites couvertures sont
jaunes. Une large ceinture de la même couleur sépare la
poitrine du ventre et se dirige de part et d'autre jus-
qu'aux scapulaires; cette ceinture n’est que faiblement
marquée sur le milieu de la poitrine. Les plames du dos
et des scapulaires sont noires, bordées de jaune olivâtre. Le
ventre et les parties inférieures sont d’un gris brunâtre
pâle avec une tache plus foncée au centre de chaque
plume. Les rémiges et les tectrices sont d’un noir brunä-
ire foncé en dessus, d’un noir cendré en dessous; les pre-
mières tectrices moyennes sont noires ; les dernières sont
Balletins de l'Acaderrue Tom. VE. Pag.297
MELUIPHAGA CINCTA. #
estate dont ONE ÉD te
;
( 297 )
blanches; toutes ces plumes es ailes ont leurs barbes ex-
térieures bordées de jaune olivâtre. Les grandes tectrices
sont noires et blanches à la base; les dernières rémiges
secondaires sont également blanches à la base, ce qui
forme avec les dernières lectrices une espèce de miroir
blanc sur la partie supérieure de l'aile.
Le bec est noir et les pieds sont bruns.
Les dimensions de cet oiseau sont les suivantes :
Longueur totale . . !. + ... Joie AE: pouces,
— du bec, de la commissure à la pointe . . » 10 lignes.
— Are PES D pouce.
— du doigt du milieu. . . . . . . . » 8 lignes.
Le Philédon à écharpe habite la Nouvelle-Zélande.
Diagnoses spécifiques de trois nouvelles espèces d’oi-
seaux, par le même.
#ARUS SENILIS.
MÉSANGE VIEILLARD.
Parus capite, collo, pectore et abdomine in medio albidis ;
dorso, tectricibusque alarum cinereo-brunneis ; iliis cine-
reo-brunnescente tinctis ; remigibus fuscis ; caudà flavi-
canti-brunned ; rostro subnigro; pedibus cœrulescentinigris.
Long. tola 5 : poll.
Habitat in Novà-Zeelandia.
LAMPROTORNIS OBSCURUS.
L2 STOURNE OBSCUR.
Lamprotornis supra fusco-griseus; capite, collo antico et
( 298 )
pectore subnigris saturate viridi nitentibus ; alis et caudà
nigricanti-fuscis; abdomine brunnescenti-cinereo ; rostro
nigro ; pedibus fuscis.
Long. tota 6 : poll.
Habitat in Novà-Zeelandià.
TURDUS MELANOTUS.
MERLE MÉLANOTE.
"
Turdus pileo . nuchä, qulé et humeris lœte cœruleis ; tænià
per oculos latä, auchenio , interscapulio tergoque summo
nigris; tectricibus alarum , remigibus , rectricibusque
subnigris, pogontis externis cœrulescente marginatis ; spe-
culo alarum albo ; pectore , abdomine , tergoque imo fer-
rugineis; rostro pedibusque fuscis. |
Long. tota 7 poll.
Habitat in Chili.
ZOOLOGIE,
De l’existence des infusoires dans les plantes , par
M. Ch. Morren, membre de l’académie, etc.
La lecture des recherches de M. Jean Roeper sur les
cellules des Sphagnum et leurs pores (1), m'a rappelé
quelques faits dont j'ai été témoin en étudiant l’histoire
naturelle de nos algues indigènes, et que je crois utile de
(1) Annales des sciences naturelles ,tom. X, novembre 1836, p. 314.
— Floru , 1838 , p. 17.
( 299 )
faire counaître aujourd'hui, puisqu'ils éclaircissent des
doutes que la science avait encore.
Le travail de M. Roeper, que je viens de citer, établit
que les cellules des Sphagnum sont munies quelquefois
d'ouvertures qui mettent leur cavité intérieure en rela-
tion avec l'air ou l’eau où elles se plongent. Get habile
observateur s’est assuré que lorsque les circonstances sont
favorables, le Rotifer vulgaris, cet infusoire dont l’orga-
nisation a élé dévoilée par les recherches de M. Ehrenberg,
se trouve dans les cellules du Sphagnum obtusifolium.
Celui-ci avait crû dans l'air du milieu d’une tourbiére,
mais M. Roeper observa ses feuilles dans l’eau; il ne dit
pas si l'infusoire venait de celle-ci ou s’il était contenu
préalablement dans les cavités des cellules. L'ensemble
de la rédaction ferait croire que ces rotifères existent
dans les cellules venues à l'air, et dans ce cas, la pré-
sence d'un animal si compliqué, vivant en parasite dans
les cellules du tissu utriculaire aérien, est un phénomène
des plus curieux, dans la physiologie des plantes, d'autant
plus que cet être est un animal aquatique.
Je me suis rappelé que la dernière année que j'habitais
les Flandres, je trouvai à Everghem, près de Gand, le
V’aucheria elavata , où j'observai quelque chose de sem-
blable. M. Fr. Unger, en 1828, avait déja publié les
détails suivans sur cette plante : « Au-dessous des tuber-
cules vidés et de plusieurs points de la tige principale,
naissent , sous différens angles, des rameaux un peu plus
étroils; ces rameaux sont en général très-longs et surpas-
sent beaucoup en longueur la tige principale. Au bout
de dix à douze jours après leur développement, on voit,
vers l'une ou l'autre de leurs extrémités, çà et la à diverses
distances du sommet, se former des protubérances plus ou
( 300 )
moins régulières en forme de massue, droites ou un peu
recourbées , et d’autres, sur les côtés de la tige, qui sont
en forme de capsule ou de vésicule. Ces vésicules sont
d'abord d’une couleur vert-clair uniforme , et sans que
leur grosseur, qui surpasse plusieurs fois celle des ra-
meaux, augmente , ils deviennent toujours d’une couleur
vert-noirâtre plus foncée vers la base, et on y distingue
alors clairement un ou deux globules d’un ronge-brun,
souvent entourés de granules plus petits, évidemment pri-
vés de mouvement , tandis que les gros se meuvent spon-
tanément et lentement çà et la dans l’intérieur de la
capsule, par des contractions et des dilatations inégales,
d'où naissent des changemens de forme remarquables. Je
vis ces globules, au bout de huit ou dix jours après leur
apparition, encore enfermés dans la capsule, se mouvant
toujours plus lentement, ne prenant pas d’accroissement
bien marqué, tandis que la base de la capsule devenait
plus transparente ; enfin, j'observai qu’au lieu de leur ex-
pulsion , à laquelle je m'attendais, l'extrémité de la cap-
sule, au bout de quelques jours, prit une forme anguleuse
et donna plus lard naissance à deux expansions en forme
de cornes; elle resta dans cel état et prit toujours une
couleur plus pâle, tandis que l’animalcule devint plus
foncé et mourut, et plus tard, il finit par se détruire en
même temps que les autres parties de la conferve (1). »
Les travaux postérieurs ne sont pas venus nous appren-
dre quel pouvait être cet animal dont parlait M. Unger.
Comme ce même auteur attira si vivement l'attention sur
les mouvemens spontanés des propagules des vaucheries ,
(1) Annales des sciences naturelles, anciennesérie, t. XIII, 1828, p. 438.
( 301 )
et qu'il admettait le passage de la vie végétale, caractéri-
sée, selon ui, par l'immobilité, à la vie animale dont le
principal critère élail le mouvement, on confondit son
animalcule avec les propagules, et personne, à ce que je
sache, n’est revenu sur ce sujet si intéressant.
Quand je trouvai donc le ’aucheria clavata à Ever-
ghem , je fus aussi surpris que content de mieux voir
que M. Unger le corps mobile dont il avait parlé. Gros-
sissant l’image beaucoup plus que lui, il ne me fut pas
difficile de connaître la vraie nature de l'animal, car ce
n'était pas un propagule, mais un véritable animal, c'é-
tait le Rotifer vulqaris avec ses cils imitant la roue, sa
queue , etc.
Les premières massues que je vis contenant cet animal,
n’en renfermaient qu’un ; plus tard, ils pondirent des
œufs et ils se multipliérent, mais il paraît qu’alors ils
descendent dans les tubes de la vaucherie, et vont se loger
dans des massues nouvelles dont peut-être ils provoquent
le développement , comme les bédéguards et les galles de
chêne, sont des transformations organiques dues à l’in-
fluence des êtres parasites.
Le Rotifer vulgaris voyage lout à son aise dans ces
massues; il longe les parois, déplace la chromule et la
refoule aux deux extrémités de la massue, de sorte que
celle-ci paraît plus foncée à ces parties. Un jour j'ouvris
doucement une massue; je m'attendais à voir le rotifer
s’élancer au dehors et jouir de cette liberté si chère à
tous les êtres, même aux animalcules d'infusion; mais
non : il aima mieux s’enfoncer dans sa prison, descendre
dans les tubes de sa plante et se nicher au milieu d’une
masse de matière verte, plutôt que de nagtr à son aise
dans les environs de sa demeure.
( 302 )
Quelques-unes de ces massues avaient des fils verdâtres
appendus à leur extrémité libre, d’autres n’en avaient
pas : je crus d’abord que ces fils étaient du mucus du dé-
dans, sorti par quelque ouverture qui aurait pu avoir
servi d'entrée au rotifer; mais une observation attentive
et long-temps prolongée m'apprit qu'il n’y avait là aucune
solulion de continuité , et qu’on ne pouvait nullement
s'expliquer par cette voie l’arrivée des rotifères dans Îles
vaucheries. Comment naissent au dedans d'elles ces ani-
malcules parasites? Voilà ce que l'observation ultérieure
apprendra quelque jour. En attendant, j'ai cru qu’il fallait
préciser que l’animalcule de M. Unger, trouvé dans les
vaucheries, était le Æotifer vulgaris des zoologues.
Note sur une nouvelle méthode de démontrer l'existence
de l’urée dans le sang, après l'extirpation des reins,
par M. Gluge, professeur à l’université libre de Bruxelles.
La présence de l’urée dans le sang, après que les reins
ont été enlevés , est maintenant un fait acquis à la science;
mais en répétant la belle expérience de MM. Prévost et
Dumas dans mon cours de physiologie, l’idée m'est venue
de rechercher l’urée dans le sang, non par l'analyse chi-
mique, mais par la simple inspection microscopique. Ce
procédé me paraissait utile, d'abord parce que de temps à
autre on a prétendu que l’urée trouvée dans le sang était le
produit de l'analyse chimique, et ensuite parce qu'on
pourrait peut-être constater la présence de cette substance
dans le sang dans des cas plus contestés , tels que le dia-
bète , etc. L'urée , dans son état pur et de cristallisation ,
( 303 })-
forme des aiguilles fines, luisantes, ou des prismes quadri-
latéraux trés-afhilés. Après avoir fait l’extirpatlion des reins
sur des lapins, j'examinai le sang, après l’avoir laissé en
repos pendant quelques heures, à l’aide d’un grossisse-
ment de 255 fois. EL déjà, vingt heures après l’extirpation,
le sang présentait les deux formes de cristallisation de
l'urée dont nous venons de parler. Pour éviter toute
erreur, le sang extrait d’autres lapins bien portans et les
cristaux de l’urée de l’urine produits par le procédé chi-
mique ordinaire ont été comparés. L'expérience répélée
deux fois m'a toujours donné le même résultat.
J'ajouterai à cette observation que, de toutes les lésions
décrites par les auteurs comme suite de l’extirpalion des
reins, deux seulement me paraissent la suite constante du
manque de la sécrétion de l'urine ; les autres sont proba-
blement produites par l’opération.
La première, c’est l’'épanchement d’un sérum limpide
dans les cavités de l'abdomen, du thorax et du cerveau;
la seconde , qui me paraît la plus importante, c’est l'état li-
quide du sang, qui n'offre point ou que très-peu de caillot.
Les sels sécrétés par les reins s'accumulent dans le sang et
paraissent être la cause de ce phénomène. Et en effet, on voit
le champ du microscope couvert par une masse énorme de
cristaux, ce qui est bien différent de ce qu’on observe à
l'état normal. Un sang tellement vicié dans ses élémens ne
peut plus remplir ses fonctions: de là le dépérissement
plus ou moins rapide des animaux sur lesquels on fait
celte opération.
( 304)
HISTOIRE ANCIENNE.
Considérations sur la condition politique des cliens
dans l’ancienne Rome; par M. Roulez, membre de
l'académie.
La clientèle romaine nous est présentée par les au-
teurs anciens (1) comme une institution de Romulus ;
récit qui, traduit en d’autres termes, signifie qu’elle était
aussi ancienne que Rome elle-même. Selon ces auteurs,
les cliens étaient les plébéiens, les patrons les patriciens,
et la clientéle le lien qui servait à rapprocher les deux
ordres. Leur manière de voir, prise absolument, repose
sur une grave erreur : non-seulement elle méconnaît l'in-
dépendance de la classe plébéienne, mais elle admet une
impossibilité historique, à savoir une lutte acharnée en-
tre les cliens et leurs patrons. Quelle que soit l'évidence
de cette erreur, elle a été long-temps partagée par les
modernes, et c’est à Niebubr (2) qu'’appartient le mérite
de l’avoir signalée le premier. Mais l'illustre historien de
Rome et d’autres savans après lui, n’ont-ils pas été trop
loin à leur tour en excluant tous les cliens de la com-
mune plébéienne ? C'est ce que nous nous proposons d’exa-
miner ici.
En Grèce, presque partout où des États se sont formés
à la suite de la conquête, on trouve une classe d'hommes
UE
Là
(1) Denys d’'Halicarnasse , Archæolog rom. , IX, 9. p.254, éd. Reiske;
Plut., Romul., c. 13, p.25, A; Cic., De Republic., XL, 9 ; Festus voc.
patrocinia, p.204, ed. Lindemann.
(2) Rômische Geschichte, X, p.617 svv, de la 4me édit, Cf. p. 330. 339,
es
( 305 )
placés dans une espèce de vasselage à l'égard de la race
dominante. Ce sont les anciens habitans du pays qui, pré-
férant la perte de leur indépendance à l’émigration, ont
accepté les conditions imposées par les vainqueurs. Cette
diversité d'élémens se rencontre particulièrement dans
les états Doriens(1). On a voulu chercher également dans
la conquête l’origine de la clientèle romaine, et on a
comparé les cliens de Rome aux clarotes de la Crète (2).
Toutes ces relations étaient fort bien connues de Denys:
elles ont dû s'offrir à son esprit, et nous ne doutons pas
que, si ses renseignemens n’eussent repoussé loute idée
d’analogie, avec sa manie souvent exagérée de trouver
dans la Grèce le berceau des institutions romaines, il
n’eût pas laissé aux modernes le soin de faire le rappro-
chement. L’historien grec établit, à la vérité, une com-
paraison entre les cliens romains et les pénestes de la
Thessalie ainsi que les thetes d'Athènes; mais c’est seu-
lement pour expliquer la nature de leurs relations, et non
pas pour en démontrer l’origine. Nous pensons même qu'il
n’a réuni ces deux exemples que parce qu’un seul n’eût
pu sufhire à caractériser, comme il le voulait, la clientèle
à Rome. En effet, il s'agissait de montrer non pas une
partie d’une nalion soumise à une autre partie dominante,
mais une classe d'hommes se trouvant sous la dépendance
de familles particulières en vertu d'un pacte d’où résul-
taient des obligations réciproques. Denys voyait cette con-
(1) Voy. K. Od. Müller, Die. Dorier, 1, p. 34 svv. et 64; Wachsmuth,
Hellenische Alterthumskunde , X, p. 168 sv.
(2) Hüllmann, Hômische Grundverfassung, p.32 sv. Bonn. 1832. Cf.
Niebuhr, ouv. cité, p. 339.
( 306 )
dition chez les Pénestes de la Thessalie appelés Oeosaoixe-
Ta (1); car c’est bien de ceux-là qu’il veut parler. D’au-
tre part, lorsqu'il isolait les cliens romains de leurs
patrons, il ne leur reconnaissait pas seulement la qualité
d'hommes libres, mais encore celle de membres de la cité;
ils les compara donc sous ce rapport aux thètes d'Athènes,
qui, libres et citoyens aussi, se trouvaient plus ou moins
sous la dépendance des eupatrides, par la nature de
leurs occupations (éri fs atosias).
La clientèle romaine avait sans doute beaucoup plus
de conformité avec les institutions analogues chez d’au-
tres peuples de l'Italie. Mais malheureusement celles-ci
ne nous sont point connues en détail, et leur existence
n’est même constatée que pour quelques-uns de ces peu-
ples, tels que les Sabins (2), les Latins (3) et les Étrus-
ques (4). Quant aux cliens de ces derniers, ils paraissent
avoir été .de véritables serfs; du moins Denys ne les dé-
signe pas comme les autres par le mot relitæ (5), mais
leur applique le nom de révesteu.
(1) Voy. Müller, ouv. cit. II, p. 67.
(2) Tit.-Liv., IL, 16; Denys, V, 40, p. 936; X, 14, p. 2020.
(3) Denys, I, 81, p.210; sbid. , 83, p. 216.
(4) Denys, IX, 5, p. 1750. — Il est aussi fait mention de cliens à Ca-
poue (Tite-Live, XXIIL, 3,7), et, selon M. Walter (Æômische Rechts-
geschichte, 1,2, p. 13, not. 11), chez les Samnites ; mais, dans le pas-
sage de Nonius Marcellus (De Propr. Serm., voc. apud pp. 33 et 255.
Paris. 1593), sur lequel il appuie son assertion, il n’est pas question
de la clientèle samnite , mais de la clientèle romaine à l’égard des Sam-
nites.
(5) Le mot reAfTaui, qui est aussi celui dont se sert Plutarque (L. cit.)
pour indiquer les cliens romains, désigne des hommes libres travaillant
pour un salaire (Pollux, LL, 82), et ensuite. par extension, ceux qui
SRE D
Se maté dl ons ut
( 307 )
Lorsque les populations latine et sabine vinrent occu-
per les endroits où s’éleva Rome, les anciens habitans ne
furent ni chassés ni réduits à l’état de serfs, mais on
leur permit de conserver des établissemens à côté des
vainqueurs; ous furent pris sous la protection de l'État,
en furent reconnus comme membres, mais membres d’un
ordre inférieur, n'ayant aucune part à l'administration
des affaires publiques; ce sont là les commencemens des
rapports des patriciens et des plébéiens. L'hypothèse que
nous avançons n'esl point imaginaire ; elle repose sur l’a-
nalogie de faits postérieurs, qui entrent dans le domaine
de l'histoire. La politique que nous supposons dés le prin-
cipe aux Romains, est celle que dans la suite ils appliquè-
rent après la conquête aux habitans des villes de Cænina,
d’Antemnæ , de Crustuminium et d’Albe, lesquels furent
incorporés dans la cilé romaine (1) et apporlèrent des
accroissemens considérables à la commune plébéienne (2).
On voit que les mêmes circonstances qui, en Grèce, don-
nérent naissance à une classe intermédiaire entre les hom-
mes libres et les esclaves, produisirent, sinon dans toute
l'Italie, du moins à Rome, des relations bien différentes.
La clientèle romaine avait si peu sa source dans la con-
quête, que l’un de ses traits caractéristiques, c’est la
spontanéité du client à se placer dans la dépendance du
se mettent sous la protection d’autres personnes. Cf. Waschsmuth,
Hellen. Alterthumsk., 1. Beilage, XII. p. 322 sv.; Stallbaum, ad Pla-
ton. Eutyphr., p. 26.
(1) Plut., Romul,, pp. 56 et 63; Tite-Live, 1, 11; sbid., 28, 30.
(2) Niebuhbr fait commencer la véritable plebs à la destruction d’Albe,
et en regarde Ancus Marcius comme le fondateur (2. G., p. 428.) CF.
Huschke, Die Verfussung des Kænigs Servius Tullius , p. 38. Meidel-
berg. 1838, Walter, Rôm. Rechtsg., kap. IX, p. 67 , not. 4.
( 308 )
patron; ce caractère dont la langue porte encore l'em-
preinte (1), a été conservé fidèlement par la tradition
qui rapporte que Romulus permit à lout plébéien de se
choisir, selon sa volonté, un client parmi les patriciens (2).
Quels étaient donc les cliens ? Indépendamment que les
vainqueurs peuvent déjà en avoir amenés avec eux (3),
ceux d’eutre les anciens habitans du pays qui ne possé-
daient pas de terres, ou qui en avaient élé dépouillés
entièrement, ceux encore qui trouvaient insuffisante la
protection qu'ils recevaient de l'État comme plébéiens , au-
ront cherché dans le patronat des patriciens des moyens de
subsistance ou une plus grande somme de sécurité (4). Il est
même à supposer que ce fut le grand nombre, puisque la
tradition semble considérer l’universalité des plébéiens
comme engagés dans ces relations (5). Ensuite, le nombre
(1) Témoin les expressions : Se in clientelam dicare (Cæsar, B. G.,
VI, 12); se (clientes) 2n fidem dare (A. Gellius, A. 4., V, 13), et au-
tres semblables.
(2) Denys, IL, 9 : Exirpédus Éndote Tüv Ex vod mAfSouc, Cv aÙrès
£BoüeTo véuEI TpocTÉTY.
(3) C’est ainsi que plus tard la gens Claudia vint à Rome avec ses
cliens. Tit. Liv., IL, 16; Denys, V, 40, p. 936; Suéton., Tiber.,c. I.
La clientèle n’aura cessé pas plus pour ceux-ci que pour les cliens des
Romains primitifs; l’exemple allégué par Wachsmuth du nègre esclave
qui devient libre à son entrée en Europe, nous paraît peu concluant,
(Die œltere Geschichte des Rôm. Staates, p. 87.) Ils n'auront pas non
plus été élevés au rang de patriciens , mais auront fait partie de la classe
plébéienne.
(4) Walter, ouv. cité, p. 13, not. 13, admet le passage de plébéiens
à l’état de cliens, mais avec perte de leur qualité primitive.
(5) Niebuhr, comme il est notoire, ne voit à Rome , dans le principe,
que des patriciens et des cliens. Le savant jurisconsulte et vhilologue
Huschke, adoptant une opinion moyenne entre celle de Niebubr et le
récit des historiens , fait, sans nécessité, ce nous semble, de ces mêmes
( 309 )
des cliens se grossil des étrangers admis dans Ja ville, en
vertu du jus applicationis (1), ainsi que des enfans des
affranchis qui se mettaient ordinairement sous le patro-
nage de la famille de l'ancien maître de leurs pères (2);
car, quant aux affranchis eux-mêmes, ils ont toujours été
bien distincts des cliens, malgré la grande conformité de
leurs relations (3), el nous croyons que c’est à tort qu’on
les a confondus avec eux (4). Ensuite, à une époque in-
cerlaine, mais déja peut-être fort ancienne, la clientèle
cliens, des plébéiens d’une espèce particulière {ouvr. cité., p.191) : « Da
nun die alte Verfassung auf dem Hauptyegensatse von Berechtigten (Pa-
triciern) und Unberechtigten oder negativ zum Staat gehôrigen { Clien-
ten oder llebeiern in diesem Sinne) beruhte. »
(1) Cic., De Orat., 1, 39. Voy. Walter, ouv. cité, chap. XV, p.119.
Cf. p. 13, not. 12.
(2) Un texte de Denys (IV, 23, p. 695), corrigé par Reiske, d’aprèsun
MS. du Vatican, est explicite à cet égard : Ka? rod: £x Tüy drekeuSé-
pay (Vulg. roùs aredeuSécous) vivouévous rehdras Tois ÉxVoyos adTüy
XATAMITOYTAS.
(3) Un individu ne pouvait en aucun cas être forcé à se constituer le
client d’un citoyen, tandis que l’affranchi demeurait soumis de droit,
et même maloré lui , au patronat de celui dont il cessait d’être l’esclave,
Mais il était naturel que les descendans d’un affranchi, délivrés de toute
obligation envers l’ancien maître de leur père ou envers sa famille, s’ils
avaient besoin de la protection d’un citoyen plus riche et plus puissant,
s’adressassent de préférence à eux. Le passage suivant de Salluste dis-
tingue clairement les affranchis des cliens (Catilin., c. 50, p. 55, Ger-
lach.) : Liberti et pauci ex clientibus Lentuli. Le eliens libertinus chez
Tite-Live (XLILL , 16), s’il ne peut pas être le fils d’un affranchi de P. Ru-
tilius, est sans doute un affranchi sans patron, qui s’est placé sous la
protection de ce tribun.
(4) Niebubr, Th. 1, p. 623; Walter, 1. c. Quant à Schulze (Grundle-
gung zu einer geschichtlichen Staatswissenschuft der fômer, 47,
p- 340) , il va beaucoup plus loin, il se représente les cliens et les plé-
béiens comme des affranchis d’origine, et les appelle (p. 344), pour
( 310 )
s’'étendit à des individus (1) ainsi qu'a des villes étrangères
à la cité romaine (2).
On voit donc qu'il ÿ avait une grande diversité dans
l'origine des cliens à Rome. Cette qualité ne changeait rien
à leur condition primitive : le citoyen d’une ville soumise
n’entrait pas plus dans la cilé romaine en devenant le
client d’un romain, que le plébéien ne sortait de la com-
mune par le même fait. Cela provient de ce que la clien-
tèle n’était pas une condition politique, mais que, dés le
principe , comme au VIIE siècle, elle fut une institution
de la vie privée constituant simplement des rapports d’in-
dividus à individus (3). L'État romain n’a donc pas connu
trois ordres distincts de membres, les patriciens , les cliens
et les plébéiens (4) ; ce n’est là qu’un rêve savant provoqué
principalement par des réminiscences helléniques.
Mais en admettant, conformément aux témoignages his-
toriques, que les cliens ou au moins une grande partie
d’entre eux faisaient partie de la classe plébéienne , nous
sommes loin de vouloir nier l’indépendance de la com-
mune, À la vérité, le plébéien en devenant client perdait
de fait son indépendance politique, puisqu'il était obligé
cette raison , cives libertini ordinis. Cette opinion se réfute déjà par son
exagération. Voy. du reste la brochure de M. Walter intitulée : Viebuhr
und Schulze, p. 17, Bonn. 1834.
(1) Selon Denys ( VIT, 21, p. 1361 ), Coriolan avait déjà un grand nom-
bre de cliens de cette espèce.
(2) Denys, Il, 9; Cic., De Office. ,L, 11 : Ut it, qui civitates aut na-
tiones devictas bello in fidem recepissent, earum patroni essent MORE MA-
JORUM. »
(3) Voy. Waschsmuth, Die œltere Geschichte des R. Staates, p. 190.
(4) Cette hypothèse a été établie surtout par Hüllmann.Voy, Rômische
Grundverf., p. 37, et Staatsrecht des Alterthums , p. 38.
(311)
de se conformer aveuglément à la volonté de son patron.
Il s’en suit même qu’à l’époque où le nombre des plébéiens
non soumis à la clientèle, se trouvait fort restreint, la
liberté de la commune était réellement illusoire. Aussi,
pour les premiers temps de Rome, l'histoire ne nous
parle-t-elle pas de dissensions entre les patriciens et les
plébéiens. D'ailleurs il n’y avait pas de lutte possible,
avant que les deux partis ne descendissent ensemble dans
l'arène électorale; ce qui n’eut lieu qu'après l’établisse-
ment des comicès par centuries de Servius-Tullius, puis-
qu'auparavant les plébéiens n’avaient pas joui du droit
de suffrages. Alors ceux d’entre eux (et c'était le petit
nombre ), que des obligations personnelles liaient à des
membres du parti adverse, durent, en cas de dissentiment,
trahir les intérêts de leur ordre pour soutenir de leurs votes
et de tous leurs moyens les prélentions de leurs patrons,
recevant des avantages matériels pour prix de la con-
trainte morale qu'ils s’imposaient. Comme cetle scission
momentanée des plébéiens-cliens d'avec le reste de la
commune se répéta fréquemment , il arrive que les his-
toriens nomment quelquefois les cliens à côté des plé-
béiens et les opposent les uns aux autres. Mais il ne faut
pas conclure de là que les annales dont leur narration
reproduit Texpression, aient élabli une incompatibilité
entre la qualité de client et celle de plébéien (1). Si quel-
ques textes, pris isolément, sont assez vagues pour pou-
_
(1) C’est ce que Niebuhr (I, p. 617, svv.) a voulu prouver par des
passages tirés de Denys et de Tite-Live; mais les textes qu’il a pu citer
ou ne sont nullement concluans, ou militent contre son opinion. Voy.,
outre nos observations, celles de E. Wichers, Dissert. de patronatu et
clientela Romanorum, p.26 sqq. Groningæ. 1825.
Tow. vr. 22
( 312 )
voir être invoqués par les partisans d'opinions contraires,
rapprochés d’autres textes plus précis, ils n’admettent plus
d’équivoque dans leur interprétalion. Ainsi on ne saurait
plus douter de la présence de cliens dans la commune
et dans les tribus, après avoir lu dans Tite - Live (1) :
(M. Furius Camillus) cum accitis domum tribulibus
clientibusque | MAGNA PARS PLEBIS ERAT ) percunctatus
animos eorum responsum tulisset se collaturos quanti
damnatus esset ABSOLVERE ewn non posse, in eæilium
abiit. Ailleurs (2), le même historien s'exprime d’une
manière non moins explicite à cet égard : Rogationem
tulit (Volero) ad populum ut plebei magistratus tribu-
tis comitiis fierent, haud parva res... quæ patriciis
omnem potestatem per clientium suffragia creandi quos
vellent tribunos auferret. Le sens naturel et véritable de
ce dernier passage, c'est que la loi de Voléron ôta aux
patriciens loute possibilité de porter au tribunat, par les
suffrages de leurs cliens, des hommes de leur choix. L'im-
puissance du parti aristocratique provenait non, comme
on le prétend, de ce que les cliens n'étaient pas admis dans
les comices par tribus, mais de ce que la prépondérance
qui, daus les comices par centluries lui était assurée par.
le concours des suffrages de ses cliens, devait lui échap-
(1) 11,28. Îl en est de même de ce passage de Denys (VI, 63, p. 1185):
rodc rehras Graytas Érayoueda ka rod dymcotixob Tù reply, où il ne
s’agit pas, comme l’entend Niebuhr, des cliens et des plébéiens, maisw
des eliens et des autres plébéiens. Cf. Wichers , L. 1., p. 29.
(2) LE, 56. Niebuhr invoque, mais en en torturant le sens, ce même
passage en faveur de l'opinion contraire. I, p. 619, Cf, Schulze ; Von der
Volksversammiungen der Rémor , p 35; Walter, Vicbuhr u. Schulse,
P:r17:
( 313 )
per alors que lui-même ne pouvant voter, il se trouvait
réduit aux seuls votes de ces derniers.
Les liens réciproques de la clientèle étaient sacrés et
mis aussi bien sous la protection des dieux que sous l'égide
des lois (1). Il n’y a donc rien d'étonnant que les cliens,
quelle que fût leur condition politique, prissent part aux
sacra gentilicia de leurs patrons (2). Mais nous ne croyons
nullement que de leur présence dans les gentes on ait le
droit (3) de conclure à leur admission dans les curies, et
moins encore celui de leur y accorder une voix (4). Quant
aux comices par centuries, personne (5) ne doute que ceux
qui jouissaient du droit de cilé, n’aient été admis dans
la classe que leur assignait leur fortune (6).
Plusieurs fois des expéditions militaires furent entre-
prises par les patriciens et leurs cliens (7). Gette circon-
stance a donné naissance à l’opinion que les cliens étaient
employés à la guerre extraordinairement et ne faisaient
(1) Denys, Il, 10, p. 257 : dycporépolg oùbTE Coioy oùTE Séguis #y.
(2) La seule preuve directe que nous connaissions est ce passage de
Denys , IX , 19, p. 1793 : rièc mé) ouci , 01, Suolas ÉrioTéoys Turpiou,
ÿy EdEr T6 baBloy Érirehédau yéyos , oi mèy dydpes ÉEËASOY OMyouc ÉTayd-
evo rehäTas Êri té iepé.
(3) Niebubr, I, p. 349; Walter, À. R., p. 25; Schulze, Volksver-
zamml. der Rôm., p.31.
(4) Hüllmann , Rôm. Grundverf., p.35.
(5) Voy. Niebuhr, pp. 493 et 622; Walter, p. 35.
(6) Je ne pense pas que M. Huschke (ouv. cité, p. 192) ait eu d’au-
tres motifs plausibles que l'intérêt de son système pour les rejeter tous
dans la sixième classe.
(7) Denys, VII, 19, p.1356 ; IX, 15, p. 1780; X, 15, p. 2025; X
43, p. 2104
u
( 314 )
pas partie de la légion (1). Il est à remarquer cependant
que, dans les cas allégués, les palriciens ne prennent seuls
les armes avec leurs cliens que parce que les plébéiens
refusent de s’enrôler , refus auquel ne pouvaient s'associer
ceux de cet ordre qui se trouvaient soumis à la clientèle.
Mais nous devons croire qu’en d’autres temps, les cliens,
qui étaient plébéiens et membres des tribus, faisaient le
service ordinaire dans la légion.
’
LINGUISTIQUE ET HISTOIRE LITTÉRAIRE.
Observations sur les patois romans usités en Belgique,
par le baron De Reiffenberg.
Parmi les travaux d’une grande étendue dont l'exécution
me semble appartenir à l'académie, je compterais volon-
tiers, avec une histoire littéraire de la Belgique (2), la ré-
daction d’un double glossaire de nos patois, savoir , de 4
ceux de la famille tudesque et de ceux de la famille romane.
En effet, les patois conservent les traces les plus pro-
fondes de la nationalité ; aussi Ménage, dont loutes les
étymologies ne sont pas aventureuses, fait-il dériver le
(1) Voy. Walter, p.21, not. 58; p.120, not. 45. Huschke, ouv. cité,
p. 454, not. 44.
(2) J'entends une vaste histoire littéraire comme celle commencée par M
les bénédictins pour la France, et non pas un simple abrégé. En 1828,
à la demande de M. Loeve-Veimars, j'avais composé un ouvrage de cette
dernière espèce dont je lui adressai le manuscrit. Jai vu dans l’At/as des
littératures que M. Du Jarry de Mancy avait bien voulu en faire usage.
Depuis, ce manuscrit, dont il ne me reste pas de copie, se sera sans |
doute écaré, car je n’en ai plus entendu parler.
(315)
mot patois de sermo patrius. C'est dans les patois qu'il
faut souvent aller étudier les antiquités du langage; plu-
sieurs reproduisent même fidèlement les idiomes origi-
naires de certains peuples : le paysan de la Provence se
sert encore de la langue des troubadours, et celui de la
Bretagne sait plus de celtique que tous les linguistes et
toutes les académies de l'Europe.
Sénèque, dans son style antithélique que nous imitons
le plus que nous pouvons tout en le blämant , a prononcé
que les vices du passé étaient les vertus d'à présent. Ne
pourrait-on pas, en renversant les termes de cette propo-
silion, et en l’appliquant à autre chose, dire que maints
barbarismes d’aujourd’hui sont des élégances d'autrefois ?
Dans les sociélés peu avancées, et qui ne se trouvent
point sous le régime des castes, il n’y a qu’une langue
pour le pauvre et le riche également simples, également
ignorans. Insensiblement les classes qui s’élévent et cul-
tivent leur intelligence, changent, modifient , transfor-
ment leur langage que les classes stationnaires gardent
au contraire presque sans allération.
La langue des aborigènes et des Faunes (1), la langue
(1) M. Granier de Cassagnac , dans son Histoire des classes ouvrières
et des classes bourgeoises , Paris , 1838, in-8o, pag. 248, cite un passage
d’Aulu-Gelle, où, parmi les mots du latin primitif, s’en trouvent deux dont
viennent, suivant lui, vessul et arrière-vassal, Confiant dans l’exac-
titude de M, Granier de Cassagnac , ébloui par quelques idées ingé-
nieuses, et, sil faut l'avouer, par ses protestations de recherche attentive
et scrupuleuse, nous ayons accepté sa citation sans Ja vérifier, selon
notre coutume (Ph, Mouskes , Il, 875, Bulletin de l’Acad. de Bruxelles,
tom. V, n° 5, note pour le mot kavaye ; trad. du poème de Waltharius,
dans la Revue de Bruxelles, du mois de mai 1839). Mais M. J.-J. Ros-
signol est venu nous faire observer qu’Aulu-Gelle ne parlait que de cau-
( 316)
saturnienne , c'est-à-dire le latin des anciens temps, qui
embarrassait les savans de Rome au siècle d’Aulu-Gelle,
n'élait sans doute pas entièrement perdue pour les labou-
reurs du Latium.
Ne nous serait-il pas permis de faire aussi dans le rude
parler de nos campagnes, dans le jargon incorrect des ar-
tisans de nos cités, quelques découvertes philologiques
intéressantes? Les propos énergiques et grivois des bau-
tresses, les lazzis railleurs des borains, n’ont-ils rien à
nous révéler ? En lisant les trouvères, les lais, fabliaux
et chansons de geste, ne reconnaïssons-nous pas une foule
de locutions et de tournures abandonnées maintenant aux
seuls prolétaires ?
Grâce pour les patois, Messieurs, pour ce langage naïf
et doux qui nous vient de nos mères, de nos nourrices,
de nos premiers amis du village natal, et que nous avons
tant regretté de perdre, quand la première simplicité en
tions et d’arrière-cautions, VADES et suvaDes. Ce docte critique, qui
s'attache à convaincre à chaque ligne M. de Cassagnac d’ignorance et
d’énormités, et qui malheureusement y réussit, pousse un peu trop |
loin , peut-être , l’amour de la critique, en reprochant à M. de Cassagnac
(Revue des deux mondes , 28 février 1839) de s’être imaginé que Fau-
norum n’était pas le pluriel du nom propre de Faunus, fils de Picus et
roi des Aborigènes , mais du nom commun de ces divinités champètres .
qu'on appelait Fauni , car si c’est une faute , elle est déjà dans Varron,
De linqua latina, liv. VI, sur ce passage d'Ennius : Versibus quos olim
Fuuni vatesque canebant. « Fauni , dit le plus docte des Romains, Dei
Latinorum , ita ut Faunus et Fauna sint, Versibus quos vocant Satur-
nios ,in silvestribus locis traditum est solitos fari, a quo fando Faunos
dictos. » Cf H. Düntzer et Laur. Lersch, De versu, quem vocant Sa-
turnio , Bonnæ, Kœnig., 1838, in-8o, pag. 3, 4, 9, etc. — Au reste , si.
M. de Cassagnac a été traité sévèrement ,.il ne doit pas oublier qu'il
manque journellement de respect à Jean Racine, et cela porte malheur.M
( 317 )
fut déflorée dans nos écoles, par le purisme ricaneur des
pédans; grâce pour cet idiome joli el fin, qui supplée
avec tant de charme aux lacunes du heau parler, et qui
a toujours un mot spirituel à mettre à l'endroit où dé-
faillent les ressources du dictionnaire (1).
Grâce pour les patois : aussi bien les chemins de fer et
la civilisation progressive qui effacent toutes les indivi-
dualités et tendent à tout niveler , à tout confondre, ex-
cepté l’indigence et la richesse, vont bientôt porter aux
patois une redoutable atteinte. Ne erovez pas pourtant
qu’on en parlera mieux dans le peuple ; non, on en par-
lera seulement plus mal dans la finance , cette dédaigneuse
aristocratie de l'époque.
La société royale des antiquaires de France, jadis aca-
démie celtique , a, l’une des premières, fait comprendre
importance de l'étude des palois. Ses conseils n’ont pas
peu contribué à faire naître un nombre considérable de
publications dont le Bulletin du Bibliophile du mois d’oc-
tobre 1838 offre un tableau , où les matériaux qui con-
cernent la Belgique sont naturellement presque tous ou-
bliés (2).
MM. Willems, More, Serrure (3) s’occupent de nos pa-
tois tudesques, c’est leur droit, et je doute que d’autres le
fassent aussi bien qu'eux. Pour moi je me borne à la Bel-
(1) Ch Nodier, Comment les patois furent détruits en France, Buzz.
DU BIBLIOPUILE , 14 février 1835,
(2) J'en indique les principaux, Ph. Mouskes, II, cx1v- cxv.
(3) Voir les Anzeiger de M. Mone, où M, Serrure a inséré des récits
en différens dialectes flamands; le même, Quellen und Forschun-
gen, etc., 1, 459-481; Willems, Belgisch Museum, 1, 33, 37, 206,
284, 408,11, 54, 172, 328, 424.
( 318 })
gique romane qui tient tant de place dans notre natio-
nalité, et dont quelques étrangers, instruits et éclairés
d’ailleurs, n’apprécient pas toute l'importance, puisque
le révérend J. Bosworth l’enclave dans la zone des dia-
lecles germaniques , en traçant la carte des langues d’Eu-
rope qui accompagne son dictionnaire anglo-saxon (1), ct
que M. Hoffmann de Fallersleben, en rendant compile de
son excursion en Belgique, pendant laquelle il a, quoi-
que allemand, jugé ccrlaines choses avec une légèreté
réputée exclusivement française, s’élonne , s’indigne même
d’avoir entendu parler français (2).
Feu M. À. Delmotte, qui possédait à merveille les finesses
et les naïvetés du dialecte montois , nous apprend, dans la
notice biographique, qu'il a consacrée à son respectable
père, que ce dernier avait laissé, parmi ses manuscrils,
un ouvrage inlitulé : Essai d’un glossaire wallon, qui
peut servir à démontrer que cet idiome, tel qu'il se
parle encore aujourd’hui dans la province du Hainaut,
n'est que le roman ou français des XI°, XIIe, XIIE,
XIVe et XV° siècles, peu corrompu et mélangé d'un
petit nombre de mots étrangers (3).
Aidé de ce recucil, du glossaire de M. Hécart (4), des
facéties montoises de M. H. Delmotie et surtout d’observa-
tions prises sur les lieux, sur le vif, on pourrait former
(1) Dictionnary of the anglo-saxon language, London , 1838, in-8°
maj., prix 56 fr.
(2) Préface de la sixième partie des Zoræ Belgiceæ.
(3) Les tournois de Chauvency, p. 2.
(4) M. Hécart n’a pas dédaigné d'employer quelques remarques que
j'ai eu l’honveur de crayonner pour lui. Voyez en outre Votes pour
un glossaire wallon-hennuyer, Nouv, aRcuiv. uisr, pes Pays-Bas, VI,
87-99.
(319 )
un lexique où seraient réunis tous nos patois romans, en
indiquant où chaque mot est actuellement usité. Ce livre,
enrichi d'exemples convenablement choisis, de quelques
développemens philologiques et littéraires, et qui, par
ce moyen, pourrait être d’une lecture aussi agréable
qu’instructive, nous aiderait à démêler dans les dialectes
du Hainaut, du Brabant , des pays de Namur , de Liége et
de Luxembourg , les divers élémens qui les composent ; en
d’autres termes :
Les anciens mots romans,
Les mots empruntés à des langues étrangères ,
Les mots français corrompus.
Ceux qui, appartenant à aucune de ces catégories,
peuvent être considérés comme vestiges d’une des langues
primitives des Gaules.
Il est entendu qu’en ne renonçant point aux étymolo-
gies, on se tiendrait en garde contre les conséquences
précipitées où mènent de vaines ressemblances de sons,
et contre cette facilité que l’on trouve à soutenir , à l’aide
de rapprochemens lexicographiques ; les opinions les plus
étrangères ; facilité à laquelle a cédé très-sériensement
l’auteur de la République des champs élysées , el dont
s'est moqué avec esprit celui du Factum ow mémoire qui
élait destiné à être prononcé dans une affaire conten-
tieuse où il s'agissait de deux têtes, l’une en plâtre et
l’autre en marbre (Gand, 1802) (1).
Si le travail que je conseille n’est pas sans difficulté,
il n’esl pas non plus dénué de charme, et la peine en se-
rait compensée par le plaisir; car j'appliquerais volon-
{1) L'auteur de cette piquante plaisanterie est M, N. Cornelissen.
+ ( 320 )
tiers à la glossologie ce que Quintilien dit de la grammaire:
Minus sunt ferendi, qui hanc artem ut tenuem ac jou
nam cavillantur….Necessaria pueris, jucunda senibus,
dulcis secretorum comes , et quæ vel sola omni studio-
rum genere, plus habet operis quam ostentationis (1),
Voici quelques mots pris au hasard, pour donner une
idée de la manière dont j'essaierais de rédiger le glos-
saire de nos patois romans.
ARsOULE , s. des deux genres; un polisson, un drôle,
un lâche. M. Lorin le fait venir du flamand aers ( posté-
rieur ), je le ferai plutôt dériver du tudesque arg soul
(angl.), ou sawl (anglo-saxon), âme méchante, âme vile,
ou de l'italien arso, un pauvre diable, et par extension
un homme de rien. Quant au mot lombard, flamand »
hollandais, anglo-saxon, suédois, danois, etc., arg, il
mérite quelque détail. Paul Diacre raconte que deux chefs
lombards s'étant pris de querelle, le plus distingué lâcha
le mot arga, injure qui coûta la vie à l’un et à l’autre.
Elle passait, en effet, pour si atroce, que si quelqu'un
l'avait laissée échapper dans un mouvement de colère, la
loi l’obligeait à se dédire , et le juge prenait connaissance
dn fait. Le litre 120 des lois des Lombards , de eo qui alii
Arga dixerit, porte: si quis alium Arga per furorem
clamaverit, et negare non poterit, et dixerit quod per
furorem dixisset, tunc juratus dicat quod eum Arga
non cognoveri. La charte appelée den Land-Charter,
donnée en 1292, par Jean [°, duc de Brabant, condamne
à une amenile celui qui oserait se servir de ce terme ou-
trageant qu’elle traduit par quaet, qui en est effective-
ment le synonyme. Luyster van Braband, part. E, p. 52.
(1) Znstitut Orat,, 1, 4.
( 321 )
M. De Grave aurait fait venir arga de raca, par une de ces
transpositions et altérations de lettres que les étymologistes
aiment tant, et dont Voltaire s’est si gaiement moqué dans
la préface de son histoire de Pierre-le-Grand. oy. Des
Roches, Æist. ane. des Pays-Bas Autrichiens ; in-4°,
p. 42; Nouv. arch. hist. des Pays-Las, VI, 89-90;
A. Ziemann, Müittelhochd. Wôrterbuch , p. 12; J.-H. Kalt-
schmidt, Sprachvergleichendes Wôrterb., p. 92; H. Mei-
dinger, Déction. comparatif et étymolog. des langues
Teuto-Gothiques, p. 51; K. Schwenk, Würterbuch der
Deutschen Sprache , p. 25 ; J. Bosworth, 4 Diet. of the
Anglo-Sax. language , pp. 27 et 308.
Cmxs-Cnxs, personnages de la suite du saint Georges des
Montois, dans son combat contre le dragon. M. Delmotte, en
se livrant à des recherches sur Gilles de Chin, regarde ce
terme comme un mot vide de sens, ou dont la signification
n’est pas arrivée jusqu’à nous. Getle signification me paraît
bien simple. Le mot Chin-Chin est formé du cri d'armes
du seigneur de Chin, Chin! Chin! cri que ses gens répé-
taient sans doute dans l’origine durant l'attaque du mon-
stre que l’on appelle le dragon. À la vérité, on lit dans la
Chronique en prose du bon chevalier messire Gilles
de Chin, que le cri de ce paladin était Berlaimont: et
M. R. Chalon a vu là un démenti donné à mon opinion.
Mais on avait souvent plus d’un cri de guerre, et l'autorité
de la chronique susdite est par conséquent celle fois sans
valeur. Conf. Messager des sciences de 1834, 1. 509,
Ph. Mouskes, 1, 280; Nouv. arch. hist. des Pays-Bas,
VL, 93. Je renvoie, au surplus , au Lexte en vers et plus an-
cien du roman de Gilles de Chin , dont j'ai préparé la pu-
blication pour la commission royale d'histoire de Belgique.
Tauque, le fin d’une chose, fourberie, ruse (montois
( 322 )
et rouchi); all. truegen, tromper, trueg, tromperie; anc.
all. éringan, triogant, trigant, triegen, d'où Mn
trigant, tricher. Dans le Baron de Fœæneste on lit: « Beci
aussilost à mes yamves de pelils vasochiens , et moi à
trucs, » ce que l'éditeur explique par à frapper dessus.
Édit. de Cologne (Bruxelles, Foppens), 1729, p. 34. Le
mot & trucs est alors ici dans le sens de #riquer. En Pié-
mont on appelle le jeu de billard truc.
VerproN (montois ), épée, fleuret, tudesque swert ou
plutôt corruption du mot verdun, sorte d'épée longue,
étroite et carrée, fabriquée dans la ville de ce nom, et
dont parle Marot :
Car chascun jour au camp, sous leur enseigne,
Font exercice, et l’ung à l’aultre enseigne
A tenir ordre et manyer la pique
Ou le verdun, sans prendre noise ou picque.
Du champ d'Attigny , Épit. LI.
Ce terme est aussi employé par Rabelais.
Addition & la notice sur Foppens, par le même (1).
La famille de Foppens était originaire de Frise. Arnould
Foppess, trisaïeul de l’archidiacre (2), avocat de la cour
de Frise, comme son père Gabinius, se retira à Bruxelles,
pour cause de religion, et après avoir rempli plusieurs
fonctions dans l'administration des monts-de-piété, mourut
le 30 novembre 1644. Son fils, Pierre Foppens, grand-
oncle de l’anteur, devint surintendant-général des monts-
(1) Voy. séance de l’académie du 2 mars 1839.
(2) Le dernier archidiacre de Malines, avant le concordat de 1801, a
été Rombaud-Jacques Van Rymenam , mort Le 13 avril 1799.
( 323 )
de-piété, et était frère de François, imprimeur et aïeul de
l'auteur, lequel décéda le 24 oclobre 1684. Il avait épousé
Anne de Kerpen, famille avec laquelle son fils François,
également imprimeur et libraire, contracta une nouvelle
alliance puisqu'il épousa Catherine de Surmont, petite-fille
(non pas nièce) de Pierre de Surmont et de Catherine Le
Mire, et fille de Pierre de Surmont et de Catherine Bosch,
veuve de Dominique de Kerpen (1), parenté obscurément
exprimée dans la notice manuscrite dont j'ai fait usage, et
qui, d'aprés une indication de M. Gyseleers-Thys, est de
M. Dominique Vanden Nieuwenhuyse, directeur de la fon-
dation de la Putterie à Malines, mort le 29 novembre
1780 ; en effet on y lit: Natus est honorata inter cives
Bruxellenses familia, patre Francisco typographo, ma-
tre Joanna de Surmont, filia Petri et Catherinæ Bosch,
nepte Petri et Franciscæ Le Mire, vidua Dominici de
Kerpen ; J.-U.-L. caussarum in concilio Brabantiæ pa-
troni, admissi in patritia stirpe T Sernuxçeus. Vander
Lcene fait de ce Dominique de Kerpen un marchand,
car il y eut beaucoup de trafiquans dans cette famille,
tandis que la nolice manuscrite en fait un avocat au grand-
conseil, en confondant ce personnage avec un autre du
même nom el du même lignage. C’est Vander Leene qui
a raison. Quoi qu’il en soil, le fils de Dominique le mar-
chand fut anobli par lettres patentes du 28 juillet 1699.
Catherine Bosch porta les scigneuries de Quabeeck et de
Vertryck dans la famille de Kerpen. Pierre Bosch , son père,
avail acquis ces terres le 25 juin 1688 de la famille des
Gasparini, successeurs des Van Houthem qui, eux-mêmes,
tenaient des Vander Ee, ces biens actuellement possédés
ne Lena, 0, ‘. ::,188
(1) Le théâtre de La noblesse du Brabant, p. 53.
( 324 )
par le sénateur chevalier Wouters; celui-ci les a achetés
au vicomte de Quabeeck, descendant de Joseph Goupy,
écuyer, d'origine franc-comtoise, lequel rendit des services
aux Etats-Généraux des Provinces-unies, amassa une for-
tune considérable, el devint propriétaire desdites seigneu-
ries en 1710 (1).
M. Gyseleers-Thys, qui, ainsi que je l’ai dit, possède
des manuscrits de Foppens, a eu la complaisance de m'en
adresser la liste. Elle contient le signalement de plusieurs
pièces de vers lalins et même d’une en vers français, si cela
peut s'appeler vers français, et se divise en 35 numéros,
dont voici les principaux :
1. Un exemplaire de Mechlinia Christo nascens , de 670 à
1760, avec les additions de De Servais et beaucoup d’estampes.
Voy. le n° 3 des MSS. dans ma notice.
2. Analecta Belgica præsertim Mechliniensia, seu vetera
aliquot scripta inedita latine, gallice et flandrice, ad histo-
riam tum ecclesiasticam tum profanam spectantium collecta.
3—4. Analysis canalis Lovaniensis, sive acta a prima con-
structione ; anno 1750 , consulibus perill. D. Theodoro Guil.
barone ab Eynatten et D. Guil. Joan. Vranx superintend.
canalis, consultiss. D. Barth. Claes, J.-U.-L., ejusdem urbis
syndico, directorum triade. Calamitatum secutarum narratio
usque ad ann. 1759 et 1761 per quatuor appendices , heroïco
carmine celebrato, authore N. Aletophylo. — Autre MS. sur le
même sujet : Acta in constructione , etc.
Voy. dans la notice, le no 52 des MSS.
5. Espiscopi Antwerpienses a Ph. Nigro usque ad Henr.
Gabr. Van Gamere, incluse.
"
(1) Déduction pour M. Joseph Goupy, écuyer, seigneur de Vertreyck et
Quabeeck, impétrant , contre les régens de Vertreyck adjournés, in-fol.
de 44 pp.
( 325 )
6. Bellum poeticum sive auricularum ursi (oreilles d'ours)
expugnatio per IT. S. ac defensio, per J.-F. F. anno 1736.
7. Diræ in plebem Batavam tumulluosan cum apologia
romano-catholicorum.
8. Encomium musicæ ac musicorum genealogia.
9. Colloquium inter S. Petrum et fratrem Tomson (obit
23 aug. 1759).
10. Encomium turris S. Rumoldi Mechliniæ, quæ anno
1452 inchoata anno 1513 feliciter consummata hoc anno 1757
jubilœum trisæ culare celebrat. Original.
11. Oratio panegyrica in laudem S. Caroli Berromæi ha-
bita Brugis in ecc. cath. die 4 nov. 1722. Original.
Voy. les nos 4 et 6 des imprimés, dans la notice.
12. Oratio habita Brugis in ecc. PP. Carmelitarum disc.
sept. 1729 , in solemnitate canonizationis S‘-Joannis de Deo.
Original.
13. Oratio panegyrica de S. Antonio Paduano, dicta
Mechl. 23 jun. 1732.
14. Oratio panegyrica in honorem S. Lucæ , 18 oct. 1732.
Original.
15. Autre sur le même sujet, prononcée dans l'église St-
Nicolas, devant la corporation des médecins le 18 octob. 1736.
_ 14. Elegia de morbo famoso sed imaginario, nostratibus
dicto CaRROEN.
15. Appendix ad scholam salernitanam elegia de morbo
CARROEN.
16. Zgnis fatuus sive parallelum Mechliniam inter et Bru-
gas de incendio solari ac lunari , seu de turre cremata 1746.
17. Turris ardens incombusta ecclesiae collegiatæ S. Petri,
Turnhauti in Campania ac diæc. Antwerp., mediantibus radis
solaribus , die vi junii 1755.
Le catalogue de la bibliothèque de M. J.-F. Vandevelde
contient deux articles de Foppens, auxquels j'en adjoin-
drai encore deux qui appartiennent à la bibliothèque royale :
( 326 }
18. Chronologie sacra episcoporum Belqii ( suppl. MS. et
inédit à l'ouvrage publié sous ce titre).
Catal., KW, 698, no 15272.
19. Autre MS. sur l'évêché de Gand.
Ib. 699, no 15275.
20. Jndex vitarum sanctorum Belgii.
Bibl. roy., catal. des MSS. nos 6129—30.
21. Extraits relatifs principalement à l'église de Bruges,
bibl. roy. n° 7153—7192.
Le
Foppens, étant au séminaire de Bruges, présida, en qua-
lité de professeur, plusieurs thèses, une entre autres:
De religione generatim , de cultu et invocatione sanc-
torum eorumque imaginum et reliquiarum , de jura-
mento, adjuratione et exorcismis, de magia, supersti-
tione , aliis vitiis religioni per excessum oppositis.
Je ne doute pas qu’il n’existe dans le cabinet de certains
curieux d’autres papiers de Foppens. La plupart, je le
répèle , sont peu dignes d'attention, etil en doit être ainsi
des bucoliques des hommes même les plus éminens, mais
tous prouveut une vie appliquée et sludieuse, où il n’y
avait certes pas de place pour les mauvaises pensées,
encore moins pour les actions coupables.
HISTOIRE NATIONALE.
Notice sur les infractions faites à la constitution fla-
mande , sous le règne de Marie-Thérèse, par le cha-
noine J.-J. De Smet, membre de l'académie.
Ce fut assurément une souveraine habile et généreuse
que Marie-Thérèse : douée d’une grandeur d'âme et d’une
( 827 )
constance, qui sont rarement l'apanage de son sexe , elle
sut triompher de l'Europe conjurée contre elle, et gou-
verner d'une main également ferme et prudente dix vastes
états de mœurs et de lois différentes. Dans la Belgique en
particulier , reine de Hongrie ou impératrice, elle sut ob-
tenir des subsides plus considérables qu'aucun de ses pré-
décesseurs , sans alarmer des populations jalouses à l'excès
de leurs libertés cimentées par le sang de leurs ancêtres,
et sans rien perdre de leur amour, en apportant des
changemens à leurs anciennes constitutions. L'histoire
devrait sans doute le surnom de Grande à Marie-Thérèse,
si on ne l'avait point souillé, en le jetant à une femme cou-
verte de boue et de sang comme Catherine IL.
On ne s’est pas cependant renfermé dans les bornes ri-
goureuses de la vérité, ce semble, quand on a écrit que
Marie-Thérèse parvint à modifier les attributions des
États dans quelques-unes de nos provinces, sans porter at-
teinte aux principes fondamentaux de leur constitution.
Il n'est pas nécessaire de prouver qu’il n'existait pas de
prérogative plus essentielle pour les États que le vote
libre des subsides, seul moyen qu’ils eussent d'arrêter les
- empiétemens du pouvoir. Il est plus évident encore qu’une
chambre on un conseil électif est à la merci des gouver-
nans, saus force et sans autorité, quand un ministre
peut le mutiler à son gré en destituant les membres qui,
à tort ou à raison, lui ont déplu. Hé bien! l’une et l’autre
de ces infractions au pacte inaugural furent commises
en Flandre sous le règne de Marie-Thérèse et sous le
ministère du comte de Cobenzl, ami éclairé et zélé pro-
tecteur des sciences et des arts, mais fort peu partisan,
semble-t-il, des franchises constitutionnelles de la vieille
Belgique.
Tow. vr. 23
("328 )
Le marquis Botta-Adorno (1) avait annonce, le 15 sep
tembre 3753 , qu’il avait obtenu son rappel des fonctions
de ministre-plénipotentiaire aux Pays-Bas, et dès le mois
de mai de l’année suivante, on annonçait au clergé de
Flandre (2) que le bruit se répandait à Bruxelles que le
gouvernement allait demander un subside fixe (3) aux
États de la province. On acquit bientôt la certitude que
ce bruit était fondé. Politique adroit, et instruit du mé-
contentement que les villes et châtellenies subalternes
nourrissaient contre les trois membres et le clergé, qui
seuls constituaient les États, le ministre proposa en même
temps d'y donner entrée aux châtellenies, et d'accorder
un subside fixe au souverain. Il réussit dans ce double
but, mais non sans une assez vive opposition, surtout de
la part du clergé : le fait est connu, mais personne n’en a
encore donné les détails, qui ne manquent pas d'intérêt
cependant , sans doute parce qu'on n’a pu compulser les
(1) On a peu de renseignemens sur ce ministre, dont l’histoire a con-
servé à peine le nom. La Biographie Universelle parle de deux hommes
d'état de cette famille : le premier encourut la disgrâce de Marie-
Thérèse, pour avoir intrigué à St-Pétersbourg contre la czarine Élisa-
beth, et mourut à Neustadt, en 1745. Le second combattit les Français
et fut souverneur de Gênes en 1746; il est sans doute identique âvec le
prédécesseur du comte de Cobenzl. Nous sommes d'autant plus porté à
le croire que, parmi les titres qu’il prend, il s’en trouve de militaires.
En tête du décret singulier qui défend au clergé de réciter l'office de
saint Grégoire VIL (du 9 juillet 1750), il se nomme : « Antoine Othon, «
marquis Botta-Adorno , chevalier de l’ordre de Malthe, chambellan et »
conseiller intime actuel d'état et de guerre, général d'artillerie, colonel
d’un régiment d'infanterie et ministre plénipotentiaire de S. M. » La
Biographie Universelle a ignoré les prénoms de ce seigneur.
(2) Lettre des députés à l'assemblée des Etats, du 10 mai 1754.
(3) Eene staende subsidie ordinaire van 18,000 rations daegs. Ibidem.
( 329 )
archives des corporations qui eurent part à la discussion.
Je m'occupe d’un travail particulier sur ce point de notre
histoire constilutionnelle pour les mémoires de l’aca-
démie.
Le second fait étant passé tout-àa-fait inaperçu, on me
permettra d'en parler ici plus longuement.
Le 28 mars 1759, le clergé du diocèse de Gand avait élu,
pour ses députés aux États de Flandre, er premier lieu (1),
M. Govard Van Eersel, archidiacre de la cathédrale de
Saint-Bavon, et en second lieu (2), M. Bernard Dieriex,
chanoine de la même église (3). Ils n'avaient montré au-
cune velléité d'opposition et s'étaient même empressés
d'obtenir de leurs commettans le don d’une robe en den-
telles de la valeur de 40,000 florins, comme présent de
noces du clergé, à l’infante Isabelle de Parme qu’allait
épouser l’archiduc Joseph, quand on reçut à Gand un
décret, en date du 25 juin 1760, par lequel le comte de
Cobenzl , au nom et de la part de Sa Majesté, autorisait
le clergé à élire de nouveaux députés pour achever le
terme de trois ans, commencé par MM. Diericx et Van
Eersel.
Surpris d’une mesure aussi imprévue, le clergé résolut
de ne point donner suite pour le moment à l'ordre du mi-
nistre , et de s'entendre avec les autres députés de la pro-
vince pour faire au gouvernement des représentations con-
venables. Peu après, l'évêque de Gand convoqua le clergé
en assemblée générale; mais il n’en put obtenir aucune
{1) Zn primarium.
(2) Zn secundarium.
(3) G.-G. Van Eersel mourut évèque de Gand, en 1778, Diericx l’avait
précédé au tombeau en 1772.
(330 )
démarche décisive. Les deux députés que le ministre plé-
nipotentiaire voulait éliminer, furent obligés de présen-
ter une requête au clergé pour en obtenir une interven-
tion plus active près du gouvernement. Ils continuaient
cependant leurs fonctions sans être inquiétés : le minis-
tre reculait devant les suites qu'auraient entraînées des
voies de fait ; il n’eut garde d'envoyer des soldats à l’assem-
blée, et un officier pour leur dire : empoignez MM. Van
Eersel el Diericx (1).
Le 16 décembre, il y eut une réunion nouvelle du
clergé de Gand : on y résolut de faire au ministre une re-
présentation respectueuse pour le maintien des députés,
d'écrire aux députés des villes et châtellenies de la pro-
vince pour s'assurer d’un concours eflicace de leur partet
de prier l'évêque de Gand, Maximilien Antoine Van der
Noot , ainsi que les prélats de Baudeloo et de Saint-An-
dré (2), de se rendre à Bruxelles pour présenter la requête
au gouvernement. Voici le texte de l'adresse adoptée, sauf
une ou deux corrections grammaticales (3) :
« Remontrent en tout respect l'évêque, prélats et chapi-
tres représentant le clergé du diocèse de Gand, que Govard
Gérard Van Eersel, archidiacre, et Bernard Ignace Bavon
Dieriex, chanoine de la cathédrale de S'-Bavon, et dépu-
tés de notre clergé à l'assemblée des États de la province,
nous ayant représenté que l'exercice de la susdite députa-
(1) Cela n’est pas sûr toutefois, mais les registres ne font aucune men-
tion de leur abstention.
(2) Celui-ci était député du clergé de Bruges à l'assemblée des États
de la province.
(3) Voir le registre VILE des résolutions du clergé aux archives de.
l’évèché.
(331)
tion leur était interdit par le décret de son Excellence du
25 juin passé, sans qu'on puisse montrer par aucune rai-
son à charge des susdits supplians, qu'ils se seraient
rendus coupables de quelque erime fait contre le bien-être
de la province, le service de Sa Majesté ou le gouverne-
ment; mais, au contraire, qu'ils s'étaient toujours montrés
très-zélés pour ledit service, et pensaient entièrement
s'être acquiltés de leurs devoirs.
Ils nous ont fait observer que son Excellence même a
souvent déclaré aux députés de la province et à plusieurs
autres messieurs de distinction, de ne rien avoir contre
eux personnellement.
En’outre 1ls ont allégué que la manière dont ils sont
députés (1) est très-infamatoire à leur égard, principale-
ment auprès de tous ceux à qui leur innocence est in-
connue.
À ces causes ils nous ont suppliés de vouloir concourir
par notre intercession à ce qu'ils puissent rentrer dans
leur première place et honneur.
Nous n'avons pas su nous dispenser d’avoir tout égard à
une demande qui nous paraît si équitable, et nous osons
prendre leur cause en mains, comme nos députés, pour
la présenter à votre Excellence, la priant d'observer :
1° Que ces dits supplians ont été choisis pour trois ans,
comme de coutume, dont le terme finira le 20 juil-
let 1762 ;
2° Qu'ils avaient alors une grande renommée qui n’est
pas diminuée, mais, au contraire, augmentée par leur com-
portement à l'assemblée des États ;
(1) Sans doute déposés,
(332 )
© 3° Que, dans ce temps, le chapitre de St-Bavon dont
ils sont membres, était agréable à la cour par son zèle et
attachement pour le service de Sa Majesté ;
4 Que les susdits députés étant choisis, sont entrés
dans l'assemblée des États, non comme faisant partie de leur
chapitre, mais comme représentant le clergé du district de
Gand : car c’est une loi fondamentale que personne n'entre
dans l'assemblée des États comme représentant le corps
dont il est membre, mais celui dont il est choisi ;
5° Ainsi, lorsque le chapitre deSt-Bavon a eu le malheur
d’être disgracié de votre Excellence, cela ne peut rejaillir
sur les supplians, qui, en leur qualité de députés, ne sont
plus considérés comme membres de ce corps ;
6° Messieurs les députés leurs confrères, qui veulent
bien les honorer de leur estime, rendent un très-bon té-
moignage de leur zèle et attachement pour le royal ser-
vice de Sa Majesté; ce dont votre Excellence doit être
convaincue, puisque, presque au moment que le susdit
décret fut arrivé, ils ont fait de leur chef une députation
vers votre Excellence pour pouvoir les maintenir dans
leur assemblée et pour montrer la peine que leur causait
leur absence; lesdits messieurs ont réitéré plusieurs fois
leurs instances par de nouvelles députations auprès de
votre Excellence;
2° Nous ne connaissons aucun crime qui rende lesdits
supplians. coupables au point d’être déportés de leur place
de députation.
Il paraît donc que l'équité ne nous permet pas (eu
égard aux raisons susdites ) de procéder à une autre élec-
tion, et comme il peut être préjudiciable au bien-être de
la province, du clergé en particulier, et même au service
de Sa Majesté, que le nombre des députés ne soit pas com-
(333)
plet, nous prions votre Excellence qu'elle soit servie, par
forme d'interprétation de son décret du 25 juin passé, de
déclarer que ledit décret vient à cesser au regard des sus-
dits députés pour achever leur terme de trois ans.
C'est la faveur que nous attendons de votre Excellence
après tant de généreux et distingués témoignages de notre
zèle et attachement pour le royal service de Sa Majesté
dans toutes les demandes qui se sont faites à la province
depuis cette cruelle guerre, et nouvellement dans celle
du dernier don gratuit, et de notre crédit pour l'emprunt
de 800,000 fl. de change, que nous avons toutes accordées
avec empressement et d’une voix unanime. »
Le prince Charles de Lorraine avait fait des plaintes
amères et des reproches assez vifs au clergé flamand, à
cause des formes qu’il avait employées dans ses réclama-
tions contre le système du subside permanent; il avait
censuré l’inconsidération des termes et même leur indé-
cence (1). Si le style de ces réclamations ressemblait à celui
de l’adresse que nous venons de transcrire, il faut avouer
que le prince était bien susceptible; si, au contraire,
celles-là étaient rédigées avec plus de franchise et d’éner-
gie, le ton avait bien baissé en quatre ans, Quoi qu'il en
soit de la forme anodine de la représentation , elle prouve
que ses auteurs connaissaient bien peu les droits que le
ministre venait de violer d’une manière tout-à-fait alle-
mande et sans même daigner en dire les motifs. Il n’y a
réellement dans les raisons alléguées qu’une seule dont
on puisse inférer que les rédacteurs avaient quelque in-
telligence des libertés que leur avaient léguées leurs belli-
re à
(1) Missive du 23 avril 1756.
(334)
queux ancêtres : c’est celle qui est exposée dans le quatrième
des considérans: On y voit que les requérans comprenaient
que l'affaire n’était point personnelle, mais qu’elle frois-
sail les droits, et partant les intérêts, de tout le clergé de
la province.
Pourquoi cependant le comie de Cobenzl, d’ailleurs
homme d'esprit, avait-il pris une mesure aussi étrange ?
Aucun reproche ne pouvait sans doute être fait aux dépu-
tés ; la représentation donne à entendre , et non sans mo-
tif, comme nous le verrons tantôt, que c'était le chapitre
de Saint-Bavon qu'on voulait punir dans leurs personnes,
apparemment à cause de sa résistance au système du subside
fixe. Mais c'était, dans cette hypothèse , s'y prendre un peu
tard, puisque la question du subside avait été terminée
long-temps avant l'élection des députés éliminés. D’uneautre
part, on affirme dans la représentation que le chapitre de
Saint-Bavon était agréable au gouvernement à l’époque de
cetle élection; ne pourrait-on pas inférer de là que le
chapitre avait encouru la disgrâce du ministre pour une
affaire postérieure et totalement étrangère à la gestion des
États de la province, puisque nous ne trouvons rien qui
puisse s’y rapporter dans les registres des résolutions du
clergé que nous avons sous les yeux.
Cependant le ministre apostilla la représentation, le
1er janvier 1761, mais d’une manière qui laissa encore la
question indécise.
Aussi quand le gouvernement demanda, au mois de
juin, par l'entremise du conseiller d'État baron de Cazier,
que la province donnât un acte de garantie pour l'emprunt
de trois millions de florins qu'on allait effectuer, le clergé
ne consenlit que d’une manière conditionnelle, et ajouta
qu'il espérait obtenir enfin par sa condescendance la réha-
( 335 )
bilitation de ses députés : « Nous nous promettons bien, »
disait-il, « qu’une demande aussi juste ne sera point re-
poussée, puisque nous avons accordé de si bonne grâce et
avec un zèle extraordinaire, que n'ont pas montré les
autres provinces, notre consentement à cet acte de garan-
tie et à beaucoup d’invitations semblables qui l'ont pré-
cédé (1). » Il suppliait de nouveau, en même temps, les
autres députés de la province de réunir tous leurs efforts à
celte fin.
Ils ne furent pas infructueux cette fois. Une lettre
de S. A. le prince gouverneur-général, datée du 7 sep-
tembre, informa le clergé de Gand que le gouvernement
ayant reçu salisfaction de la part du chapitre de Saint-
Bavon , le réhabilitait dans son droit d'intervenir par ses
députés dans l'assemblée des États de la province. Peut-
être le ministre commencçait-il à craindre de réveiller
contre lui l'opinion publique, s’il persistait plus long-temps
dans une prétention illégale et inconstitutionnelle. Les deux
députés continuèrent leurs fonctions jusqu’en 1762; mais,
dans l'élection de cette année (2), l'archidiacre Van Eersel
(1) °Tis met dese occasie dat de generale clergé mede versoecht dat
hacre Majesteit soude gedient wezen, dat haere gedeputeerde ter vergae-
deringe deser provincie souden worden erstelt.
De seer eerw. heeren der uenerale clergé laeten sich vastelyk voor-
staen, dat dit hun rechtmactigh versoeck hun niet sal worden gewey-
ghert, ten aenzien sy met 500 eenen extraordinairen iever buyten alle
_ andere provincien dit hun consent s00 gratieuselyck komen toe te staen,
500 als alle andere die zy te vooren hebben geduen. ( Registre déjà cité, )
(2) Les électeurs, qui se réunirent à cette occasion sous la présidence
de l’évêque de Gand, étaient : les abbés de St-Pierre au Mont-Blandin,
d'Eename, de Grammont, de Baudeloo, de Ninove, le prieur-prélat de
Waerschoot, les députés de l’abbaye de Tronchiennes , des chapitres
( 336 )
fut remplacé par l'abbé de Saint-Adrien à Grammont; le
chanoïne Diericx conserva son poste.
Sur l’Histoire des troubles des Pays-Bas , par Vander
Vynckt. Note communiquée par M. Gachard , corres-
pondant de l'académie.
J'ai publié, dans les Ænalectes Belgiques (1), des
particularités peu connues jusque-là, relativement au con-
seiller Vander Vynckt et à l'Aistoire des troubles compo-
sée par lui. À cette occasion, j'ai hasardé une conjecture
que m’avaient suggérée le petil nombre d'exemplaires au-
quel le comte de Cobenzl] fit tirer l'ouvrage, le mystère
qu'il mit à son impression, la circonstance qu’elle se fit
non sur le manuscrit envoyé à Vienne, c’est-à-dire celui
corrigé par le colonel De Bon, mais sur le manuscrit
même que Vander Vynckt avait entièrement écrit de sa
main : j'ai dit qu'il se pouvait que l’Æistoire des troubles
n’eût pas élé imprimée par les ordres du cabinet autri-
chien ; que le comte de Cobenzl faisait assez souvent, de
son chef, de ces sortes de dépenses, pour lesquelles il fut
blâmé plus d’une fois par la chancellerie aulique. Deux
pièces que J'ai trouvées depuis que j'ai écrit cet article
semblent changer en certitude ce qui n’avait pu avoir à mes
yeux qu’un caractère de probabilité. La première est un
de St-Bavon, de St-Martin d’Alost, de Ste-Pharaïlde à Gand. Les chapi-
tres de N.-D. à Courtrai, de St-Sauveur à Harlebeke, de St-Hermès à Re-
naix et de N.-D, à Termonde, envoyèrent leurs votes par écrit.
(1) P. 326-334.
( 337 )
billet adressé , le 7 mai 1774, par le secrétaire d’état et
de guerre , au comte de Nény, chef et président du con-
seil privé; il est ainsi conçu : « C'est en exécution des
» ordres de S. A. le ministre (1), que je me donne l’hon-
» neur de remettre à V. E. la note ci-jointe sur le pro-
» jet dont on s’occuperait, en Allemagne, de traduire et
* » faire imprimer en allemand l’Æistoire des troubles des
» Pays-Pays, faite par M. le conseiller Vander Vynckt,
» et dont l’exemplaire que feu S. E. le comte de Cobenzl
» avait donné à feu M. Schoëpflin, se trouve dans la
» bibliothèque de Strasbourg. S. A. me charge de prier
» V. E. de vouloir bien l’informer de ce qu’elle pense sur
» cet objet. S. A. présume que V. E. a eu dans le temps
» connaissance de l’ouvrage dont il s’agit. » — Voici la
réponse de M. De Nény, en date du 8 mai; elle mérite at-
tention : « Je n'ai aucune connaissance d’une Âistoire
» des troubles des Pays-Bas, rédigée par M. Vander
» Vyuckt, conseiller du conseil de Flandre , sur des actes
» qui doivent lui avoir élé remis par feu S. E. M. le comte
» de Cobenzi. Je sais néanmoins que ce ministre a com-
» muniqué à quelques personnes le travail du comte de
» Wynants (2)sur nos archives... M. Vander Vynckt n'é-
» tait pas fort propre à mettre en œuvre les excellens
» malériaux que nous avons, Car, outre qu'il n’a pas
» des idées bien lumineuses de l’histoire des Pays-Bas à
» il écrit mal. Du reste, je ne vois pas de possibilité
(1) Le prince de Starhemberg , ministre plénipotentiaire de l’'impé-
ratrice auprès du duc Charles de Lorraine, gouverneur-général des
Pays-Bas.
(2) M. De Wynants était directeur-général des archives de l'État : il
avait formé plusieurs recueils de pièces curieuses pour Phistoire.
( 338 )
» d'empêcher qu’on ne fasse usage en Allemagne d’un des
» six exemplaires qu’on doit avoir imprimés ici au loto (1),
et dont on dit que feu M. le comte de Cobenzl a fait
» présent à feu M. Schoëpflin. Après une révolution de
» deux siècles, il n’y a plus de secret, et il est de l'intérêt
» de l’humanilé qu'il n'y en ait point: mais, avant que
» de publier un ouvrage qui nous intéresse de si prés,
» et qu'on annoncera comme imprimé à Bruxelles, par
» les ordres du ministre plénipotentiaire de S. M., il serait
» du moins à désirer qu'il ne parût pas dans une forme
» capable de donner une idée désavantageuse soit de la
» nation, ou du ministre. » — Si l'Æistoire des troubles
n'eûl pas été imprimée en quelque sorte clandestinement,
et seulement pour le comte de Cobenzl et ses amis les
plus intimes, comment M. De Nény, l’un des premiers
ministres du gouvernement des Pays-Bas, et qui jouissait
à Bruxelles et à Vienne d’un crédit fondé sur d’imporlans
services, n'en aurait-il pas eu connaissance ?
Notice sur une Collection de manuscrits connue à la
Bibliothèque du Roi, à Paris, sous le nom des 182
Colbert, par le même.
Les documens manuscrits relatifs à la Belgique , et spé-
cialement à l’ancien comté de Flandre, sont fort nom-
(1) M. De Nény veut parler de l'imprimerie que le gouvernement avait
établie pour le service de la loterie génoise , que l’on appelait en ee
temps le Zoto. L
( 339 )
breux à la bibliothèque du Roi, à Paris ; il n’est presque
aucun des fonds divers dont s’est formé successivement
cet immense dépôt, dans lequel on ne trouve des chroni-
ques, des chartes, des traités, des lettres, ou d’autres
pièces qui concernent nos provinces. Tous ces documens,
on le pense bien , n’ont pas une égale valeur. La plupart
ne sont que des copies qui n’ont pas toujours été faites avec
une exactitude scrupuleuse ; il y a de ces copies qui se
reproduisent jusqu’à cinq et six fois et plus. Tels qu'ils
sont cependant , ils sont de nature à offrir, dans leur en-
semble, de précieuses ressources pour les travaux qui se
rattachent à l'histoire de notre pays.
Indépendamment de plusieurs centaines de volumes qui
sont sans liaison les uns avec les autres, le département
des manuscrits de la bibliothèque du Roi possède, sur la
Belgique, deux collections de pièces fort considérables.
L'une est celle qui a reçu le nom de Collection d'Énans,
du conseiller Courchetet, seigneur d'Énans, qui en re-
cueillit les matériaux. Elle consiste en des copies d’inven-
taires des archives de la Belgique, et de pièces mêmes
tirées de ces archives, par ordre du gouvernement fran-
çais, après que la victoire de Fontenoy eut fail tomber les
Pays-Bas autrichiens au pouvoir de Louis XV. Elle com-
prend 180 volumes in-fol. C’est un recueil indigeste, fait
avec peu de soin et d'intelligence, et où se montre trop
fréquemment une ignorance profonde de notre histoire.
Je l'ai décrite dans une Notice publiée il y a quelques
années (1).
(1) Wotice sur une Collection de 180 volumes manuscrits concernant
l’histoire de la Belgique , etc. Bruxelles, M. Hayez. 1835, In-8,
( 340 )
L'autre est connue à la bibliothèque du Roi sous le
nom des 182 Colbert. C'est de celle-ci que je me pro-
pose d'entretenir aujourd’hui l'académie.
Colbert ne fut pas seulement le fondateur de la richesse
industrielle et commerciale de la France, il fut aussi le
protecteur éclairé des sciences et des lettres. La biblio-
thèque du Roi dut à ce grand ministre des accroissemens
notables : il ne se bornaïit pas à profiler de toutes les occa-
sions qui s’offraient dans le royaume d'acquérir pour elle
des livres et des manuscrits rares et curieux, mais il en-
voyait des savans dans les divers pays de l’Europe, avec
la mission d’en rapporter ceux qu'ils y déconvriraïent; il
faisait concourir au même but les ambassadeurs du roi
dans les cours étrangères .Ce fut lui encore qui, le premier,
conçut l’idéede faire tirer des copies authentiques des titres
historiques conservés dans les archives des provinces, pour
en enrichir la bibliothèque. Le président Doat fut chargé
de ce travail pour les provinces de Guyenne, de Langue-
doc et le pays de Foix; Denis Godefroy eut à dépouiller le
dépôt de la Chambre des Comptes de Lille, à la garde du-
quel il venait d’être commis (1), ainsi que les chartriers
principaux de la Flandre française ; le président Allant et
Baluze eurent aussi chacun un département spécial. Les
documens recueillis par ces savans parvinrent à la biblio-
thèque du Roï dans ces années 1670 à 1675. Les titres
relatifs à l'histoire du Languedoc furent distribués en
500 volumes , qui recurent et ont conservé le nom des
(1) Par lettres patentes du 11 décembre 1668. Voy. la notice de M. Le
Glay sur les archives de la Chambre de Comptes de Lille, Juillet 1835.
In-80,
(341)
500 Colbert : on donna à ceux qui concernaient l’histoire
du Béarn , au nombre de 300 , le nom de fonds Doat ;
enfin l'on appela les 182 Colbert les volumes et porte-
feuilles formés des pièces extraites en copie et en original
des archives de la Flandre (1).
Ces derniers documens , les seuls dont j'aie eu à m’oc-
cuper, sont classés par ordre de matières. Voici l'indica-
tion des titres que portent les volumes, ou des matières
dont traitent les actes qu’on y a rassemblés :
Vol. 1-2. Affaires du comté de Bourgogne.
Vol. 3. Inventaire des titres à extraire des registres de
Lille.
Vol. 4. Maison des princes; gouverneurs et grands offi-
ciers ; affaires des finances.
Vol. 5. Mariages des princes ; légitimations ; successions ;
hommages.
Vol. 6-8. Anoblissemens de Flandre.
Vol. 9. Érections de terres en Flandre.
Vol. 10-11. Domaines de Flandre.
Vol. 12-13. Ordonnances, instructions, mandemens, etc.,
concernant les domaines de Flandre et les droits et autorités
du roi.
Vol. 14. Extraits des registres des mémoires, concernant
les domaines royaux et particuliers.
_ Vol. 15. Droit de nouvel acquèt, ban et arrière-ban en
Flandre.
Vol. 16-17. Commissions et instructions des officiers pré-
posés à la recette des domaines royaux en Flandre.
(1) Essai historique sur la bibliothèque du Jioi, Paris, 1782. — Les
manuscrits français de La bibliothèque du Roi, etc., par M. Paulin Pâris.
Préface du premier volume. Paris, 1836. In-8.
( 342)
Vol. 18-20. Droit da 10° denier sur les donations de fiefs.
Vol. 21-23. Affaires des impôts, aides, subsides, prêts,
emprunts. (Documens tirés des registres des mémoires.)
Vol. 24. Aliénations et engagemens des domaines ; commis-
sions des gouverneurs de Namur et d'Artois. 9
Vol. 25-27. Aliénation des domaines de Flandre.
Vol. 28. Bois et forêts de Flandre.
Voi. 29. Officiers de justice et règlemens sur la justice et
la police.
Vol. 30-31. Souverains baillis, baïllis, châtelains et sous-
baillis en Flandre.
Vol. 32-33. Répertoire des commissions des officiers de
justice et de finances transcrites dans les registres de la
Chambre.
Vol.-34. Prévôts, cépiers et concierges des prisons en
Flandre.
Vol. 35-36. Police en Flandre; confiscations.
Vol. 37-38. Monnaie de Flandre en général; monnaie de
Tournai.
Vol. 39. Monnaie d'Arras ; ordonnances.
Vol. 40. Commerce de terre et de mer dans les Pays-Bas ;
amirauté, etc.
Vol. 41. Manufactures en Flandre.
Vol. 4% Guerre; fortifications; munitions.
Vol. 43. Traités de paix , de 1336 à 1665.
Vol. 44. Affaires ecclésiastiques; lois de Flandre.
Vol. 45. Indults ; nouveaux évèchés des Pays-Bas.
Vol. 46. Hôpitaux ; maladreries dans les Pays-Bas.
Vol. 47. Priviléges et amortissemens des églises et hôpi-
taux.
Vol. 48-49. Amortissemens.
Vol. 50. Subsides ecclésiastiques aux Pays-Bas.
Vol. 51. Provisions, charges et affaires concernant la re-
cette des domaines royaux de Lille.
Vol. 52. Chambre des comptes de Lille.
( 343 )
Vol. 53-56. Inventaire général des 78 registres aux chartes
de la Chambre des Comptes de Lille, formé par registre et
par ordre de matières.
Vol. 57-61. Fiefs de la salle de Lille.
Vol. 62. Francs-alleux de Lille.
Vol. 63. Amortissemens des églises et béguinages de Lille.
Vol. 64. Conseil souverain, régale et terrier de Tournai.
Vol. 65-68. Recueil formé, par ordre chronologique,
des titres originaux et en copie, concernant l'évêché de
Tournai.
Vol. 69-70. Fondation de bénéfices dans le diocèse de
Tournai.
Vol. 71. Amortissemens des églises de Tournai.
Vol. 72. Juridiction de l’évêque de Tournai sur l’abbaye
‘ de Saint-Amand. :
Vol. 73. Titres de l’abbaye de Cisoing.
Vol. 74. Inventaire des chartes du château de Namur ,
formé en 1590.
Vol. 75. Inventaire des chartes du comté de Hainaut.
Vol. 76. Domaines du comté de Hainaut.
Vol. 77. Mortemains et domaines dansle comté de Hainaut.
Vol. 78. Cartulaire du domaine de la ville du Quesnoy.
Vol. 79. Cartulaire des rentes de la ville du Quesnoy.
Vol. 80. Terrier de la forêt de Mourmal.
Vol. 81-82. Inventaire des chartes du comté d’Artois,
formé dans le X VI: siècle.
Vol. 83. Domaines royaux dans le comté d’Artois,
Vol. 84. Cartulaire des domaines d'Arras.
Vol. 85. Amortissemens des églises d'Arras.
Vol. 86. Priviléges et amortissemens des églises du diocèse
d'Arras.
Vol. 87. Actes et lettres concernant les aides et subsides
d'Artois, de 1600 à 1657 ; terrier de Saint-Omer.
Vol. 88. Fiefs du bailliage d’Aire.
Vol. 89. Cartulaire d’Avesnes,
Tom. vr. 24
( 344 )
Vol. 90-91. Fiefs du château de Lens.
Vol. 92. Table alphabétique des fiefs du comté de Saint-
Pol.
Vol. 93. Inventaire des chartes du château et de la Cham-
bre des Comptes de Lille , formé, dans les années 1506-1512,
par Jean Ruffaulé et Charles de Boulogne, conseillers-maîtres,
ut Jean Le Blanc, auditeur de ladite Chambre;
Les n°° 94-182 sont des portefeuilles renfermant des
comptes originaux de domaines, d'impôts, de subsides,
de droits d’entrée et de sortie, etc., dé différentes villes et
quartiers de l’Artois, du Hainaut et de la Flandre; on ne
s'explique pas bien comment Godefroy put les extraire
du dépôt dont il avait la garde, pour les envoyer à la bi-
bliothèque du Roi (1). Du reste, aucun de ces comptes n'a
de l'intérêt pour l’histoire.
Les documens qui forment la matière des volumes 1-93
ne sont, ainsi que je l’ai dit, que des copies; mais ces
copies ont été faites avec soin; et la plupart sont authen-
tiquées par Godefroÿ lui-même. Il est à remarquer d’ail-
leurs qu’elles comprennent beaucoup de pièces dont
aujourd'hui l'on chercherait vainement les originaux à
Lille. Par exemple, il y a quatre volumes (ceux qui sont
cotés 6-9) qui contiennent des lettres-patentes d’anoblis-
sement «et d'érection de terres en Flandre : or, l’on sait
que, sous le régime de la terreur, des commissaires se
transportérent aux archives de la Chambre des Comptes,
et arrachèrent ; dans les 79 registres aux chartes, tous les
(1) Dans plusieurs äutrés fonds , ét notamment dans celui de Baluze,
il y a encore des recueils de piècés originales qui proviennent évidem-
ment des archives de Lille.
( 349 )
actes qui conféraient quelque titre de noblesse (1). Il peut
importer à bien des familles belges de connaître qu'il
existe encore un moyen de se procurer copie des actes de
cetté espèce, émanés des souverains des Pays-Bas, depuis
Philippe-le-Hardi jusqu’à Philippe EV (2).
Alors même que tous ces documens se seraient conser-
xés à Lille , la collection formée par Godefroy n’en aurait
pas moins une utilité spéciale et trés-grande, à raison de
l’ordre de matières qui y a été observé, et qui y facilite
beaucoup les recherches.
En résumé, je regarde les 182 Colbert comme le recueil
de matériaux le plus important qu'il ÿ ait à la bibliothè-
que du Roï pour l’histoire de la Belgique , et c’est ce qui
m'a engagé à le signaler à l’attenlion de l'académie.
Conseils de Charles V, roi de France , au Dauphin,
par M. Marchal, membre dé l'académie.
Parmi les manuscrits de Fancienne bibliothèque royale
des ducs de Bourgogne , il ÿ a un recueil dont voici le titre:
(1) Foy. la notice de M. Le Glay déjà citée, et mon Rapport à M. le Mi-
nistre de l'Intérieur sur les archives de là Chambre des Comptes de
Flandre , etc., Bruxelles, Hayez , 1836. In-S de 34 pages.
(2) I ne s’agit ici que des titres de noblesse conférés aux habitans des
provinces qui étaient du ressort de la Chambre des Comptes de Flandre,
savoir : PArtois, la Flandre, lé Hainaut, le Namurois, la seigneurie de
Malines, le Tournaisis Quant aux titres conférés à des Brabançons,
à des Limbourgeois et à des Luxembourgeois, ils étaient transcrits dané
les registres de la Chambre des Comptes de Brabant, qui se sont tou-
jours conservés et sé conservent encore à Bruxelles.
( 346 )
Traités divers ; 1l est inventorié n° 10394 à 10414, etren-
ferme entre autres (n° 10406) les conseils donnés par un
roi de France à son fils, qui doit lui succéder. Aucun inti-
tulé, aucune phrase n’indiquent le nom de l’auteur, ni ce-
Jui de son fils ; mais l’auteur fait mention d’une anecdote du
roi Philippe, qui dit être son aïeul : elle est relative à la
tolérance de ce prince envers des extorsions et des sur-
prises de quelques gens d'église.
Le texte étant écrit en français , dans le style du XIV”°
siècle, on se demandera : est-ce Philippe-le-Bel , Philippe-
le-Long, ou Philippe de Valois? Ce ne peut être Philippe-
le-Bel, parce que ce prince, peu endurant, s’est porté à des
violences envers les gens d'église, telles que celles contre
le pape. Boniface VIIT et la condamnation des Templiers.
Ce ne peut être Philippe-le-Long, parce que son fils uni-
que mourut dans la première enfance; mais ce doit être
Philippe de Valois, père de Jean IT, aïeul de Charles V;
ainsi ces conseils peuvent être attribués à Charles V, roi
de France. Nous allons le démontrer.
Philippe de Valois, chef de la branche de ce nom, et
par conséquent tige des ducs de Bourgogne-Valois, qui
régnèreni sur nos provinces , avait inspiré à sa famille le
goût des lettres; il composa lui-même un ouvrage dont
il y a un manuscrit à la bibliothèque de Bourgogne,
ayant à l’incipit; « ci-après commencent li diz; livre du
» roy Phelippe de France, qui fu contes de Valois, Danjou
» et du Maine. » Cet ouvrage, en vers, est une collection
de sentences morales.
Le roi Jean IT, son fils, aimait aussi les lettres : il y
en a tant de preuves dans l’histoire de France et dans la
librairie primitive des ducs de Bourgogne, qu'il est inu-
tile de le démontrer, Ce prince, malgré les guerres et les
( 347 )
embarras de toute espèce qui durèrent pendant son règne,
malgré sa captivité en Angleterre, veilla à l'éducation de
tous ses enfans ; on le reconnaît entre autres, au manu-
serit n° 11183 de Gaces de la Vingne, premier chape-
lain du roi Jean, intitulé : Romans des déduis, composé
à Heldefort, en Angleterre, en 1359, pour l'éducation
du jeune Philippe, duc de Bourgogne, quatrieme fils
du roi.
Charles V, fils aîné de Jean IT, surpassa dans l’art de
régner son père et son aïeul. Nous ne pouvons compren-
dre ce qui a pu lui attirer le jugement sévère de quel-
ques écrivains modernes, qui, parmi plusieurs griefs, révo-
quent en doute que ses contemporains et la postérité lui
aient donné le surnom de Sage, en prétendant que le mot
sapiens doit se traduire exclusivement par le mot savant,
et que, par conséquent, il faut dire Charles-le-Savant
et non point Charles-le-Sage.
Charles V lui-même emploie l'expression de sapiens
pour signifier sage, selon la citation que nous ferons plus
loin de son Ordonnance de 1374 , d'aprés le texte de l'Ec-
clésiastique, ch. VI, v. 18.
Je n’invoquerai pas le glossaire de Du Cange, tom. VI,
p- 131, qui traduit sapiens par le mot tuteur, sapientes
par sage homme; par exemple : Celsus qui fut sage-hom
de loix , et plus loin Christus sapiens. N'y trouvant
point la traduction par le mot savant , je me borne à
consulter les dictionnaires latins les plus usuels, qui tra-
duisent sapiens , d’après Cicéron , par les mots sage, pru-
dént , judicieux ; d'après Horace, sapiens operis , qui
entend son ouvrage ; d'après Aulu-Gelle, sapiens rerum
humanarum , intelligent dans les affaires du monde ;
mais il nous semble que cette expression latine signifie
(348)
également sage et savant , tout comme le mot grec xxAdç
veul dire, bel et bon. {
Le roi Charles V ne jouissait que de peu de considé-
ration , lorsqu'il commençait à exercer les fonctions de
Régent de France, pendant la captivité de son pêre, en
1356. On avait peu de confiance dans un prince valétudi-
naire qui gouvernail le royaume sans sortir de son hôtel,
à Paris, ou de ses châteaux dans les environs; en effet , sa
mauyaise santé, qui fut la cause de sa mort prématurée,
le retenail dans ses appartemens. Il portait une rebe rouge.
qui paraît être d'étofle de laine, taillée comme celle des
femmes : c’est ainsi qu’on le voit représenté à la miniature
du manuscrit n° 2, fol. 446 verso , des chroniques de France
(Bibl. Bourg.); c’est, d’ailleurs, ce qui est attesté par les
historiens modernes.
Charles acquit insensiblement l'affection publique. Au
moment où il succéda à son père, il jouissait de l'estime
générale. S'abstenant toujours d’altérer les monnaies, mal-
gré l'usage autorisé par les rêgnes précédens , et quelle que
fût l’urgence de faire face aux dépenses, il rétablit le
crédit publie. Observateur de la justice, il rendit plusieurs
arrêts remarquables par leur profonde sagesse ; il veilla
à la sûreté personnelle des Juifs; il fit plus encore, il
commanda, par son Chancelier, qu'un jeune Juif dont le
père avait élé excommunié par ses eoréligionnaires, fût .
circoncis ; exemple de tolérance religieuse qu’on ne croyait
guère trouver au XIV" siècle. (’oir au 28 février 1364,
vieux slyle, tome III des registres du parlement, pag: 4,
n°14431 , de l'inventaire de la Bibliothèque de Bourgogne.)
Le roi Charles dirigea adroïtement et avec succès , par les
talens de Duguesclin , la guerre contre les Anglais; il mit
une fin aux désordres des bandes d'ordonnance dont les
funestes services avaient été si onéreux sous le régne du roi
( 349 )
Jean ; c’est ainsi qu'il rendit Ja sécurité aux habitans des
campagnes. C'est le même roi qui, sachant allier l'économie
à la magnificence, fit rédiger ou transcrire un grand nom-
bre de manuscrils précieux , comme l’attestent la biblio-
thèque ou librairie du Louvre, qu'il fonda, et la librairie de
Bourgogne. ( V’oir un grand nombre de numéros de l'in-
xentaire de cette bibliothèque, tels que le hivre des pro-
priétés des choses, etc, , etc.)
Sans doute , le roi Charles V fit des fautes graves : l'aban-
don des derniers jours de Dugueselin, l’acharnement à
poursuivre Charles de Blois, en sont la preuve; mais quel
est le prince, quel est l’homme qui n’en a point commis ?
Charlemagne, qui fit massacrer les Saxons, Théodose , que
saint Ambroise amena à la pénilence sont-ils des Nérons
et des monstres ?
Charles, valétudinaire , comme nous l'avons dit , s’em-
pressa de soigner, à l’imitation de son père, l'éducation de
ses propres enfans; deux seulement eurent le bonheur d’en
pouvoir profiter : Catherine, qui épousa Jean, duc de Berri,
prince célèbre, comme ses parens, par son amour pour
les lettres, et le malheureux Louis, duc d'Orléans, qui
fut assassiné par les ordres du duc de Bourgogne.
Parmi ses autres enfans, Charles VI, l'aîné, mourut dans
un état de démence ; Jeanne, Bonne, une autre Jeanne,
Isabelle, Marie, moururent lrès-jeunes et, par conséquent,
sans alliance, Leurs noms sont omis dans l'Art de vérifier
les dates, mais on les retrouve à la Généalogie des rois
de France, présentée à Louis XIV , en 1687, par Thuret.
D'après ce tableau d’une famille qui ne compte que deux
enfaus adultes en bonne santé, sur huit qui la composaient,
et, surtout d’après les habitudes de prévoyance du roi
Charles V, on ne doit pas s'étonner qu'au mois d’août 1374,
c'est-à-dire, six ans avant sa mort, il fit publier et enre-
( 350 )
gistrer, avec toutes les précautions requises, l’'Ordonnance
qui fixe la majorité des rois de France à l’âge de 14 ans.
Le jeune dauphin (Charles VI) était né le 3 décembre
1368, et n'avait alors que six ans.
Le texte latin du préambule de cette Ordonnance, que
nous avons transcrit du tome VI, pages 26 et suivantes, du
Recueil des Ordonnances de France, concorde tellement
avec l'esprit des conseils donnés par Charles V, qu'on ne peut
douter qu’il n’en soit l’auteur; en voici le commencement :
Carolus, Dei gratià Francorum rex, ad perpetuam rei
memoriam. Filios requm per parentes educari et erudiri
debere, ut Deum timeant, virtutum ac virium profec-
tum celeriter attingant, sincere diliqi ; et primôgenitos,
maxime, magnis donis et aliis honoribus decorari, rei-
publicæ commodum, status regnorum et subditorum
concernentibus, tranquillitatis arqumentum. Præde-
cessorum tillustrium sectando vestigia, clare liquet ;
bona enim terra cum diligentià colitur ut fructus opti-
mus reporteretur, multo magis sunt filii requm per pa-
tres studiosius nutriendi et docendi, ut virtutibus im
buantur, fortificentur et crescant ; et cum in adultam
ætatem pervenerint, pueritiæ redoleant bones mores,
qui ad majoris honoris culmen sunt in populis eri-
gendi, etc , etc., unde sapiens, filii a juventute tua, etc.
(Ce dernier passage est tiré de l'Ecclésiastique, ch. VE, v. 18.)
Le roi cite ensuite, pour exemples, la bénédiction d’Isaae
à Jacob, le règne de Josias qui commence à 8 ans, celui
de Joas, à 7 ans; il eite David, jeune garçon (parvulus in
regem unctus est); il dit après cela : Salomonem elegit
Deus adhuc puerum atque tenellum ; il parle d’un roi de
Macédoine élu au berceau , et de Chilpéric, qui fut roi de
France à 4 mois. Tout cet exposé nous démontre sa solli-
citude envers son fils âgé de six ans.
( 351 )
Nous terminons cette notice par l'extrait de ses conseils
qui sont, en quelque sorte, une instruction particulière
pour expliquer l’Ordonnance royale. Après avoir fait diffé-
rentes recherches , nous présumons que cet écrit est inédit ;
tout porte à croire qu’il était conservé dans la librairie
ou bibliothèque de Bourgogne comme un acte de famille.
Extrait des conseils du roi Charles F.
« Mon tres-chier filz, pour ce que je desire de tout mon
» cuer que tu soiez bien enseingniez en toutes choses, jay
» eu pensee que je te face aucuns bons enseingnemens pour
» eschever le peril de lame et du corps et tout premie-
» rement selon ce que le pere doit enseingnier a son filz. Et
» pourtant, mon enfant, que je cuide et croie que tu le orras
» ententivement et les retiendras soigneusement et moult
» voulentiers. »
Le roi lui conseiile ensuite d'aimer Dieu, de supporter
les adversités que Dieu lui enverrait, d'améliorer sa vie , de
n'avoir point d’orgueil dans la prospérité « car, ajoute-t-il,
» cest moult grant pechie et moult grant villennie quand
» on guerroie notre Seigneur de ses propres dons. »
I lui conseille de se confesser souvent ; il ajoute : «et
» que tu aiez telle maniere en toy, que ton confesseur et
» tez autres amis te osent hardiement enseignier, monstrer
» et reprendre, se tu fais aucune chose qui ne soit mie
» a faire. »
I! lui donne des conseils sur la manière d'entendre
l'office divin et de faire l'aumône, sur la compagnie qu’il
se doit choisir, sur les discours qu’il ne doit pas laisser
dire en sa présence. Le roi veut que son fils se conduise
( 352 )
de manière qu'il soit« digne de recevoir la saincte onclion
» dont les rois de France sont communement sacrez. Or,
» mon tres chier filz, se il avient que lu viengnes au gou-
» vernement du Royaume, garder et gouyerner si ten
» preng garde, que tu aies les bonnes taches qui aflierent
» a Roy avoir, cest assavoir que tu soies si droicturier pour
» vraye justice faire que pour nulle chose qu’il te puisse
» avenir, que ne laisse que tu ne la face. Et sil avient
» que il y ait aucune querelle d’aueun povre homme
» contre aucun riche homme devant toy, je te pry sous-
» tiens tous jours la querelle du poyre, jusques a tant que
» tu saches et congnoisses de la plaine verite et si tres tost
» quetuen saras de la plaine verite, fay en droit, justice et
» raison selon Dieu de qui tu est lieu tenant et sil avient
» que tu aiez querelle contre autruy, soustiens la querelle
» de lestranger contre toy : meismes jusques a tant que tu
» congnoisse plainement de la plaine verite car autrement
» ceulz de ton conseil se pourroient doubter de parler
» contre toy, que tu ne doiz mie vouloir, Gher fils, se tu
» entens que tu tiengnes aucune chose d’autruy à Lort,
» soit de ton temps, soit du temps de tez anlecesseurs,
» or reng celle chose tantost combien que elle soit grant ,
» soit en terre, soit en deniers ou en autres choses. »
PORTE Aprés des explications sur la conduite à tenir, le
roi ajoute : (Or, beau filz, soiez bien diligent de faire garder
» en ta terre toutes manieres de bonnes gens en bonne
» paix et par especial les personnes de saincte églize. »
Le roi raconte ensuite une anecdote du roi Philippe
de Valois, son aïeul, sur une plainte contre des clercs qui
surprenaient la justice. « Adonc le Roy (Philippe) respon-
» dit, je crois bien, fait-il, qu’ils me font moult dextorcions
» et de susprises, mais quant je pense bien aux honneurs
( 353 )
» que notre Seigneur mà donne el fait en ce chetif monde,
» je vueil mieulx mon domaige souffrir, que en faire chose
» par quoy il veinst esclandre , ne contens entre moy et
» saincte eglise, Et pour ce je te recorde ceste parolle afin
» que tu nesoies mie ligier a croire encontre les personnes
» de sainte eglise. »
Le Roy lui recommande ensuite de bien aimer sa mère;
il ajoute: «Or, mon très-cher filz, je te prie que tu aimes tez
freres et tes soeurs... et que tu leurs soie en lieu de père. »
Il conseille ensuite de donner les bénéfices de l’église
« à ceulx qui ont peu ou neant ».….… «Tu verras, ajoute-
t-il, que ton don sera bien emploie.
» Or, mon tres-cher filz, garde toy bien que tu naïez
» guerre a nul chrestien et se on te fait tort, assaie par
» plusieurs voies pour sayoir si tu pourras trouver aucune
» voie par quoy tu puisses, sans avoir guerre, recouvrer
» ta droitture, avant que tu esmeuves ton peuple a faire
» guerre, »
Suivent des conseils sur la conduite des gens de guerre
et sur la manière de pacifier les gens de ses terres « car,
» ajoute-t-il, c'est une chose qui moult plaist à notre Sei-
» gneur. »
Viennent ensuite des conseils sur le choix des baillis,
prévôts, sergens. « Chier filz, donne voulentiers povoir et
» auctorilé aux gens de bonne voulente de ta terre et a
» ceulz par especial qui sauront bien user du povoir... tu
» feras oster jeux de dez et tavernes deshonnestes, bour-
» delliers.… et toutes mauvaises gens qui usent de sorce-
» ries, de malefices et de mauvaises ars..., selon ce que tu
» entendras.. par saige conseil de bonnes gens.
» Or, cher filz, met grant entente a ce que lez despens de
» lon hostel soient raisonnables et amesurez et que les de-
( 354 )
» niers que tu despendras soient... prins et levez droic-
» turierement et loyaument sans aucune mesprenance. »
Le roi donne des explications à ce conseil; il termine
en recommandant que, s’il meurt avant son fils, celui-ci
fasse prier pour lui par les congrégations de France.
M. le vice-directeur, en levant la séance, a rappelé que
l’époque de la prochaine réunion , aux termes du rêgle-
ment, est fixé au mardi 7 mai prochain , anniversaire de
la restauration de l'académie. La séance commencera à
10 heures du matin , et pourra, au besoin, être continuée
le lendemain.
OUVRAGES PRÉSENTÉS.
———
Une conjuration en 1568, par Jules de Saint-Genois.
Broch. in-8°.
Note sur Antoine Sanderus, par le même. Une feuille
in-8°.
Sur l’origine de notre système de numération, par
M. Chasles. (Extrait des Comptes-rendus de l'académie
des sciences. ) Broch. in-4°.
Énoncé de deux théorèmes généraux sur l'attraction
des corps et la théorie de la chaleur, par le même. ( Ex-
trait des Comptes-rendus , etc.) Broch. in-4°.
Histoire et ouvrages de Huques Métel, par M. le mar-
quis de Fortia d'Urban. Paris, 1839. 1 vol. in-8°.
Première lettre sur Jacques de Guise, à M. le baron
De Stassart , par M. Adolphe Aubenas. Paris, 1839. Broch.
in-8°.
( 355 )
Le Tasse a Sorrente, Térentia, le Monge des îles
d'or, poèmes, nouvelle et impressions, par Jules Ca-
nonge. Paris, 1839. 1 vol. in-&.
Traité de l'affection calculeuse, par le docteur Ci-
viale. Paris, 1838. 1 vol. in-&,
Description des vases peints et des bronzes antiques
qui composent la collection de M. de M***, par J. De
Witte. Paris , 1839. Broch. in-8°.
Mémoires de la société royale des sciences , lettres et
arts de Nancy. 1837. 1 vol. in-8°. Nancy, 1838.
Comptes rendus des séances de l’académie des scien-
_ ces de Paris. 1% sem. 1839; n° 9 à 12. Paris, 1839.
4 broch. in-4°.
Bulletin de la société géologique de France. Tome IX.
Feuilles 28 à 32. — Tome X. Feuilles 1 à 4. 1838 à 1839.
Paris. 2 broch. in-&.
Tstruzione sui parafulmini letlera del sig. professor
Elice al p’° CG. Dentone. Genova, 1839. Broch. in-8°.
Notice sur les travaux de J.-B..T. Vandenzande, par
C. Broeckx. Anvers, 1838. Broch. in-&.
Réglement de la société d'agriculture et de botani-
que de Louvain. Broch. in-8°. Louvain, 1838.
_ Diptères exotiques nouveaux ou peu connus, par
J. Macquart. Tome 1°, 1°° parlie. Paris, 1838. 1 vol. in-8e.
Festival quinquennal de Flore. XXX® salon d'hiver.
1839. 60° exposition publique de Ja société royale d’agri-
. culture et de botanique à Gand. Broch. in-8&.
Des juifs en Pologne, par O. Louis Lubliner. Bruxelles,
1839. 1 vol. in-12.
- Bibliothèque universelle de Genève. Nouvelle série.
+ 4e année. — N° 38. (Février 1839.) Genève, 1 vol. in-8°.
Annalen der Staatsarzneikunde, herausgegeben von
( 356 )
P. J. Schneider, J. H. Schürmayer und F. Hergt. 3% Band.
2es Heft. Tübingen, 1838. 1 vol. in-8°.
Annales et bulletin de là société de médeciné de Gard.
Année 1839. 5° vol. 3° livr. (Mars.) Gand. Broch. in-8°.
Journal de la société de la morale chrétienne: Tom.
XV: N° 8. Paris, 1839. Broch. in-&.
Concours et éxposition de la société royale pour l’en-
couragement des beaux-arts, à Anvers ; pour l’année 1840.
Broch, in-12.
ERRATA.
Page 217, note 1, au lieu de der, lisez des.
— 224, ligne4, — — un renom, lisez une renonciation.
re da
BULLETIN
DE
L’ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES
ET BELLES-LETTRES DE BRUXELLES.
1839. — No 5.
Seance générale du 6 et du 7 mai.
M. le baron De Stassart, vice-directeur, occupe le fau-
teuil.
M. Quetelet, secrétaire perpétuel.
CORRESPONDANCE.
Le secrétaire donne communication d’une lettre qu’il a
reçue de Florence, par l'intermédiaire de M. Antinori, et
qui annonce la formation d’un congrès scientifique italien.
La première réunion aura lieu à Pise, du premier au
quinze octobre inclusivement. Le comité se compose des
savans dont les noms suivent : le prince Charles L. Bona-
parte, le chevalier Antinori, Amici, Giorgini , Paolo Savi
et Maurizio Bufalini.
Tom. vr. 25
(358)
M. Quetelet, en rendant compte de la correspondance,
donne quelques nouveaux renseignemens sur l'aurore bo-
réale du 19 janvier dernier, d’après une lettre de M. le
professeur Lloyd de Dublin. Il fait connaître à ce sujet
qu'une belle aurore boréale a été aperçue, à Bruxelles,
dans la soirée de dimanche dernier, 5 mai. Il était envi-
ron 11 heures et demie du soir, lorsque M. Mailly, attaché
à l'observatoire royal, a vu ce phénomène qui occupait à
peu près la huitième partie du ciel dans le sens horizontal,
et des deux côtés du méridien magnétique. Les jets lumi-
neux s'élevaient par intervalles à plus de 50 degrés au-
dessus de l’horizon. Le ciel était serein d’ailleurs, et
l'hygromètre de Saussure, qui avait indiqué une grande
sécheresse pendant la journée, était encore assez bas mal-
gré la nuit. On sentait une odeur particulière, assez vul-
gairement désignée par le nom d’odeur de tourbe brûlée,
et qui accompagne souvent , dans nos climats, les chaleurs
du printemps. Le baromètre, qui avait remonté un peu,
marquait 753,64 par une température de 19 degrés
cenlig., le thermomètre extérieur marquait 13°,5 el s'était
élevé à plus de 20:degrés pendant la journée. Le vent
élait à l’est, après avoir soufflé pendant le jour dans une
direction opposée.
M. De Reïffenberg présente, de la part de M. Tandel,
professeur à Liége , une note manuscrite sur un problème
de logique. (Commissaires : MM. l'abbé De Ram et Rouler.)
CONCOURS DE 1839.
L'académie avait proposé cinq questions pour la classe
La.
7
voa aid 25 pd alt pi bi à. x mit Ré te LE SE
AC Sn DR à honte -ripta
( 359 )
des lettres , et huit pour celle des sciences. L'examen des
mémoires reçus en réponse à trois de ces questions, a pré-
senté les résultats suivans :
CLASSE DES LETTRES.
Ouels furent les changemens apportés par le prince Maximi-
lien-Henri de Bavière (en 1684) à l’ancienne constitution lié-
gevise ; et quels furent les résultats de ces changemens sur l’état
social du pays de Liége, jusqu’à l’époque de sa réunion à la
France ?
L'académie désirait que cet exposé fût précédé, par
forme d'introduction, d’un tableau succinct , historique et
critique, de l’ancien gouvernement liégeois , sans toutefois
que l’auteur fût tenu de remonter au delà du règne d’AI-
bert de Cuick.
Un seul mémoire portant pour épigraphe :
. Un prince de Liége ne donne sentence que par ses
justices, et ne fait ordonnance contre Les lois
du pays que du consentement des états.
(Le prince GERARD.)
a été envoyé en réponse à cette question. L’académie, après
avoir entendu ses commissaires (MM. Grandgagnage, le
baron De Reiffenberg et De Gerlache), a décerné une men-
tion honorable à ce travail, en invitant l’auteur à faire
connaître son nom. L’académie a ordonné en outre l'in-
sertion au Bulletin du rapport suivant de M. Grand-
gaguage.
« L'histoire de la principauté de Liége ne peut man-
( 360 )
quer d’exciter un vif intérêt; car elle nous montre un peu-
ple, resserré sur un étroit territoire el gouverné par des
évêques, signalant l’un des premiers le réveil de la liberté
dans les ténèbres du moyen âge, se faisant avec le temps
l’une des conslitutions les plus libres qui exisiérent jadis,
el lraversant toutes les révolutions que l'Europe a subies
pour arriver avec son indépendance territoriale et son
régime théocratique jusqu'à la grande époque de 1789.
» Les Liégeois, ainsi que d’autres peuples, commencent
par le gouvernement absolu, aspirent peu à peu à la liberté,
l'obliennent après de grands efforts, mais ensuite la ren-
dent excessive, soit en la défendant contre les entreprises
du pouvoir, soit en élevant loujours des prétentions nou-
velles; et alors, tombant dans l'anarchie, ils retournent
en quelque sorte à leur point de départ, sous le gouver-
nement plus fort et plus régulier du prince. C'est là le ré-
sumé de beaucoup d'histoires anciennes et modernes;
comme si l’homme, par sa nature même et par l'effet de
passions inévitables , était condamné à tourner éternelle-
ment dans le même cercle de révolutions!
» C’est en partant de cette idée que l'auteur du mémoire
présenté au concours de l'académie, a divisé en cinq pé-
riodes l’histoire de l’ancienne constitution liégeoise , ou-
vrant la première période par la translation que fit saint
Hubert, en 708, du siége épiscopal de Tongres dans la
ville de Liége.
» Nous voyons d’abord les premiers évêques poser, sous
les rois francs , les fondemens de leur principauté, et pro-
fitant habilement, d’un côté, de leur autorilé spirituelle,
de l’autre, de la faiblesse du pouvoir souverain qui décroît
chaque jour après Charlemagne, augmenter incessamment
leurs richesses au moyen de donations pieuses, leur pou-
( 361 )
voir au moyen de concessions qu’ils obtiennent des empe-
reurs, et finir par ajouler à la puissance épiscopale la
plénitude de la puissance temporelle. Dans ces premiers
© temps, l’autorité des évêques n'est faiblement limitée que
par le chapitre de l’église cathédrale ; la constitution est
. essentiellement théocratique : circonstance heureuse sous
un point de vue; car si les évêques de Liége , à l'exemple
- des comtes et des grands seigneurs féodaux, ont réussi à se
+ créer une souveraineté indépendante, cette souveraineté
n'est pas de nature à être facilement reconquise, comme
celle des comtes héréditaires, par des princes séculiers qui,
outre le respect que doit leur inspirer dans ces temps de foi
le caractère sacré des évêques, ne pourraient d’ailleurs se
mettre à leur place sans renverser les bases mêmes de la
constitution. Cette première époque, l’auteur du mémoire
l'a appelée la période pontificale (708-1000).
» La deuxième période commence au X[° siècle. Notger,
ce grand homme dans un petit État , s'est constitué le vé-
ritable fondateur de la puissance liégeoise , étendant ses do-
maines, augmentant la ville et la fortifiant , ainsi que les
petites villes des frontières, établissant une sévère exécu-
tion des lois, purgeant le pays du brigandage, ouvrant des
écoles et protégeant les lettres, Vers la fin de son règne, il
partage les biens de l’église de Liége en trois parts égales,
lune attribuée à lui et à ses successeurs, l’autre au clergé,
et la troisième aux nobles, à la condition pour ces derniers
de défendre les droits et les prérogalives de l’église de Saint-
Lambert, patron de la cité. De la, dit-on, la première ori-
- gine des états liégeois. Ce partage est de l'an 1004. Dans
une charte de l’an 1031; nous voyons les bourgeois figu-
rer à leur tour avec les chevaliers et les clercs , pour ap-
prouver une donation faite par l’évêque à une des églises
( 362 )
de Ia ville (1): voilà donc l'élément des trois élats assez
clairement indiqué. Le peuple cependant ne prend pas en-
core une part réellement active au gouvernement du pays.
L’habitant de Liége a bien ses droits, ses priviléges; sa
personne et ses propriétés sont libres, son domicile est
inviolable; il ne doit payer n2 taille nt écot sans son con-
sentement; il est exempt de logement de soldats et de ser-
vices militaires ; il ne peut être frappé d’excommunieation
que par une assemblée synodale ; i} ne peut être jugé que
par ses juges compétens ; il a droit à la justice des éche-
vins sans être obligé de vider sa cause en champ clos;
et tels sont en eflet les droits et les franchises que l’évé-
que Albert de Cuick établit ou plutôt confirme par écrit
dès l’année 1199 : charte bien remarquable pour l’époque,
et qui est le premier acte explicite des libertés liégeoises.
Mais le peuple ne figure pas encore sur la scène politique
au rang qu'il doit bientôt obtenir. Foutes les charges, tous
les offices sont occupés par les nobles, qui remplissent
cette période de leurs sanglantes dissensions et de leurs
guerres de château à.château. C’est l’époque patricienne
(1000— 1250).
» Dans le XIIT siècle, tandis que la noblesse s’est con-
sidérablement affaiblie dans ses guerres eontinuelles, le
peuple au contraire, par le développement progressif de
son commerce et de son industrie, à su augmenter ses ri-
chesses, et avec elles sa force et sa puissance. En 1253, un
homme , aussi audacieux qu'habile, Henri de Dinant, pro-
fite d’une contestalion survenue entre l’évêque et les éche-
vins pour faire transporter au peuple la nomination des
(4) Miræus, Il, 809.
( 363 )
deux bourgmestres. Chacun sait que cette charge impor-
lante devint en peu de temps des plus considérables, équi-
valant jusqu'a un certain point au consulat de Rome,
attribuant ordinairement le commandement de l’armée,
donnant enfin la haute main dans la direction des affaires.
Cependant on veut contester au peuple ce droit de nomi-
nation , ou du moins on cherche à le paralyser. Le peuple
résiste avec énergie ; ses méliers s'organisent en corps. Pour
affaiblir de plus en plus la puissance des nobles, on décide
que la charge de bourgmestre ne peut être conférée qu’à
des personnes faisant partie d’un métier. Parfois même on
voit l’évêque prendre le parti du peuple contre une no-
blesse ambitieuse. Dés lors l'amour de la liberté anime par
dessus tout le peuple liégeois. Jaloux de ses droits à l'excès,
il ne souffre pas qu’on y porte la moindre atteinte; il ne veut
plus que les étendre; il s’irrite des obstacles; et de là ces
luttes continuelles, ces troubles, ces guerres même que
terminent presque toujours à l'avantage du peuple ces sortes
de transactions connues dans l'histoire du pays de Liége sous
le nom de paix , mot caractéristique qui marque si bien
la source et la nature de ces nombreux traités et règlemens,
dont le recueil forme l’ensemble de l’ancienne constitution
liégeoise (1). C'est ainsi qu’en 1316 fut conclue la paix de
(1) Ce recueil portait le nom de Pavwillart, écrit plus anciennement
Pawilhaer, Pawelhaar, Pavillaar et Pauvillart. Ne peut-on conjectu-
rer que ce mot, dont on a souvent recherché l’étymologie, vient du
mot paix, en liégeois paie, et du vieux mot warder, garder ? paward,
c’est-à-dire , Ze gardien des paix , le livre où l’on conservait les paix,
les règlemens ; d'où, par corruption, les diverses dénominations ci-
dessus rapportées. Il est bon de noter à ce sujet qu’une copie authen-
tique du Pavillart se trouvait déposée au tribunal des échevins , lesquels
étaient Les gardiens de la loi.
( 364 )
Fexhe, laquelle est en quelque sorte la grande charte des
Liégeois. Celte paix confirme les anciennes franchises ;
porte que chacun sera mené et traité par loi et par juge-
ment régulier ; impose à tous les officiers du pouvoir exé-
cutif ou iuicieire l obligation de jurer l'observation de cet
arlicle à leur entrée en fonctions ; déclare que tout agent
du pouvoir , coupable d’une infraction au même article ou
ayant abusé de la loi, sera puni, el tenu en outre de dé-
dommager la personne lésée; que celle-ci, n’obtenant pas
la réparation du dommage , pourra s'adresser directement
au prince, qui sera tenu d’ÿ pourvoir dans les quinze jours;
que si le prince néglige ou refuse, le plaignant avertira le
chapitre cathédral, qui requerra de nouveau l’évêque sans
délai ni détour , et que ce dernier manquant de satisfaire
dans la quinzaine à la réquisition, les Liégeois seront dé-
liés du serment de fidélité, et tous les tribunaux fermés
jusqu’à ce que justice soit faite. La paix de Fexhe statua
en outre que les lois et coutumes ne pouvaient être chan-
gées que d’un commun accord, c’est-à-dire, du consen-
tement unanime des États; el c’est à partir de cette dis-
position, qui fut bientôt expliquée par un réglement
postérieur, que les trois États, que l'on nommail le sens
du pays, intervinrent régulièrement dans les deux actes
les plus importans de la souverainelé, la confection des
lois et l'établissement de l'impôt. Il est douteux qu'a cette
époque aucun autre pays pût se prévaloir d’une constitu-
tion aussi libre. Ce n’est pas tout pourtant : de nouvelles
résistances , de nouveaux abus amènent le peuple à former
de nouvelles demandes, les unes justes, les autres exagé-
rées. En 1343, on établit le fameux tribunal des vingt-deux,
ce palladium des libertés liégeoises, qui, lantôt entravé,
tantôt attaqué ouvertement et abattu , se relève enfin plus
PR.
Me me tt,
bhém.t. 1, ne]
D ns di
( 365 )
fort que jamais, en 1373, soumettant à sa juridiction, non-
seulement tous les agens du pouvoir, prêtres ou laïques, qui
manqueraient à la loi, mais le prince lui-même dans la per-
sonne de son grand chancelier. En 1384, un dernier coup
est porté à l'influence des nobles, qui s'étaient adroitement
immiscés dans l'élection des bourgmestres et du conseil
municipal, en se faisant inscrire dans les méliers des bour-
geois. Le peuple les force à renoncer formellement à cette
à intervention. Telles sont les libertés qu'il a obtenues au
prix de grands sacrifices dans celte période de 150 ans, ap-
pelée par l’auteur du mémoire la période populaire (1250-
1400).
» Au XV: siècle s'ouvre l'époque anarchique. L'équilibre
est rompu. Le peuple, ou du moins ses deux puissans bourg-
mestres, ne rencontrant plus de contre-poids suffisant dans
une noblesse déchue et dépouillée de sa force, vont se trou-
ver face à face de l’évêque, balancer sa puissance et pré-
tendre agrandir encore la puissance populaire ou plutôt
celle de la multitude. Le prince veut ressaisir son autorité.
Nous arrivons au Lemps où le pouvoir monarchique cher-
che partout à se fortifier et à détruire le pouvoir des
communes. C'est à celte époque que se rapporte l'épisco-
pat de Jean de Bavière, surnommé Jean-sans-Pitié, lequel,
dès l'année 1409, commence à établir une constitulion
nouvelle, mais qui ne doit pas durer au delà de son règne.
C'est également à cette époque que se rattachent le sac de
la ville de Liége et le renversement de ses lois par Char-
les-le-Téméraire. Durant toute cette période, on voil Lour-à-
tour la constilution modifiée, abaltue, relevée, pour faire
place enfin au régime établi par les évêques de la maison
de Bavière (1400 - 1505).
» La période despotique s'étend dans le XVI: siècle et
( 366 )
dans le siècle suivant : dénomination justifiée surtout par
Ferdinand de Bavière. Affaiblis par de grands désastres ,
les Liégeois ne peuvent plus que se débattre sans succès
contre les entreprises et les abus du pouvoir. Alors péri-
rent, viclimes de leur dévouement à la cause du peuple,
les bourgmestres Beekman et Laruelle. L'évêque règne en
maître absolu. Le réglement de 1649 met aux mains du
prince Ferdinand la plus grande part d'influence dans les
élections communales : les assemblées des métiers sont in-
terdites, le conseil municipal est dépouillé de ses fonc-
tions judiciaires, une citadelle est bâtie pour contenir la
ville. Cependant le prince redoute assez le courage et
l'esprit ardent des Liégeois pour respecter encore d'anciens
priviléges; et si, dans l’année 1684, Maximilien-Henri de
Bavière modifie profondément la constitution liégeoise,
c'est surtout pour en changer les formes démocratiques,
causes de tant d’orages , et y substituer un régime de li-
berté Lempérée, gage de paix et de sécurité (1505 - 1684).
» Je viens de résumer les cinq périodes de l'histoire de
la constitution de Liége, telles que l’auteur du mémoire
les a présentées. Il a divisé son travail en autant de chapi-
tres, rejetant dans un court appendice les résultats des
changemens opérés par le prince Maximilien-Henri. Cette
distribution, comme l’a fait observer M. De Reiffenberg,
résume assez bien l'aspect général des révolutions liégeoï-
ses; mais on conçoit qu’elle offre l'inconvénient des divi-
sions systématiques, et qu’elle se plie difficilement à tous
les détails des événemens de l'histoire. Pour n’en citer
qu’un exemple, comment faire entrer sans injustice dans
la période qualifiée despotique, le règne de Gérard de Groes-
beck, à qui la ville de Liége doit la réformation de ses lois,
la confirmation de ses priviléges, et qui disait hautement
ha ne Cr,
08: Ta
{ 367 )
dans un de ses édits qu’un prince de Liège ne donne sen-
tence que par ses justices , et ne fait ordonnance contre
les lois du pays que du consentement des états (1). Je
ne vois pas non plus pourquoi l’auteur ouvre à l’année
1400 la période qu’il appelle anarchique, coupant de la
sorte en deux le règne de Jean de Bavière , et d'ailleurs
ne rapportant aucun fait qui se rattache particulièrement
à cette date, Celle dernière observation peut également
s'appliquer à d’autres périodes.
» Je pense que l’auteur n’a été conduit à diviser comme
3l l'a fait son mémoire, que parce qu'il a trop élargi le
cercle de la question proposée par l’académie. Cette ques-
tion avait pour objet le règne de l’évêque Maximilien-
Henri, les institutions de ce prince en 1684, l'influence
de ces institutions sur l’état social de Liége, tandis que
l'auteur , comme le titre de son mémoire l’annonce, a fait
l'histoire de la constitution liégeoise, et a traité toutes les
parties de cette histoire avec une égale étendue. Ce n’est
‘même que par une phrase incidente, jetée au milieu d’un
chapitre, qu'il tombe brusquement au cœur du sujet,
c'est-à-dire, au règne du prince Maximilien-Henri.
» Pour traiter convenablement la question du pro-
gramme , il me semble que , après avoir tracé rapidement
dans une introduction l'histoire des révolutions liégeoises ,
aprés avoir fait un exposé sommaire de ces conflits perpétuels
entre le prince et le peuple, toujours suivis de quelques
changemens à la constitution, l’auteur arrivant à l’époque
de 1684, et avant d'aborder le sujet directement proposé
par l'académie, devait résumer le résultat définitif de tous
(1) Recès du 15 janvier 1578.
( 368 )
ces conflits, et présenter dans un même cadre, sans digres-
sion, sans narration de faits, l’ensemble de l’ancienne
constitution liégeoise, telle que l’avaient faite les époques
antérieures. De cette manière, l’auteur mettait en saillie le
tableau précis et complet de la constitution; il exposait
immédiatement les changemens introduits par Maximilien
de Bavière, et le parallèle s’établissait nettement (1).
» Telle n’est pas la marche qu'il a suivie : comme sil
voulait absolument employer les nombreux matériaux qu’il
paraît avoir recueillis sur l'histoire du pays de Liége, il
en parcourt d’un pas égal les cinq périodes; il s’appesantit
sur des faits étrangers au sujet ; il ne présente nulle pari le
résumé général de la constitulion ; seulement, à mesure
que l'ordre chronologique lui fait rencontrer sur $a route
-un règlement, un édit, une paix relative au gouverne-
ment du pays, il les enchâsse dans son texte pour reprendre
aussitôt la narration des faits, et arriver de la sorte à l’épo-
que de Maximilien de Bavière, en laissant au lecteur le
soin de rassembler , de combiner entre eux tous les élémens
de la constitution liégeoise, éparpillés dans un récit qui
embrasse neuf siècles.
» De là nécessairement une assez grande confusion
dans l'ouvrage ; défaut qui s'aggrave encore par la manière
dont l’auteur paraît envisager l’histoire. Il semble, en effet,
(1) IL fallait en quelque sorte procéder article par article, con-
sacrer par exemple, un chapitre ou un paragraphe spécial au tribu-
nal des vingt-deux, nous montrer exclusivement dans ce chapitre
l'établissement de ce tribunal, ses modifications successives et sa con-
stitution définitive en 1684, et passer de cette manière en revue les
différens pouvoirs de l’état, les bourgmestres, les échevins, la cour
féodale, etc.
es Éd
( 369 )
n'attacher d'importance qu’à la partie dramatique et des-
criptive. Il se plaît beaucoup à raconter, il craint par des-
sus tout de ne pas soutenir l'intérêt en désertant un moment
le récit ou l’action. Voici ses propres paroles : « Nous
» croyons devoir consacrer quelqueslignes sur l’organisa-
» Lion du conseil communal avant l’année 1684... C'est mal-
» gré nous que nous les écrivors; car nous allons détruire
» lout l'intérêt historique, dépouiller les événemens de
» leur caractère, pour ne composer qu’une dissertation
» bien froide et bien décolorée... Nous ne finirions pas
» celte période, si nous voulions nous étendre sur un su-
» Jet aussi fécond. En effet , que de coutumes à décrire!
» mais telle n'est pas malheureusement la question posée
» par l'académie... » ( Pag. 38 et 95.)
» C’est donc comme à regret que l’auteur abandonne le
récit des faits pour trailer le sujet du programme. Aprés
cette déclaration, il faut s'attendre à de nombreuses digres-
sions, à une foule de détails sans doute intéressans, mais
qui ne sont pas à leur place , et qui, à chaque instant , vien-
nent couper l'attention en mettant à l'écart l’objet de Ja
question comme s'il n'élait qu'un simple accessoire. C'est
ainsi notamment que l’auteur à consacré dix pages tout
entières à décrire le cérémonial usité au moyen àge pour
recevoir un chevalier. C’est ainsi encore qu'il peint com-
plaisamment le costume des échevins de Liége et l'armure
des sires d’Argenteau et de leurs hommes d’armes. Pour-
quoi même s'est-il permis une digression assez longue sur
le développement du commerce et de l’industrie dans les
villes de Verviers, de Visé, de Liége, quand quelques
lignes pouvaient suflire à expliquer l'influence de ce fait sur
le gouvernement du pays ? Ce n’est pas la, selon moi, l’es-
prit qui doit présider à l'exposé d'une constitution politi-
( 370 })
que. Ce n’est pas ainsi du moins que l’entendaient Montes-
quieu, de Lolme et Benjamin Constant. Seribitur ad
narrandum , telle est la devise que l’auteur du mémoire
pouvait emprunter à M.de Barante.
» Et à ce propos, n'est-il pas permis d'avancer que le
succès bien légitime del’ Æistoire des ducs de Bourgogne à
égaré beaucoup de jeunes écrivains , qui, ainsi que cela
arrive après toute espèct d'innovation, ont pris exclusi-
vement cette forme historique comme la seule vraie, la
seule qu'il fallût suivre? On a donc quitté le ton sévère
de l'historien pour adopter le récit pittoresque des anciens
chroniqueurs. L'histoire ne s’est plus guère élevée aux vues
générales, aux graves et hautes considérations de politi-
que, de philosophie et de morale ; elle est devenue comme
une suite de tableaux de genre , représentant tous les dé-
tails d’un combat, d’une émeute, d’un banquet, d’un
tournoi, peignant avec un soin minutieux l’armure d’un
chevalier ou le costume d’un magistrat municipal: Tous
ces détails, quand ils sont bien rendus, excitent sans
doute la curiosité, l'intérêl, et nous reportent parfaite-
meut aux temps et aux lieux de la scène. Sachons donc
apprécier le mérite de cette forme historique; mais ne
soyons pas exclusifs. En admirant le crayon de l’histoire,
ne brisons pas son burin ; n’allons pas la déposséder de sa
plus noble mission; et si nous lisons avec beaucoup de
charme d'Hemricourt et Froïssard, qu'il nous soit permis
cependant de leur préférer Tacite et Montesquieu.
» J'ai critiqué la méthode de l’auteur; mais le style,
comme l’a fait observer M. De Reïflenberg, paraît encore
mériter plus de blâme. Ge style manque de précision et de
correction; il est faible, traînant , bien que l’auteur cher-
che à le relever par un usage fréquent et maladroit de
abat", à
LORS US TN ON CONS OP ET CE
1h
PRET
Q
:
|
(COM)
certaines expressions brillantées, assez en vogue aujour-
d'hui, mais qui ne rappellent pas moins la décadence des
lettres latines sous le Bas-Empire, et qui tombent fort heu-
reusement tous les jours. Peut-on, surtout dans l'exposé
d’une constitution politique, tolérer des phrases telles que
les suivantes : — Nos princes, en éveillant dans le peu-
ple l'écho du cœur, par le culte saint des souvenirs qui
lui retracent vivement des désastres ou des temps heu-
Teux, elc. — L'histoire de la constitution d'un peuple
rehausse le sentiment, en faisant connaître nos droits
eb nos priviléges au banquet de la société. — Si la querre
civile décimait la nation, les conseillers étaient d’une
trempe aussi bonne que la meilleure daque de Florence.
— L'amour des beaux arts s’est fait peuple. — Dans un
autre passage, l’auteur emploie le mot adagateur , qui ne
se trouve, je.pense, dans aucun dictionnaire. Il bläme
aussi la conduite /ubrifiante de certain évêque. C'est ap-
paremment lubrique qu'il a voulu dire. Ailleurs il parle
de la voix fatidique des évêques, de progrès palpitans,
de preuves palpitantes, névlogismes prélentieux, qui,
du reste, n'empêchent pas l’auteur d’user çà et là de cer-
laines expressions quelque peu familières.—L'évéque pou-
vait laisser cette MAROTTE au peuple. — L'autorité des
évêques qui était sans pareille , elc. — On voit que l’au-
teur du mémoire n’a pas échappé à l'influence du style
actuel de la mauvaise école, style formé, trop souvent,
d'un mélange d'affectation et de locutions triviales. Je sais
bien que la langne française, soumise à la sévérité des formes
et à la dignité de l'expression sous le gouvernement mo-
barchique de Louis XIV, doit nécessairement s’assouplir
sous le régime;des libertés constitutionnelles ,et subir l'in-
fluence de nos institutions populaires; mais d'un côté ne
(372)
peut-on être simple sans devenir trivial? de l’autre, ne
peut-on rehausser l'éclat de la pensée sans l'affubler de
métaphores bizarres? Et ce ne sont pas senlement les pro-
duclions purement littéraires que de nos jours le mauvais
goût dépare; ce sont parfois les livres les plus sérieux, les
livres historiques. Voici ce qu'on lit dans un ouvrage es-
timé et vraiment digne du succès qu'il a obtenu : D'autre
part, ily avait la Hollande, ce petit peuple dur, avare,
taciturne , qui fit tant de grandes choses sans grandeur.
D'abord ils vécurent malgré l'Océan, ce fut le premier
miracle ; puis ils salerent le hareng et le fromage, et
transmuterent leurs tonnes infectes en tonnes d'or, purs
ils rendirent cet or fécond par la banque, leurs pieces
d’or FIRENT DES PETITS , etc. — J{s ont pris la mer a l'Es-
pagne et les Indes par dessus... La Hollande était déjà
un vampire couché sur la Pelqgique, suçant sa vie, en-
graissant de sa maigreur...…. Ainsi parle M. Michelet,
dans son Précis de l'histoire moderne, chap. XIX; et ce |
n’est pas le seul passage de ce genre que l’on pourrait citer. …
Quand les maîtres de l’école nouvelle tombent dans de
semblables aberrations de style, il faut tout attendre et
tout craindre de leurs disciples moins habiles.
» Après avoir examiné la forme , il me resterait à parler
du fond, à apprécier le mérite du mémoire sous le rapport
de la fidélité historique; mais sur ce point, je dois me
déclarer incompétent , n’étant pas suffisamment inilié dans
l'histoire da pays de Liége, et particulièrement dans ses
sources. Tout ce que je puis dire, c’est que l’auteur paraît
être versé dans la connaissance de cette histoire, que son
travail atteste des recherches, et qu’il présente un grand.
nombre de documens sur l’ancienne constitution liégeoise,
documens déjà connus, il est vrai, mais qui se trouvent
(373)
peut-être réunis pour la première fois. Il peut sous ce
rapport mériter une mention honorable. Mais en suppo-
sant même qu'il se recommande par son exactitude histo-
rique (ce dont il est permis de douter après l'erreur assez
grave que M. De Reiffenberg y a relevée), je ne puis voter
un encouragement plus considérable en faveur d’un tra-
vail qui ne répond que fort imparfaitement au vœu de
l'académie, et qui est tout - à - fait incapable de supporter
l'impression. D'un autre côlé, le sujet est beau et mérite
d'être traité convenablement; c’est pourquoi, bien que
auteur dise assez naïvement dans l’un des passages du
mémoire ; qu'il n’a eu que trop de temps pour le compo-
ser , je propose de lui accorder plus de temps encore, et
de remettre la question au concours , soit pour amener de
nouveaux concurrens, soit pour donner à l’auteur le moyen
de revoir, de corriger , de refondre presque entièrement
son œuvre.
CLASSE DES SCIENCES.
.
| L'académie avait reçu un mémoire en réponse à la ques-
. ion:
Un mémoire sur l’analyse algébrique, dont le sujet est laissé
au choix des concurrens.
;
| M. Timmermans, commissaire-rapporteur, a présenté
le rapport suivant sur ce travail, portant pour devise :
On le peut, je l'essaie ; et ayant pour objet un essai sur
des formules d'évaluation des produites continues.
Wronski dans son introduction à la Philosophie des ma-
“thématiques, et Kramp dans plusieurs de ses ouvrages,
appellent produites continues, le produit d’un nombre
“infini de facteurs soumis à une loi de succession déter-
À Tom. vi. 26
(374)
minée. Les premières recherches sur les propriétés de sem-
blables fonctions, sont dues à Jean Bernouilli, qui fut
conduit à l’expression des sinus ou cosinus en produites
continues. Pendant long-temps ces deux formules ou quel-
ques autres qui s’en déduisent plus ou moins directement,
constituèrent à peu près tout ce que l’on connut sur ces
quantités; Euler et d'autres géomètres reprirent plus tard
ces recherches sous différens points de vue, mais ils n’ajou-
térent que peu de chose à ce qu'avait fait Bernouilli ;
aujourd’hui même, les deux formules de Bernouilli sont
encore ce qu'on connaît de plus remarquable en cette
matière, et, à l'exception de quelques produits infinis
auxquels conduisent certaines intégrales définies, elles
sont encore les seules qui fassent connaître le développe-
ment d'une fonction en un nombre infini de facteurs,
quoiqu'il soit cependant présumable que toutes fonctions
qui, comme les sinus ou les cosinus, ont un nombre infini
de racines, doivent pouvoir être égalées au produit d’un
nombre infini de facteurs du premier degré, reproduisant
chacune des racines.
Kramp chercha ensuite à résoudre le problème inverse
de celui dont on s'était occupé jusque-là; étant donnée une
produite continue avec la loi de succession des facteurs,
il se proposa de remonter à la fonction génératrice. Il con-
sidéra dans son mémoire, les produites continues de la
forme,
CC) ee)
dont il donne l'expression au moyen de ses factorielles;
ces produites sont à peu prés les seules dont il se soit oc-
( 375 )
cupé ; mais ainsi qu'il l’observe lui-méme , la marche qu'il
a suivie serait encore applicable aux produites dans les-
quelles les seconds termes des facteurs binomes seraient
élevés à une puissance quelconque.
L'auteur de l'essai sur les formules d'évaluation des pro-
duites continues, présenté à l'académie, à vu dans cette
partie du mémoire de Kramp , une lacune à combler, et
le travail qui fait le sujet de son mémoire à pour objet
l'évaluation des produites continues de la forme précé-
dente; le second terme des binomes étant élevés à ane puis-
sance paire quelconque.
Le premier moyen qu'il propose consiste à prendre le
logarithme de la produite, à développer en série le loga-
rithme de chaque binome et à les ajouter ; de cette ma-
miére le logarithme de la produite se trouve exprimé par
une série dont la loi prend une forme assez simple pour
cerlaines produites continues.
Le second moyen consiste à décomposer chaque facteur
binome du degré 2n en un nombre # de facteurs du se-
cond degré, ce qui est facile, au moyen des racines de
l'unité; de celte manière la produite du degré 2n se
trouve remplacée par le produit d’un nombre # de pro-
duites du second degré ; or, ces dernières pouvant, pour
certaines lois de succession , être évaluées en facultés nu-
mériques , ainsi que l’a fait voir Kramp, la produite du
‘degré 2n se trouvera exprimée par le produit d’un nom-
bre n de facultés numériques, renfermant à la vérité des
quantités imaginaires , mais que l’auteur parvient à faire
disparaître. Cette méthode est sans doute celle à laquelle
Kramp fait allusion dans son mémoire inséré dans le 3me
volume des Annales de Nimes , lorsqu'il dit qu’on pourra
sans peine étendre à une produite d’un degré quelconque
(376 )
les procédés qu'il applique à certaines produites du second
degré.
Le troisième procédé qu'emploie l’auteur de ce mé-
moire, celui auquel il paraît attacher le plus d’impor-
tance, revient à décomposer, comme précédemment , au
moyen des racines de l'unité, les facteurs binomes du
degré 2n en n facteurs du second degré, ce qui transforme
la produite proposée en un produit de x produites conti-
nues du second degré dont chacune représente un sinus ;
développant ces sinus en série, effectuant les multiplica-
tions en ayant égard aux réductions fondées sur les pro-
priélés des racines de l'unité, on parvient à une série
représentant la produite continue donnée. Pour éviter
cette multiplication de séries qui entraîne dans des lon-
gueurs, el pour mieux reconnaître la loi des coefliciens,
l’auteur établit d’abord des formules donnant le produit
d'un nombre quelconque de sinus ou de cosinus, en fonc-
tion des sinus ou cosinus des sommes ou des différences
des arcs; faisant ensuite dans ces sommes et ces différences
les réductions fondées sur les propriétés des racines de
l'unité, il obtient en série l'expression de ses produites.
Enfin, dans une note qui termine le mémoire, l’auteur
fait la remarque que plusieurs intégrales particulières de
cerlaines équations différentielles du premier degré, et
d'un ordre quelconque, peuvent être exprimées au moyen
de produites continues , ce qui, du reste, est une consé-
quence immédiate de la forme exponentielle de ces inté-
grales.
Quoique l’on puisse faire à l’auteur le reproche fondé de
s'être quelquefois jeté dans des longueurs inutiles, pour
éviter de faire usage de propriétés connues depuis long- «
temps, qu’on puisse même, jusqu'à un cerlain point,
( 377 )
contester l'utilité des recherches auxquelles il s’est livré,
cependant on est forcé de reconnaître qu'il a fait preuve
de connaissances variées et étendues en mathématiques.
Je suis en conséquence d'avis d'accorder à l’auteur la mé-
daille d'argent.
Après avoir entendu ses deux autres commissaires
MM. Dandelin et Garnier, l'académie a décerné, confor-
mément aux conclusions du rapport précédent, une mé-
daille d'argent à l’auteur du mémoire, M. Le François,
professeur à l’athénée de Gand.
L’académie avait reçu un second mémoire pour le con-
cours des sciences, sur la question.
Exposer la théorie de la formation des odeurs dans les fleurs.
Après avoir entendu ses commissaires (MM. Dumortier,
Martens et Morren ), l'académie a également décerné une
médaille d'argent à l’auteur de ce mémoire, M. le docteur
Auguste Trinchinetti de Monza, ci-devant professeur ad-
joint à l’université de Pavie, et actuellement domicilié à
Milan. L’académie a ordonné en même temps l'insertion
au Bulletin du rapport de M. Morren.
Rapport sur le mémoire intitulé : De onoRiIBUS FLORUM
OBSERVATIONES ET EXPERIMENTA PROBLEMATIS RESOLU-
TIONI ACCOMMODATA QUOD REALIS ACADEMIA SCIENTIARUM
LITTERARUMQUE BRUXELLENSIS PROPOSUIT PER ANNUM
MDCCCXXX VIIT.
L'académie avait proposé pour le concours de 1838, la
question suivante :
( 378 )
ÆE æposer la théorie de la formation des odeurs dans les fleurs.
Elle joignait à cette demande les recommandations qu’on à
pu lire au programme : L'auteur déterminera les organes où se
forment les odeurs des fleurs ; — il exposera la structure ana-
tomique et les fonctions de ces organes. — Il examinera le
mode d’exhalation et spécialement à quoi on doit attribuer que
plusieurs fleurs sont odoriférantes à certaines heures de la jour-
née et inodores pendant d’autres. — Les observations devront ,
autant que possible, se rapporter à des plantes de familles diffé-
renles. Le mémoire devra être accompagné de planches.
La même question fut reproduite pour le concours de
1839. Ces recommandations ont été connues de l’auteur
qui a répondu à notre appel, il les transcrit dans son in-
troduction et n’omet que la condition des planches. Maïs,
comme il paraît n'avoir eu connaissance de la question
que par la traduction qui en a été faite en italien, il est
permis de se demander si le traducteur lui-même n’a pas
omis cette clause imposée par l'académie, Dans le doute,
la justice exige que l'interprétation soit en faveur de
l'auteur.
Son mémoire a pour épigraphe :
Hominis sapientia est ut neque te omnia scire putes, quod
Dei est, neque omnia nescire quod est pecudis. Est enim ali-
quod medium quod sit hominis, id est scientia cum ignoratione
Jjuncta et temperata ( Lactant. Div. Enstit., lib. IIT).
Il divise son travail en deux parties : dans la première,
considérant les odeurs des fleurs en général , il parlera de
leur distinction de celles des autres parties des végétaux,
des organes floraux d’où elles émanent, de ceux qui les
préparent , de la nature chimique de ces substances, de
leur mode d’exhalation et enfin de leurs fonctions.
Dans la seconde partie il traitera des odeurs relativement
( 379 )
à leur intensité , à leur quantité considérées aux différens
âges des fleurs, aux heures du jour; il donnera le moyen
de les explorer et parlera surtout du phénomène des odeurs
intermittentes. |
Le rapporteur a cru devoir donner de ce travail un ex-
posé succinct, en faisant suivre toutefois les assertions de
l’auteur des considérations dont l’ensemble motivera son
vote. Ses observations seront consignées entre parenthèses ;
le reste est de l’auteur.
On trouve, dit celui-ci, quelque odeur à toutes les par-
ties des plantes, mais elle est due à des substances rési-
neuses ou camphrées, comme on peut s’en assurer chez les
Laurinées , les Labiées , les Ombelliferes et les Hespéri-
dées , tandis que les émanations odorantes des fleurs sont
des effets d’une fonction particulière, par laquelle il se fait
une simple évaporation de malières sécrétées.
(Il y a ici évidemment erreur, car il est plus d’une
fleur où le parfum se doit également à des émanations
campbhrées : toutes les Labices sont dans ce cas).
On ne peut pas dire, d’une manière absolue, qu’il existe
des fleurs au monde dépourvues d’odeur , et chacune de
leurs parties peut en offrir. En général, elle siége de préfé-
rence dans la corolle et surtout à sa surface supérieure.
Le calice est odorant dans les plantes où toutes les parties
vertes le sont, comme les Labiées, les Ombelliféres. Le
spathe le devient dans les Calla. Si le périgone est simple,
l'odeur vient de sa face interne. Les filets des étamines
exhalent une odeur corolline, tandis que les anthères ont
en général celle du sperme des animaux. Rarement l'appa-
reil femelle est odorant , quoique parfois, comme dans le
safran , le style et le stigmate le soient à un haut degré,
L'ovaire est le plus souvent odorant comme le calice, dans
( 380 )
les plantes dont loutes les parties vertes possédent um
arome ( Ombelliferes, Labiées, etc.)
Tantôt toutes les parties d’une fleur sont odorantes éga-
lement, tantôt quelques-unes d’entre elles le sont seule-
ment; ici, les odeurs sont semblables; là dissemblables.
Aüïnsi, dans la fleur du eitronnier le calice, la corolle et le:
pistil ont la même odeur, le pollen en a une autre; le
périgone du safran ne sent pas comme les sligmates.
(Il est fâcheux que l’auteur n’ait pas apporté plus d’exem-
ples de ces différences dans une même fleur. J'ai signalé
encore sous ce rapport le Cereus grandiflorus dont la
corolle sent l’héliotrope et le calice la vanille. Ces détails.
auraient eu une influence marquée sur les classifications
des odeurs, comme celle de Rafinesque , en ce sens qu'ils
auraient donné ke moyen de distinguer les odeurs com-
plexes, résullant dans une fleur donnée de la combinaison
de différentes odeurs particulières, et les odeurs simples
qui ne résident que dans une seule espèce d’organes).
L'auteur, pour déterminer le genre d’odeur, quand elle
est légère, rassemble en grand nombre ou les fleurs ou
leurs parties odorantes ; il ajoute ainsi du parfum à du
parfum , et alors telle fleur qui paraît inodore, quand elle
est isolée, dénote un arome particulier. Il a trouvé que
tous les pollens ont à peu près le même arome. Un de ses
moyens encore pour reconnaître les faibles odeurs, c’est
de renverser une cloche qui contient ou des fleurs ou de
leurs organes, sur de l’eau , et d'exposer l’appareiïl au soleil
pendant quelques heures. L'air inclus devient odorant.
(Il ne connaît pas, à ce qu'il paraît , un moyen beau-
coup plus simple, celui de passer l’objet faiblement odo-
rant sur un flacon d’ammoniaque; alors, l'odeur devient.
très sensible, C'est le moyen employé par les dames an-
( 381 )
glaises pour faire revenir sur leurs mouchoirs, l'odeur des
fleurs ou celle de l’eau de Cologne ou d’autres parfums.
L'étude de la réaction chimique qui se passe dans cette
opération , aurail pu servir à l’auteur pour mieux conuaître
la nature des parfums. M. Raspail a fait là dessus des re-
cherches fort étendues. D'ailleurs, ce réactif de l’ammo-
niaque est des plus utiles dans la diagnose des plantes
odorantes et dans la classification des odeurs faibies. Celui
employé par l’auteur du mémoire est sujet à plus d'un
inconvénient. Que faire quand on n’a qu'une seule fleur
à sa disposition ? De plus, il n’est pas neuf, Desfontaines
l'employait déja (1)).
Les organes odorans sont pour l'auteur toujours des
glandes qui ont échappé bien souvent aux yeux des phy-
siologistes ; il les décrit d’une manière générale et traite
de leur volume, de leur forme, de leur structure interne,
de leur situation, de leur nombre, mais toujours en s’en
tenant à des généralités qui, malheureusement, donnent
fort peu de conviction. Il cite à la vérité 55 exemples, pris
parmi les plantes où généralement les glandes sont connues
de tout le monde, comme le Dictamnus albus , le Ruta
graveolens, le Citrus medica, les Labiées, etc. I] a soin de
prendre des fleurs dont les odeurs sont fort diverses,
comme la rose dont le parfum plaît à tous les peuples, et
les S'apélies dont la détestable odeur de viande corrompue
n’est aimée que des animaux nécrophages.
(Cette partie est, sans contredit , une des plus faibles du
travail, et nous le déplorons sincèrement. L'auteur n'est pas
difficile pour donner le nom de glande à des organes qui
(t) Decandolle , Physiologie, tom. II, p.938,
( 382 )
ne sont rien moins que glanduleux. Ainsi, il est fort dou-
eux que les petits globules qu'il signale chez le Magnolia
grandiflora soient des glandes. Une vésicule qui fait
sortir un liquide de son intérieur, quand on la comprime,
n'est pas, par cela seul, une glande ; à ce prix, il n’y a pas
de cellule de tissu cellulaire qui ne soit un organe glan-
duleux. L'histoire de la science ne l’a que trop montré,
ces idées sur les organes sécréteurs ont arrêté bien des
progrès : ne saluait-on pas du nom de glandes, au même
titre, les globules de la chlorophylle, les globules de la
couleur des fleurs , les poncluations des vaisseaux et celles
du prosenchyme des conifères ? Quand des idées pareilles
sont admises sans examen , elles deviennent fatales, parce”
que beaucoup d’auteurs les adoptent sans refaire par eux-
mêmes les observations. M. Dutrochet déclare un jour que
pour lui ces globules, dont on a tout fait, chacun selon
son système, sont des globules nerveux, et FEurope tout
entière reconnaît un système nerveux chez les plantes, à
l'exception de quelques hommes assez indépendans pour
ne pas opiner du bonnet. — Aujourd'hui M. Dutrochet
ne veut plus de son système nerveux, il en déshérite les
plantes, et que de physiologistes ont à regretter d’avoir
eu trop de confiance dans la parole d’un des leurs! — Or,
dans le mémoire en question, on appelle glande ce qui
n’a rien de glanduleux. Évidemment, ce que l’auteur
prend pour de tels organes chez les Pelargonium , les
Roses, les Cyelamen, etc., n’est autre chose que le conen-
chyme qui est la cause du velouté, de l’aspect mat des
pétales; ce sont les papilles (nommées ainsi à cause de
leur forme seulement), de simples cellules coniques sur
lesquelles M. Link a depuis si long-temps attiré l'attention,
qui existent tout aussi bien sur les corolles presqu’entière-
:
( 383 )
ment inodores du Galanthus nivalis que sur les beaux
pétales veloutés et odorans des pensées et sur ceux plus
lisses, mais aussi odoriférans de la rose. Comme M. Link
l'a dit, si ces papilles ne se développent pas, l'aspect des
fleurs est terne , sale, comme on le voit dans le plantain,
ou produisent, en se développant, le velours si agréable
descorolles (1).
M. J. Muller , dans ses belles recherches sur la structure
de glandes (2) chez les animaux, est arrivé à ce résultat,
que ce sont les surfaces des membranes qui opérent la
sécrétion , et que la structure si variée des glandes, quelle
qu'elle soit , se réduit à une augmentation de ces mêmes
surfaces sécrétoires. Les appareils chimiques des sécré-
tions animales sont, dit-il, 1° des cellules : comme les cel-
lules de la graisse, les vésicules de De Graaf dans l'ovaire;
2° des membranes : comme les synoviales, les séreuses;
3° des organes d’une structure particulière et plus com-
pliquée, les glandes (3). Quelque multipliées que soient
les formes , dit-il encore, dans la disposition des conduits
des glandes , toujours ces dernières ont ceci de commun,
qu’elles offrent une grande surface sécrétante dans l'inté-
rieur de l’espace formé par les conduits repliés ou rami-
fiés, et que cet espace interne réalise le même effet, mais
seulement d’une manière plus compliquée que ce qui a
lieu sur une membrane étendue; de sorte que la nature
n'a eu pour but, en formant les organes glandulaires, que
de produire une surface immense sous un pelit vo-
(1) Link, £lementa Philosophiæ botanicæ, tom. 1, p. 26, 1837.
(2) 3. Muller, De glandularum structura.
(3) Muller, Physiologie, tom. 4, p. 409.
( 384 )
lume (1). M. Burdach admet que l'existence d’une mem-
brane muqueuse laissant un espace où se sépare un pro-
duit transmissible au dehors par un canal, forme la
condition des glandes (2). M. Meyen, dans son mémoire
couronné par la Société royale des sciences de Gültin-
gue (3), a mis ses nombreuses dissections des glandes des
végétaux en rapport avec celles de M. Muller, et est arrivé
à une conclusion équivalente à celle de ce dernier pour le
règne végétal. Son Vouveau système de physiologie (4)
est venu ensuite confirmer encore ses vues antérieures. Il
paraît que ces grands travaux de l'Allemagne sont restés
inconnus à l’auteur du mémoire. Selon M. Meyen , la sé-
crétion, chez les plantes, s'opère par la membrane de
quelques cellules. Les glandes végétales sont ainsi for-
mées ou de cellules réunies, chose connue depuis long-
temps, ou d’une seule cellule ; la sécrétion se fait tantôt à
l'intérieur, tantôt à l'extérieur , et l'appareil lui-même est
refoulé dans le tissu intérieur de la plante, ou bien il
occupe sa surface cutanée. Il suit de là que toute cellule
peut être une glande; mais, en bonne logique, il faut
avant de donner ce nom à une vésicule de tissu cellulaire,
prouver qu'elle sécrète ; la sécrétion, le fluide, la matière
séparée doil pouvoir se constater, avant qu’on soit en droit
de conclure que l’utricule est réellement une glande; c’est
le seul critère admissible , précisément parce que la cellule
et la glande se réduisent à une organisation identique, au
(1) Muller, Physiologie, tom. I, p. 421.
(2) Burdach, Physiologie (traduction française), tom. VII, p. 150.
1837.
(3) Meyen, Ueber die Secretions-Organe der Pflanzen (Berlin). 1837.
(4) Meyen, Veues System der Pflansen- Physiologie (Berlin). 1838.
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Fe
( 365 )
moins pour autant que nous pouvons en juger par nos
moyens actuels d'investigation. Aussi, M. Mevyen ne s'est-il
formé une juste idée de la structure glandulaire qu'après
l'avoir étudiée sur près d’un millier de plantes ; son ou-
rage contient les figures de 259 organisations différentes,
et beaucoup de ses figures représentent quatre ou cinq
espèces de glandes. Ces nombreuses observations lui ont
permis d'établir une classification de glandes qui, dans
l'état actuel de la science , répond aux besoius de la phy-
siologie ; mais nulle part nous ne voyons chez lui le tissu
conenchymateux placé parmi les surfaces glandulaires.
En effet, il aurait dû trouver en dedans ou en dehors de
ces cônes du velouté, un produit sécrété, et c'est ce que
l'expérience ne confirme pas encore.
Certes , quand on trouve dans une fleur une huile vola-
tile séparée par des appareils glanduleux particuliers, on
est en droit de regarder cette sécrétion comme la cause de
l'odeur, mais quand de pareils organes ne se rencontrent
pas, comme la chose arrive communément, on ne doit pas
regarder tel tissu ou telle forme de tissu comme glandu-
laire, plutôt que tel autre, quand on n’a pas pour cela de
bonnes raisons. Or, l’auteur du mémoire n'apporte pour
prouver que les cônes des pétales sont les organes du par-
fum , d'autre motif qu’une simple asserlion. La lecture de
la Physiologie de M. Meyen aurait pu lui faire éviter ce
grave écueil , car le professeur de Berlin cite précisément
la rose comme offrant celte particularité remarquable que,
chez elle, beaucoup d'organes non odorans possèdent des
glandes , et que ses pétales, siéges de son parfum, ne pré-
sentent pas le moindre organe semblable.
Et d’ailleurs, c'était ici le lieu de se demander ce que
c'est que l'odeur, ce que c’est que le principe odorant ?
( 386 )
On s'imagine presque toujours que les odeurs sont des
émanations matérielles, substantielles, pondérables, mais,
chose singulière! et M. Muller est le seul, à ce que je
sache, qui ait émis cette idée dans sa Physiologie (1) : le
seul réactif de l'odeur, c'est le nez. En effet, dans une
foule de cas, tout autre moyen de saisir la substance, le
principe odorant, nous échappe et le seul qui nous reste,
ce sont les nerfs olfactifs. Quand l’odeur vient d’une éma-
nation matérielle, il faut que sa substance soit soluble
dans le mucus de la muqueuse de l'organe pour aller mo-
difier les nerfs olfactifs, mais quand ce ne serait pas une
matière , ces nerfs pourraient se modifier tout aussi bien
que ceux de la gustation, qui transmettent la sensation
d’un goût qui provient d'un fluide impondérable, comme
le fluide électrique, le fluide magnétique. Rudolphi (2)
avait déjà remarqué que puisqu'il y a tant de corps odo-
rans et que tant d’odeurs semblables et identiques provien-
nent d’un grand nombre d’ertre eux très-divers de nature,
il n’y a pas de principe odorant absolu. Théophraste déjà )
voulait qu'il n’y eût point au monde de corps sans odeur.
Walther (3) dit avec raison que puisqu'on ne peul pas sai-
sir les effluves odorantes matérielles, partout où il y a
odeur, on peut regarder celle-ci comme une modification
d'un agent que nos sens aperçoivent, comme ils aper-
çoivent la lumière ou le son qui ne sont pas des corps. La
lumière, l'obscurité, le bruit, le silence, sont des états
bien différens, de même que l'odeur et l’inodorité sont
(1) Muller, Physiologie, 2e vol., 2e partie , p. 483 et suiv.
(2) Rudolphi , Physiologie, 6 291.
{3) Walther, Physiologie, 2 vol., 6 277, $ 579,
CR de es né né cl mue +
+
RTS LA
( 387 )
des conditions diverses qui ne doivent pas venir nécessai-
rement de l'existence d’une swbstanec odorante : l'élec-
tricité qui se répand dans le vide de nos machines pneu-
matiques n’a-t-elle pas une forte odeur phosphorique ?
L’académie , qui avait demandé d'exposer la théorie de
la formation des odeurs chez les fleurs, voulait surtout
provoquer cette discussion : toutes les odeurs des fleurs
sont-elles dues à des émanations matérielles ? N'y a-t-il pas
des odeurs physiologiques , des odeurs fonctionnelles,
comme le veut M. Decandolle (1)? L’arome est-il partout
saisissable autrement que par l'organe olfactif? — Alors,
on aurait reculé les limites de la science, en établissant où
commence et où finil l'opération glandulaire; on aurait
su classer les fleurs sous le rapport de l'existence et de la
non-existence de glandes visibles, et alors aussi, dans celles
privées de glandes, on aurait recherché par des perquisi-
tions ultérieures d'où venait le parfum. L'académie avait
ainsi en vue de compléter les découvertes de M. Meyen sur
les sécrétions. L'auteur n’a pas saisi celte occasion pour
perfectionner la science.
D'ailleurs, l'académie avait exigé qu'on exposàt la struc-
ture anatomique des organes où se forment les odeurs , ce
qui s'applique non-seulement aux glandes odorantes, mais
aux sépales, aux pétales, aux nectaires, aux étamines et
aux pistils non glanduliféres mais odorans ; elle exigeait
une réponse qui fût au moins à la hauteur du travail de
M. Meyen).
Relativement à la théorie chimique de Ja formation des
odeurs , l’auteur n’expose que celles de Fourcroÿ et de
(1) Decandolle, Physiologie, 2e vol., p.934,
( 388 )
Couerbe; de Fourcroy, qui donne pour composition aux
huiles volatiles l'hydrogène et le carbone, et celui-ci en
proportion plus grande que celle qui se trouve dans l'hydro-
gène percarboné ; de Couerbe, qui regarde l’arome comme
provenant d'un principe acide.
(L'auteur se trompe étrangement, selon nous, en
croyant que la théorie chimique ne soit pas destinée à
éclairer vivement celte partie de la physiologie végétale,
C'est toul le contraire. L'observation de Recluz (1), connue
de l’auteur et citée par lui dans sa seconde partie, qu’on peut
à volonté rendre odorantes ou inodores les fleurs du Caealia
septentrionalis, en inlerceptant ou non les rayons solaires,
prouve déjà que l'émission de l'odeur est un phénomène
chimique en relation avec celui de la respiration végétale.
Pourquoi ne pas discuter ici les systèmes de Hermbstädt (2),
d'Ingenhouss (3), de Sennebier, qui a fait de si jolies ex-
périences sur la conductibilité de l’eau pour l’arome des
fleurs seulement (4); de Sprengel (5), qui prenait l’'hydro-
gène pour base de toutes les odeurs; de Hales, qui dit
avoir fait émettre l'odeur de musc aux feuilles et aux ra-
meaux des arbres fruitiers, et jamais aux fleurs et aux
fruits, en mettant du muse aux racines de ces arbres; de
Raspail, qui pense que toutes les odeurs sont une combi-
naison d’ammoniaque et d’un acide volatil ou d’une huile
volatile, et quelquefois des trois corps à la fois (6), etc. Si
(1) Recluz, Journal de Pharmacie , 1827, p. 216,
(2) Hermbstadt , Experimental Pharmacie, vol. 1 , $ 106, 6 132.
(3) Ingenhouss , Versuche an ang. Ort., vol. 1, ( 191,
(4) Sennebier, Physiologie, tom. V, p. 37.
(5) Sprengel, Ueber den Bau der Pflansen , p. 355.
(6) Raspail, Chimie organique , 1re édition, 1833 , p. 480,
OT TRS NP PTE
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Tag RS PS san bi à
CS
( 389 )
l’auteur n'avait pas envoyé son travail six mois avant le
terme fatal, il aurait pu discuter encore les curieuses ex-
périences cilées dans la nouvelle édition de la Chimie
organique de M. Raspail (1). Il aurait dû parler des sys-
tèmes de MM. Robiquet et Buchner, et surtout des ingé-
nieuses théories de M. Raffinesque, qui a reconnu jusqu'a
130 espèces d'odeurs chez les plantes; il aurait dû surtout
saisir celle occasion pour examiner les belles et intéres-
santes recherches de MM. Schübler et Kühler de Tubingue,
sur la liaison des odeurs avec les couleurs des fleurs, et il
aurait dû tenter au moins la solution de ce singulier pro-
blème , pourquoi parmi les fleurs colorées, les rouges sont
le plus souvent odorantes et les bleues le plus rarement ?
pourquoi les fleurs blanches ont les odeurs les plus agréa-
bles et les violeltes, en général, les plus désagréables?
Tous ces travaux anciens et modernes avaient donné à la
question des odeurs un intérêt bien vif, un charme de
pouveaulé qu'on aime à augmenter encore par des recher-
ches ultérieures, mais tous ces travaux ou sont restés in-
connus à l’auteur, ou sont devenus pour lui lettre morte).
L'académie avait demandé d'établir le mode d'exhala-
tion des odeurs. L'auteur le trouve dans une simple éva-
poration par les pores organiques et inorganiques, qui
se fait à la cuticule intérieure (supérieure) des organes
floraux. Il a couvert de cire celle surface, et l'odeur s’est
afflaiblie; en cirant la cuticule extérieure (inférieure), l'o-
deur est restée la même. La turgescence favorise l’émana-
tion, Il signale quelques fleurs, où l'odeur, lorsqu'elles
sont sèches, diffère de celle qu’elles exhalaient à l'état de
fraicheur (Mélilot, Tilleul, Sureau, etc.).
(1) Raspail, Chimie organique , 2 édit., 1838 , tom. XI, p. 520.
Tow. vr. 27
( 390 )
(Les expériences faites par l’auteur ne sont pas en rap-
port avec les conclusions qu'il en tire. Ses porés organi-
ques ne peuvent être que les stomates; or, qu'il veuille
bien se rappeler que les stomates existent de préférence
sur le derme inférieur ou extérieur des pétales, quand
ceux-ci en sont pourvus (/oya carnosa , etc .) I le dit lui-
même dans la seconde partie. Ces stomales ne serviraïent
donc pas à l’exhalation odorante, mais à l'exhalation
aqueuse. Pour rester fidèle à ses idées sur la nature glan-
duleuse du conenchyme des pétales, il aurait dû conclure
de ses expériences que c’est là l'organe de l'émission.
Je ne suis pas non plus d'accord avec lui sur ce qu'il
dit relativement à la turgescence. À coup sûr, il y aides
exceplions à cette règle, si c'est une règle. Il y a des
plantes qui, fraiches, n’ont pas d’odeur, et qui sèches, en
acquiérent. Le Trigonella fœnum græcum en est un
exemple, je lai observé aussi sur le Zeptotes bicolor,elc.)
Pourquoi la nature a-t-elle donné des odeurs aux fleurs ?
— Peut-être, dit l’auteur, parce qu’elles sont destinées à
devenir ainsi une source de voluplés pour: l'homme —
parce qu’elles lui annoncent ainsi leurs propriétés médi-
cales — parce qu’elles avertissent les animaux et: surtout
les insectes de leur existence — parce qu’elles leur ouvrent
leur sein rempli de nectar. Mais la nature qui a plus d’un
bat, a sans doule créé aussi les odeurs pour les faire servir
directement aux fonctions des organes sexuels. La corolle,
organe odoriférant par excellence , entoure immédiatement
ces organes ; l’auteur croit que le suc préparé par les
pétales, ou la séve générale modifiée par eux, devient la À
nourriture des organes sexuels. Il s'appuie sur l'expérience
connue de Mustel, qui fit mourir ces organes sexuels en
enlevant les pétales.
1
;
À
(En laissant de côlé l'appréciation des causes finales ,M
de. mi 260
EE doit
r 2
\
7, 4
( 391 )
sujet toujours plus ou moins poétique, et qui n'aurait d'u-
tilité réelle pour la science qu’à la condition d’être discuté
après la citation d’un grand nombre d'exemples, nous de-
vons regretler que l’auteur, sur une simple assertion de
Mustel, ait basé toute une théorie de fonctions. J'ai en-
levé bien souvent des corolles sur certaines fleurs, sans
déranger le moins du monde les fonclions reproductives;
toute la famille des Orchidées se prêle à ces mutilalions
sans aucun dommage.)
Fidèle aux idées de Fourcroy, l’auteur voit dans l’'éma-
nation de l'odeur sous forme d'huile essentielle, le rejet
hors de l'appareil floral d'une quantité notable d’hydro-
gène et de carbone, de sorle que le suc nutritif (selon lui)
des organes sexuels serait caraclérisé par un excès d’oxy-
gène: De là viendrait l'oxygène du pollen (Macaire), l'oxy-
gène de la chromule des fleurs (Decandolle) et, dit-il, le
sucre du neclar.
(Quant au nectar, il y a erreur, puisque le sucre est
une substance éminemment hydrocarhonée. Mais, si l’au-
teur admet que les pétales préparent au profit des appa-
reils sexuels une nourriture oxygénée, il n'arrive pas à
cette théorie par voie d’expérience; son premier devoir
était de prouver : 1° que les odeurs sont toutes formées
d'hydrogène et de carbone; 2° que l'oxygène reste en
excés dans la séve des pétales ; 3° que la séve oxygénée
des pétales sert aux élamines et aux pislils. Aucune de
ces trois conditions n’est remplie; c’est donc une hypothèse
« etrrien de plus. Les expériences de Raspail et de Dunal,
. sur la formation du sucre dans les fleurs, par une modi-
ORPI
L
Li
ur y
ficalion de la fécule provoquée par l'acide carbonique,
et sur la formation du nectar, considéré ici comme une
espèce d'urine dont la plante se débarrasse pour éviter
(59% )
dans ces appareils un excès de carbone, ont été infini-
ment plus profitables à la science, parce qu'elles n’assurent
aucun fait au dela de l’expérimentalion. En poursuivant
la théorie de M. Raspail, on pourrait tont aussi bien dire
que les pétales ont de l'odeur, pour débarrasser la fleur
de son excés de carbone, et que ces organes, qui se modi-
fient si souvent en nectaires, opèrent la même fonction
soit en sécrétant des liquides sucrés , soit en émettant des
aromes. La corolle serait alors un appareil analogue aux
reins, et les nectaires des espèces de vessies urinaires.)
Les émanalions odorantes exerceraient, en outre, un
cffet physique sur les organes génilaux, en diminuant la
tension des vapeurs aqueuses si nuisibles au pollen dont
elles provoquent l'explosion , et qu’elles frappent de stéri-
lité. L'auteur, pour élayer cetle opinion, cile une expé-
rience curieuse qui consiste à déposer sur un verre plan,
mouillé par une couche mince d’eau, de pelits morceaux
de camphre ou des gouttelettes d'huile volatile. Un in-
stant après le contact, on voit aulour de ces corps des
espaces parfaitement secs, parce que l'effluve odorante
chasse l'humidité. Les fleurs odorantes sont donc entou-
rées d’une atmosphère d’odeur qui, par sa propre tension,
éloigne la vapeur aqueuse de l'air et protége contre l’hu-
midité les organes de la reproduction.
(J'ai répété celte expérience : un morceau cubique de
camphre de deux millimètres de côté, a desséché en cinq
secondes une aire circulaire de deux centimèlres de dia-
mèlre, mais, j'ai remarqué aussi qu'il faut que le cam-
phre soit bien sec pour opérer cet effet. Cependant , je
n'oserais conclure de ces expériences que les odeurs des
fleurs ont pour but de dessécher l’air dans lequel elles se |
trouvent. Le camphre est un des aromes les plus intenses,
( 393 )
et cependant son eflet n’esl pas si énergique pour opérer
le desséchement qu’on pourrait s’y attendre. Le faible
parfam d'un grand nombre de fleurs opérerait un effet si
petit, qu'il serait nul pour protéger les organes de la fé-
condation. Toutefois cette vue de l’auteur est intéressante ;
elle est, je crois, neuve en physiologie. et elle mériterait
d'être poursuivie avec attention.)
L'auteur trouve, en suivant ses idées sur la protection
qu'offrent les odeurs contre une humidité malfaisante , que
les fleurs où les organes protecteurs sont les plus exposés
aux agens du dehors, sont celles précisément qui jouis-
sent d’une odeur ( Jasmin, OEillet, Eugenie, etc.) ; que
les fleurs deviennent odorantes le malin, le soir, la nuit,
aux heures humides ; que les fleurs naturellement proté-
gées contre les vapeurs , comme les Campanules, la Diqi-
tale ,Y Aconit,les Antirrhinum ,etc., sont peu odorantes ;
les fleurs dormantes, ou celles qui changent leur position
la nuit pour se prémunir contre l'humidité, sont égale-
ment inodores; enfin les fleurs nocturnes sont toutes odo-
riférantes , parce que, la nuit , elles ont besoin des odeurs
pour lutter contre les vapeurs; il cite le VNymphæa comme
une exception aux fleurs qui entrent dans l’Æorloge de
Flore de Linné , fleurs que l’auteur du mémoire dit être
toutes dépourvues de parfum.
(Ces considérations sont fort ingénieuses ; et nous regret-
tons que le reste du mémoire ne porte pas le même cachet
d'originalité et d’aperçus utiles. Si l’auteur entre encore eu
lice, nous lui conseillons d'étendre ces rapprochemens
- curieux , de les prouver par plus de faits, par plus de dé-
tails, car ils le méritent en tout point. La physiologie ne
saurait que gagner à voir s’accumuler les raisons pour éta-
blir ces vues, qui prouveraient davantage en faveur des
( 394 )
causes finales que l’allégation citée par l'auteur quelques
lignes plus haut , que les parfums ont été créés pour nous
plonger dans l’ivresse de la volupté. La poésie orientale
seule adopterait sans réserve une pensée si conforme aux
mœurs de l'Orient. Pourquoi l’auteur n’examine-t-il pas
la thèse de Jean-Jacques : que l’odorat est l'organe sensitif
de l'imagination). (Émile , tom. Ier, p. 367).
Tel est le résumé de la première partie du mémoire.
Dans la seconde, l’auteur se propose d'examiner les
odeurs séparément. À cet effet , il a besoin de les classer.
Il ne cite comme l'ayant précédé dans ces investigations,
que Linné et Fourcroy, mais il est d'avis que puisque l'aca-
démie n’a pas exigé une classification, il doit se mettre
peu en peine d’en faire une parfaite; car, dit-il, la variété
des odeurs est telle que jamais on ne les réduira en classes
précises.
(S'il fallait abandonner les classifications par la raison
qu'on ne peut leur donner la perfection, toutes les mé-
thodes seraient inutiles. Une classification n'est pas par-
faite, soit; mais elle est perfectible : elle subit la condition
de toutes les œuvres humaines. Outre les classifications de
Linné et de Fourcroy, nous aurions voulu voir citer celles
de De Saussure, de M. Desvaux, de M. Mirbel, de M. Decan-
dolle, et surtout celle de M. Rafinesque. Ces classifications
reposant les unes sur l'appréciation de nos sens, les au-
tres sur les propriétés et les fonctions des plantes; celles-ci
sur des caracteres chimiques, celles-là sur l'affectivité
de notre âme, c'était le lieu de discuter la valeur de ces.
considérations ; et puisque l’auteur va quelques pages plus «
loin nous présenter une classification partielle, mais nou=
velle , d’heureux aperçus auraient pu naître de la compa= «
raison de sa méthode avec celles de ses prédécesseurs).
mn
LOC
( 395
À l’anthèse, le parfum commence; il augmente pendant
l'épanouissement et finit après la floraison (nous avons
déja combattu cette dernière assertion , en tant qu’elle
est trop générale). Les fleurs qui, comme celles de l’4s-
perula odorata, sont odoriférantes à la fin de leur vie,
ne le deviennent que par un commencement de décompo-
sition, et non par une propriété vitale. Il y a des fleurs qui,
froïssées, exhalent une autre odeur que lorsqu'on les
flaire entières (Ællium moschatum, Sambucus ebulus,
Lantana violacea , etc.), c'est qu'alors la séve elle-même,
mise à nu par le froissement, est odorante.
(C'est précisément la théorie , appuyée sur des faits et
des expériences, de ces odeurs qui se développent aux dif-
férens âges des fleurs que l'académie aurait désiré voir
exposer. Que se passe-t-il dans cette prétendue décompo-
silion pour que l'odeur se développe ? IL y a des fruits
chez lesquels l'albumine végétale abonde, quand ils sont
veris et sans arome , et chez qui l’albumine disparaît et
l'acide benzoïque se forme, à l’époque de la maturation
quand le parfum se dégage. Ce sont des faits analogues
que Ja compagnie aurait voulu voir bien étudiés chez les
fleurs. Alors seulement la théorie des odeurs sera quelque
peu satisfaisante).
S'il y a des fleurs odorantes le soir, la nuit et le matin,
auteur attribue cet effet à l’action combinée de la lu-
mière et de la chaleur qui dispersent le principe odorant
pendant le jour.
(Il énonce ce fait curieux, en quelques lignes, et dé-
clare que des fleurs qui deviennent odorantes la nuit, le
deviennent aussi le jour, lorsqu'on les met dans un en:
droit frais et obscur, et ce qui fait supposer ici quelque
dapsus calumi, c'est qu'il cite plus loin ses propres ex-
( 396 )
périences pour prouver le contraire. La Physiologie de
M. Decandolle, qui est entre les mains de tout le monde, en
avait beaucoup plus appris à cet égard; elle parle des
mêmes raisons, mais M. Decandolle avait pressenti qu'il y
avait quelque rapport entre les parfums nocturnes et les
couleurs sombres, puisque les fleurs odorantes la nuit
portent le nom de tristes (Hesperis tristis, Gladiolus
tristis, Pelargonium triste, elc.). & Il y a ici quelque
chose de lié à la vie végélale, mais qui nous est mal
connu » disait le célèbre professeur de Genève (PAysiolo-
gie, tom. IL, p. 934). C'est pourquoi l'académie avait dé-
siré qu'on fit des recherches pour éclaircir ces doutes. Des
expériences précises, multipliées, variées, devenaient ici
nécessaires).
Enfin l’auteur arrive à la questions des odeurs intermit-
tentes. Il remarque queles fleurs qui nous offrent ce phéno-
mène ou bien s'ouvrent et se ferment alternativement à des
heures déterminées, ou bien, restant toujours épanouies,
leur parfum seul est intermittent. [l'en fait deux classes.
Dans la première, la questionde l'émission intermittentedes
odeurs revient, selon lui, à rechercher la cause de l’épa-
nouissement et de l'occelusion de la fleur, dans la seconde,
une condition physiologique spéciale préside au phéno-
mène.
Poursuivons son exposé.
La première classe a deux sections,
Dans la première , les fleurs sont fermées le jour, ou-
vertes et odorantes la nuil.
Dans la seconde, les fleurs sont fermées la nuit, ou-
vertes et odorantes le jour.
Parmi les premières, figurent les Mirabilis jalappa ;
M. dichotoma ; M. longiflora ; Datura ceratocaula ,
( 397 )
Nyctantes arbor tristis ; Cereus grandiflorus; C. ser-
pentinus : Mesembryanthemum noctiflorum ; Silene noc-
tiflora ; S. patula ; S. paradoxza; S. V'allesi.
Dans la seconde section, où les fleurs sont fermées la
nuit, ouvertes et odorantes le jour, l’auteur cite les Con-
voloulus arvensis, Cucurbita pepo, les Nymphæa alba
et cœrulea.
(Quoique l’auteur oublie ici les Ænotheres, le Comme-
lina cœlestis , etc., il répèle les observations connues sur
les plantes citées. Il n’a fait de recherches qne sur le Ai-
rabilis jalappa et ses congénères. Sur la première il à,
pendant l'épanouissement de la fleur, introduit un cornet
de papier, de manière à l'empêcher de se refermer le
malin. Alors, le jour suivant, elle était encore odorante,
et aussitôt le cornet enlevé, la fleur s’est soudainement
refermée. Comme il attribue l’émanation odorante à l'é-
panouissement nocturne , il recherche la cause de celui-ci
dans le jeu des nervures de la corolle des Mirabilis ; 11 a
vu, dit-il, la nuit, les nervures de la corolle du Mirabilis
longiflora, aprèsles avoir excilées avecune aiguille, se con-
tracter et se courber en dedans. Une lampe éclairant la
fleur, la contraction n'avait plus lieu. S'il n’y a pas ici
quelque illusion, le fait est des plus précieux pour la
physiologie.
Ces expériences le conduisent à examiner le nouveau
système de M. Dutrochet, qui plaçait d’abord la motilité
des plantes dans ur prétendu système nerveux, pour l’at-
tribuer plus tard à l’endosmose, et qui, aujourd'hui ne
reconnaît à celte aclion que la moilié de son pouvoir,
l'autre moilié élant devenue le partage de l’oxygénation,
Le tissu incurvable est pour lui le pleurenchyme des ana-
tomistes Allemands, le tissu fibreux des Français; l'en-
dosmose rend les cellules extérieures lurgescentes et la
…
( 398 )
fleur s'ouvre; l’oxygénation du pleurenchyme, provenant
de l’accès de l'oxygène dans les trachées et les cellules
du derme supérieur, fait courber en spirale ses fibres,
et la fleur se ferme. La nuit, l'atmosphère plus humide
permel aux cellules de se remplir de liquide intracellu-
laire, et l'épanouissement s'opère ; le jour, la lumière et
la chaleur augmentent la respiration et la transpiralion,
la respiration appelle la séve et la transpiration la fait
perdre. Si l’une de ces deux actions l'emporte sur l’autre,
les cellules se remplissent ou se vident ; la turgescence ou
la flaccidité en sont les résultats; c’est donc d'après la struc-
ture des parties que les fleurs s'ouvriraient ou se ferme-
raient la nuit. Mais puisque la structure est la mêrne dans
une foule de fleurs où ces phénomènes ne se reproduisent
pas, les idées de M. Dutrochet ne sont, aux yeux de l'au-
teur, qu’une simple hypothèse, aussi long-temps qu'on
ne la rend pas plus probable par de nouvelles recherches ;
c'est là ce qu’il se propose.
Les corolles des Mirabilis, du Datura ceratocaula ,
probablement les pétales externes du Mesembryanthe-
mum noctiflorum , les sépales des Cereus grandiflorus et
serpentinus sont, d'après ses recherches, pourvus de slo-
mates à leur derme externe ou inférieur (ces fleurs s’ou-
vrent la nuil); ces organes ne se rencontrent ni chez les
Convolvulus, ni chez les Cucurbita, ni chez les Nymphæa
(ces fleurs s'ouvrent le jour). Les stomates s'ouvrent le jour,
se ferment la nuit; ils servent à l'évaporation, à la transpi-
ralion. Il suit de là que chez les fleurs qui en sont pourvues,
la turgescence du tissu cellulaire ne peut avoir lieu pen-
dant le jour, mais seulement pendant la nuit où elles ne
perdent pas la séve qu’elles reçoivent ; leur épanouissement
est alors le résultat non de la tumescence isolée des cel-
cotées tt. Condo: spi" “hs ts
( 399 )
lules des fibres, mais de celle de toute la corolle. Chez les
fleurs sans stomates, il est clair que le soleil produit l’an-
thèse, puisque la chaleur et la lumière appellent une séve
que l'évaporation ne diminue presque pas.
Dans les Cereus le calice serait doné l’organe actif de la
déhiscence. Dans les Mésembryanthèmées où l'anthèse est
diurne ou nocturne, les pointes du calice (divisions), eou-
pées, les pélales ne se meuvent plus; la fleur reste fermée,
si l'opéralion a été faite lorsqu'elle se trouvait dans cet
état ; elle resle ouverte sous les condilions contraires.
(On ne peut nier que ces réflexions et ces expériences ne
soient très-dignes d’éloge, mais l’auteur devrait prouver,
pour nous convaincre, qu’en effet l’action des stomatcs
perverlie, le sommeil et le réveil des fleurs le seraient
aussi. Il faudrait couvrir d’une mince couche de cire les
fleurs nocturnes non ouvertes, voir si elles s’ouvriraient
la nuit et rechercher si une obscurité factice n'opérerait
pas le même phénomène pendant les heures du jour. Puis-
que l’auteur avait élé assez heureux pour arriver à décou-
vrir un organe qui appartient aux fleurs nocturnes et dont
les diurnes sont privées selon lui, toute l'attention devait se
porter sur cet organe et des expériences directes devenaient
nécessaires. Je dois cependant faire observer que les slo-
males existent chez les fleurs qui sont ouvertes indifférem-
ment le jour ou la nuit. M. Link en a observé chez Îles
Stapelia (1), Rudolphi en a signalé chez les Dictamnus
albus, Passiflora serratiflolia, Epilobium angustifo-
lium (2), et j'ai sous les yeux un Æoya carnosa, où leur
“»,
(1) Link, £lementa philosophie botanicæ , 1re édition , pag. 22,
(2) Rudolphi, Anatomie der Pflanzen.
( 400 }
nombre est assez grand à la surface inférieure (extérieure).
Cette existence infirme, à mes yeux , la valeur du système
de l’auteur. En outre, je n'ai pas trouvé de stomates aux
sépales jaunes du Cereus grandiflorus (1).
Quant à ce que l’auteur dit des Mésembryanthèmes
qui ne mettraient plus leurs fleurs en mouvement après
l’ablation des divisions du calice, je dois déclarer que je
viens de répéter ces expériences sur le Mesembryanthe-
mum striatum etautres, mais je n’ai rien obtenu de sembla-
ble. Les corolles se sont fermées ou ouvertes , le calice ayant
eu ses divisions coupées jusqu'à la base. Si l'ablation se
faisait le matin , la fleur s’ouvrait néanmoins vers one
heures; si elle se faisait le midi, la fleur ne se fermait pas
moins dans l'après-midi. Je n'ai pas remarqué que ces mu-
tilations opérassent le moindre effet ; je restreins toujours
ces objections aux seules espèces que j'aiobservées jusqu'ici.
La seconde classe de l’auteur est celle des fleurs toujours
épanouies, mais à émissions d’odeur intermittentes. Elle
a aussi deux sections : dans l'une les fleurs toujours ou-
verles ne sont odorantes que le jour , dans l’autre cet effet
a lieu la nuit.
L'auteur fait observer que parmi les fleurs que con-
tient la première section, il en est comme le Cestrum diur-
num où l'odeur est seulement plus faible la nuit. Le Coro-
nilla glauca ne seraïil odorant que le jour, et le Cacaliu
septentrionalis perd son parfum si on le couvre d’un pa-
rasol. L'auteur n’a pas eu l’occasion d'observer ces deux
dernières plantes, mais il attribue cet effet à ce que la
(1) Morren, Observations sur l’anatomie et la physiologie de La fleur
du CEREUS GRAXDIFLORUS , pag. 5.
|
|
AP PO PET
( 401 )
sécrélion aromalique est trop faible sans l'influence du
soleil, pour qu’elle devienne sensible. (Il ne manque à
celle explicalion que des preuves.)
La seconde seclion , celle qui traite des fleurs toujours
ouvertes et seulement odorantes la nuit, offre des détails
sur le Pelargonium triste, le Cestrum nocturnum ,
l'Hesperis tristis et le Gladiolus tristis. L'odeur chez le
premier commence vers 5 heures de l'après-midi et aug-
menle vers la nuit, jusqu'à ce que vers 5 heures du matin,
elle diminue, pour s’évanouir à 7. Les pétales odorans ont
leur surface supérieure d’un jaune verdâtre, tachetée de
macules pourpres et obscures. Le soir, celte surface offre
des corpuscules brillans qui n'existent pas le jour : ce sont
des cellules remplies de suc; il y a des stomates. Le limbe
de la corolle du Cestrum nocturnum est aussi d’un vert
jaunâtre , le tube est vert et il offre des stomates; le soir,
les cellules sont turgescentes. Des faits analogues s’obser-
vent chez l'Æesperis et le Gladiolus. L'auteur a fait des
expériences sur les deux premières plantes. Un Pelargo-
nium triste, placé pendant tout un jour dans un endroit
trés- obscur, n'a pas donné d’odeur pendant ce temps,
mais le soir, plus tard qu'à l'ordinaire, l'odeur s’est ex-
halée, mais plus faible. Soupçonnant que l'humidité du
soir pouvait produire un effet, l'auteur tint, pendant le
jour, une plante dans une atmosphère fort humide, mais
aucun parfum ne se répandit. Enfin un Pelargonium sem-
blable , tenu pendant presque tout un jour sous le soleil,
exhala le soir un arome extraordinaire. Un Cestrum noc-
turnum , placé le jour dans l'obscurité et sous l'influence
d'une atmosphère humide, répandit une faible odeur,
mais bien inférieure à celle qui s’en exhale la nuit. L'au-
leur conclut de ces expériences que la lumière du jour
( 408 )
préside à l'élaboration du parfum de la nuit ; la présence
des stomales chez ces fleurs et leurs cellules turgescentes
semblent le prouver. Le jour, les stomates ouverts ne per-
mettraient pas la turgescence qui, ne se faisant que la
nuit, serait nécessaire à la sécrétion des matières odoran-
tes, car les cellules, remplies alors de suc, émettent des
substances aromatiques peu à peu hépitéés le jour.
(Nous félicitons l’auteur de ces recherches, mais n’au-
rait-il pas été nécessaire de prouver, en détruisant l’action
évaporante des stomales, que ces organes opèrent quelque
effet sur la préparation des odeurs? L'absence de la lu-
mière , le premiér jour, ne prouve pas que l'obscurité ar-
tificielle ne puisse produire une émission odorante, car
M. Decandolle a trouvé aussi que ce n’est qu'à la longue
que ses sensilives s'élaient accoutumées à celte influence
hors des heures habituelles.)
Le mémoire dont nous venons de donner un aperçu et
dont nous avons examiné chaque asserlion séparément , en
faisant suivre cet examen de nos observalions et de celles
puisées dans les documens que possède actuellement la
science, ce mémoire nous a paru trop au-dessous des con-
naissances nouvelles que nous devons aux travaux des Mal-
ler, Meyen, Link, Decandolle, Sprengel, Schübler, Ras-
pail, Rafinesque, etc., pour être digne des médailles d’or que
l'académie ne peut décerner qu’à des réponses auxquelles
on a peu de chose à reprocher. La question est vase, elle
est difficile, nous le savons ; mais hâtons-nous de le décla-
rer, si l’auteur avait connu les travaux étrangers , s'il avait
donné des analomies détaillées, précises , telles que nous
pouvons en demander après les beaux mémoires deM. Meÿen,
sans être taxés d'exigence, s'il n'avait avancé de théories
( 403 )
qu'après les avoir basées sur des faits, sur des expérien-
ces, alors il aurait rempli le vœu de l'académie; la phy-
siologie des parfums, celte lacune dans la science, aurait
enfin été connue. Mais, disons-le lui, l’auteur est en bon
chemin , son travail ne demande qu'à être perfectionné , et
nous concluons à ce que l'académie lui décerne la mé-
daille d'argent, en remellant la question au concours de
1840. Nous avons à ce dessein, extrait du mémoire ce
qu'il contient d'intéressant, et par la publicalion de ce
rapport , nous meltons les nouveaux concurrens qui vou-
draient répondre à l'appel, sur la même ligne que l’auteur
de la réponse jugée. La justice l’exigeait. D'un autre côté,
en signalant à l'attention des concurrens les principaux
travaux à consulter, leur tâche est rendue moins difficile,
et les désirs de la compagnie sont mieux connus et plus
précisés.
L'académie propose, pour le concours de 1840, les
questions suivantes :
CLASSE DES LETTRES.
PREMIÈRE QUESTION.
"Quels furent les changemens apportés par le prince Maxi-
milien-Henri de Bavière (en 1684) à l'ancienne constitution
liégeose ; et quels furent les résultats de ces changemens sur l'état
social du pays de Liège, jusqu'à l’époque de sa réunion à la
France ?
L'académie désire que cet exposé soit précédé, par forme
d'introduction, d'un tableau succinct, historique et criti-
( 404 )
que de l’ancien gouvernement liégeois, sans toutefois que
l'auteur soit tenu de remonter au dela du règne d'Albert
de Cuick. j
DEUXIÈME QUESTION.
Quelles ont été, jusqu’à la fin du règne de Charles-Quint,
les relations politiques, commerciales et litléraires des Belges
avec les peuples habitant les bords de la Mer Baltique ?
TROISIÈME QUESTION.
Quel a été l’état de la population, des fabriques, des manu-
factures et du commerce dans les provinces des Pays-Bas, depuis
Albert et Isabelle jusqu'à la Jin du siècle dernier ?
QUATRIÈME QUESTION.
Vers quel temps l’architecture ogivale, appelée improprement
gothique, a-t-elle fait son apparition en Belgique? quel caractère
spécial cette architecture y a-t-elle pris aux différentes époques?
quels sont les artistes les plus célèbres qui l'ont employée, les
monumens les plus remarquables qu'ils ont élevés ?
CINQUIÈME QUESTION.
Les anciens Pays-Bas Autrichiens ont produit des juris-
consulles distingués qui ont publié des traités sur l’ancien
droit belgique, mais qui sont, pour la plupart, peu connus
ou négligés. Ces traités sont non-seulement précieux pour
l'histoire de l’ancienne législation nationale, mais con-
tiennent encore des nolions intéressantes sur notre ancien
droit politique; et, sous ce double rapport, le juriscon-
sulte et le publiciste y trouveront des documens utiles à
l'histoire nalionale.
L'académie demande donc qu'on lui présente une analyse
raisonnée et substantielle, par ordre chronologique et de matières,
PT EE
RTS RS
( 405 )
de ce que ces divers ouvrages renferment de plus remarquable
pour lancien droit civil et politique de la Belgique.
CLASSE DES SCIENCES.
PREMIÈRE QUESTION.
Un mémoire sur lanalyse algébrique, dont le sujet est laissé
au choix des concurrens.
DEUXIÈME QUESTION.
Déterminer par des expériences si les poisons métalliques, tels
que l’arsenic blanc (acide arsénieux), enfouis dans un terrain
cultivé, pénètrent également dans toutes les parties des végétaux
qui y croissent, et entre autres dans les graines des céréales, et
s’il y a, d’après cela, du danger pour la santé publique de ré-
pandre de l’acide arsénieux et d’autres poisons analogues dans
les champs , pour détruire les animaux nuisibles.
TROISIÈME QUESTION.
Rechercher et discuter les moyens de soustraire les travaux
d'exploitation des mines de houille aux chances d’explosion.
Les concurrens rechercheront en outre un moyen sûr
et d’une application facile de pénétrer au loin, de séjour-
ner, de s’éclairer, et d'agir librement dans les galeries
souterraines envahies par un air vicié.
QUATRIÈME QUESTION.
Faire la description des coquilles et des polypiers fossiles des
terrains crétacé et tertiaire de la Belgique, et donner l'indication
précise des localités et des systèmes de roches dans lesquels ils
se trouvent.
La synonymie des espèces déjà connues devra êlre soi-
Tom. vr. 28
( 406 )
gneusement établie ; et la description des nouvelles espèces
accompagnée de figures.
CINQUIÈME QUESTION.
Ezxposer la théorie de la formation des odeurs dans les fleurs.
L'auteur déterminera les organes où se forment les
odeurs des fleurs ; il exposera la structure anatomique et
les fonctions physiologiques de ces organes. Il examinera
le mode d’exhalation et spécialement à quoi on doit attri-
buer que plusieurs fleurs sont odoriférantes à certaines
heures de la journée et inodores pendant d'autres. Les
observations devront, autant que possible, se rapporter à
des plantes de familles différentes. (Le mémoire devra être
accompagué de planches.)
“
SIXIÈME QUESTION.
Donner l’organogénésie des épiphyses dans les mammifères,
les oiseaux et les reptiles ; déterminer l'âge où elles se soudent et
leur structure.
L'auteur prendra , autant que possible, des exemples
dans les différens ordres de ces classes, et accompagnera
le mémoire de planches.
SEPTIÈME QUESTION.
Les Céphalopodes présentent à l'intérieur un système de ca-
nauz qui paraissent ressembler aux vaisseaux lymphatiques.
L’académie désire que l’on détermine de quelle nature sont ces
canaux ; elle demande d’en décrire et d’en fiqurer le système.
L'auteur devra joindre à son travail les pièces anato-
( 407 )
miques nécessaires pour l'intelligence du mémoire et la
vérificalion des observations.
HUITIÈME QUESTION.
Déterminer, par des expériences, les anomalies que peurent
subir les mouvemens du sang dans les vaisseaux capillaires des
animaux vertébrés, ainsi que les transformations des parties
constituantes du sang chez ces animaux. Fndiquer les causes
qui y donnent naissance.
Le prix de chacune de ces questions sera une médaille
d’or de la valeur de six cents francs. Les mémoires doivent
être écrits lisiblement en latin, en français ou en flamand ;
et seront adressés, francs de port, avant le 1° février 1849,
à M. Quetelet, secrétaire perpétuel.
— L'académie propose, dès à présent, pour le concours
de 1841, les questions suivantes :
CLASSE DES LETTRES.
PREMIÈRE QUESTION.
Quel était l’état des écoles et autres établissemens d’instruc-
tion publique en Belgique, depuis Charlemagne jusqu’à la fin
du XVII siècle? Quelles étaient les matières qu’on y ensei-
gnait , les méthodes qu’on y suivait, les livres élémentaires qu’on
y employait, et quels professeurs s’y distinguèrent le plus aux
différentes époques ?
DEUXIÈME QUESTION,
Faire l’histoire de l’état militaire en Belgique, sous les trois
périodes bourguignone, espagnole et autrichienne, jusqu’en
1794, en donnant des détails sur les diverses parties de l’adimi-
( 408 )
nistration de l'armée, en temps de querre et en temps de paix.
L'académie désire que le mémoire soit précédé, par forme
d'introduction, d’un exposé succinct de l’état militaire en
Belgique dans les temps antérieurs , jusqu’à la maison de
Bourgogne.
CLASSE DES SCIENCES.
PREMIÈRE QUESTION.
Faire la description des coquilles et des polypiers fossiles des
terrains ardoisier, anthraxifère et houiller de la Belgique, et
donner l'indication précise des localités et des systèmes de ro-
ches dans lesquels ils se trouvent.
La synonymie des espèces déjà connues devra être so1-
gneusement établie, et la description des nouvelles espé-
ces accompagnée de figures.
DEUXIÈME QUESTION.
Un mémoire sur les vapeurs qu’émettent les métaux , et sur
le rôle que quelques physiciens prêtent à ces vapeurs dans cer-
tains phénomènes météorologiques.
RAPPORTS.
MÉCANIQUE INDUSTRIELLE.
M. Cauchy donne lecture du rapport suivant :
« M. L. Hoffman, ingénieur civil, domicilié à Bruxelles,
rs
PTT TRS
( 409 )
Montagne de la Cour, n° 30, a présenté à l'académie , le
4 janvier dernier, la description de ses calorifères à maxi-
mum d'effet utile, applicables à tous les usages, avec
trois feuilles de dessins.
» L'idée principale de l’inventeur consiste à entourer
d’une enveloppe l'appareil destiné à la combustion, de
maniére à obtenir un conduit annulaire par lequel il fait
passer, de bas en haut, l'air à chauffer ; cette disposition
peut ajouter quelques avantages à tous ceux que doivent
produire les bonnes proportious de toutes les parties du
calorifère ; mais ces avantages sont-ils aussi extraordi-
naires que le pense l’auteur du mémoire? En prenant la
moyenne des résultats obtenus dans les deux premières
expériences qu'il cite, on voit qu'il a élevé 294 m. c. d’air
de 4 c. avec 11K1-,75 de bois. Mais le poêle de Desarnod,
construit d'apres le même principe, a élevé 100 m. c.
d'air de 1°,872 avec 2 kilog. de bois, d'où il suit qu’il -
échaufferait de 4° les 294 m. c. d’air avec 12K1-50 de bois
tout au plus, puisque les surfaces par lesquelles se perd
la chaleur augmentent bien moins rapidement que les
volumes. Il faudrait donc répondre affirmativement à la
huitième (qui est aussi la plus importante) des neuf ques-
tions proposées par l’auteur : « Ÿ a-1-il quelque autre
invention connue jusqu’à ce jour, qui soit en état de con-
courir avec celle que je vous présente, en donnant des
résultats semblables , ou au moins un peu rapprochés? »
» Mais, outre cette erreur capitale de fait, je crois en voir
d'aussi graves dans les calculs et dans les raisonnemens de
l'auteur. Je ne puis pas les signaler, parce que les ta-
bleaux des expériences à la houille contiennent aussi
des données évidemment inexactes. Je ne puis point ad-
mettre non plus , parce qu'elle est contraire à toutes les
( 410 ) :
iées reçues, la conséquence qu’il Lire, pages #4 et 15
(4°), et bien plus explicitement encore page 16, savoir :
que le tirage n’emporte aucune chaleur. Gomment d’ail-
leurs concilier celte asserlion avec celle qu’on trouve,
page 2 (9), savoir : que le combustible donne, dans les
appareils de l'auteur, 79 p. °Z, pour le chauffage de l'ap-
partement , el 21 p. °?, pour le tirage.
» Je pense donc qu’il conviendrait, avant de statuer sur
ia demande de M. Hoffman, de linviter à s'expliquer sur
les points que je viens d'indiquer. » à
M. Dandelin, second commissaire , fait remarquer que,
pour établir des comparaisons en semblables matières avec
quelqu’espoir d'en tirer des conclusions justes , il faudrait
opérer dans des localités au moins semblables, et sur des
combustibles parfaitement identiques, enfin dans des cir-
constances que ne présente pas la notice.
M. De Hemptinne présente de son côlé les détails sui-
vans sur les appareils proposés par l’auteur :
« Deux conditions principales sont à considérer dans les
calorifères : la première , que le foyer et les parties qui en
dépendent soient combinés de manière que le bois et la
houille brâlent avec la moindre perte de leur combus-
tible volatil ; la seconde , que le calorique résultant de la
combustion soit utilisé de la manière la plus avantageuse
et avec le moins de déperdition.
» L'auteur n’a proposé aucune amélioration pour la pre-
mière de ces deux conditions; et pour la seconde, il pa-
rait n'avoir cherché qu'a diminuer la perte de calorique
que le courant d'air intérieur entraîne dans la chemi-
née.
» Ses appareils fig. 1, 2, 3 et 5 sont des espéceside poêles
cylindriques entourés d’une enveloppe de tôle, laissant |
ri ni Lis
(1)
assez d'espace entre elle et le foyer pour x établir un cou-
rant d’air.
» D'après cette disposition , le calorique n'est pas utilisé
d'une manière avantageuse, parce que la chaleur est dirigée
vers le plafond, tandis que pour bien chauffer un apparte-
ment, on doit chercher à la diriger vers le sol. Dans une
pièce chauffée par l'appareil proposé par l’auteur, on pour-
rait étouffer de chaud tout en ayant les pieds glacés.
» L'appareil fig. 4 est destiné à chauffer plusieurs cham-
bres par un courant d'air chaud, Il consiste en un foyer
avec ses tuyaux de fumée, renfermé dans une petite cham-
bre en maçonnerie, destinée à échauffer l'air qui doit se
rendre aux appartemens supérieurs.
» Cet appareil est bon ; mais il ne me paraît pas présen-
ter des avantages sur ce qui est connu.
» L'appareil de la fg. 6 est une espèce de calorifére inter-
mittent, destiné d’abord à la préparation des alimens, et à
chauffer ensuite les apparlemens supérieurs. Je ne discu-
terai pas les avantages et les inconvéniens de ce poêle,
parce qu'il me paraît trop grand et trop compliqué pour
pouvoir être adopté dans nos cuisines.
» Je ne me refuserai pas aux expériences qui ont été pro-
posées ; mais il me paraît résuller de nos divers rapports
qu’elles’ ve seraient pas avantageuses à l’auteur de ce
mémoire. »
Après avoir entendu ses commissaires , l'académie décide
que des remercimens seront adressés à M. Hoffman, pour
sa communication ; mais qu’elle attendra des explications
ultérieures, avant de donner son approbation au systéme
proposé, comme le désire l'auteur.
( 412 )
STATISTIQUE.
MM. De Stassart et De Reiïffenberg font leur rapport sur
la note de M. Heuschling, concernant la classification des
documens statistiques, présentée à la séance du 4 avril
dernier. Il à paru à MM. les commissaires que la division
proposée par M. Heuschling, laquelle pourrait néanmoins
s'améliorer encore dans les subdivisions, semble offrir
sous le rapport de la méthode quelques avantages sur le
plan suivi par le gouvernement pour la publication des
documens officiels de statistique, mais ils ne les regar-
dent pas comme assez importans pour que le plan adopté
doive être modifié par la suite. Des remercimens seront
adressés à l’auteur pour sa communication.
MÉCANIQUE ANALYTIQUE.
L'académie, après avoir entendu ses commissaires
(MM. Timmermans et Garnier), ordonne l'impression
dans ses mémoires, du travail de M. Pagani sur quelques
transformations générales de l’équation fondamen-
tale de la mécanique.
LECTURES ET COMMUNICATIONS.
PHYSIQUE MATHÉMATIQUE.
Quelques considérations mathématiques sur les vents
alizés, par M. Pagani, membre de l'académie.
Supposons qu'une masse d'air, prise à la surface de la
P q |
Le es à. :
( 413 )
terre dans les régions boréales , soit transportée instanta-
nément sous une latitude plus rapprochée de l'équateur ;
il est certain que cette masse paraîtra avoir un mouve-
ment d’orient en occident, et qu’elle produira, par con-
séquent , un vent d'est. Mais si le transport avait lieu dans
le vide, et abstraction faite du frottement , la masse d’air,
parvenue sous une latitude moins boréale avec une cer-
taine vitesse, le mouvement apparent se composerait de
deux mouvemens, et le résultat serait un vent de nord-est.
C'est ainsi que l’on explique d’une manière satisfaisante
la cause des vents alizés , en l’attribuant au mouvement
de rotation de la terre d’occident en orient, combiné avec
le mouvement de translation de l’air des régions polaires
vers les régions équatoriales.
En soumettant ces données au calcul on trouve, dans
la première hypothèse, que la vitesse du mouvement ap-
parent de l'air, d’orient en occident , est exprimée par la
formule
4 :
D sit, — sin. (ar .
E 2
dans laquelle on désigne par :
r le rayon de la terre supposée sphérique;
À la latitude du point de départ;
& la différence en lalitude du point de départ et du
point d'arrivée;
T la durée de la révolution diurne;
% le rapport de la circonférence au diamètre.
Si l'angle + est très-petit, on pourra remplacer dans la
formüle précédente sin. + par = ; et si l’on nomme Ë la
distance qui sépare les parallèles terrestres , dont les lati-
( 414 )
tudes sont À et À +6, on aura simplement
QDTS - ( 2)
avants: :: (À — = .
T V7
ce qui fait voir que le mouvement de l’air, dans ce câs,
a la même vitesse que le point du globe situé sur le rayon
mené du centre de la terre au parallèle moyen, et qui
serait éloigné du centre de la quantité 2.
En attribuant à À la valeur 7, la formule (1) donne
krr .
—— sin. — COS. =,
TT
wie
&
2
et en comparant ce résultat à la formule (1), on en déduit
que :
Le mouvement apparent d’orient en occident d’une
masse d'air prise au pôle boréal, et transportée tout à coup
sous la latitude 17 —w, est au mouvement apparent de
la masse d’air qui passerait de la latitude À à la latitude
À— w, comme
Ce rapport est sensiblement égal à = lorsque l'angle w
est très-pelit.
Si l’on applique la formule (1) à lexemple suivant:
À— 45°, © — 26°; on trouve que la vitesse apparente de
l'air serait de 110 mètres par seconde; ce qui produirait
un vent effroyable.
Considérons maintenant le mouvement d’un point ma-
tériel obligé de glisser sans frottement sur un méridien
terrestre en allant du nord aw sud.
Le à
( 415 )
Après le temps £ écoulé depuis l’origine du mouve-
ment, soit » la vilesse constante du mouvement du point,
et À la latitude du lieu où il se trouve. Dans l'instant sui-
ant , l’espace parcouru par le point sera vdt; la vitesse en
longitude, qui était 7 cos. À au bout du temps #, sera,
au bout du temps £+ dé, cas cos. (}— d)).Donc le point
aura reçu pendant l'instant dt, perpendiculairement
à son mouvement, un accroissement de vitesse égal à
sin. À. dA; et en vertu du principe de l'égalité entre
l'action et la réaction, le point matériel réagira contre
l'obstacle qui l’oblige à rester sur le même méridien, avec
une force égale à
d7rr . À
1 SIR4 À.
T dt
: dÀ
Mais on a v—r—:
dt
Partant
97 |
—= T Sin. À;
P gt ;
équation dans laquelle 4 désigne le coefficient de la gra-
vité, et p le rapport de la pression latérale au poids du
corps qui glisse sur le méridien.
En faisant dans cette formule v—33 mètres, et —50°,
on trouve à peu prés
p — 0,000188 ;
ce qui fait voir que, pour une vitesse de 33 mètres par
seconde sous la latitude de 50°, la pression latérale est
une trés-petile fraction du poids du corps qui glisse sur le
m en lerrestre.
Oceupons-nous maivtenant d'une question plus géné-
( 416 )
rale, et cherchons quel doit être l'état dynamique d'un
corps qui serait obligé de glisser sur la surface de la terre
supposée sphérique, abstraction faite du frottement et de
la résistance de l’air. En nommant 8 le complément de la
latitude boréale du mobile, au bout du temps £, d sa lon-
gitude orientale, à partir d’un méridien fixe dans l’espace;
r le rayon de la terre et p le poids de l’unité de masse du
corps, on aura
dé”
d’0 À du”
AT sin. 4 cos. 4 FT —= 0,
sin”. 6dL
d LOUE
La première de ces équations exprime que la pression
exercée par le corps en mouvement est égale à la gravité
diminuée de la force centrifuge du mobile; ce qui est
connu depuis long-temps.
Les deux autres équations serviront à la détermination
du mouvement après qu'on les aura intégrées. La dernière
s'intègre immédiatement et devient
: (7
sin?. 0— —= c.
d
En substituant cette valeur dans la seconde , et en in-
tégrant on à
de 1 c°
— = —-—: ü
dt’ sin”. 4 dt
Pour déterminer les constantes €, ce’, soit à l'origine du
LA
mouvement ,
dp 27 d 27h
2 DT ANT ONE D'ART de
on aura
c—='—\sin".
Li (F + sin”. a)
Partant
9
RC . . sn. dy = = sin°. ad
27 sin. 4. d3
D. LE
T V( + sin”. &) sin”. 0 — siné. &
En substituant cette valeur de dt dans l'équation pré-
cédente on trouve
sin”. &. d
M RON AO di — Re esse 5
@) sin. 4 V@ + sin°, &) sin°. 4— sin£. &
Les expressions différentielles (3) et (4) s’intègreront
sans peine, et l’on pourra exprimer les arcs 0 et en fonc-
tion de £.
Mais sans nous arrêter à ces calculs qui n’ont d’autres
difficulté que leur longueur, nous allons examiner les va-
: cd D la à
leurs des vitesses angulaires —, Es que nous fournis-
sent les équations (2)et (3). On a d’abord
dy 27 sin’. «
# (5). . . . . . TT = Here 5 3 ’
dt FTsin”. à
#1 d6 2r sin”, æ
6) . . . —— — Be sin”. a (1 — ):
(9) dt T Ds sin’. 5
(418)
Si l'on substilue ces valeurs dans la formule
qui exprime le carré de la vitesse du mobile à un instant
quelconque, on a
4z°r°
T°
(k° + sin”. a);
ES
d'où l’on voit que la vitesse esl constante. On voit en
outre que les deux composantes de la vilesse sont varia-
bles et que l’on a
dé 27
dd
depuis ÿ — à jusqu’à 0—7T— 2, résultat assez remarquable.
Enfin, si l’on détermine les longitudes © à partir d’un
méridien terrestre , et d’orient en occident, on fera
+ do 2x pe)
ED sf octians c+ El 7 sin”. 8
Les formules (6) et (7) peuvent servir à la détermina-
tion de la vitesse apparente d’une masse d'air qui aurait
. R. 27Trk
reçu une vitesse iniliale —, du nord vers le sud, sous ,
la latitude boréale 2? — », et qui glisserait à la surface de
2 ? q 8
la terre, sans frottement ni résistance aucune. Parvenue
à l'équateur, cette masse aurait dans le sens du méridien,
|
( 419 )
la vitesse
27r 4 PE TOR TUE
TT V/Æk° + sin’. & Cos?. «,
et dans le sens de l’équateur même, la vitesse apparente
En composant ces deux vitesses, on aura pour le carré
de la vitesse résultante «,
kr°r° L |
U° — T- k° + COS . & 2
En comparant cette formule à la valeur de v° donnée
plus haut, on remarque une analogie frappante entre ces
deux valeurs.
Notice sur la population de la terre et sur la masse
de numéraire, par J. G. Garnier, membre de l’aca-
démie.
Suivant Malte-Brun la population est . . 650,000,000 (1e).
D’après l'American Missionary Papers,
Dlleestn ln 0. 0! |, .1/1828,445,000 : (2).
ie en 6 tt
D'après un autre tableau, on compte :
En Europe . . . .…. + + « + 227,000,000
En Amérique. . . . : . . 39:000,000
PAR 2. 2.10. 600 000,000
En Afrique, . : :.,/.:0....60,000,000 ./ :&)
En Océanique, . . . . . . . 21,000,000
737,000,000 |
( 420 )
D'après M. Mac Carthy, il y a :
En Europe . . . . . . . . 220,000,000
En Asie}, 7, 40.0. *."253,000,000
En Afrique . . . . . . . . 81,000,000
En Amérique . . . . . . . 839,000,000 (4).
En Australie. . . . . . . . 8,000,000
En Polynésie. . , . . . . . 1,180,000
596,180,000
D’après Walkenaer et Eyriès :
En Europe . . . . . . . . 190,000,000
En Asie . , . . . . . . . 890,000,000
En Afrique . . . . . . . . ‘70,000,000
En Amérique . . . , . . . 40,000,000 ? (6°).
En Océanique . . . . . . . 20,000,000
710,000,000
Les divisions les plus essentielles à établir dans la popu-
lation du globe, sont celles qui portent non'sur les affinités
politiques, mais sur les aflinités religieuses. Pour l'intel-
ligence des tableaux suivans , nous poserons quelques dé-
finitions.
Le bouddhisme, religion si peu connue jusqu'ici, si
importante par ses singuliers rapports avec le christia-
nisme qu’elle a précédé de 800 ans, règne dans des pays
sur lesquels la géographie ne possède pas d'informations
suffisantes. On croit que c’est le bramisme débarrassé de
ses erreurs les plus grossières. Nous pensons que c’est le
système braminique, réformé par Budda, et que l'on
nomme encore buddisme.
Le fétichisme adore toute sorte d'objets animés ou
inanimés.
Le bramisme, où bramanisme , ou brahaminisme a
pour objet de son culte un grand nombre d'idoles repré-
« Us At | REVERS
M on à énn.
( 421 )
sentant des formes humaines ou animales sous lesquelles
l'être suprême est censé l'être déguisé.
Le {amisme adore son chef comme image de la divinité.
D'après M. Hassel :
Bouddhisme . + 315,977,000
Christianisme avec toutes ses bran-
chés:, 4. HE ler lu: 252,000,000
Mahiomeétisome , : +. : :; : ; 120,105,000
Brahmanisme , , , - + 111,353,000 } (6o).
eme ef DIE) AU 3,930,000
Les autres religions ensemble. . 134,490,000
937,855,000
D’après M. Balbi :
Bouddhisme. , 170,000,000
Église catholique . . 139,000,000
Églisegrecque . . , . , . . 62,000,000
Églises protestantes , . . , . 59,000,000
Mahométisme + + . 96,000,000
FAR + (7e).
AO NA LA Ir e 60,000,000
Judaïsme . , , + + + + 4,000,000
Magisme , Fétichisme, etc. + + 147,000,000
737,000,000
Et d'après une autre source :
Christianisme - 235,000,000
Judaïsme . re + 5,000,000
Hahométisme - 1, . 1,11, ! 120,000,000
ARDNEM ENS) NT SEEN 60,000,000
Lamisme . . . . . . . . . 80,000,000 } (&).
Bouddhisisme . . , - 100,000,000
Fétichisme et autres croyances. . 100,000,000
700,000,000
La population trouvée par Malte-Brun, se compose ainsi
Tom. vi. 29
(42)
qu'il suit :
‘en Europe. . . 88,000,006
hors de l’Europe. 28,000,000
L'église grecque . . . . . . ‘70,000,000
Les églises protestantes . . . . 42,000,000
Le judaïéme ! 4 1%, 4 1. "5:000,000
Le mahométisme , . . , . . 110,000,000
Le brahminisme, ... . . . . 60,000,000
Le schamanisme ou la religion du Ù
Dalai-Lama . . . . . . . 50,000,000
Le buddhisme y compris la religion
defFo;gelc. :. ,, ,.,.11410,11../100;000:000
Le fétichisme et diverses autres
GrOVANCES 4.10. up er 0 DD DOUDOU
Le catholicisme {
653,000,000
Chiffre que l’auteur a réduit à 650 millions. |
Dans le bulletin de la séance du 6 avril 1839, on trouve
le tableau suivant sur Ja classification des races humaines
par M. J. J. D'Omalius-D'Halloy D
Race blanche . , . . . . . 442,000,000
Race/jaunés. : 4 15: ‘4: 220,000/000
Race rouge . . . . . . . . b5,000,000
Race Done A. de Den 07 O0D OUD
Race noire . . , . . . . . 43,000,000 } (8).
Hybrides, tels que métis, mulâtres,
zamboses , . 4, 2 je5.1/:,1.110/000,000
737,000,000
La moyenne des résullats énoncés, est
104 20... + (g)— . . . . 737,053,333
qui diffère peu des résultats (3°), (5°), (7°) et (9e).
D'après les recherches auxquelles se sont livrés MM. le
baron De Humboldt et Ward , la masse du numéraire exis-
MAVILLE 79
( 433 )
tant en Europe, en Asie et en Amérique, aurait été, à la
fin de 1809, déduction d'un quatre cent vingtième pour
perte et usure, de 11 milliards, 643 millions, 269 mille
500 francs. A la fin de 1829, la diminution aurait été de
1 milliard, 663 millions, 36,000 francs. Le numéraire de
l'Afrique n’est pas évalué. En n’admellant que celte masse
de numéraire et la divisant par la population moyenne, on
trouve
9,980,233,500
-— 13fr,54.
737,053,333
On peut conjecturer qu’en tenant compte de la masse in-
connue de numéraire en Afrique, on aurait pour limite
supérieure 15 francs, ou, au plus, 16 francs par individu.
PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE.
Observations sur la circulation dans les poils corollins
du maricaA cæruLEA (Ker) et sur l'histologie de cette
fleur, par M. Ch. Morren , membre de l'académie, etc.
La beauté de la fleur de cette Iridée brésilienne, la ri-
chesse de ses couleurs et surtout le ton suave de son bleu cé-
leste, ses taches variées, la forme remarquable des lamelles
de son style et de son stigmate auraient été déjà des motifs
suflisans pour atlirer l'attention du physiologiste, el l’enga-
ger à étudier la structure interne de celle superbe produc-
tion du règne végétal, si cette même fleur ne possédait pas
dans la partie évasée et en forme de coupe de son périanthe,
un grand nombre de ces poils transparens qui peuvent, sans
( 424 )
doute, comme leurs analogues des Commélinées, présenter -
le singulier phénomène de la circulation intracellulaire. Ce
fut pour moi un vrai plaisir d'examiner l’histologie de cette
fleur et surtout la circulation qui se montre, en effet, dans
ses poils , avec une netteté qui a bien son mérite dans ces
observations difficiles et pourtant si importantes pour les
progrès ultérieurs de la physiologie végétale en particu-
lier et de la science de la vie en général. La circulation du
Marica cœrulea peut être placée parmi les phénomènes
de ce genre les plus faciles à vérifier dans tous leurs
détails. Dans l’état actuel de la science , il est bon de con-
stater quelques faits bien précisés, d’en prendre acte et de
les faire servir à étayer une théorie de la circulation végé-
tale, qui puisse enfin mettre d'accord les physiologistes.
Avant de parler en détail de cette circulation, je crois
utile de faire connaître mes observations sur quelques
autres conditions où se trouvent les tissus chez cette char-
manle fleur.
Quoique son odeur soit presque nulle, les parties de son
périanthe présentent sur leur derme ces cônes que l’on a
considérés comme des papilles et qui, comme l’a fort bien
démontré M. Link (1), sont la cause du velouté des organes
floraux. Les sépales du Marica sont d’un bleu céleste mat
très-remarquable, et ce sont, en effet, les cellules coniques
qui, par leurs petites aspérités, ôtent au derme l'éclat et le
brillant qu’on lui voit dans d’autres fleurs (renoncules ).
Le tissu formé par ces cônes prend dans la nomenclature
histologique que j'ai adoptée le nom de conenchyme,
exprimant par ce seul mot sa forme si bien précisée. Les
1) Link, Elementa philusophiæ botanicæ, tom. IE, p. 26.
? P ? ) P
( 425 )
cellules de ce conenchyme sont ovoïdes , un peu sinueuses,
rélevées au milieu en cône obtus, formées par une mem-
brane très-fine, très-transparente , sans tissu ultérieur visi-
ble, et remplies d’un liquide non globulifère d’un bleu
très-tendre et uniformément répandu dans la cavité inté-
rieure. À la base de chaque cellule conique est un nucléus
ou cytoblaste fort simple, globuleux, très-régulier, auquel
on ne voit aboutir aucun courant intracellulaire. Je donne
ces détails d'anatomie (fig. 10) dans le but de faire res-
sorlir les différences très-prononcées d'organisation entre
les élémens de ce conenchyme et les poils à circula-
tion de l’évasement du périanthe. M. Treviranus (1) con-
sidère , en effet, les papilles du derme des fleurs comme
le premier état des poils corollins, de sorte que ceux-ci ne
sont que de simples allongemens de celles-là. Cette opinion
est trés-conforme aux faits dans une foule de cas , mais elle
ne peut pas se vérifier dans toutes les fleurs, le Marica
cærulea nous le prouvera à la dernière évidence.
Le derme inférieur des sépales est aussi formé par du
conenchyme à cellules dont la base est sinueuse, mais le
cône est beaucoup plus bas : c’est un simple renflement au
milieu de la cellnle. Ces cellules possèdent aussi le suc
bleu non granulifère du derme supérieur, mais elles ont de
plus des grains de chlorophylle très-prononcés, jaunûtres,
arrondis, qui, pour la plupart, se disposent ou en couronne,
ou en amas arrondis à la base de la cellule (v. fig. 14).
Quelques globules sont épars. Le nucléus sert ici de
point central attractif pour ces corpuscules globuleux, et
lorsque ceux-ci étaient libres, je ne leur ai reconnu aucun
a ——— …" —"— _——_——————…"—" …"”" _—_ ——————— —…—…— …— — … —. ————
1) Treviranus, Physiologie, tom, ILE, p. 247,6 466,
, CM gve;, »P ;
( 426 )
mouvement. Il y a évidemment un antagonisme de forma-
tion entre le suc bleu et ces granules chlorophyllaires,
car ceux-ci diminuent à mesure qu’on examine les cellules
placées plus prés du bout des sépales, et augmentent en
nombre vers la base de ces organes, au point que la partie
verle de l'évasement du périanthe ne contient plus de suc
bleu, mais uniquement des globules d’un jaune verdâtre. Le
liquide pur, sans mélange de corps solide, est l’attribut du
pôle aérien du pétale; les globules solides, jaunes ou verts,
esl celui du pôle terrestre de l'organe, du pôle qui tient
du calice, appareil plus foliaire que floral; plus nutritif
que fécondant , plus conservateur que reproducteur.
Sur ce même derme inférieur il y a des stomates (fig. 14).
Le Marica cærulea est donc une espèce de plus à ajouter
aux fleurs où ces organes respiraleurs se trouvent sur le
périanthe corollin. Signaler cette existence, c’est, je pense,
fournir un élément de plus à la discussion actuellement
pendante au sein de notre Académie belge, sur la question
de savoir si réellement les stomates sont les organes qui
ouvrent où qui ferment les corolles à épanouissement
nocturne ou diurne. La fleur du Marica cϾrulea s'ouvre
le matin à six heures, et se ferme le soir pour mourir, mais
je doute beaucoup que ces bouches respiratrices soient
pour quelque chose dans ce mouvement.
Le tissu du diachyme des sépales est formé de cellules
incolores et où il y a beaucoup d'air. Une bulle d'air se
trouve même sous chaqué cellule du derme, de manière à
élever davantage le cône. Le compressorium, en chassant
cet air, fait voir parfaitement comment ce fluide exhausse
les cellules.
Les pétales dont la base fait partie de l'évasement poilu
du périanthe et dont lesommet se recourbe au dehors, offrent
( 427 )
dans cette dernière partie un derme aussi sinueux, et où les
cônes s’observent aussi, quoiqu'ils soient trés-surbaissés
(fig. 9). Sur une cellule, j'ai vu deux cônes; ce fait est rare.
Les cellules sont remplies d'un suc incolore, bleu, rouge
ou brun, selon la partie ainsi colorée du péiale où on les
prend , et dans leur intérieur on voit quelques globules
solides, mais que je n’ai vus qu’en repos, sans mouvement
giraloire. Vers la portion du pétale où l’évasement pilifére
commence , on voit des poils naîlre du conenchyme, mais
leur base reste distincte, et ils ne paraissent pas être des
métamorphoses directes des cônes. Cependant, entre les
poils, des cônes s’allongent beaucoup et pourraient être
considérés comme des poils, s'ils n’offraient pas pour base
Ja partie élargie de la cellule ; en un mot le poil est con-
traclé à sa base (fig. 1, 2, 3,4, 5) et la cellule du conen-
chyme est dilatée à la sienne (fig. 10).
Le périanthe du Marica cærulea forme au milieu de la
fleur une espèce de vase à taches brunes sur un fond jaune;
ces taches sont des raies placées circulairement, et qui se
trouvent sur les pétales comme sur les sépales. Le tissu qui
compose ces parlies si diversement colorées est un pris-
menchyme dont les cellules iacolores par elles-mêmes
renferment un liquide ou incolore, ou rouge, ou bleu, dont
la limpidité exclut tout globule (fig 11); mais, quelle que
soit la couleur du fluide, il y a au dedans des cellules des
globules chlorophyllaires jaunes très-nombreux et atla-
chés aux parois, sans fécule. Cette chlorophylle, je lai
dessinée fig. 12 et 13, pour faire voir ses formes diverses,
car elle est loin d'avoir la régularité qu'on lui connaît
dans une foule de plantes; généralement arrondie, elle
offre des protubérances et des portioncules superposées ,
comme si c'était de la fécule, mais l'iode ne la colore pas
en bleu ou en violet.
( 428 )
Enfio, j'ai examiné le derme des laciniures du stigmate,
parties pétaloïdes, et j'y ai reconnu un colpenchyme très-
élégant. Les cellules sinueuses, remplies d’un liquide bleu,
sans mélange de globulines ni de nucléus, présentent ce
caractère que j'ai trouvé déjà un si grand nombre de fois,
et sur lequel les auteurs disent fort peu de chose, si tant
est même qu'ils en parlent. Je veux parler de ces petites
linéoles noires, transversales, très-serrées, parallèles,
quoique sinueuses, qu’offrent un si grand nombre de cel-
lules de pétales ou de parties corollines; ces linéoles ne
sont que des plis de la membrane des cellules, et disparais-
sent par la simple extension qu'amène la compression.
L'eau suffit même souvent pour les faire disparaître, en
gonflant l’utricule végétale. Ces plis amènent ainsi la dila-
tabilité des cellules, propriété nécessaire à la turgescence.
Il y a peu de fleurs ou ces plis peuvent mieux s’observer
que dans le Marica cœrulea, et j'ai dessiné cet état fig. 8.
Comme je l'ai dit plus haut, un des points qui, dans
l'étude de cette fleur, m'a beaucoup intéressé, c’est la cir-
culation intracellulaire des poils qui garnissent l’évase-
ment central du périgone du Marica. Les récentes com-
munications que m'avait faites M. Schultz, pendant son
passage à Liége, et les préparations des appareils laticifères
et des poils à cyclose, qu'avait eu la bonté de m'envoyer
ce célèbre professeur, fixaient encore toute mon attention,
lorsque la circulation du Marica s'offrit à ma vue; de
sorle que je restai cloué à mon microscope pendant tout
un jour, pour suivre ce phénomène dans ses diverses phases.
Le haut intérêt que j'avais vu prendre à l'étude de la cir-
culation du liquide vital, en Angleterre, par MM. Lindley,
Solly, Don et Taylor, excitait le mien et me faisait persé-
vérer dans des observations qui, je l'avoue, sont extrême-
-
( 429 )
ment fatigantes par la nécessité où l’on est de regarder
fixement, pendant plusieurs heures de suite, une image
microscopique. Mes recherches m'ont conduit à la con-
naissance de plusieurs faits que je crois curieux dans l’état
actuel de la théorie de la circulation chez les plantes.
Pour observer le mouvement du liquide vital, je coupai
horizontalement le derme avec un scalpel très-acéré, je
mettais la partie enlevée sur du verre, et après avoir placé
dessus une lame trés-fine de la même matière, j'intro-
duisais de l’eau entre les deux plaques de verre, de sorte
que les poils, quoique ramenés à la position horizontale,
n'étaient nullement comprimés; leur grandeur (un milli-
mètre), leur transparence, la simplicité de leur enveloppe,
la forme, le volume et la mutabilité des appareils circula-
toires de leur intérieur, donnaient aux observations une
justesse qu'on aime bien à rencontrer dans un sujet si
délicat et si important à la fois.
Rappelons-nous en peu de mots où en est la question
actuelle de la circulation chez les plantes.
Lorsque M. Robert Brown découvrit le mouvement du
suc dans les poils moniliformes du Tradescantia virgqi-
nica, il crut que les cellules étaient pleines d’air (1). Les
nombreuses recherches de M. Meyen sur le mouvement
du même suc vilal dans les poils de l'Zydrocharis mor-
sus ranæ (2), auraient déja pu prouver qu'il y avait là
quelque erreur. En 1832, M. J. Holland, dans une lettre
à M. Aïkin, découvrit la circulation dans les poils du
(1) Robert Brown, On the sexual organs and impregnation in Orchi-
deæ and Asclepiadeæ , 1831.
(2) Meven, Nova acta naturæ curiosorum , tom. XHI.
( 430 )
pétiole du Senecio vulgaris (1). Il reconnut le fluide in-
térieur et s’imaginait que les globules circulaient le long
d’un système de fibres intérieures attachées aux bouts et
aux côlés de chaque cellule; il reconnut des courans trans-
versaux. En 1833, feu M. Henri Slack étudia de nouveau
la circulation dans le Tradescantia et dans les Aydrocha-
ris et Penstemon (2). Il y revint encore dans une lettre
datée d’'Epsom de la même année, en signalant le mouve-
ment dans l'Ortie, dans les poils du calice du Mawran-
dia, dans les poils des pétales des Yiolettes, des Tulipes ;
il pense même que le phénomène existe dans tous les poils
transparens (3). Mais ce qui est peu connu, c'est que
dans ce dernier travail il déclare que d’abord, pour lui, la
circulation provenait de l’action de l'eau sur les prépa-
ralions microscopiques, de l’exosmose et de l'éendosmose,
parce qu’on observe toujours les poils et les cellules où la
circulation existe, dans de l’eau, mais que, plus tard,
observant ce phénomène dans des poils plongés dans de
l'huile, du mucilage, des solutions salines et dans l'air, il
vit qu'il continuait toujours à se montrer, et qu'aucune
cause physique ou chimique ne pouvait l'expliquer. Pour
lui, la circulation avait lieu dans l’espace que laissaient .
h..
(1) James Holland, Henri Slack et Cornelius Varley. Communications
relatives to the microscope. Trans. for the encouragement of arts,
manufactures and commerce, vol. XLIX, part. Il, p.5
(2) Edmund Turell, James Holland and Henri Slack, ]mprovements
in the microscope. Transact. for the encouragement of arts, manufac-
tures and commerce, vol XLIX. 3
(3) Observations on the motion of fluids in plants Ly Henri Slack. Com-
munications , etc. (suprà laudata). Transactions of arts, vol. XLIX,
part. IT.
( 431 )
entre elles et la paroi extérieure des poils et des sacs con-
tenant la liqueur colorée ( Tradescantia) ou incolore
(Senecio) des cavités intérieures. Il faisait jouer un rôle ac-
était presque , il faut l'avouer , le cœur de la circulation
cellulaire. Cependant , Slack comparait le mouvement gi-
ratoire observé par lui dans tant de plantes, au mouve-
ment des globules dans les Ælques, Chara nitella et
autres plantes inférieures. En 1838, le champ de la dis-
ssion passa d'Angleterre en Allemagne. M. Meyen (1)
s'occupa surtout de la circulation dans les poils du Tra-
descantia ciliata, du Cobæa scandens ; les courans
n'existent pas entre les membranes admises par Slack,
;
mais ont lieu tantôt contre la paroi interne de l'enveloppe
rénérale , tantôt directement à travers la cavité intérieure,
eL le nucléus ou le globulus a une influence marquée sur
eux. En 1837, il avait déjà préparé les esprits à recevoir
es idées par ses observations sur la circulation dans les
poils du Zoasu tricolor (2). Il y déclare déjà « que le mou-
ement observé dans ces organes est une simple modifica-
ion des courans de rotation ordinaire du suc des cellules. »
ILcomparait, comme Slack et ses amis, le mouvement de
Bireulalion au mouvement giratoire des plantes inférieu-
es. Enfin, en 1838 aussi, M. Schultz lut à l'Institut de
aris une courte mais savante notice , sur la circulation
ans les plantes (3), où il établit que dans les hélérorga-
Meyen, Veues System der Pflanzen Physiologie,tom I, p. 206,
à te
2) Meyen , Secretions Organe der Pflansen , p. 43.
; 3) "Schultz, Nouvelles observations sur la circulation dans les plantes,
"327. Annales des sciences naturelles, 1838, décembre.
( 432 )
niques (végétaux vasculaires), la rotation du suc dans les
cellules n'est que la circulation qui se fait par des vais-
seaux lalicifères contenus dans les cellules. C'était là un
trait de lumière qu'il était important de bien constater ;
M. Schultz avait fait ses observalions sur une foule de
plantes, comme les Commelinées et les Campanulacées.
Il me communiqua en personne ses recherches, et je me .
mis aussitôt à vérifier l'existence d’un réseau vasculaire
dans les Campanules , où il ne me fut pas difficile de le »
trouver, mais j'avoue que nulle part on ne le voit aussi
bien que dans le Marica cœrulea.
Je confesse que je ne suis pas d'accord avec M. Schuliz,
et sur les dénominations à donner aux différens phéno- «
mènes du mouvement du suc vital, et sur la manière
de concevoir leur distribution dans le règne végétal. .
M. Schultz nomme cyclose le mouvement dans des vais- 1
seaux , et rotation le mouvement dans l'intérieur d’une »
cellule. Mais il serait beaucoup plus simple, beaucoup
plus rationnel, ce me semble, et surtout beaucoup plus“
conforme au langage habituel de la physiologie, de nom:
mer CIRCULATION ce qui est une circulalion, un transport,
dans des vaisseaux clos et anastomosés; de nommer cx-
GLOsE le mouvement en KYKAOË , en cercle, dans l'inté:
rieur d’une cellule, corps originairement sphérique, et
dont la section est un cercle, el enfin de réserver le no n
de ROTATION à celte rotation que, dans beaucoup de plantes
on trouve aux corpuscules globulinaires, chlorophyllaires;
qui tournent sur eux-mêmes ou grouillent ensemble
comme des infusoires; cela se voit dans les cellules.desm
feuilles du 7’anilla planifolia, des étamines du Spa =.
mannia africana , et comme l’a dit M. Meyen , dans milles
autres plantes. Je crois que ces dénominations apportes
( 433 )
raient moins de confusion , el M. Schultz se plaint, en
effet, de ne pas toujours avoir été compris. J'avais déjà
proposé une parlie de ces distinctions dans un écrit anté-
rieur (1).
Quand M. Schultz pense que M. Meyen a tort d'admettre
que, dans les plantes hétérorganiques ou vasculaires , il
peut y avoir à la fois une circulation du latex el une rota-
tion du suc intracellulaire, je suis convaincu par des expé-
riences et des observalions particulières, que le reproche
de M. Schul!z n’est pas fondé. Je pense que la question a été
mal envisagée, parce que les trois sortes de mouvemens dont
;
]
|
bal
{
je parle plus haut, n’ont pas élé suffisamment distingués.
Ainsi, il est certain que dans des plantes où les vaisseaux
» opophores et leur suc sont très-visibles , où la grande cir-
culation se constate facilement, il y a néanmoins un mou-
_vement dans les cellules qui ne vient pas de ce que l’ap-
‘pareil laticifère envoie ses réseaux vasculaires dans les
utricules, ou de ce que des appareils vasculaires opophores
existent séparément dans les cellules. Par exemple, dans
l'Aoya carnosa où le latex et son mouvement sont si bien
‘appréciables , il y a dans les cellules de la feuille un mou-
: vement des globulines , qui est du genre des rotations dont
jai parlé plus haut , mais il n’y a là pas de trace d’un trans-
port par des vaisseaux. M. Valentin avait déjà signalé ce fait
(2). M. Meyen, qui a constaté un mouvement semblable dans
beaucoup d’autres plantes, a même émis l'idée que pres-
(1) Morren , Notice sur la circulution observée dans l’ovule, la fleur et
Jephorante du figuier, p.3.
(2) Valentin, Bericht über die Schlesische Gesellschaft für vaterlan-
dische Cultur, 1833.
(434)
que loujours ces molécules mobiles sont brunâtres ou
rougâtres, et comparables à celles que j'avais signalées .
dans les Clostéries (1). Je n'admets pas ce dernier fait
comme exact partout; car, dans les cellules très-grandes
des feuilles du 7’anilla planifolia, on peut constater un
mouvement trés-rapide, et qui se prolonge aussi long-
temps que la cellule est close, de globulines vertes, et qui
suivent toutes sorles de directions, à côlé d’autres parfai-
tement immobiles, plus grandes et vertes aussi, Dans les
élamines du Sparmannia africana , j'ai vu dernièrement
de très-gros globules tournoyer sur eux-mêmes et marcher
en différens sens ; ce sont des glohes rouges, comme les \
Palmelles , et contenus dans les cellules. Or, dans tous ces d
cas ,iln’ya pas de vaisseaux: |
Néanmoins, on doit reconnaître que M. Schultz a eu |
raison de regarder comme un vrai sÿslème de vaisseaux,
le réseau où le mouvement s’observe dans une foule de W
cas; et, qu'il y a eu confusion entre les transports gira- »
toires et circulaloires, est un fait qui me paraît hors de»
doute. J'espère que le lecteur parlagera celle conviclion, »
lorsque j'aurai décrit ce que j'ai vu dans le Marica cæ-
|
R
rulea.
chyme dermoïde ne permet pas de les regarder comme des
modifications de ces dernières. La paroi est trés-transpal
(1) Meyen, Physiologie, tom. H, p. 255.
cé
-
f
+
1
( 435 )
rente , forte, résistante, très-peu extensible, se brisant au
compressorium (fig. 1, 2, 3). La paroi est très-visible et se
dessine avec son double bord ou ses deux lignes noires, et
comme rien ne fait saillie en dehors, il est clair que le
réseau vasculaire qu'on voit à ces poils est intérieur. En
effet, rien n’est plus visible que ce réseau de vaisseaux
dont les membranes se dessinent avec netteté dans les cel-
lules , et la circulalion y est si active, qu’on ne peut pas
retrouver à ces vaisseaux la même forme pendant dix ou
quinze minutes. En général, il y a quatre grands vaisseaux
qui parcourent le poil de haut en bas, et qui s'unissent
latéralement par des vaisseaux transversaux anastomosés
avec les premiers. Pour l'existence de ces anastomoses et
de leur extrême facilité à se contracter au point d'échap-
per aux yeux même très-exercés au microscope, il n’y a
pas le moindre doute que M. Schultz n'ait observé avec la
dernière exactitude. Les figures indiquent mieux que mes
paroles les formes que prennent successivement ces vais-
seaux. Quand tout le latex afflue dans un vaisseau pri-
maire (un des quatre longitudinaux), celui-ci se renfle,
mais en conservant souvent un aspect moniliforme qui
devient trés-élégant, quand ‘une partie du fluide circula-
toire s'échappe par les anostomoses. Alors, il y a une série
de vésicules renflées, attachées les unes aux autres par des
vaisseaux linéaires très-étroits (fig. 3); les globules du
latex avec leur sérum, filent doucement dans ces espèces
de fils jusqu’à ce qu’un afflux trop considérable dilate uni-
formément le grand vaisseau.
Tantôt un grand vaisseau esl tout entier contracté (fig. 1),
tantôt dilaté ({g. 2); tantôt un vaisseau transversal , géné-
ralement moins gros que les autres, aboutit à un renfle-
ment, Lanlôt à une contraclion, mais presque jamais on
( 436 )
ne voil de ces renflemens sur les vaisseaux de communi-
calion.
Maintenant, pour être bien sûr que les espaces où s’ob-
serve la circulation soient de vrais vaisseaux, on pouvait
s’y prendre de diverses manières. En premier lieu, je no-
terai l'appréciation de la membrane même des vaisseaux ;
en second lieu, ses dilatations , qui se produisent sous
l'affluæ visible du latex ; mais il me vint à l’idée que, puis-
que le latex est plus dense que le liquide intracellulaire de
la cavité du poil, un fluide colorant ferail reconnaître
mieux et ce fluide et les vaisseaux qui le contiennent. Je
pris donc de la teinture d’iode, et en colorant par elle les
poils, je vis qu’en effet les vaisseaux se dessinaient en brun
rougcâlre et la cellule avec son fluide en jaune (fig. 4—5).
La membrane était alors bien visible, et en mettant une
telle préparation sous le compressorium , je déplaçai en
roulant le disque supérieur, l’appareil vasculaire , de ma-
nière à me montrer son entière indépendance comme ré-
seau de vaisseaux. |
Cette coloration par l'iode me prouva un autre fait
auquel on n’a pas pensé , à ce que je sache : les deux bouts
de ces poils se colorèrent en violet, comme si, à ces deux
extrémités il y avait de la fécule. La coloration violette
diminuait ses teintes insensiblement vers le milieu du poil,
comme on le voit dans quelques cellules de fécule de pom-
mes de terre bouillies à moitié. La présence de la fécule
dans ces poils à l'élat de demi-cohésion est un fait remar-
quable, et lorsqu'on songe à la grande qualité nutrilive de
cette substance, on s'explique pourquoi l’on voit le latex
cheminer plus doucement, et par conséquent s’'accumuler
aux deux extrémités féculiféres des poils, car c’est un fait
démontré par l'observation qu'aux deux bouts des poils,
Lu L'ctfitéie “pes tt cacao
VTT,
|
L
n
He can
a.
Le
(437)
_ es vaisseaux sont plus long-temps dilatés, et les anasto-
moses plus fréquentes (fig. 1, 2, 3). Celle plus grande
activilé vitale qu'acquiert là le latex, permet au bout supé.
rieur du poil de prodüire une sécrétion qu'on voit, trans-
mise au dehors, sous forme d'un filet visqueux, comme
une substance gommeuse (fig. 6), et, sans doute, le fluide
formé par l’activité du latex à l’autre bout du poil qui re-
pose sur le derme, est absorbé par les cellules et sert à la
nourriture de la plante; de sorte que le poil , organe res-
piratoire, comme la branchié, puisqu'il met le latex en
rapport avec l'air à travers la membrane pileuse , devien-
drait encore un organe de nutrition d’ün côté et de sécré-
tion de l’autre. En effet, où nous conduisent les progrès
de la physiologie végétale, n'est-ce pas à la concentration
des fonctions trés-diverses dans une cellule? Et celle-ci,
qu'on regardait , il y a quelques années, comme üne sphère
très-simple avec des corpuscules colorés au dedans, n’est-
elle pas devenue tout un organisme compliqué, au point
qu'entre un poil de Marica et une Annélide 11 n’y a plus
tant de différence ?
À ces observations, je dois ajouter célles-ci : le poil du
Marica possède un nucléus diversement placé (fig. 1, 2, 3).
Je n'ai pas vu que des vaisseaux y aboutissent, bien que ce
soit le cas très-souvent, mais je ne dis pas pour cela qu’il
soit Lout-àa-fait indépendant du réseau vasculaire, et sans
» connexion avec lui, car les vaisseaux peuvent avoir élé si
contractés, qu'ils auront échappé à mes veux. C’est un
sujet très-délicat, que jé me propose d'examiner une autre
fois. |
J'ajouterai encore que, contre la paroi , entre les réseaux
vasculaires, il y a des globulines sans mouvement, associées
par plaques comme l’indiquent les figures ; et que sur le
Tom. vi. 30
(438 )
sligmate on voit des poils plus petits, coniques (#g. 7), où
la circulation se fait aussi dans des vaisseaux.
EXPLICATION DE LA PLANCHE,
(Les figures sont dessinées à 250 fois le diamètre ; la fig. 13 à 400 fois).
Fig. 1.
S &
SE ro M8 ER 9
Fig.2et3.
Poil de la gorge du périanthe.
. Vaisseau longitudinal.
Etranglement d’un autre grand vaisseau lonsitudinal.
Etranglement du même conduisant à des renflemens.
. Vaisseau de communication.
Grand vaisseau longitudinal.
Nucléus.
Globulines extérieures au système circulatoire.
. Paroi du poil.
. Cellules dermoïdes
Air y contenu.
Hèmes poils avec d’autres dispositions du système circula-
toire.
Fig. 4 et 5.Poils colorés par la teinture d’iode.
a.
Têtes colorées en bleu , comme si elles renfermaient de la
fécule.
4. Vaisseaux.
Bases colorées en bleu comme si elles renfermaient de l«
fécule.
Tête de poil avec son produit excrété.
a. Sécrétion.
. Paroi du poil.
Poil du style avec son appareil circulatoire.
Derme du style.
Derme supérieur des pétales.
Cône vu d’en haut.
Derme supérieur des sépales. Nucléus simple.
Derme des taches brunes de la gorge du périanthe avec les
liqueurs colorées et les globulines jaunes.
Une cellule isolée. Globulines informes avec un point central, «
Globulines séparées, vues sur plusieurs faces,
Derme inférieur des sépales avec le stomate et les globu-
lines disposées en couronne.
Glabule de pollen,
C.Morren d'apr nat.
Lage 438, Torre VI.
MARICA CŒRULEA KER.
D ls
RE EEE DS
(439 )
ORNITHOLOGIE.
Description d’un Tangara nouveau , par M. B. Du Bus,
membre de la Chambre des Représentans.
TanaGra LunuLATA. — Tangara à croissans.
Tanagra corpore sericeo-atro ; pectore, epigastrio, hypochon-
driis et maculà postoculari cum lunul& parotic4 igneis ;
flezurû cum tectricibus alarum minoribus, tergo et uropygio
lœte cyaneis; tectricibus caudæ superioribus nigris, cyaneo
terminatis ; crisso atro, transverse rubro fascialo ; rostro
pedibusque nigris.
M. d'Orbigny a figuré (pl. XXV, fig. 2 de son J’oyage en
Amérique), sous le nom de Tanagra igniventris, une
espèce qui, au premier ceup d'œil, paraît identique avec
le Tangara à croissans, Cependant, un examen attentif
m'a convaincu que ces deux oiseaux doivent réellement
former deux espèces distinctes par les formes, par la taille
et par des différences assez notables dans la distribution
des couleurs du plumage.
Le Tangara à croissans a le bec conique, assez épais à
la base; la mandibule supérieure est plus longue que l’in-
férieure ; elle est élargie et renflée sur les côtés, à bords
ranchans, à arête droite, ne fléchissant sensiblement que
ers la pointe du bec qui est trés-échancrée. La mandibule
férieure est plus étroite que la supérieure ; elle a son
rd inférieur légèrement ascendant depuis l'angle formé
ar la réunion de ses branches jusqu’à sa pointe.
- Les ailes sont arrondies; la premiére rémige est plus
courte que la seconde; celle-ci est un peu plus courte que
(40 )
les troisième, quatrième et cinquiéme, qui sont les plus
longues. La queue est carrée.
Le Tangara à croissans est remarquable par la vivacité
de ses couleurs. Le corps eu général est d’un noir profond
et velouté ; la poitrine, la partie antérieure du ventre jus-
qu'aux jambes et les flancs sont d’un beau rouge de feu
lustré et très-vif ; une tache de la même couleur se trouve
derrière l'œil près de la nuque , et se réunit à un croissant,
aussi de la même couleur, et qui descend vers la gorge en
bordant la partie postérieure de la région parotique. Une
large bande rouge traverse les couvertures inférieures de
la queue. Le pli de l'aile ainsi que les petites couvertures,
la partie inférieure du dos et le croupion, sont d'un beau
bleu d'azur lustré ; les couvertures supérieures de la queue
sont noires , terminées de bleu. Les rémiges sont d’un noir
moins profond que les rectrices. Le bec et les pieds sont
noirs.
Je terminerai cette notice en présentant le résultat de
l'examen comparatif que j'ai fait des T°. lunulata et igni-
ventris. Mais il est à regrelter que, pour établir la diffé-
rence spécifique , je sois obligé de me borner à l'examen
des caractères indiqués dans la figure que donne M. d'Or-
bigny. Car le texte correspondant aux planches du Voyage
dans l’ Amérique méridionale, quise publie par livraisons
el dont la moitié seulement a paru aujourd’hui, n’aceom-
pagne pas toujours ces planches et ne paraît souvent que
dans des livraisons postérienres. C'est ce qui est arrivé au
Tanagra igniventris, dont la description n’a pas encore
vu le jour, bien que la figure en soit publiée depuis quel-
ques mois, Néanmoins cette figure m'inspire toute con-
fiance, à cause de la grande exactitude qui distingue les
planches du Voyage de M. d'Orbigny.
Ballitins de l'AHcaderie Tom. V'I, Taac 441
ES
EEE
TANACRA LUNULATA .
aber onu par dessus b. lon par dessons
/ /
CAT )
TanaGRa LUNULATA, (N.)
L’arête de la mandibule supé-
rieure est droite et fléchie seule-
mént vers la pointe du bec.
Lapointe de la mandibule supé-
rieure est très-échancrée.
- La mandibule inférieure est moins
longue que la supérieure ; son bord
. inférieur est légèrement ascendant
depuis l’angle formé par la réunion
de ses branches jusqu’à sa pointe.
L’extrémité des rémiges à l’état
de repos, dépasse l’extrémité des
couvertures supérieures et infé-
rieures de la queue.
Longueur totale, 6 pouces 6
lignes.
Longueur du tarse, 1 pouce.
Les grandes et moyennes couver-
tures des ailes et les rémiges sont
complétement noires.
La région anale et les jambes sont
oires ; une bande rouge traverse
es couvertures inférieures de la
eue qui sont également noires.
Les :
TanaGna Ienivenris. (d'Oib.)
L’arête de la mandibule supé-
rieure est fléchie à partir de la
base.
La pointe de la mandibule supé-
rieure est faiblement échancrée.
La mandibule inférieure est à
peu près aussi longue que la supé-
rieure; son bord inférieur
presque droit.
est
€
L’extrémité des rémiges à l'état
de repos n’atteint pas l'extrémité
des couvertures de la queue.
{
Longueur totale, 5 pouces.
' Longueur du tarse, 8 lignes.
Les grandes et les moyennes cou-
vertures des ailes sont bordées ex-
térieurement de bleu ; les rémiges
sont extérieurement bordées en
partie de bleu et en partie de blanc
jaunatre.
Toutes les parties inférieures
sont rouges, à l’exception des jam-
bes qui sont noires.
» Le Tangara à croissans habite la province d'Honduras.
fait partie de ma collection.
HISTOIRE ET ARCHÉOLOGIE.
* M. le baron De Reiffenberg présente les deux notes sui-
- Remarque sur J.-F. Foppens. — Depuis que j'ai com-
( 442 )
muniqué à l'académie une notice sur l’archidiacre Foppens,
le Messager des sciences historiques a publié un poëme
latin de Dominique Foppens , chanoine d'Anderlecht, son
frère. M. Gautier, à qui le Messager est redevable de ce
poème, s’est imaginé que l'Aistoire de Bruxelles con-
servée en manuscrit à la bibliothèque royale , était de ce
Dominique Foppens. Il est tombé dans l'erreur; l'Histoire
de Bruxelles, ainsi que je l'ai dit, appartient à l’archi-
diacre. M. De Ram qui posséde plusieurs manuscrits de
ce dernier , a entre les mains le recueil relatif à l'inquisi-
tion el au concile de Trente.
Sur une bague ancienne. — Clovis voulait épouser
Clotilde, fille de Chilpéric et nièce de Gondebald, roi
de Bourgogne. Le gaulois Aurelien, déguisé en mendiant,
fut chargé de l'aller trouver. Il devait remettre à Clotilde
un anneau que lui envoyait Clovis, afin qu’elle eût foi
dans les paroles du messager. Clotilde, en réponse, lui
confia aussi son anneau. Telle est l’anecdote que raconte
un ancien chroniqueur, en y joignant des parlicularités
qui en font une scène de l'Odyssée, ainsi que le remarque
M. De Chateaubriand.
Les anneaux de Clovis et de Clotilde devaient, sans
doute, pour êlre reconnus, porter quelque signe et ap-
partenir à la classe de ceux qu’on appelait signatorüi,
sigillaritii ou cerographi (1), et sur lesquels s’est étendu
longuement un savant belge, le P. François De Corte, qui
a écrit un trailé ex professo sur les anneaux en général (2).
(1) Natalis de Wailly, Élémens de paléographie, 1838, in-4o maj. IT,
1 et suiv.
(2) Syntagma de annulis , authore R, P. F. Fr. De Corte (Curtio), Au-
gustiniano Brugensi, Antwerp , in-8o.
(43)
De pareils anneaux , dont l'usage remonte au delà de trois
mille ans, étaient communs chez les Francs. Les évêques
se servirent d’anneaux pour sceller jusqu’au IX: siècle; ils
y faisaient graver leurs noms ou leurs monogrammes,
quelquefois une tête. Les premiers rois francs scellaient
également avec un anneau. Je viens d'acquérir, à la vente
du cabinet numismatique de M. Leclercqz, un joyau de
cette espèce. Il est d’or, en forme de décagone, à double
. cachet, et présente sur un chaton une tête dont le style
annonce l'ère de la barbarie , et sur un autre un mono-
gramme qui m'offre le nom de Renerus, Reinerus ou Re-
nerius.
Cet anneau fut trouvé aux environs de Mons avec une
monnaie de Swintilla, roi des Wisigoths, plusieurs pièces
de monétaires mérovingiens ( catalogue, n°° 58, 59—66 ),
des pièces byzantines d'Héraclius (#hid., n°° 122—124 ),
une boucle d'oreille et un cachet à l’image byzantine de
la Vierge.
La circonstance du lieu où la découverte a été faite et
le nom de Regnier, car je ne puis lire Treveris avec un
savant numismate (1), m'ont induit à conjecturer que cet
anneau pouvait avoir appartenu à l'un de nos Regniers,
comtes de Hainaut, appelés dans les monumens anciens.
Ragenarius, Raginerius, Raignerus, Rainerus et Re-
nerus (2). J'inclinerais volontiers, quant à moi, pour le
plus ancien, c’est-à-dire Regnier-au-long-Col, celui-là
(1) On attribue la rédaction du catalogue de M. Leclercqz à M. Lele-
well, mais cela me paraît fort douteux, attendu les erreurs dont cet
inventaire abonde.
(2) Isfr. Thys, Quatuor duntaxat fuisse Raginerios comites Hannonie.
Acra SS. Ben, VI, 274—282.
(444 )
même dont M, Mone a suivi l'histoire pas à pas dans l’an-
cienne fable du Renard.
La têle, grossièrement gravée, est remarquable par la
coiffure qui la surmonte, et qui m'avait paru d’abord con-
venir à un évêque. Quant aux ornemens de la bague, j'y
verrais des abeïlles, si je ne craignais d’être dupe de mes
yeux et de mes souyenirs.
Quoi qu'il en soit, cet anneau est digne de J’attention des
archéologues et mérite d’être mis, à l’aide d'une figure (1),
sous les yeux de ceux qui ne peuyent Lau - cabi-
net des médailles de la bibliothèque royale , où il est dé-
posé.
HISTOIRE.
Documens inédits sur Juste Lipse : note communiquée
par M. Gachard, correspondant de l’académie.
Lorsque, dans une de mes tournées, il y a cinq ans,
Jexaminai Jes archives de la ville de Louvain, il me tomba
sous la main une liasse (2) dont l'intitulé excita vivement
ma curiosité ; il annonçait des documens relatifs à.une de
nos plus grandes célébrités littéraires, à Juste Lipse,
Ayant ouyert celte liasse, j'y trouvai les six pièces dont
je vais donner l'indication ; elles se rapportent à un évé-
(1) Elle sera donnée dans un des prochains Bulletins.
(2) Elle est marquée L, n° 57, dans l’inventaire de Cuypers, intitulé :
Inventaris alphabeticq van de Lbescheeden, titulen , munimenten ende pro-
cesstukken bevonden ende berustende ten stadshuyse van Loven.
|
|
( 445 )
nement qui marque à la fois dans la vie de Juste Lipse ct
dans l’histoire de l’université de Louvain.
La première est une requête, sans date, adressée au
magistrat de Louvain par M° Nicolas Foxius; il y est dit
que Juste Lipse était, depuis plusieurs années , réconcilié
avec le roi et avec l’église; qu'il, se tenait à, Liége, où le
duc de Ferrare et beaucoup d’autres princes lui faisaient
des offres magnifiques. pour l’allirer, chez eux, etc:
La deuxième est une lettre, aussi sans date , de l’univer-
sité de Louvain aux élats de Brabant: celte lettre a pour
objet de leur recommander Juste Lipse; l’université leur
fait observer que, par l'intervention,des péres de la société
de Jésus, il's’est réconcilié avec l’église, & qué tamen
numquam defecerat , el avec le roi.
Une lettre des bourgmestres, échevins et conseil de
Louvain, adressée à Juste Lipse, le 17 juillet 1592, est la
troisième. pièce. Ils lui écrivent qu'ils sont informés de
son intention d’honorer leur ville, en venant y fixer son
séjour : ils le prient d'effectuer ce dessein, l'assurant
qu'ils feront tout ce qui dépendra d'eux pour,sa satisfac-
tion. Ils lui offrent l'exemption de garde.et toutes les im-
munités qui sont en leur pouvoir. Ce-leur sera, ajoutent-
ils, un grand bonheur de le voir dans leur ville, et ils
en espérent le meilleur résultat pour le rétablissement de
l’université,
La quatrième pièce est la réponse de Juste Lipse, en
date du 21 juillet. Il les remercie de leur bonne aflec-
tion : il n’est aucun endroil, où. il.ait plus le désir de
vivre que Louvain. Il lui a été offert des conditions bien
avantageuses pour aller se fixer dans d'autres pays catho-
liques ; mais il donne la préférence à leur ville. Il leur de-
mande deux choses : qu'il soit exempt de garde, ainsi que
( 446 )
de logemens militaires, non pas qu'il ait la prétention
d'obtenir des priviléges particuliers; mais l’état de sa
santé réclame l’exemption de garde, et celle de logemens
militaires lui paraît indispensable à ses études. Gette
lettre est en flamand comme la précédente.
La cinquième pièce est un acte des 17 juin et 12 sep-
tembre 1592, par lequel les trois états de Brabant prient
Juste Lipse, dans des termes on ne peut plus flatteurs et
honorables , de vouloir, pour l'amour de sa patrie, se ren-
dre à Louvain et y enseigner, à l’université, les lettres
humaines, lui offrant une pension annuelle de 600 florins.
La sixième et dernière pièce est une lettre de Juste
Lipse à M° Philippe Maes, grefñer des états de Brabant ;
elle est datée du 9 des kalendes de décembre 1594. Le
célébre professeur y sollicite une augmentation de sa
pension.
Les particularités que ces documens révélent, m'ont
paru assez curieuses pour mériter l'intérêt de l'académie,
surlout en ce qu’elles délerminent l'époque précise où
Juste Lipse fut appelé à Louvain, et les avantages qu’on
lui offrit pour l'y attirer : il ne paraît pas du reste qu’elles
aient élé connues des biographes de ce savant.
Discours adressé à l'empereur Maximilien 1°" par Jean
de Hun, député du pays de Hainaut, et Jean Jonglet,
député du pays de Namur, & Ympst(1), le 30 janvier
1507 : note de M. Gachard,
Nous ne possédons presque point de monumens de l’élo-
(1) Je nai trouvé cet endroit dans aucun dictionnaire gévgraphique ;
( 447 )
quence politique de nos pères : les discours qu’on trouve
dans nos historiens sont peu nombreux, et pour la plu-
part encore, ils sont de leur invention. Dans un pays ,
comme la Belgique, qui a joui de temps immémorial et
sans inlerruplion du régime représentatif; où, pendant
plusieurs siècles, des assemblées nationales ont été ap-
pelées à statuer sur les plus grands intérêts de la patrie,
les rapports du peuple avec le souverain, et la discussion
des affaires de l’état, ont dû cependant donner naissance
à bien des harangues , à bien des allocutions politiques.
Frappé de cette lacune dans la série des documens qui
concernent notre histoire, je n'ai cessé, dans le cours de
mes recherches, de travailler à la combler. C’est ainsi que
J'ai pu recueillir (1) les discours si remarquables adressés
par Charles-le-Téméraire aux députés de la Flandre en
1470 et en 1475; c'est ainsi que j'ai été à même de pu-
blier les discours prononcés au sein des élats-généraux lors
de l'abdication de Charles-Quint (2), lorsque Philippe IL
les réunit avant son départ pour l'Espagne (3), et lors de
la cession des Pays-Bas à l'infante Isabelle (4).
je n’y trouve pas non plus Umbst, lieu d’où est datée une lettre du 7 août
1496 de l’archiduc Philippe-le-Beau à la chambre des comptes, que j'ai
rapportée dans le 17 volume imprimé des Znventaires des archives,
p- 121. Il est évident qu’il s’agit, dans les deux pièces, de la même ville :
mais quel est le véritable nom de cette viile?.... Ce qui est certain, c’est
que Maximilien était en Allemagne, lorsqu'il reçut les ambassadeurs des
Pays-Bas.
(1) Collection de documens inédits concernant l’histoire de la Belgique,
1, pp. 219-224 et 249-259.
(2) Analectes Belgiques, pp.81-102.
(3) Collection de documens inédits, ete., \, 313-325.
(4) Zhid , 460-496.
( 448 )
Les mêmes motifs m'ont déterminé à prendre copie, à
la bibliothèque du Roi, à Paris, d'un: discours adressé,
en 1507, à l'empereur Maximilien [°, par des députés que
lui avaient envoyés les pays de Hainaut et de Namur (1):
c'est le seul document de ce genre que j'aie trouvé dans
mes explorations littéraires en France, et, indépendam-
ment des circonstances politiques auxquelles il: se ratta-
che, il est curieux comme spécimen du style oratoire de
l'époque.
Avant de le mettre sous les veux de l'académie, je re-
tracerai quelques faits historiques sans lesquels on n’en
aurait qu'imparfaitement l'intelligence: ces faits, quoique
bien importans , ont été négligés par nos historiens; on les
chercheraït en vain dans M; Dewez, dans la chronique de
Robert Macquereau, dans Pontus Heuterus; c'est à des
sources inédites qu’il m'a fallu les puiser (2).
Les états-généraux se trouvaient assemblés à Malines,
lorsque, au commencement du mois d'octobre 1506, la
(1) Ce discours se trouve dans le manuscrit n° 517 du fonds Dupuy,
fol. 116-117; l'écriture en est du temps. Voici le préambule qu’il porte :
« Pour les pays de Haynault et de Namur, à la très sacrée majesté du roy
» des Rommuins, par Jehan de Hun, escuier, prevost de Mons, et maistre
» Jehan Jonglet, president dudit Namur, et par la bouche dudit Jonglet,
» a esté dit et remonstré comme il s’ensuit , à Ympst, le penultiesme de
» janvier milchinq cens et six, ou en substance. »
(2) Les sources dans lesquelles j'ai puisé sont : aux archives de Mons;
le 3me registre aux résolutions du conseil de cette ville, commençant à
l’année 1485 et finissant à l’année 1509; aux archives du royaume; un:
registre des états de Brabant portant pour titre: « Rootboeck: sommier
van de consenten van verscheyde beden, resolutien, acten endé béschee-
den, raeckende de staten van Brabant, sedert den jacre 1503 totten jaere
1578, et un autre registre contenant les comptes des aides de Brabant au
quartier de Bruxelles, des années 1500 à 1514.
i
( 449 )
nouvelle dela mort inopinée de Philippe-le-Beau à Burgos
parvint aux Pays-Bas; Guillaume de Croy, seigneur de
Ghièvres que leroi , en partant pour l'Espagne, avait in-
stilué son lieutenant-général, les avait convoqués pour
délibérer surune demande de subsides que rendaient né-
cvssaires les 1hostililés commises par le duc de Gueldre,
au mépris des engagemens qu'il avait contractés avec Île
roi défunt.
Cette nouvelle causa, dans le sein des états, comme
par tout le pays, une affliction inexprimable. Le chancelier
de Bourgogne, après en avoir donné connaissance à l’as-
semblée, demanda qu'il fût pourvu à la collation des
offices que le décès du roi rendait vacans, ainsi qu’à la
mambournie ou lutelle des jeunes princes et à la régence
du pays : le testament du roi, dont il fit lecture , ne con-
tenait aucune disposition sur ces deux derniers points. Il
proposa que des ambassadeurs fussent envoyés aux princes
voisins, tels que les rois d'Angleterre et de France, les
évêques de Liége, de Cologne et d'Utrecht et le duc de
Lorraine, pour les requérir de se maintenir en paix et
bonne amitié avec les Pays-Bas. Il communiqua aussi aux
états un trailé de trève conclu, sous leur ratification,
avec le duc de Gueldre, par le moyen du roi d'Angleterre.
H demanda enfin que des mesures de précaution fussent
prises pour la garde des frontières, et que les provinces
restassent bien unies.
Les états-généraux délibérérent sur ces &ifférens objets.
Les députés de Brabant , de Hollande, de Zélande, de
Frise et de quelques autres petits pays ressortlissans à la
Hollande (1) furent d'avis :
(1) Met noch cenige cleyne landen onder Hollande resorterende, est-il
dit dans le registre des états de Brabant.
( 450 )
Que les membres du grand-conseil du feu roi fussent
maiulenus dans leurs charges ; qu'il leur fût recommandé
de veiller soigneusement sur les personnes des jeunes
princes et princesses; que le conseil pourvût à tout ce
qui concernait le bien du pays, et que ses résolutions
fussent prises à la majorité des voix recueillies par le
chancelier ;
Que madame la douairière de Ravestein fût priée de
rester aussi auprès des jeunes princes;
Que les officiers de justice fussent continués dans leurs
charges jusqu'à la Chandeleur, et qu'ils se servissent d'un
sceau de plomb ayant pour inscription: Sigillum Caroli
ducis, etc., per provisionem tantüm, sans qu'ils pussent
faire quelque innovalion préjudiciable aux états ni aux
pays;
Que tous les officiers de recette fussent de même main-
tenus, exceplé en Hollande ;
Que la mambournie des jeunes princes et la régence du
pays fussent offertes au roi des Romains, et qu'à cet effet il
lui fût envoyé une ambassade composée de quelques sei-
gneurs notables et de députés des états ;
Qu'on laissât au conseil le choix des ambassadeurs à en-
voyer aux autres princes ;
Que, pour la garde des frontières , il fût entretenu aux
frais du pays 2000 hommes à pied, outre les 1000 hom-
mes à cheval et les 2000 piélons qui étaient à la charge
du prince, et ce jusqu’à la Chandeleur, ou jusqu’à la con-
clusion de la paix, si elle se faisait auparavant;
Que, à l'égard de la trève conclue avec le duc de Guel-
dre, les états la ratifiassent, et que l’on s’occupât immé-
diatement des moyens de parvenir à une paix définilive.
Enfin , ils déclarèrent être prêts à s'unir avec les autres
( 451 )
provinces, en telle manière que, si l’une d'elles était at-
taquée, toutes fussent obligées de voler à son secours.
Les députés des autres provinces se rangèrent à leur
sentiment sur tous ces points, excepté sur celui qui con-
cernait le choix du roi des Romains comme mambour
des jeunes princes : les députés de Flandre, d'Artois, de
Lille, Douai et Orchies, dirent n'avoir pas d'instructions
relativement à cet objet, et demandérent retraite pour
aller en référer à leurs principaux. Les députés de Hai-
paut et de Namur ne voulurent se prononcer ni pour
le roi des Romains , ni pour quelque personnage que ce
fût : la présence, dans le voisinage de leurs frontières, de
forces considérables rassemblées par le roi de France, et
la crainte que ce monarque n’envahit leurs provinces, si
en celte occasion elles manifeslaient des senlimens qui
lui déplussent , furent la cause de cette réserve.
Nonobstant cette divergence d'opinions , le seigneur de
Chièvres, le seigneur de Berghes et le seigneur de la Roche
furent commis à l'effet d'aller offrir à l'empereur la mam-
bournie des enfans du feu roi. Les documens que j'ai con-
sultés ne font pas connaître si toutes les provinces leur ad-
joignirent des députés; seulement j'y vois que les quatre
chefs-villes de Brabant furent représentées dans cette dé-
putation, et Bruxelles nommément, par trois de ses ci-
toyens : Philippe Van Mons, échevin, Henri de Foytcre,
. conseiller (raedsman) et Pauwels Michelsmans, secré-
laire de la ville. .
Les pays de Hainaut ct de Namur, craignant le mécon-
tentement de l'empereur, par suite de l'avis qui avait été
exprimé en leur nom dans l'assemblée des états, résolurent
de Ini envoyer des députés spéciaux, pour lui expliquer
les motifs de leur conduite, qui n’était pas fondée sur de
( 452 )
l'éloignement pour sa personne, mais sur les ménagemens
que l'intérêt de leurs provinces leur commandait de gar-
der vis-à-vis de la France. Les états de Hainaut jelèrent
les yeux, pour cétle mission délicate , sur Jean de Hun (1),
prévôt de Mons, et ceux de Namur, sur Me Jean Jonglet (2),
président du conseil de leur province. Ces députés trou-
vérent l'empereur à Ympst, et là ils lui adressèrent, par
l'organe de M° Jean Jonglet , la harangue qui est le sujet
de cette note, et qui était conçue dans les termes suivans :
« Sire , quant Gayus Cesar, en faisant ses conquestes , se
trouvoit à la foys sur mer, et il s’y éslévoit quelque tor-
mente ou dangereuse témpesle, sés mariniers el navieurs
de prime face se trouvoient tristes et désolés, pour crainte
du peril et dangier apparent.
» Mais, Sire, quant ilz consideroyent la personne de
Cesar, reprénoient espoir, méltoient seurelté et confiance
en leurs courages pour sà soeulle presence, et rejéctoient
d’eulx toutes doubles, loutés craintes et toutes peurs, di-
sans : Cur timore concutimur ? Cesarem velhimus.
» Sire, au vraÿy parler, ainsi est-il de nous. Quant for-
(1) Jean de Hun, écuyer, seigneur de Ronchine et de la Rocque,
chambellan du duc d'Autriche, depuis roi des Romains, fut nommé
prévôt de Mons, par lettres de Maximilien et Philippe dorinées à Mons
le 24 janvier 1483 (1484 , n. st.): Il mourut en 1517 ou 1518. Foy. les
comptes de la prévôté de Mons , aux archives du royaume:
(2) Me Jean Jonglet , licencié ès lois, fut nommé chefet président du
conseil à Namur, par lettrés de Philippe-le-Beau du 10 mars 1504 (1505
n.st.). Il devint, en 1511, conseiller et maître des requêtes ordinaires
de l’archiduc Charles. Me. Hercule de Dinant fut appelé à le remplacer «
comme président du conseil de Namur, par lettres de l’empereur et de
lP'archiduc données à Bruxelles au mois de mai 1512. Voy., aux archives #
du royaume , les comptés de la recette générale de Namur,
Ciné nd +":
| 2
(453 )
tune envieuse de longue prosperité nous a tollu et ravy
nostre bon roy, prince et seigneur nalurel, le roy de Cas-
tille, à qui Dieu par sa grace face mercy, nous nous sommes
trouvés fort tristes, perplex et desolés, tant pour le regret
Dr rons de son doloreux trespas, que pour crainte des
perilz , dangiers et nouvelleités qui souvent adviennent et
poeulvent advenir aux subjectes apres le trespas de leurs
princes et seigneurs, tellement que en nous nec spes li-
bertatis erat , nec cura peculii.
» Et veritablement, Sire, n’estoit crainte de offenser et
ennuyer vosire lres sacrée majesté, en tant que l’on poul-
roit dire que beaucoup parler de ceste matière en vostre
presence vous seroit renouvellement de doeul, ef secun-
dum dare supplicium, nous aurions bien cause le regret-
ter et condoloir.
» Car, Sire, il nous traictoit en toute doulceur, tenoit
en paix, en repolz, en justice, en concorde de cueurs,
en unyon de courages et seurelé de tous voysins.
» Il avoit desja mis et eslevé en bien jeusne eage et
soubz vostre appuy, Sire, la tres haulle et tres noble mai-
son de Bourgogne en plus hault degré qu’elle ne feust de
la memoire des hommes.
» Et sy estoit clerement apparent, s'il eusist pleust
Dieu le laisser de faire et achever, à vostre moyen et ayde,
Sire, de haulles choses et vertueuses à l'honneur et louenge
de vous, de luy et au bien, prouflit et seureté d’entre
nous : qui nous donnoit confiance et espoir de vivre soubz
Jui de plus en plus en toutes franchises et libertés, et en
bonne assurance de voysins.
» Car en sa puissance gisoit nostre seureté , en sa force
ostre appuy, et nostre eur en sa prosperité, en façon que
ous nous povoyons bien dire et reppuiter les plus eureux
Tom. vr. 31
( 454 )
subjects , louenge à vous, Sire, qui feussent soubz quel-
cunque prince chrestien : Cum felix sit ille populus qui
sub optimo principe vitam agit felicem.
» Par quoy, Sire, se nous avons son trespas à regret et
desplaisir, ce n’est point de merveilles : nature l'enseigne
et raison voeult que sy grands biens et haulx benefices que
nous avons receupt de lui et de son temps ne soient mis
ou coullés en oubliance : Ælias ingrata foret patria.
» Aussi, Sire, les enffans vertueulx poeulvent comme
doibvent estre regrettés , et leurs bienffais recongneus et
regraciés à la personne de leurs pères et parens, en tant
que filiorum virtutes et merita in parentes irradiant :
celer ne se poeult et ne se doibt, Sire, ce que lealle af-
fection constraint à dire : Ædhereat linqua mea faucibus
meis, sy ejus non meminero.
» Mais, Sire, puisque le plaisir de Dieu a esté le prendre
et appeller en sa compaignie, nous ne povons à l'encontre :
Statutum est hominibus semel mori, et Dei statuta et
- fati ordinem nostris fletibus inmuture non possimus.
Nous ne le povons recouvrer.
» À cesle cause, Domine, reffugium factus es nobis,
et avons fait comme firent les mariniers de Cesar, Sire;
car , ainsi tristes et desolés que nous estions , avons tourné
nos cueurs et levé les yeulx de nos entendemens envers
vostre tres sacrée majesté, comme à nostre appuy , espoir
et refluge.
» Eten considérant , Sire, la grace que Dieu nous a fait,
puisque ainsi est, et que son plaisir est tel de nous avoir F.
mis et delaissiet ès mains de celuy a quo vita pendet om-
nium , c'est vous, Sire, qui toujours avés esté nostre con- M
fort, ayde et soubstenance, avons reprins espoir, miss
confiance en nos courages , et rejetté de nous toutes doub-
{ 455 )
tes, poeurs et craintes, et dist en nous meismes : Cur ti-
more concutimur ? Cesarem habemus. Et, en ce consi-
derant , Sire, nos coeurs, qui paravant estoient serrés de
tristesse, se sont ouverts et consolés.
» Et combien aussy, Sire , que de nostre part congnois-
sons assés que le cas advenu vous est plus que dur, grief
et amer à porter par doleur non pareille, toutesfois, at-
tendu, Sire, vos vertus naturelles, il nous a samblé et
samble, à vostre tres haulte et tres noble supportation,
que vostre tres noble coeur se poeult raisonnablement tor-
ner et mouvoir à consolation pour plusieurs regards et
considerations.
» Car qui vouldra, Sire , considerer comment nostre bon
roy, à qui Dieu soit misericords, a vescu et regné , com-
ment il est parti de ce monde, et en quel eslat et disposi-
tion il a delaissiet ses pays et subjectz, l’on trouvera, Sire,
que Dieu et nature l'avoient doué de toutes vertus et con-
ditions que in optimo principe esse debent.
» Il est notoire, Sire, qu’il a vescut et regné grande-
ment, haultement et vertueusement en l’amour et bien-
veullance non point seullement de ses subjects, mais de
touttes nations.
» Il est parti de ce monde, Sire, quand il a pleust à
Dieu l'en appeller, comme bon roy et prince, fidele chres-
tien et tres catholicque, en bonne, grande et glorieuse
renommée : qui fait conjecture et argument du salut de
son ame, qui doibt bien consoler vostre haulle majesté,
car amour de pere doibt plustost chosir et aymer la bonne
wie el vertueuse de son enffant , que la longue : Quia non
quantum vixit sed quam bene, inspici oportet , etc.
» Il y a plus, Sire, et qui doibt beaucoup faire à vostre
consolation , ja soit que nostre bon roy, cui Dieu pardonne,
( 456 )
feust filz unicque de vostre tres sacrée majesté , toutesfois
il ne vous a point delaissiet imporveu d’enffans.
» Il vous a delaissiet, pour vostre consolation, ce tres
noble tresor messeigneurs et mesdames nos princes et prin-
cesses, vos nepveux et niepces, ses enffans, esquelz rena-
tus videtur.
» Et sy vous a delaissiet ses pays paisibles, ses subjects:
en bonne concorde , union, amilié et intelligence les ungts
aveuc les aultres, et en bonne obeissance et leaulté envers
lui, comme ilz sont et demourront, Dieu en ayde , envers
vous , Sire.
» Et posé, Sire, que nos princes el princesses soient
bien jeusnes et en bas eage, neangimoins Dieu ne les a
pas oubliés ne delaissiés impourveus de tuteur et deffen-
seur.
» Il les à mis et delaissiet, et nous consequamment, en
vostre garde, main, tuitelle, defence, manbournie et pro-
tection ; ainsi l’avons tousjours desiré, entendu, tenu et
congneut , entendons, desirons, lenons et congnoissons,
sachans que nature l'enseigne et droit l’ordonne, et l'eus-
sions, Sire, voullentiers ainsi dist et declairiet ouverte- M
ment à l’assamblée generalle des estals de vos pays d’embas. |
» Mais, Sire, il sambla lors plus expedient et pour ung.
mieulx actendre de en faire declaration à vostre tres sacrée
majesté, par ce, Sire , que nous sommes pres du feu , faim
sans haye et frontiere à vos autres pays du costé de France,m
et pour ce temps y avoit grand assamblée de gens de guerre
à l’entour de nous, ne scavons à quelle fin , et vous estiés
loingts, Sire; au moyen de quoy, nous craindions que
dommage ou inconvenient n’en advint, non point, Sire,
que nos courages ne fussent telz, aussi entiers et leaulx
envers vous que les avez trouvés par cydevant et trouverés
ban
( 457 )
aincoires de plus en plus; vous supplions, Sire, en toute
humilité, ainsi le voulloir croire et prendre de bonne part.
» Au surplus, Sire, combien que vos bons et leaulx
subjectz de Haynault et de Namur congnoissent assés vostre
bonté et nature avoir esté et eslre tousjours enclint de soy
meismes à les ayder, conforter et subvenir , et qu’il ne
feust besoing vous exciler ou esmouvoir à ce faire, toutes-
fois quia zelus domus tue commedit me, Sire, il leur a
samblé que leurs courages ne eussent point esté assouffis
ne appaisés, et ne se feussent pas acquittés ne mis en
leur leal debvoir, s’ilz n’euississent envoyé devers vous leurs
depputés vous declairer ces choses, et remonstrer leurs
intentions, desirs et bonnes voullentés.
» À ces fins, Sire, sommes icy envoyés, monsieur le
prevost de‘Mons pour vostre pays de Haynault, et moy
pour vostre pays de Namur, non point, Sire, telz per-
sonnages ne en tel nombre qu’il seroit requis envoyer de-
vers sy haulte majesté que la vostre.
» Mais, Sire, ilz se sont tant confiés en vostre doul-
ceur et bonté, veu l'amour que leur avés tousjours de-
monstré ; que ne aurés point regard aux pelits personnages,
ne au petit nombre de leurs depputtés, ainçois à leurs
bonnes voullentés et affections.
» Et soubz ceste confiance, Sire, nous vous supplions
en toute humilité et obeissance qu'il plaise à vostre tres
haulle majesté avoir les pays, les subjectz, ensamble leurs
affaires, en vostre tres haulte et tres noble recomman-
dation.
» Et pour monstrer que les ayés pour recommandés et
en vostre souvenance , qu’il vous plaise prendre la cherge,
tuitelle et mansbournie de messeigneurs et mesdames nos
princes et princesses, et consequamment de nous, voz
{ 458 )
subjectz et les leurs, en nous recepvant en vostre garde,
tuitelle, deffense et protection, tellement que nous puis-
sions congnoistre , Sire , que nous soyés comme avés tous-
jours esté, sicut acquilla provocans ad volandum pullos
suos et super eos volitans.
» Et, pour commencher entretenir et regler nos af-
faires en bon ordre, rigle et entretenement, que vostre
plaisir soit nous faire tant d'honneur que de descendre
en vos pays d’embas , et nous voulloir visiter ad videndum
in bonitate electorum tuorum ; ad letandum in gloria :
gentis tue, ut lauderis cum hereditate tua ; ostende no-
bis faciem tuam, et salvi erimus ; el, en ayant regard
aux choses advenues en temps passé , pertes et souffrances
que avons eu et soubstenu , et à la disposition du temps
present, vous plaise, pour le bien des pays êt subjectz,
nous tenir en paix et bonne justice.
» Vous declairant toutesfois, Sire, que là où l’on voul-
droit entreprendre à tort sur vous , Sur nous, ou autres
vos subjectz, ou nous grever ou adommager, nous y voul-
drions à nos petits povoirs resister , el en ensuivant ce à
quoi nature nous submet et oblige, nous garder et def-
fendre, sans y espargnier traveil de corps, peril de per-
sonne, ne despense de biens.
» Et, pour accomplir par effect ce que par parolles nous
vous declairons de coeurs ouvers, vous offrons ce que bons
et leaulz subjectz sont tenus faire et offrir à leurs princes
et seigneurs, et qui est escript à nostre doctrine, Judith,
cal 4 (1): Omnis civitas nostra, omnis possessio uni-
verse facultatis atque familie nostre in conspectu tuo
(4) Sie au MS. par erreur : le passage cité est au chap. IE.
À i
|
À |
M.
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"+ '
( 459 )
sunt omnia ; sub lege tua, nos jam et filii nostri servi
tui sumus , elc. ; vent, etc. ; utere servicio nostro, sicut
placuerit tibi.
» Sire, en eflet, pour toui comprendre , nous vous
nos biens , toutte ouverture , obeissance , subjection , aveuc
nostre tres humble service, pour en faire et user à vostre
;
}
presentons ce qui est vostre : nous , nos coeurs , n0s Corps,
tres haulte et tres noble discrétion. »
Sur l'invention de l'imprimerie, note communiquée par
M. Em. Gachet, employé aux travaux de la commission
royale d'histoire de Belgique.
J'ai l'honneur de communiquer à l’académie une note
que jai trouvée sur les marges d’un manuscrit du XV° siè-
cle, et qui me paraît du plus haut intérêt pour l’histoire de
l'imprimerie. La voici :
Istis diebus mira celeritate librarii seu librorum im-
pressores usi sunt , tradendo recentia doctorum et no-
vissime gesta satis vili pretio, nam novitati studentes
per illum modum indulgere denarios curaverunt. Unde
factum est ut AD INFERIORES HAS PARTES TURCHORUM GESTA
DENUNTIARENTUR ; Maxime tamen Parisius in alma ma-
tre studiorum omnium comportabantur , ubi diebus iis
hœc copiavi , nec multo post monachus Dunis effectus ,
semper quæ potueram addere marginibus annotavi, qua-
tenus in parte miranda contingentia posteris in testi-
monium asserenda relinquerem.
L'auteur de cette note se nommait Adrien de But, et il
était né en 1437 dans le polder de Marlemont près de Saef-
( 460 )
tinghe. En 1457, après avoir étudié tour-à-tour à Malines, à
Bois-le-Duc et à Louvain, où il fit ses humanités sous Émeric
de Campo, il quitta la Belgique pour se rendre à Paris, et
ce fut dans l'université de cette ville qu’il acheva ses études
sous le célébre Gilles de Roye. Il nous apprend lui-même
que, vers 1458, Jean Crabbe de Hulst, ami de sa famille,
étant devenu abbé du monastère des Dunes, il se décida
à prendre l'habit dans cette maison; mais que, n'ayant
point encore obtenu son grade de maître en théologie,
et, d'un autre côté, venant de lire la letire de Pétrarque
sur le double mariage du diable, lettre dirigée contre
les moines de Gileaux , il eut encore certains scrupules,
ce qui lui fit ajourner sa prise d'habit. En 1460 enfin
tout fut résolu, et cette fois Gilles de Roye, son maître,
l'accompagna lui-même et fit sa profession au monastère
-des Dunes.
C'est donc entre les années 1457 et 1460 que nous pou-
vons placer l’époque dont parle Adrien de Saeftinghe.
1457, c'est la date du plus ancien livre imprimé à
Mayence. Paris n'a eu d'imprimeries qu'en 1470, et à
leur établissement s’est attaché le nom de Michiel Fribur-
gier, d'Ulric Ghering et de Martin Crantz. Nous voyons.
cependant par la note ci-dessus, qu'en 1458 ou 1459, on
colportait déjà dans l’université des livres imprimés qui se
vendaient à vil prix en comparaison des manuscrits, et ce
n'étaient pas seulement des bibles ou des missels, ce n’é-
taient pas des ouvrages de scolastique ou de théologie,
comme il nous en resle en assez grand nombre, c'élaient
des imprimés sur les événemens graves qui se passaient
alors en Italie, c’étaient les faits et gestes de Mahomet IF,
et des Turcs. Du moins il me semble impossible d’expli-
quer autrement le texte d’Adrien de Saeftinghe.
( 461 )
Que sont devenus aujourd'hui ces monumens précieux
de l'origine de l'imprimerie? Je ne sache pas que les sa-
vans ou les bibliophiles aient eu connaissance de ces es-
pèces de gazettes qui venaient jusqu'aux Pays-Bas, ad in-
feviores has partes , raconter les massacres, les incendies
auxquels l’Etalie était en proie sous la main de ses ennemis
terribles. Ces feuilles volantes, véritables proclamations
pour appeler les chrétiens à une nouvelle croisade, ces
bulles énergiques et brûlantes du pape Pie Il, pour con-
jurer les princes, de quels ateliers d'imprimerie émanaient-
elles ? Serait-il croyable que de Rome elles cussent été
envoyées à Mayence pour, de là , se répandre eu feuilles in-
nombrables sur le monde chrétien ? ou bien y avait-il dés
lors à Rome même tout ce qui constituait l'imprimerie , et
cela peut-être dans la chancellerie romaine ? Cette ques-
tion bien intéressante, je la livre à l'académie.
Il me paraît peu probable que les impressions dont il
s’agit soient venues d'Allemagne en France, et j'en ai dit
quelques raisons. Cela dérange, il est vrai, un peu loutes
les notions connues. Mais enfin la note d’Adrien de Saeftin-
ghe est la. Il ne reste plus qu’à l'expliquer.
Si l’on n’en tirait aucune conséquence eu faveur des im-
primeries romaines , il en resterait toujours un fail assez
curieux, c'est que des 1458 il circulait en Europe des do-
cumens imprimés sur les affaires du temps; et, sous ce
rapport-làa seul, la note d’Adrien de But mériterait encore
de fixer l'attention.
M. De Gerlache, directeur sortant , n'ayant pu assister
à la séance générale, communique à l'académie, par lin-
termédiaire du secrétaire qui en donne lecture, le rapport
. annuel qu'il vient de faire à M. le Ministre.de l'Intérieur,
( 462 )
sur les travaux de l'académie, pendant l’année 1838-
1839 (1).
La séance a été terminée par l'élection du vice-direc-
teur, et M. De Gerlache a été réélu pour 1840.
M. le baron De Stassart, directeur pour 1839, est en-
suite entré en fonctions, et a fixé l’époque de la prochaine
séance au samedi :8 juin.
OUVRAGES PRÉSENTÉS.
Faits et vues détachés sur certains points de théorie
chimique , etc. Feuilles 19 et 20. Par M. Van Mons.
Notice sur une nouvelle espèce d’épilobe, etc., par
G. D. Westendorp. Bruxelles, 1839. Broch. in-8°.
Catalogue des cryptogames observées depuis 1835
dans le Brabant et dans la province d'Anvers, par
C. D. Westendorp et G. C. Van Haesendonck. Bruxelles,
1838. Broch. grand in-8°. :
Journal historique et littéraire. 48° à 61° hvraisons.
Avril 1838 à mai 1839. Liége. 14 broch. in-&e.
Messager des sciences historiques de Belgique. An-
née 1839, 1°e livraison. Gand. Broch. in-8.
Nouvelles archives historiques, philosophiques et lit-
téraires. 2° année , 2° livraison. Gand, 1839. Broch. in-8°. ,
Belgisch museum, uitgegeven door J. F. Willems. 3°
deel. — 1° aflevering. Gent, 1839. Broch. in-8&.
(1) Ce rapport sera joint au Bulletin de la séance,
( 463 )
Mémoires de la société royale des antiquaires de
France. Tom. 14°. Paris 1838, 1 vol. in-8°.
Journal de la société de la morale chrétienne, t. 15.
Nos 4 et 5. Paris. Avril et mai 1839. 2 broch. in-8°.
Geological society of London : Proceedings, vol. WI.
| Nes 60 et 61. 1838-1839. — Address delivered at the
| anniversary meeting on the 15 th february 1839. Bythe
Rev. W. Whewell. — List of the fellouws. March 1, 1839.
» Londres. 4 broch. in-8.
| Comptes rendus des séances de l’académie des sciences
- de Paris. 1* sem. 1839. N° 13-15. Paris. 3 broch. in-4°.
| Bulletin de la société géologique de France, tom. X.
Feuilles 5-9. 1838 à 1839. Paris. Broch. in-8°.
Proceedings of the royal.society. 1838, n° 35 et 36.
— 1839, n° 37. 3 broch. in-8°.
Discours prononcé par M. Blondeau à la première séance
publique du concours ouvert, le 10 janvier 1839, devant
la faculté de droit de Paris. Paris, 1839. Broch. in-4°.
Recherches historiques sur les voies d'écoulement des
eaux des Flandres, etc., par l'abbé J. O. Andries. Bruges,
novembre 1838. 1 vol. in-8&.
ERRATA,
L Page 238, ligne 8; p. 241, lign. 14
et 16 ; p. 243, lig. 12et27. . au lieu de Pirria, lisez : Piria.
Page 238, lig: 10et 18. . . . — salirésine:, — salirétine.
MES CORP TEE — phlorirésine, — phlorirétine.
+ — 238, dernière ligne et p. 239,
OR EN AR ENNEMIS TER _— canadirésine, — canadirétine,
PPage 239, ligue 12 . . . . . _ résine , — rétine.
NT: 1. 0 0, — A=U«, dd Ut:
(464)
RAPPORT
Du directeur de l'académie royale de Bruxelles, à M. le
Ministre de l'Intérieur et des Affaires Étrangères.
Moxsreur LE Ministre,
Dans mon précédent rapport, j'ai rappelé sous quelles
auspices avait été formée l'académie des sciences et belles-
lettres de Bruxelles; quel avait été le but de sa création,
et quelle influence salutaire elle pouvait exercer sur le
progrès des sciences , des lettres ei des arts, au sein de
cette Belgique, qui a repris enfin sa place parmi les na-
tions européennes. L'académie continue à marcher dans Ja
même voie, et nous osons croire qu’elle justifie de plus en
plus la confiance du gouvernement et du pays. L'exposé de
ses travaux, que je vais avoir l'honneur de vous soumettre,
sera naturellement succinct, parce qu'il trouve son com-
plément dans nos mémoires, et dans nos bulletins men-
suels, auxquels l'académie a cru devoir donner plus de
développemens, à mesure que ses relations se sont éten-
dues parmi nous et à l'étranger.
L'académie avait proposé, pour le concours de 1838,
cinq questions pour la classe des lettres , et huit pour celle
des sciences. Un mémoire sur l’état de la poésie flamande,
depuis son origine jusqu'a la fin du règne d’ Albert et
Isabelle, a remporté le prix, conformément aux conelu-
sions de M. Willems; un autre mémoire sur l’influence
du règne de Charles-Quint, quant à la législation et aux
institutions politiques de la Belgique , a donné lieu à un
(465)
savant rapport de M. Raoux. Les rapports de MM. Willems
et Raoux, et celui de M. De Hemptinne sur un mémoire
relatif a la garance, ont été reproduits à la dernière séance
publique et imprimés dans nos Bulletins. Il appartenait à
M. Willems , également versé dans l'étude de nos monu-
mens historiques, et spécialement dans la langue flamande,
d'apprécier la partie la moins connue et la plus originale
peut-être de notre littérature nationale.
Puisque j'ai commencé par les lettres, je parcourrai ra-
pidement les différens mémoires qui nous ont été commu-
niqués par ceux de nos collégues qui appartiennent à cette
classe. -
M. De Reïffenberg, qui sait répandre les fleurs de la
science sur loule sorte de sujets, nous a lu une piquante
nolice sur M. Raynouard, et un grand nombre d'essais
historiques et lilléraires, sur Charles-Quint considéré
comme renommée populaire; sur J. F. Foppens; sur
les patois romans usités en Belgique. M. le chanoine
De Smet a communiqué de curieuses observations sur /e
caractère et le génie de Ph. d’ Artevelde; sur l'élection
et la déchéance de Guillaume-le-Normand et sur Les
infractions faites à la constitution flamande sous le
régime de Marie-Thérèse. M. Roulez, des observations
sur {a condition politique des cliens dans l'ancienne
Rome; sur les vases vulgairement appelés lacryma-
toires ; sur la découverte de tombeaux antiques à Hol-
sthum dans le Luxembourg. M. Marchal, des considéra-
| tions sur les mêmes tombeaux de Holsthum. MM. De
Stassart, Cornélissen, De Ram, ont pris une part impor-
tante et assidue à nos travaux. M. Voisin, littérateur et
bibliophile instruit, nous a lu des considérations sur un
manuscrit de la chronique de Brandon, sur un projet
( 466 )
de catalogue, à l'usage des bibliothèques de toute la
Belgique. M. Jules de S'-Génois, une Notice sur les anti-
quités de la Flandres ; sur les confiscations exercées
à Malines , de 1767 à 1770; sur Antoine Sandérus.
M. Gachard, dont vous connaissez l’activité , et qui voit
souvent ses laborieuses recherches couronnées par d’heu-
reuses découvertes, nous a lu des observations sur l’am-
bassade extraordinaire , envoyée par Jacques 1° a l’ar-
chiduc Albert, pour demander justice contre Erycius
Puteanus , et une note sur l’Histoire des troubles des
Pays-Bas, par Vander Fynckt. M. Schayes a publié, en
1838, lesecond volume d’un ouvrage véritablement érudit,
et qui a dû nécessiter d'immenses recherches, intitulé : Les
Pays-Bas, avant et durant la domination romaine.
Je passe maintenant à la classe des sciences. M. Que-
telet, notre secrétaire perpétuel, a rendu compte, lors
de la dernière séance publique , des travaux de l'acadé-
mie, pendant l’année précédente ; et cet aperçu laisse peu
de choses à dire pour toute l'époque qu'il embrasse.
M. Quetelet, chargé de la correspondance de l'acadé-
mie avec tous les corps savans de l’Europe, ne laisse pas
de prendre une part continue à nos travaux intérieurs, et
de rendre à la compagnie des services, de jour en jour
mieux appréciés. M. Quetelet a présenté à l'académie le
Résultat de ses observations , sur les températures de
la terre, recueillies à l’observatoire pendant l’année
1838; sur une aurore boréale ; sur les étoiles filantes, «
M. Morren a lu plusieurs élégantes dissertations sur une «
branche de science qu'il cultive avec succés : sur l'Orga-
nisation des Jungermannidées ; sur la Morphologie des …
Ascidies ; sur lÆAnatomie des Musa ; un rapport sur un
intéressant travail de M. Gb. Phillips, de Liége, intitulé : 4
( 467 )
l Anatomie du cheval. M. Morren a donné en outre une
Notice biographique sur J.-P. Minkelers, dans V Æn-
nuaire de l’académie de 1839. M. Wesmael nous a
communiqué une Notice sur la synonymie de quelques
gorytes, et sur les chrysides de Belgique. M. Crahays les
résultats de ses observations météorologiques et des re-
cherches sur l'électricité par influence. M. Van Mons,
dont le zéle semble s'accroître avec l’âge , a envoyé à l’aca-
démie un grand nombre de notes roulant sur des expé-
riences ou des hypothèses chimiques. M. Dumont a présenté
un rapport sur la continuation des travaux de la carte
géologique pendant l’année 1838, et un mémoire étendu
comprenant des tableaux analytiques des minéraux et
des roches. Le recueil de nos nouveaux mémoires s’est
enrichi, en outre, de plusieurs autres travaux remarqua-
bles : d'un mémoire sur l’irradiation par M. Plateau, de
recherches sur les coquilles fossiles de Basele, Boom,
Schelle, etc., par M. De Koninck; de six mémoires de
M. Van Beneden sur l’ Anatomie des mollusques, dont
l'auteur continue à s'occuper avec persévérance , de deux
mémoires de M. Morren, sur le mouvement et l'anatomie
du Stylidium graminifolium et du Goldfussia aniso-
phylla ; d'un mémoire sur la pile galvanique, par M. Mar-
tens ; des recherches de M. Pagani sur quelques trans-
formations générales de l'équation fondamentale de la
mécanique , et d’un mémoire de M. De Reiïffenberg sur
quelques anciennes prétentiôns à la succession du duché
de Brabant ; M. Garnier a transmis une note sur la trans-
formation de quelques fonctions imaginaires ; nous de-
xons aussi des communications mathématiques à M. Chas-
les , notre correspondant, qui a enrichi nos mémoires du
travail le plus complet que possède la science sur l'his-
( 468 )
toire de la géométrie depuis son origine. MM. Thiry, Bel-
paire, D'Omalius d'Halloy, Timmermans, Cantraine, Kickx,
Lejeune , ont largement payé leur tribut, soit par d’utiles
communicalions personnelles, soit par de savans rapports
sur.les questions soumises à l'académie. Nous ne pouvons
oublier , en terminant, M. Dumortier, dont l’ardeur et le
talent embrassent à la fois la politique, l'histoire et plu-
sieurs branches des sciences naturelles, qui a rendu des
services de plus d’un genre à l'académie, et qui continue
de prendre une part journalière à ses travaux.
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l'assurance de
mes sentimens de haute considération.
Bruxelles, le mai 1839.
Le Directeur,
E. C. DE GERLACHE.
BULLETIN
DE
L’ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES
ET BELLES-LETTRES DE BRUXELLES.
1839. — N° 6.
————
Séance du 8 juin 1839.
M. Garnier, doyen d'âge, occupe le fauteuil.
M. Quetelet, secrétaire perpétuel.
CORRESPONDANCE.
Le secrétaire donne lecture d’une lettre de M. James
Yates, qui annonce que la prochaine réunion de l’associa-
tion britannique pour l'avancement des sciences, aura
lieu à Birmingham , pendant la semaine qui commencera
le lundi 26 août.
Il met ensuite sous les yeux de l’académie les résultats
manuscrits des observations faites sur les marées en sept
stations des côtes de Portugal. Ces documens réunis, comme
- ceux de Belgique, d’après l'invitation du gouvernement
Tom. vr.: 32
( 470 )
britannique, et pour favoriser les recherches de MM. Whe-
well et Lubbock , ont été communiqués obligeamment
par M. le conseiller De Macédo, secrétaire perpétuel de
l'académie royale de Lisbonne.
M. Carr Woods, membre de Ja société météorologique
de Londres, annonce que son intention est de faire un
voyage dans les régions intertropicales, dans la vue de s’y
livrer à des études de météorologie. Son absence se pro-
longera pendant dix à douze ans; il recevra avec plaisir
les instructions de l'académie ou les demandes de rensei-
gnemens sur des sujets scientifiques ou littéraires qui se
rattachent à son voyage.
RAPPORTS.
HISTOIRE.
MM. le baron De Reiffenberg, Cornelissen et le cha-
noine De Smet, font leur rapport sur le mémoire intitulé: »
Essai historique sur les anciens Belges, présenté par
M. Ph. Bernard , à la séance du 6 octobre dernier.
« Depuis long-temps, dit M. De Smet, on désire un «
ouvrage qui puisse nous faire connaître l’état ancien de :
la Germanie, l’origine de ses peuples , les élémens qui con-
stituaient leur société si remarquable ; l’histoire ancienne
d’un grand nombre des peuples européens présentera beau-w
coup d'énigmes aussi long-temps que cet ouvrage n’existera
point. M. Moke a touché à quelques-unes des parties dont
il doit se composer dans son Âistoire des Frances, mais”
il ne les à point approfondies; M, Schayes a donné plus”
er.
lotte "os Le
(471 )
de développement à ses recherches sur le même sujet , et
l'Essai historique de M. Bernard tend au même but. Il
esquisse rapidement, mais avec une érudition aussi vaste
que sage , quelques-uns des traits qui doivent former ce
tableau intéressant; il fait un choix heureux de citations
et prouve assez qu’il est maître de sa matière. »
MM. les commissaires pensent du reste que M. Bernard
mérite les encouragemens de l'académie; que son mé-
moire doit être mentionné d’une manière honorable dans
le bulletin, et qu’on ferait bien de l'exhorter à le publier,
en l’invitant à étendre ses recherches. Ges conclusions sont
adoptées.
MAGNÉTISME TERRESTRE.
L’académie, conformément aux conclusions de ses com-
missaires, MM. Crahay et Plateau, ordonne ensuite l'impres-
sion dans ses recueils du mémoire présenté à la séance du
6 avril dernier, par M. Quetelet, sur l’état du magnétisme
terrestre à Bruxelles, pendant les douze dernières années.
L'auteur communique à ce sujet l'extrait d’une leitre
de M. le capitaine Duperrey , contenant sur l’inclinaison
de l'aiguille magnétique à Paris, de nouveaux renseigne-
mens qui complètent ceux donnés dans son mémoire.
« Les résultats que je vous adresse, écrit M. Duperrey,
sont relatifs à l'inclinaison magnétique; quant à la décli-
naison, je sais qu'on l’observe avec soin à l'observatoire,
mais les résultats ne parviennent pas jusqu’à moi. Voici
ce que je puis vous communiquer :
MM. De Blosseville (à lobservatoire), 21 mai 1827. — Méthode directe.
Inclin... . 1. . 6%51/,7
M Duperrey (à l'observatoire), 9 sept. 1834. — Méth. dir.
Aig. n° 1.
» n2.
» n°3.
Inclin. moy.
M. Duperrey (au dépôt des cartes), 3 juill. 1834. Méth, dir.
Aig. no 1.
» n°2,
» n°3
Moy.
M. Duperrey (au dépôt des cartes), 17 juill. 1834. Méth. dir.
Aig. n°1.
» no 2,
» n°3.
Moy.
M. Duperrey (au dépôt des cartes), 28 juill. 1834.— Méth. dir.
Aig. no 1.
» nm.
M. Duperrey (au dépôt des cartes), 9 sept. 1834. — Méth. dir.
Aig. n° 1.
» m2
» n° ST
Moy.
Nota. 11 est assez remarquable que j'ai constamment trouvé 6’ de
moins au dépôt des cartes, qui est au centre du faubourg St-Germain, …
qu’à l'observatoire, qui est au sud de Paris et de ce faubourg.
67 26,5
67 20,6
. 67 19,1
67 22,3
67 20,7
670 24/,4
67 28,4
67 26,7
6718/,2
67 20,5
67 23,0
67° 16/,0
67 21,0
67 20,2
670 23,8
67 21,2
67 22,0
6718/,7
67 19,2
67 24,2
(473) |
MA. D’Abadie et Lefebvre (à l'observatoire, sous les yeux de MM. Bou-
vard jeune et Laugier).
1836. Le 2 août, de 1! à 5l du soir :
Aig. no 2. Méth. dir.. 670236
» ind.. 67 20,8
» Le » de 11h à 2h15 du soir :
Aig. no 1. Méth. dir.. 67 23,5
» ind. 67 20,2
Inclin. conclue. . 67 22,0
M. Lottin (à l’observ., conjointement avec MM. Laugier et Plantamour.)
1836. Le 20 avril, de midi à 2h45’:
Aig. no 1. Méth. dir.. 67025',9
| » ind. 67 27,4
| » Le2l » de 1h30’ à 3h15’ :
Aig. no 2. Méth. dir.. 67 26,7
» ind. 67 27,4
Inclin, moy. . . 67 26,8
» Le 10 octob.de 1h à 4h :
Aig. no 1. Méth, ind.. 67 23,5
» Le 10 octob. de 1h à 4h:
Aig. no 2. Méth. ind. 67 26,9
Inclin. moy. . 67 25,2
Récapitulation.
MM. De Blainville, à l’observatoire royal, 21 mai 1827. Incl. 67°51/,7
Duperrey, — 9 sept.1834. » 67 26,5
— au dépôt des cartes, 3 juill.183%4, » 67 20,6
25 — 17 juill.1834. » 67 19,1
_— — 28 juill.1834. n» 67 22,3
_ $ — 9 sept.1834, » 67 20,7
D’Abadie et Lefebvre, à l’ob. royal, 2 et 5 août 1836. » 67 22,0
Lottin, à l’observatoire royal, 20 et 21 avril 1836, » 67 26,8
. — 10 oct. 1836. » 67 25,2
( 474 )
Ces résultats rapprochés de ceux obtenus antérieure-
ment, donnent pour Paris une diminulion annuelle de
l'inclinaison magnétique qui s'élève à 3,7; de sorte que,
d’après tous les renseignemens que M. Quetelet a pu re-
cueillir, la diminution de l’inclinaison a été
Pour Milan de, . . . . . 3,87 paran
St-Pétersbourg . . . 3,8 »
DAPIRE Re ee es ae el Rte 7 »
BEI CE CN OT »
Christiania. . . . . 3,66 » 4
AUTRE CL L'EAU »
Bruxelles". 5-00 00,4 »
Florence 14,704 .: 08/8 »
Stoekholmte- .1,1,. . 93,15 »
Gættingue. . . . . 3,05 »
Londres "000 US, 4 »
Dublin fre Lee et »
Upsal re). MR 720 D
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
ANALYSE ALGÉBRIQUE.
Sur la résolution des équations binomes et de quelques
équations trinomes , par M. J.-G. Garnier, membre de
l'académie.
Soit la fonction rationnelle de x,
A + Bac Oz 4 Dai + ss sc) ER, 13) MN)
si on l’égale à zéro et qu’on parvienne à résoudre l'équa-
( 475 )
lion résultante, on aura généralement & + bx pour les
facteurs réels du premier degré, et RL
Din hi 00 MISE NE. FOR)
pour ceux du second; comme les racines de cé dernier
. . . ù . ë
sont supposées imaginaires, on aura la relation ,, <1,en
sorte qu’on pourra faire
0 Fee
KE — cos. M, d’où 2— 4h cos. M.
Portant pour + cette valeur dans le facteur (b), on aura
h°—2hk cos. M + k°x°. 7. . . . (b’)
d’où l’on tire, en posant £ 1.
æ—n [cos. Mæ+sin. M}/—1]=0 . . . (b”)
Substituant ces racines dans le polynome (a) égalé à
zéro, on aura les deux résultantes
A+Bn [cos M+sin. My/—1] |
+ Cn° [cos. 2M + sin. 2My/—1]
A ST OT ie Nes Lit "fe
+ Rw [cos. pM + sin. pMy/—1]
À + Bn [cos M— sin. My—11}
+ Cn°[cos. 2M — sin. 2My/—1]
Re Ne re et Lo ET LT
- .
+ Ra? [cos. pM — sin. pMy/—1 |
( 476 )
Faisant les combinaisons (ec) + (e’) et (e) —(e'), et divi-
sant la seconde par W/—1, il viendra
A+Bn cos. M+Cn° cos. 2M-+..... +Rnr cos. pM=—o. . (d)
+Bnsin. M+Cn° sin. 2M+...... +Ræ sin. pM=0o. . (d')
Avant de passer aux applications, nous placerons ici un
tableau des sinus des arcs de 3° en 3°, calculés pour un
rayon — 1, extrait des Réciproques de la géométrie , par
J.-G. Garnier :
sin. 0°— (1)
sin, 3 — _. (V5—1 +5)
sin. 6 = — (841) + er 3 (5/5)
sn. = = = 2 (y/B4 1) — VE)
sin, 12 = — 481) PA _. V5+v56)
sin. 15° — ee (y 3—1)
sin. 18° — - (5—1)
sin. 2° = — me (V/5+1) + us. V(5—V5)
sin.
sin.
sin.
sin.
sin.
sin.
sin.
sin,
(477)
de — I (541) 7e à)
27 = — — = (V5—1) + = (525)
PE
33e — EE (V/8—1) + = v(5+V/5)
36° — He V5)
= ae LE y)
420 — — — VE) + + v(5+5)
45° — ne
= sn + 65
in ne (/5+1) + . V(5—v5)
54e — a (841)
sin. 570 = —
sin.
sin,
sin,
sin.
sin,
sin.
sin.
sin.
sin.
sin,
sin.
60° —
63° —
66° —
69° —
72 =
75° —
78 —
81° —
84° —
870 —
90° =
(478)
v3
8-0) à (65)
8/2
V3
2
Ts VD + V4)
V3
g V5+D + SV EVE)
QE) + TE (5-5
1
32 v(5+1/5)
e 3+1
32 KL)
1 V3
AUDE 14014)
1 1
FEU A Mt dE
V3 1
er (5+1) + 12 (5-16)
v3—1 v3+1 |
2 VI) RE VERS
( 479 )
1° Assigner les facteurs réels du second degré des
équations @" + x?" dont la première n’admet que des
racines imaginaires et la seconde comporte les deux
racines réelles x = + a.
Composant a?" + x?" avec (a), on à
d’où il suit que les équations (d) et (d') se changent dans
les suivantes :
a+ n°" cos. 2m. M—0. . . + . . . . (e)
+ n°" sin, 2m. M—0, d'où sin. 2». M—0 . . (e'}
Donc, d’après (e’), l'arc 2m. M représente un multiple de
la demi-circonférence tr, ce qui réduit l'équation (e) à
celle-ci :
En" XH+HI—0. (f)
* Le signe + en avant de 1 répondant au cas où l'arc 2m. M
a LE tons nier éd cu ttes
est égal à zéro, ou à un multiple pair de la demi-circon-
férence ; et le signe — à celui où le même arc est un mul-
- tiple impair de 7. De l'équation (f) on tire
D Me me ES SU le din: (g)
comme la quantité a doit être réelle, il faudra, pour Île
binome a?” + x?” qui donne — en avant de #?”, prendre
le facteur — 1 , c’est-à-dire pour l’are 2m. M, un multiple
( 480 )
impair de la demi-circonférence ; et pour a — x?" qui
donne le signe + en avant de n°”, prendre le facteur + 1,
ou pour l’arc 2m. M, un multiple pair de x. Mais l'équation
(g) se réduit à
2m
V” 2 h
a —= n'=n—;—=h
en observant qu'à cause de R — 1 dans (a), on doit poser
k—1 dans (b'). Reportant ces valeurs de k. k', prenant
pour 2m. M le multiple impair (2u + 1)x pour a?" + x?",
et le multiple pair 2(4 + 1)rx pour a2”*-—x?", on aura ces
facteurs généraux du second degré
a” — 2ax cos.
F'H:S te OMS
1/4
a° — ax cos.
RE Ne RC
m
Pour le cas particulier de »m— 3 et le binome af + x5,
on fera dans (k),H=0,=1,—72, ce qui donnera trois
facteurs doubles
a°— 2ax cos. À 7r+xv'—a—2ax sin. 60°+ x’ —a— axy/3+2°
2 2 2 2 2
a° — 2ax cos. Er dn = + 2
a°—2ax cos. à r+2°—a"+ ax sin. 60°+2—=a"+ a2/3+2°,
dont le produit est en effet af + +5, Pour le binome aÿ—xt à |
on fera dans (k”), p —0 et b—=1; d'où résulteront ces M
facteurs
a°— 2ax cos. } 7 + 2° — a" — ax + 2°
a° + 2ax cos. $ r +2 0 +ar+r,
( 481 )
le produit
(a°—x")[(a’+2°) — ax] [(a°+2°) + ax] —=a$— 7x5,
on aurait pu poser
aé—x6—(añ+x)(a—2$)—(a+x)(a—x)(a—-ax+x")(a +ax+x")
et plus généralement
dx" — (am + x) (am — x");
2° Trouver les facteurs doubles des binomes a?"+1
+æm+1 dont le supérieur n’a que la racine réelle
æ——a, et l’inférieur que celle-ci x = + a.
Les facteurs du second degré à racines imaginaires,
sont encore en nombre ». En remontant aux équalions
(d) et (d'), on en déduira les suivantes :
a HE n°4 cos. [(2m+1)M]o. . . . (i)
sin: HMéma 1) M] 0... eus 707)
De (i) on déduit , en ayant égard à (7)
am-1
a = V + M UNIS
Or, a devant être réel, les deux facteurs sous le radical
doivent avoir le même signe, en admettant le signe su-
périeur de n?”+1 qui répond à a?”+1 + g°"+1, il faudra
que (2m +- 1) M soit un multiple impair der; et que pour
a — g2+1, le même arc (2m + 1) M soit un multiple
pair de x. D'ailleurs, on a toujours, comme précédemment ,
(482 )
a=n a Han, à cause de #— 1; substituant dans (b')
4 74e ei | :
ces valeurs de À et k et faisant M—=" CS
3 ï z pour 4
0] 1 m+
u +
ea g27+1 et M ( ) our a2+1 a+ 1 on
; En P 7
2m + 1
obtiendra ces facteurs doubles
Qu +1
——— 7
Don + 1
+ 27,0 ST 8, @) |
a? — ar cos.
af, D T+X
a? — ax cos.
2m+ 1
nat RO
Soit m=— 2, el on aura sous les hypothèses y —0o et
= 1,
a5ÿ+a5—(a+x)(a"— ax cos. 7+ 2°) (a°— 2ax cos. 5x + x) |
—(a+r)[a—2arx+1(p/8+1)+4"][a—2axx—1(/5—1)+2]
—(a+x) [Ce = +8) à _.
Ke-3.)
et
a5—25—(a—x) (a°— 2ax cos. ? 7 + 2°) (a°— Dax cos. Ÿ x + 2)
—(a—x)[a—2ax X 1(V/5—-1)+2"1[a"+2a7 X 4 (V/5+1)+2°
(a a ax 8
(as) [(o+ +) TV |
(CEE TA
produit facile à effectuer.
«
3° Proposons-nous d'assigner les 2m facteurs hino-
mes du trinome,
Am
2m 2 4
G — a rcos.p+r”
(1)
En le comparant avec la formule (a), on obtient A—a,
0... , R—1, d'où k—1, enfin p—= 4m: si l'on
représente par L le coefficient du terme où x a pour expo-
sant 2m, on aura L = — 24?” cos. o. L'équation (d) qui
renferme trois termes , donnera
4 2 2m 4
a’ —2a cos.oXn cos. 2m.M-+n" cos. 4m.M—o. ([')
et l'équation (d') qui n’a que deux termes, donnera
2 2m . am ;
— a" cos.o X n°” sin. 2m.M+ n°" sin. 4m. M—o. (l”)
Divisant (2) par 2n°" sin. 2m.M, en observant que
sin. 4m.M — 2 sin. 2m. M cos. 2m.M , on en tirera
° a?m cos. %
n°" é i Fe (2)
cos. 2n.M
Substituant pour #?”' sa valeur (7) dans (/'), on a , toutes
réductions faites,
sin*. z cos’. 9 tang”. 2m.M— 0, d'où tang. 2m.M—tang. #
(484 )
el par conséquent
COS. 2m Mens 9 ea NET)
Donc l'équation (7) donne
n— ==.
D'ailleurs, d’après (ZT), #
D
à 2
cos. 2m. M— cos. (2ur +»), d'où M— er .
% 2m
Portant ces valeurs de » ou k, de M et faisant 41
dans (b’), on aura le facteur général double
dur +
a° + dax cos. ue
Din
Aie Ce SOIN
où on supposera
emo Me auTieS = m — |.
Soit, pour exemple, le trinome aÿ—a“xt+ x qui
revient à
as — Dai xé cos. & 7 + 28.
Comparant avec ({), on conclut m = 2 etp— 5%.
Donc en faisant u — 0, — 1 dans la formule (#), on trou-
vera
T 77
a? + 2ax de zx” et a° —Æ 2ax cos. Fe +8,
motions sd mt à à td |
(485 )
T
et parce que TE 15° , ces facteurs seront
2e
V3 + 1 ; v°3—1
SR TITRE Æ T a DE
*2 NOMME "à
a +ax De,
ce qui revient, pour la vérification, à effectuer le produit
L(a? + x) — a° x° (2 #. V3)] [(a° +27) — ax (2—y/3;]
qui rend la proposée.
4° Cherchons les facteurs du second degré du trinome
2(2m + 1 2m+1 2m+1 2(2m +1
ä (2m + j:r9% m + se cos. » Pr Cia : ? (x)
En suivant la marche tracée précédemment, on parvien-
dra aux équalions
2(2m+1 m1 2m+1
D En tent cos. o cos. (2m + 1)M
RAR CT 608, 2(2m+1)M—0. . . (p)
2m +-1
"+1 4 TT cos. y p)
cos. (2m + 1) M P
Substituant dans (p) pour n°”+1 sa valeur tirée de (p'),
on obtient , après les réductions,
tang. (2m + 1)M = tang. »,
cos. (2m + 1) M — cos. p — cos. (2ur + y) . (q)
Tom. vr. 33
( 486 )
Ge qui, d'après (p’), conduit à cette détermination
2m +1 Lee
nn Nu RES.
On tire de (g)
2ur + 9 :
M— CENT NT. TELE à (g )
de sorle qu’on a pour facteur double : ,
2ur + o
QŸ — 247 COS. "© + pe, (r)
2m + 1
Qu'on demande, par exemple, les cinq facteurs doubles
de a — à à + #10, qu'on écrira ainsi :
a — Da5 à5 cos. 4 7 + w10 :
on aura
p—35T, 2(2m + 1) —10;. d'où »m —°2.
Faisant &— 0, —1,— 9, le facteur (r), c’est-à-dire,
a
(Qu +i)r
2m + 1
— 2ar cos. HE Nr
devient
T
a" — 2ax cos. — + z°,
15
tant pour + ç que pour — 9: puis les quatre derniers
facteurs doubles sont
z . 2 2
a mnt TER a —,ax,+ 2°,
LC TN din D De.
(487)
2 4
a” + 2ax cos. Te MD a° A 20 COR LEE A x:
mais
3
Fe —=12°: donccos. L2e=sin To (/8-17 (5+y/5),
2 3
cos. = 008. 24e —sin. 66° = 1(//5+1) V5)
4 3
cos. E= cos.48°=—sin. Den ét (5+y5)
77 . V3
— cos.84°=sin.60 — — 1(/5+1 Ha —V5)
En disposant convenablement les facteurs doubles, il res-
tera à faire le produit :
D lei: 10/84 1) VV]
[a° +2’ + }ax(y 5 + D 55)
Gare dant 5 D 2/5]
Quad 50 +175
Le produit du second par le troisième, est
aû + Lax(p/5 + 1) + (1 + 5) 2 Loc
celui du quatrième par le cinquième, est
ai — Laix(y/5—1)+(1 — 5 AE ax + æi,
( 488 )
Le produit de ces facteurs se réduit encore à celui d'une
somme par une différence, c’est-à-dire à
a°r* ax v'5 à
(ai + zaîr + 3 RS) na es
produit égal à
as + 7x — a5a3 — aéré — a3x$ + ax? + 2
qu'il faut multiplier par le premier facteur a°— ax + x",
ce qui rend la proposée a!° — aÿx° + °°.
Remontons à l'équation
am — 1—0
et supposons »m décomposable en facteurs p et g premiers
entre eux : les racines de la proposée s’obliendront en
cherchant celles de
a —1—=0 et x7—1—0,
et en multipliant chacune des racines p de la première par
chacune des racines g de la seconde, produits qui seront
en nombre pg = m. En effet, soient &’ et 4” deux racines
de la première, et 6 et 6’ deux racines de la seconde, on
aura d’après (b”)
a Fe AT ; j PL
etes,
P P q q
c’est-à-dire
* ==,C08.
n°
X 27 + sin. — X 27 V/— 1
P
x = COS.
L
X 27 + sin. — X 27V/— 1
P
(489 )
74 pe
€ —= cos. — X 27 + sin. — X 27 V/— 1
q q
44 14
"= cos. — X 27 + sin. — X 27V/— 1
q q
Conséquemment
À A4 ru
D nn Pos
Pq Pq
LE | L' LA
a'€'— cos. EF ES Label dr + sin. els
pq Pq
Or, si 6’ pouvait être égal à «’6”, on aurait
; L DE LUE JR EL En 2e
Xq + Xp = q + L’p, ph ee ET RETTTL
mais }' et L’ étant moindres que p et X” et L” moindres
que g, la fraction = dont les deux termes sont premiers |
entre eux, ne serait pas irréductible. Ainsi la résolution
de l'équation
&l5 — 1 — 0,
se réduira à celle des équations
æ3— 1 —0o et 2 — 1 —0,
et, en faisant les produits successifs de chacune des trois
racines de la première, par chacune des cinq racines de
la seconde, on aura les quinze racines de la proposée.
Pareillement l'équation
230 _1]= 0
( 490 )
se réduirait à celle des équations
22 — 1—=0;88—1—=0, 25,— 1 —0,
et ainsi des cas analogues,
On démontre facilement que
2m m
æ —2x cos. my + 1 —0
a pour diviseur 2x cos. y + 1 : donc en faisant my— ;
d'où y — L, observant que cos. = cos. (9 + 247), et po-
sant successivement À=0,—1,..... = m—1,on aura
a — 07" Cô8. » + 1 = [r° — 2 cos. LATIN 1]
m
D) f/
AA el 1] X [z°— 2x cos. ? =
[r° — 2x cos. ose °
. . Û . . 0 . e « 0 . . .
X [r°— 2x cos. faites) +1],
mn
ce qui rentre dans les cas (3° et 4°).
Pour 9 —0 et y—7T, la précédente se réduit à (x + 1}.
Dans une note insérée dans le Bulletin du 2 mars 1839,
de l'académie royale de Bruxelles, nous avons donné cette
formule connue els
zV/—1=1l(cos, x +sin. 3}/—1),
. . . CNT MAN . T
L'indiquant un logarithme népérien; si on pose æ = ;,,
r désignant la demi-circonférence, et qu’on divise par .
V/—1, on aura
T 7% 1 413 gll \
DT 7 ie 4/10 - al, EE
“A F? LM 1
c'est-à-dire
den gere
V2 = =. À
£
mais
Z T T° x} L
e = +g-+t Fs-+ 523 + ete. — 4,81049,
donc
a
y—1Y — 0,207879. . . ..
Dans un autre écril, nous appliquerons ces principes
à la décomposition en facteurs de plusieurs séries infinies.
MÉTÉOROLOGIE.
Halos et parhélies. — M. Quetelet donne des rensei-
gnemens sur un phénomène lumineux qui a été observé
dans la journée du dimanche, 2 juin. Il était environ
10 heures et demie du malin lorsqu'il aperçut un halo
très - remarquable autour du soleil; l'aire, d’un gris
bleuâtre assez intense, élait bordée de couleurs peu pro-
noncées, parmi lesquelles on distinguait cependant bien le
rouge , le jaune et le bleu ; le ciel était en général couvert
de petits nuages blanchâtres cirrho-cumulus. La matinée
avait été assez fraîche comparativement aux jours précé-
dens; le thermomètre centigrade, qui s'était élevé la veille
jusqu'à 21 degrés, était descendu à 8 degrés, tandis qu'il
est remonté à près de 20 dans l'après-midi, et pendant
l'apparition du phénomène qui s’est prolongée jusque vers
( 492 )
le soir. Plusieurs mesures prises successivement , ont donné
pour valeur moyenne du rayon de ce halo 22°27. Le
vent, assez faible, soufflait de l'ENE. Les indications des
instrumens méléorologiques pendant la journée, ont été
les suivantes :
: THERMOM.
BAROMÈTRE. TUERM. EXT.| HYG. SAUSS,
du bar.
9 heures du mat. 756,85
ROUX 0 de el Le 756,26
4 heures du soir . 754,34
9 heures du soir . 754,06
Le phénomène, vers 2 heures de l'après-midi, présen-
tant à peu près les mêmes apparences que dans la matinée,
M. Quetelet ne jugea pas à propos de prolonger ses obser-
valions; cependant, vers 6 heures du soir, il se forma
un halo exlérieur et presqu’en même temps deux parhé-
lies. M. Quetelet communique à ce sujet Ja lettre suivante,
de M. C. Willaert, professeur de physique à Alost, dans
laquelle on trouvera en même temps quelques nouveaux
renseignemens sur l'état du ciel pendant la matinée.
«La matinée avait été fraîche. Le vent soufflait entre le
nord et l’est. Beaucoup de vapeurs blanches, semblables
à une gaze légère qui flotte au gré des vents, volti-
geaient dans l'atmosphère. Vers midi, ces vapeurs vinrent
en partie se placer devant le soleil, qu’elies voilaient légè-
rement et aulour duquel elles se disposaient à peu près
( 493)
circulairement. Un grand nombre de stries blanches,
ayant l'apparence de rayons, partaient du centre à la cir-
conférence. Tout à coup l'arc oriental commence à se
teindre des couleurs de l'iris. Le phénomène croît rapide-
ment, et en quelques minutes un halo paraît dans toute
sa beanté. Le soleil occupait le centre d'un espace circu-
laire d’un bleu très-foncé. Cet espace, ou l'aire du halo,
élait compris entre plusieurs cercles concentriques diver-
sement colorés. Le rouge, bien tranché, était en dedans,
l’orangé et le jaune étaient encore bien distincts; un large
cercle bleu, dont le bord extérieur tirait sur l'indigo,
enveloppait les trois précédens et s’effaçait insensiblement
dans l’azur du ciel. Je n'ai pas remarqué de couleur verte
ni violelle. Le phénomène n’a été vu d’abord que quelques
minutes dans tout son éclal; maisil s’est conservé avec une
moindre intensité jusqu’à 2 heures, époque où il a disparu
avec les vapeurs atmosphériques. À 4 heures, le ciel était
parfaitement serein. Mais à mesure que le soleil s'inclinait
sur l'horizon, les vapeurs se condensèrent de nouveau et
et le phénomène reparut plus beau que jamais. À 6 heures,
il ÿ avait deux halos, l'un intérieur bien formé, et l’autre
extérieur dont on ne voyait que quelques traces. Le dia-
mètre du pelit, que j'ai mesuré, avait la longueur de 45
à 46°; celui du plus grand pouvait avoir une longueur
double. Ce n’est pas tout encore, à la même heure (6 h.)
il s'est formé deux parhélies dans la circonférence du
halo intérieur. L'une de ces images du soleil élait à
l'extrémité australe, l'autre à l'extrémité boréale du dia-
mêtre qui passait par le soleil. L'image méridionale émet-
tait des faisceaux de rayons lumineux, qui, par intervalles,
avaient l'apparence d’une croix lumineuse, semblable à
celles que l’on peut produire avec les réseaux métalliques
( 494 )
de Fraunhofer. Après 6 heures, les parhélies ont diminué
d'éclat ; et, à 7 heures, elles avaient disparu ainsi que les
halos.
» Je crois devoir ajouter que, depuis 9 heures du matin,
le baromètre a baissé continuellement. L'hygromètre mar-
quait une assez grande sécheresse. Entre midi et 4 heures,
le thermomètre marquait plus de 20°, »
Pluie extraordinaire. — M.Quetelet entretient ensuite
l'académie de la pluie abondante qui est tombée dans la
nuit du 4 juin.
« Le mois de mai avait élé généralement remarquable
par sa sécheresse; le 1% et le 2 juin, il était tombé un
peu d’eau. La pluie du 4 commença un peu avant midi ,
et, jusque vers le soir, elle n'offrit rien de particuhier.
L'orage ne commença à se déclarer avec intensité qu'après
8 heures; la pluie était chassée avec force par un vent
violent , dont la direction venait du nord et qui, plus tard,
passa vers l’ouest. Pendant plus de trois heures , elle tomba
avec une abondance dont nous n’avons guère d'exemples |
dans nos climats. Les coups de tonnerre étaient forts etse .
suecédaient à des intervalles très-rapprochés; la foudre
éclata en plusieurs endroits , sans qu’il en soit résulté d’ac- |
cidens, du moins à notre connaissance. Mais il n’en est w
pas de même de cette pluie désastreuse : dans plusieurs en= F
droits les récoltes ont été détruites ; les campagnes inon=
dées. Dans le jardin de l’observatoire plusieurs arbres ont
été déracinés; trois peupliers ont été renversés ; le long'des
boulevards, on à lrouvé le lendemain un grand nombre
d'oiseaux morts ou tellement abattns par la pluie et le
fatigue, que les passans pouvaient les ramasser. Les com
munications par le chemin de fer furent interrompues en
vo sur
( 495 )
plusieurs endroits; un grand nombre de bestiaux à W1,
à Crainhem, à Dieghem ont péri avec leurs étables; mais
le désastre le plus déplorable est sans contredit celui
du hameau de Borgt, près de Vilvorde , qui a été presque
totalement détruit avec plus de quarante de ses habi-
tans, morts sous les décombres ou ensevelis sous les eaux,
L'orage en général a sévi avec le plus d'intensité dans
toute l'étendue de la vallée de la Woluwe et du côté de
Berthem, où l’on a eu à regretter également la perte de
onze personnes.
». La quantité d’eau tombée du ces différentes lo-
calités doit avoir été considérable, puisqu'a Bruxelles,
éloignée de quelques lieues du théâtre de ces grandes dé-
vaslations,, la quantité d’eau recueillie sur Ja terrasse de
l'observatoire , le lendemain. vers midi, s ’élevait à à 112,78
millimètres ; quantité énorme, puisqu'elle forme le sixième
de l'eau qui y tombe annuellement (675,75 millimètres
d’après les observations de 6 années ). Il convient de dire
cependant que l’eau recueillie était tombée pendant une
période plus longue que 24 heures ; en ne tenant compte
que de l'eau recueillie à 9 heures du matin, et qui s'é-
levait à 108,46 millimètres, cette quantité est encore
bien considérable pour nos climats, et nous n'avons jamais
eu, occasion d'en observer une aussi grande dans l'es -
pace d’un jour. On ne peut guëre comparer cette pluie
qu'a celle du 7 juillet 1833, pendant laquelle il tomba
plus de 56 millimètres d’eau en moins de deux heures.
Voici, d’après les {nnales de l'Observatoire , quelles ont
été les plus grandes quantités d'eau recueillies chaque
année , pendant l’espace de 24 heures, depuis que les
observations y ont commencé.
( 496 )
1833, le 7 juillet. . . . . 656,27 millimètres.
1834, le 27 août . . . , .' 39,71 =
1835, le 9 octobre . . . . 35,89 —
2636, ,le, 14, mars .., . 4,1,-,5:::42/01 —
1687; le10faout 0 7 RE RAGE ——
1838 (le 28 juin10. 1e Wu 10e7,84 —
» La pluie qui vient d'être signalée, nous le répétons,
n’est remarquable que pour notre climat; car, dans des
latitudes moins élevées, les pluies sont quelquefois beau-
coup plus considérables : il suffira de citer, par exemple,
celle dont M. Arago a parlé (1), d’après M. Tardy De la
Brassy, et qui a donné, le 9 octobre 1807, pendant l’es-
pace de 24 heures, 29 pouces 3 lignes d’eau, ou 791,80
millimètres : c'est plus qu'il n’en tombe à Bruxelles pen-
dant loute une année. On aurait peine à croire à une pluie
semblable, si l'on ne pouvait citer l'orage qui éclata, le 25
octobre 1822, sur un canton des environs de Gênes, et
qui produisit 30 pouces ou 812,10 millimètres d’eau.
» Voici quel a élé l'état des instrumens météorologiques
pendant la journée du 4 :
THERMOM.| THERMOM. | HYGROM.
BAROMÈT. 3
du bar. EXTÉR. |SAUSSURE,
9 heures du matin . . . 20,3 18,5 86,5
OURS ES SA. asso Lie. de 21,1 18,1 90,0
4 heures du soir. . . . 21,0 16,1 100,0
9 heures du soir. : . . 20,0 12,0 100,0
» Le mercure, dont l'abaissement n’a pas élé considé-
rable, a remonté assez vite après 9 heures ; à 11 heures et
demie , il indiquait 748,30 millimètres.
» Nous avons reçu, depuis, les observations d’Alost et de »
(1) Annales de physique, tom. XXXVI, pag. 413.
S ( 497 )
Gand, qui nous ont été obligeamment communiquées par
MM. Willaert et Duprez, à qui l’on doit des observations
méléorologiques failes régulièrement quatre fois par jour
dans ces deux localités. Ces communications tendent à
montrer que l'orage s’est manifeslé avec moins d'intensité
daus les Flandres que dans le Brabant. Nous les reprodui-
sons ici (1). »
Alost , le 6 juin 1839.
« Nous sommes assez heureux pour n’avoir pas éprouvé
les désastres que l'orage a causés en plusieurs autres
lieux. Toutefois la pluie a élé conlinuelle et presque tou-
jours battante depuis mardi midi jusqu’à mercredi vers la
même heure. Plusieurs fois, durant la soirée du mardi, le
tonnerre s’est fait entendre dans le lointain. De 3 à 5 heures
le vent a soufflé avec force. Ensuite il s’est calmé entière-
ment, pour recommencer avec plus de violence vers les 9
heures du soir. Alors aussi les éclairs et les coups de ton-
nerre se sont succédé assez rapidement, et ont élé assez
forts, mais toujours l'orage était loin de nous. Il parais-
sait être retenu par les collines des environs de Gram-
mont. J'ai appris que celle dernière ville a élé en partie
inondée; mais je n'ai point d’autres détails. La quantité
d’eau que j'ai recueillie dans mon udomèétre, durant les
24 heures de pluie, a été de 54",60. La veille, il en
était Lombé 5%%,26, et aujourd'hui qu'il a plu et grêlé,
“il y a eu 2%%,48 d'eau. Le barromèlre est descendu
| constamment du 1° au 4, etdepuis lors il remonte rapi-
+ dement. Mais comme il n'a élé que jusqu'a 750Mm dans
(1) Deux autres orages très-violens ont éclaté depuis : l’un à Anvers
“ct dans plusieurs autres localités pendant la nuit du 14 au 15; l’autre,
- dans la soirée du 18; il a ravagé Gand et ses environs et s’est dirigé
sur Anvers.
RP EE
( 498 )
son plus grand abaïssement , et que d'ailleurs sa marche a
été régulière, je crois que le tableau des hauteurs obser-
vées à différentes époques n'aurait rien d’intéressant.
»'Je dois ajouter aux détails que je vous ai transmis le 3
de ce mois , qu’un de mes élèves in’a assuré avoir vu’ une
troisième image du soleil, placée à 90° Est des deux pré-
cédentes. »
Gand, le 7 juin 1839.
10
« Laquantité d’eau tombée du 4 au 5, à midi, a été de
76, 5 millimètres , un peu plus que lé aégéiné dé OA ré- :
cueillie pendant le cours dé l’année détnière.
‘» Les variations barométriques n’ont offert rién aie
quablé : lé baromètre qui, le 4 à midi, marquait 752mm,9
par une température de 22°,0 RONDES, ést monté dans
la noit, de'4mm,4 """ ‘toy
» Le même jour , le vent a constamment soufflé du NE;
mais vers le soir il est tourné au NO. Le ciel est resté en-
tiérement couvert , et vers les 9 ? heures du soïr on‘à vu
briller un éclair trés-vif, qui a été suivi d’un coûpde ton- «
nerre. Les RASE vor linites observées ont été"21°,12
ét 9,87 centig. » “hd :
— M. Crahay a Srq les nouveaux nero
qui suivent, sûr les phénomènes dont il vient d’être’ parlé.
Halo'lé 2 juin. — On eù a vu un à Louvain depuis
10 heures du matin jusqu'a 2 heures de l'après-midi;
je n’ai pas appris qu’on y ait aperçu un parhélie.”
Orage du 4. — Depuis le 2 au matin où le baromètre
était à 756,07, la pression de l'atmosphère a continuel-
lement diminué jusqu’au 4, où le baromètre a atteint sas
moindre hauteur vers les 10 heures du soir, il était alors,
à 744,88. La direction du vent a été variable pendant la
( 499 )
journée du 4; elle a été successivement N,E, NNO, dans
la soirée elle m’a paru être NO, du moins à en juger d’après
la direction que suivait la pluie dans sa chute. Pendant
l'après-midi du 4 il était tombé un peu de pluie, à 5h.
elle devenait plus abondante, depuis 7 heures elle à été
d'üñe force extraordinaire; vers les 8 heures elle a pres-
que cessé, maïs après un petit quart d'heure des éclairs
se sont montrés, la pluie a recommencé presque aussitôt
et'avec plus de force qu'auparavant; elle a duré jusque
vers 1; heure de la nuit, en n’éprouvant que de loin en
loin de légers et courts ralentissemens ; les éclairs crois-
saient en intensité jusqu'à 10 heures; les coups de 1on-
nerre étaient peu forts comparativement à la vivacité de
la lumière des éclairs , et ils ne suivaient ceux-ci qu’aprés
. d'assez longs intervalles. — Le vent soufflait avec violence;
à deux heures de Ja nuit la pluie tombait toujours, mais
avec beaucoup moins d'abondance; elle a continué pen-
. dant toute Ja nuit el la matinée du lendemain. Le 5, à 8
- heures du malin, j'ai mesuré l’eau recueillie dans l’udo-
mètre; elle s'élevait à la quantité énorme de 19,8 litres,
» pour une surface d'ouverture du récipient de 1313,18
centimètres carrés, ce qui donne pour la hauteur de l’eau
- 15,078 centimètres, c’est-à-dire au delà de 1 ! litre par
+ décimètre carré : ainsi sur une surface d’un mètre carré
* il en est tombé 150,78 litres, donc 15,078 hectolitres
par hectare. D'après cela, il n’est pas étonnant que partout
les dégorgeoirs fussent insuffisans pour l'écoulement de
cette masse considérable de liquide, et que tous les ter-
_rains bas ou tant soit peu encaissés fussent inondés. Le
vent a fait aussi de grands ravages surtout parmi les végé-
- , lesquels, garnis de feuillages, présentaient de larges
surfaces à son action.
+
( 500 ) |
Étoiles filantes: —M. Quetelet présente ensuite à l’aca- |
démie le nouveau catalogue qu’il vient de faire des appa-
ritions les plus remarquables d'étoiles filantes. Ce catalo-
gue, beaucoup plus étendu que celui qu'il a publié dans
sa Correspondance mathématique ; tom. IX , pag. 432, a
été rédigé particulièrement dans la vue de reconnaître les
retours périodiques que pourraient avoir ces sorles de phé-
noménes. Il semble assez bien prouvé aujourd'hui, par
exemple, que les nuits vers le 10 août et le 12 novembre
mérilent une allenlion particulière. Il paraîlrait en être
de même de celle du 7 décembre. M. Brandès remarqua
le premier, en 1798, un nombre considérable d'étoiles
filantes à celle époque de l'année. M. l'abbé Raillard fit
une observalion semblable le 7 décembre 1830 (1). M. De
Paravey parle d’un bolide observé par M. De Waldeck, le .
12 décembre 1833 (2). En 1838, M. Paul Flaugergues ob-
servait à Toulon, dans la nuit du 6 au 7, un nombre con- .
sidérable d'étoiles filantes, et M. Herrick faisait des obser- »
valions analogues aux États-Unis (3). M. Quetelet ajoute w
que le même phénomène a élé vu à Bruxelles et consigné
dans les Annales de l'observatoire. Il fut remarqué d’'a-
bord par M. Bouvy, aide observateur, vers 7 heures etw
demie du soir. Les méléores , en nombre quadruple envi-
ron de ce qu'ils sont ordinairement, parlaient générale-\
ment des constellations de Pegase et du Bélier, et se diri-.
geaient des régions voisines du zénith vers les parties de
l'horizon entre le SE. et le SO. (Commissaires MM. Gratiai |
el Plateau.) 4
(1) Comptes rendus de l'institut, séance du 4 février 1839.
(2) Zbid., 18 juin 1838.
(3) Zbid., séances du 21 janvier et du 4 février 1839,
(501)
M. Quetelet annonce que son intention est de présenter
aussi un catalogue des aurores boréales , phénomènes qui
semblent avoir des rapports nombreux avec celui des étoiles
filantes , et particulièrement de leurs apparitions qui ont
coïncidé avec des apparilions extraordinaires de ces der-
miers méléores. Il sait que M. Wartmann a émis aussi des
conjeclures sur ce sujel dans un mémoire encore manuscrit.
Au sujet des aurores boréales, M. Quetelet annonce
qu'il a reçu une lettre de M. John Taylor, rédacteur du
Philosophical magazine , qui lui annonce que l'aurore
boréale du 5 mai dernier, dont il a été parlé dans les
Bulletins de l'académie, a aussi été observée à Londres.
Le même phénomène a élé vu en France (1).
Note sur l’irradiation, par J. Plateau, membre de
l'académie.
Dans la séance de l'académie des sciences de Paris, du
6 mai dernier, M. Arago a bien voulu rendre un cempte
verbal de mon mémoire sur l'irradialion, et a présenté en
même temps quelques observations sur la partie théorique
de ce travail. M. Arago pense qu'on ne peut conserver l’ex-
plication physiologique que j'ai cherché à confirmer, et
avance une nouvelle théorie d’après laquelle l'irradiation
serait le résultat de l'aberration chromatique de l'œil.
Les observations de M. Arago n'ayant pas été imprimées,
je n’ai pu les connaître d’une manière complète, el j'ignore
si elles tendent à réfuter les argumens que j'ai apportés
en faveur de la théorie ancienne. Je ne rappellerai donc
(1) Comptes rendus de l'institut.
Tom. vr. 34
( 502 )
pas ici ces argumens, et je me bornerai à examiner la nou-
velle hypothèse présentée par M. Arago.
Les physiciens reconnaissent , il est vrai, aujourd’hui,
que l'œil n’est pas un instrument parfaitement achroma-
tique, et il suit nécessairement de ce non achromatisme,
que les images des objets sont entourées, sur la rétine,
d’une petite bande d’aberration qui doit augmenter quelque
peu les dimensions apparentes des objets lumineux pro-
jetés sur un fond obscur, et diminuer celles des objets
obscurs projelés sur un fond lumineux. Mais cet effet
peut-il être sensible Gans les circonstances ordinaires, et
la petite bande d’aberration a-t-elle assez de largeur pour
qu'on puisse la distinguer et lui attribuer le phénomène
connu de l'irradiation ? Telle est la question que je crois
pouvoir résoudre.
Je ferai d’abord remarquer qu’en vertu de la cause
même qui la produit, la petite bande que l’aberration
chromatique de l'œil dessine autour des images ne peut
être exempte de couleurs. Par conséquent, si l’irradiation
manifestée par un objet blanc sur un fond noir était due à
celle cause , il semble que l'objet devrait paraître coloré w
sur les bords. Or parmi tous les observateurs qui se sont.
occupés de l’irradiation oculaire, aucun ne fait la moindre »
mention d’apparences colorées, et dans les nombreuses »
expériences que j'ai faites sur l'irradiation dans une foule w
de circonstances diverses, je n'ai jamais aperçu rien de“
semblable. Cette absence de couleurs visibles pourrait
difficilement être attribuée au peu de largeur angulaire
de l’irradiation : les personnes chez lesquelles le phéno= |
mène a beaucoup de développément se convaincront aisé.
ment, en répétant quelques-unes de mes expériences ou |
en observant l'apparence si connue du croissant, que lan
( 503 )
bande d'irradiation est d’une largeur bien suflisante pour
laisser voir ses couleurs si elle en avait.
En second lieu, je ne vois pas comment il serail pos-
sible d'expliquer par l’aberration de réfrangibilité, cette
loi singulière à laquelle est soumise l’irradiation , savoir
que lorsque deux objets d’un éclat égal ne sont séparés que
par un petit intervalle, chacun d’entre eux diminue l’irra-
diation de l’autre dans les parties en regard, et cela d’au-
tant plus fortement que les objets sont plus voisirs, de
sorte qu'enfin, lorsqu'ils se touchent, l'irradiation es! nulle
pour chacun d’entre eux au point de contact. Comment
admettre une action exercée par une image lumineuse sur
l’aberration produite autour d’une autre image ?
Mais on peut aisément décider par des expériences
directes si l’irradiation est, ou non, due à l’aberration
chromatique. Il suffit, en effet , d'essayer si lirradiation se
produit encore lorsque l’objet est éclairé par une lumière
homogène. Si dans ce cas on n’aperçoit plus d'irradiation,
on sera en droit d'admettre comme vraie l'hypothèse qui
attribue le phénomène à l’aberration chromatique de
l'œil ; mais si, au contraire, l'irradialion se montre encore,
et au même degré qu'avec une lumière composée égale en
éclat à la lumière homogène employée, il deviendra im-
possible de chercher dans l’aberration doni il s'agit la eause
du phénomène. Or j'ai exécuté ces expériences par les pro-
cédés que je vais indiquer.
La lumière homogène dont j'ai fait usage est celle que
donne, comme on sait, la flamme d’un mélange d'alcool,
d’eau et de sel. J'ai imbibé de ce mélange un paquet de
mèche de colon que j'ai placé derrière une glace dépolie
disposée verticalement. Le mélange allumé dans l'obscurité
me donnait une flamme volumineuse , et la glace dépolie
( 504 )
observée de l’autre côté, formait un champ lumineux d'un
éclat suffisant. Pour rendre la lumière plus homogène
encore, j'ai interposé entre la flamme et la glace dépolie,
un verre jaune d'une couleur intense. Tout étant ainsi pré-
paré, j'ai placé successivement devant la glace dépolie,
l'appareil à jour décrit dans le paragraphe 28 de mon mé-
moire, et celui qui m'a servi dans mes expériences de
mesure, après avoir amené dans ce dernier le bord vertical
de la plaque mobile dans le prolongement de celui de la
plaque fixe. Ces appareils se trouvaient ainsi projelés sur
un champ d’un éclat assez considérable, et d’une lumière
tellement rapprochée de l'homogénéité, qu’en les obser-
vant par réfraction à travers un prisme placé verticalement
à 5 mètres de distance , leur image non-seulement conser-
yait une parfaite neltelé, mais ne présentait latéralement
qu'une nuance verdâtre si légère, qu'il fallait beaucoup
d'attention pour l’apercevoir. Je ne dois pas oublier de
dire que, pour donner aux yeux plus de sensibilité, les
expériences n'ont pas été failes le jour dans une chambre
obscure, mais la nuit.
Or, dans les circonstances que je viens de décrire et
qui devaient nécessairement exclure les effets qui auraient
pu dépendre de l'aberration de réfrangibilité , les appareils
ci-dessus m'ont fait voir une irradiation très-développée.
Le même résullat s'est montré à MM. Burggraeve et Lefran-
çois, deux des personnes qui m'avaient aidé dans les expé-
riences de mesure rapporlées dans mon mémoire, et qui
sont, par conséquent, babiluées à juger des phénomènes
d'irradiation. Pour comparer ensuile les effets produits à
ceux que ferait naîlre une lumière composée et d’un éclat
semblable, j'ai placé à côté de la glace dépolie ci-dessus,
une autre glace pareille, derrière laquelle j'ai allumé plu-
ï ( 505 )
sieurs bougies disposées de manière à l’éclairer d’une
lumière uniforme, et j'ai éloigné ou rapproché ces bougies
jusqu’à ce que l'éclat de cette seconde glace parût égal à
celui de la première. Un écran opaque séparait d’ailleurs
les bougies de la flamme d'alcool, de manière que chacune
des glaces ne recevait qu’une seule des deux lumières.
J'avais ainsi deux champs lumineux d’un même éclat, mais
dont l’un était éclairé par une lumière jaune homogène,
et l’autre par une lumière qui, sans être blanche comme
celle du jour, est cependant évidemment assez composée
pour le cas dont il s’agit. J'ai placé alors devant ces deux
champs lumineux, des appareils d'irradiation identiques
entre eux, de mañière qu’en les observant simullanément,
il était aisé de voir si les irradiations développées par les
deux lumières différaient sensiblement l’une de l’autre.
Or cette comparaison faite par les deux personnes dont j'ai
parlé plus haut et par moi , ne nous a montré aucune diffé-
rence appréciable : les deux appareils manifestaient une
irradiation prononcée, et celle qui provenait de la lumière
composée n'avait ni plus ni moins d'étendue que celle que
faisait naître la lumière homogène.
Ces faits conduisent donc, me semble-t-il, à cette con-
clusion , que s'il faut admettre l'existence de l’aberration
de réfrangibilité dans l’œil, on doit attribuer l'irradiation
à une autre cause; et que l'effet de l’aberralion doit être
considéré comme entièrement masqué, dans les circon-
stances ordinaires , par la bande d'irradiation.
( 506 )
ORNITHOLOGIE.
Notice sur un merle inédit , par M. B. Du Bus, de la
Chambre des Représentans.
GENRE MERLE, ( Turdus L. et auct.)
MERLE MÉLANOTE.
ToRDUS ( Peérocincla ) MELANOTUS.
( Bull. de l’acad. du mois d'avril 1839.)
Le genre Turdus dans lequel se trouvent réunies un si
grand nombre d’espèces, a été divisé par les auteurs en
plusieurs sous-genres. L'un de ces sous-genres a été formé
pour recevoir un pelit nombre de merles qui vivent soli-
taires dans des contrées rocailleuses, et dont le bec est
allongé, comprimé, peu élevé, légèrement fléchi; dont
les ailes sont longues et la queue médiocre. Les couleurs
dominantes chez les oiseaux qui appartiennent à cette sec-
tion, sont le bleu et le roux.
J'ai sous les yeux une espèce que je crois inédite et dont
je vais donner la description. Elle appartient à ce petit
groupe caractérisé par Vigors, et auquel cet auteur a
imposé le nom de Petrocincla. M. Lesson, dans son Traité
d'ornithologie, appelle les oiseaux qui font partie de ce
sous-genre Merles solitaires.
Turdis pileo, nuch4, qulé et humeris lœtè cœruleis ; tænié per
oculos lat, auchenio, interscapulio tergoque summo nigris ;
tectricibus alarum, remigibus, rectricibusque subnigris,
pogoniis externis cœrulescente marginatis; speculo alarum
albo; pectore, abdomine, tergoque imo ferrugineis ; rostro
pedibusque fuscis.
Le Merle mélanote a 7 ponces de longueur totale ; le bec
Bulletins de L'Acadernr Tor. VI. lag. 507
TURDUS MELANOTUS.
( 507 )
a un pouce de la Commissure à la pointe ; la longueur du
tarse est de 11 lignes. Les ailes s'étendent jusque vers le
milieu de la queue. La première rémige est extrêmement
courte; la seconde est plus courte que les troisième et
quatrième, qui sont les plus longues de toutes.
Le dessus de la tête, la nuque et les épaules sont d’un
beau bleu d’azur lustré ; la gorge et les joues sont de cette
même couleur, mais plus terne; l’espace entre l’œil et le
bec, le tour des yeux, la région parotique , les côtés du cou
et le dos, sont d’un noir profond. Les couvertures des ailes
ainsi que les rémiges et les rectrices sont d’un noir brunâtre
avec leurs bords extérieurs azurés, à l'exception de la pre-
mière et de la seconde rémige et de la premiére rectrice qui
sontentièrement de la même couleur. Les pennes secondaires
des ailes ont vers le milieu de leur longueur une tache
blanche qui occupe toute la largeur des barbes extérieures ;
ces taches réunies forment un miroir sur l'aile dans l’état
de repos. Le bas du dos et le croupion sont d’un roux ferru-
gineux. Toutes les parties inférieures sont de celle même
couleur, mais plus pâle.
Le bec est noir brunätre, à bords jaunâtres vers la com-
missure , les pieds sont bruns.
Le Merle mélanote habite le Chili. Il fait partie de ma
collection.
BOTANIQUE.
Sur deux nouvelles Scrophularinées du genre Axexrowra ,
par J. Kickx, membre de l'académie.
Fondé par Humboldt et Bonpland en 1814, l'Angelonia,
( 506 ) |
dont les affinités ont élé long-temps méconnues, forme
aujourd’hui, avec cinq ou six genres voisins, la petite
tribu des Zeminieridées de Bentham.
Quatre espèces, toutes de l'Amérique méridionale et du
Brésil, sont décrites. Elles portent les noms d’4. salica-
riæfolia , minor, integerrima el procumbens.
Une cinquième fleurit aujourd’hui au jardin botanique
de Gand. Elle y est provenue de graines adressées de l’île de
Cuba au gouvernement belge, par nos jeunes naturalistes,
MM. Linden et Ghiesbrecht.
L'élégance de cette nouvelle espèce ne peut manquer de
la faire rechercher et de la répandre par la suite dans nos
serres, où l’on ne cultive jusqu'ici que lÆ. salicariæfolia.
Elle est entièrement hérissée de poils blancs, élalés , ana-
logues à ceux de l'Épervière, vulgairement appelée Oreille-
de-souris. C'est ce qui me porte à la nommer 4ngelonia
pilosella. (Foir la figure ci-jointe.)
Ses tiges , longues de deux à trois décimètres, sont ob-
tusement lélragones, procombantes, garnies de feuilles
sessiles, opposées, à paires croisées et d'autant plus dis-
lantes qu’on s'éloigne davantage du collet. Chaque feuille
est linéaire-lancéolée, à bords entiers, à sommet obtus, à
surface inférieure d’un vert pâle.
L'inflorescence se compose de pédoncules axillaires sim-
ples, uniflores, solitaires, disposés en grappe. Les fleurs
et les fruits qui leur succèdent, m'ont présenté tous les
caractères génériques énumérés par Endlicher (Gen. plan-
tar., pag. 672), dont la description est beaucoup plus
exacte que celle de Kunth (Synops. plant. æquinox. orb.,
nov. 11, 132).
Notre Ængelonia pilosella nous rappelle une autre
plante cougénère, que l'on cultivait, il y a plusieurs an-
( 509 )
nées, au jardin botanique de Bruxelles, et dont les graines
avaient été directement envoyées du Brésil par le P. Leandro
do Sacramento, qui rendit, comme on sait, de nombreux
services_à l’histoire naturelle.
Ces graines ne produisirent qu’un seul pied, qui mourut
avant d’avoir fructifié ; circonstance qui nous détermina à
ne faire pour le moment de cette espèce l’objet d'aucune
publication. Mais ramené aujourd'hui à l'étude du même
genre, et de mieux en mieux convaincu que la plante est
restée inconnue, nous avons jugé utile d'appeler sur elle
l’attention des botanistes.
L’'Angelonia Leandri (c'est ainsi que nous proposons de
la désigner) atteignit à peu près cinq décimètres de hau-
teur. Ses liges élaient létragones, glabres, dressées, et
donnaient naissance à des feuilles courtement pétiolées,
lancéolées-oblongues, aiguës, dentées en scie au sommet
et pubescentes. L'ensemble de l'inflorescence formait une
sorte de panicule à pédoncules axillaires simples, uniflores,
presque tous géminés. La fleur était plus petite et d’un
bleu plus foncé que celle de l'espèce décrite en premier
lieu, mais. tachetée du reste d'une manière analogue.
Dans le but de rendre comparatives et de rectifier en
quelques points les diagnoses de ce genre, nous en réca-
pitulons les caractères spécifiques comme suit :
1. À. ricoseuLa. UVob. . . Foliis sessilibus, lineari-lanceolatis, inte-
gerrimis, cauleque procumbente, setoso-pilosis.
{Icon nostra.) Cuba.
2 À. véanpur. (ob, . . . Foliis petiolatis, lanceolato-oblongis, apice
serratis, pubescentibus; caule erecto, glabro.
Brasilia.
3 À. sauicamiæroiaA. Humb. Foliis semiamplexicaulibus, lanceolatis,
dentatis , cauleque erecto, quadrangulo, pubes-
centibus. Caracas.
(510 )
4, À. minor. Fisch. . . . . Koliis basi attenuatis, lanceolatis, serratis,
cauleque erecto , teretiusculo, glabris. Zrusilia.
Precedente humilior et omnibus partibus minor. (Fiscn.
et MEY., Index quintus seminum hort. Petropolit.
Januar. 1839, pag. 33.)
5. A. rPRocumBENs. Mart. . Foliis petiolatis, elliptico-lanceolatis, ar-
gute serratis, basi ciliatis; caule procumbente,
diffuso, glabro, Prasilia.
6. À, inreGenimA. Spr. . Foliis. . . . . sparsis, lanceolatis, integer-
rimis; pedunculis racemosis; caule erecto . ..
Rio-Grande. |
Le manque absolu de tout autre renseignement sur celte
dernière espèce, nous a forcé de répéter textuellement la
phrase descriptive du Systema vegetabilium de Sprengel.
D'autre part, nous n'avons rien dit de l’Ængelonia cam-
pestris, parce que ses caractères carpologiques en font le
type du genre Tyracanrua, créé en 1823 par Nees et
Martius. (Voy. Beitrag zur Flora Brasiliens, dans les
Acta physico-medica natur. curios. Bonn., XL.)
Il est évident, d’après cela, que Sprengel a commis une
erreur de synonymie qu'il convient de relever , en rappor-
tant en 1827 (Cur. posterior, pag. 257), celte Angelonia
campestris a V Angelonia salicariæfolia.
PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE.
Observations sur la formation des huiles dans les
plantes, par M. Ch. Morren, membre de l’acadé-
mie , etc.
L'étude de la formation des substances utiles que les
Balleuns de ! Hatem Tor NT Jag.ito.
ANGELONIA PILOSÉLLA Kx
( 511 )
végétaux nous fournissent en si grande abondance, ac-
quiert de jour en jour plus d'intérêt, depuis qu'on se
rend compte des diverses phases que la nature leur fait
- parcourir avant de nous les présenter dans l’élat où nous
les employons. L'organogénésie des matières tinctoriales à
fait depuis quelque temps de rapides progrès ; elle a prouvé
que c’est la cellule végétale qui est le creuset où se for-
ment ces substances; l’histoire du développement de la
fécule a été envisagée sous un jour tout nouveau par
M. Payen, et celle du sucre vient de trouver son écrivain
en M. Decaisne, qui a reconnu aussi que c’est dans les
cellules de la racine de betterave, que le sucre se forme
par une élaboration de la séve modifiée et végétalisée.
J'avais depuis plusieurs années fixé mon altention sur le
développement des huiles dans les plantes, et aujourd’hui
que j'ai vérifié plusieurs de mes observations, j'ai cru que
le temps était venu où je pouvais faire connaître quelques-
unes de mes recherches. Il y a trop d'industries où les
huiles jouent le rôle principal pour ne pas trouver quel-
que intérêt à étudier la formation et le développement de
ces substances si éminemment utiles. La physiologie de ces
substances connue, on pourra mieux se rendre compte
des propriétés et des phénomènes qu’elles offrent.
M. Meyen nous a présenté dernièrement (1) l’état actuel
de nos connaissances relativement aux huiles fixes ou
grasses ; elles se forment pour lui, au dedans même des
utricules végétales; et comme dans l’amande, la noix, le
chevenis et le ricin, cet habile observateur n’a plus re-
connu de fécule , à l’époque de la maturité de ces graines
(1) Meyen, Physiologie , tom. K, p. 292, 1838.
( 512 )
oléagineuses, et que la fécule y était au contraire abon-
dante avant cette époque, il en a conclu que la fécule
avait servi à faire l’huile, comme la fécule peut produire
d’autres substances et notamment le sucre. Il a surtout
étudié la manière d'être de l'huile d'amande douce qui
exisle sous forme de gouttes dans les cellules mêmes de la
graine ; toutes les graines qui deviennent émulsives par
leur manipulation dans l’eau, lui ont offert le même phé-
nomène; et dans des embryons et leurs enveloppes, il a
reconnu que parfois des utricules végétales élaient entie-
rement remplies par de l'huile. Dans le lait de la noix de
coco, véritable émulsion, on voit cependant nager des
yeux d'huile entièrement séparée; l'huile d'olive est con-
tenue dans les cellules qui font partie du péricarpe.
D'une autre part, ce même auteur, dans son Mémoire
sur les sécrétions végétales (1), a prouvé que beaucoup
d'huiles volatiles siégeaient dans des organes glanduleux
particuliers, plongés au milieu du tissu cellulaire et for-
més essentiellement de ce même tissu. L'oranger, la rue,
le Melaleuca salicifolia, et beaucoup d’autres plantes,
déjà examinées par Guettard, sont des exemples connus
d’une telle structure (2).
Quoiqu’on n'ait pas comparé entre elles ces deux ma-
niéres d’être des huiles, on aurait pu penser que les huiles
volatiles étaient, en raison même de leurs propriétés, le
résultat d’une élaboration exécutée par des organes plus
compliqués et plus actifs que de simples utricules; et que
d'un autre côté, les huiles fixes ou grasses provenaient
(1) Meyen, Ueber die Secretions Organe der Plansen , pag. 55-59.
(3) Guettard, Mémoire de l’académie royale des sciences ; 1745.
(515 )
toujours d’un simple travail utriculaire. Le gisement et la
nature de ces huiles auraient , dans ce cas, élé également
distincts. Dans les observations que j'ai vu cilerà propos de
l'histoire de ces huiles, je n’ai pas trouvé qu'on eût signalé:
1° une huile volatile se formant et existant dans une cel-
lule; 2° une huile volatile se formant et s’accumulant sur
la surface d'un organe dermoïde plongé dans l'air; 3° une
huile fixe on grasse existant en dehors des cellules et dans
les méais intercellulaires. Seulement l'existence bien con-
nue d'huiles excitantes, qui s’élaborent par un travail de
sécrélion à la surface externe des coques polliniques, était
un fait qui prouvait déja que la seconde des conditions
dont je viens de parler, pouvait se réaliser: mais dans ce
cas aussi, on pouvait objecter que le pollen est primitive-
ment et pendant très-long-temps un appareil intérieur,
logé dans une cavité à l'abri du contact immédiat de l'air
(anthere); et alors aussi l'existence d’une huile à la sur-
face des coques polliniques constituait un fait qui rentrait
dans les condilions générales qu’on était en droit de con-
clure des travaux de Guettard et de M. Meyen.
C'est sur ces points-là que vont rouler les observations
que je me fais l'honneur de communiquer aujourd’hui à
l'académie.
Ces observations n’orl pas pour but seulement de con-
stater ces faits généraux , mais encore de faire connaître
des propriétés nouvelles de quelques huiles, et surlout de
démontrer qu'il est des plantes chez lesquelles l'huile est
aussi un contenu de cellules temporaire el se liant à l'exer-
cice de certaines fonclions où à la production de certaines
propriétés, pour lesquelles on n'avait pas songé jusqu’à
présent que ces matières fussent nécessaires. Ces quelques
pages se rattachent donc au perfectionnement de la phy-
siologie des plantes.
( 514 )
(I. Huiles volatiles se formant dans l’intérieur des cel:
lules.—La première fois que je vis une huile dans ces con-
ditions de formation bien exprimées, ce fut sur les étami-
nes mobiles du Sparmannia africana. Ces étamines sont
jaunes et rouges dans quelques-unes de leurs parties; en
examinant leur derme disséqué sous l’eau et isolé, je vis
sur de très-jeunes organes des cellules ovenchymateuses
sans nucléus ni globules, mais remplies d’un suc jaune,
aqueux et uniforme (fig. 12, À). Plus tard , un globule se
forma dans des cellules semblables , maïs il était simple et
paraissait jaune comme le liquide au sein duquel il avait
pris naissance (fig. 12, B). Ce globule grandit beaucoup
et il devint d’un très-beau rouge (fig. 12, C); alors aussi
le liquide jaune passa au rose et plus tard au rouge, et en
même temps les parois de l’utricule, siége de ces méla-
morphoses, devinrent plus épaisses (fig. 12, D). Sur des
cellules d’étamines adultes et mobiles, le phénomène avait
pris un aspect bien autrement intéressant ; un nucléus s'é-
tait formé contre la paroi de l'utricule (fig. 12, E, a); la
paroi était plus épaisse encore (fig. 12, E, b), et le liquide
intracellulaire était d'un beau rouge. L'huile s'était for-
mée en bien plus grande quantité. On en voyail de nom-
breuses gouttelettes d'un pourpre foncé, répandues dans
toute la cavité de l’utricule, et ces gouttelettes avaient un
mouvement rapide de rotation et de va et vient (fig. 12,
E, d); elles finissaient par se rencontrer, se loucher et se
confondre pour produire des globules plus grands; d'or-
dinaire une grosse goutte se trouvait ainsi au milieu de
gouttelettes plus petites. À mesure que la fusion s'opé-
rait, le mouvement des gouttelettes réunies devenait de
plus faible en plus faible, et les plus grosses masses ne se
mouvaient pas. Je voulus voir alors si ce mouvement Le-
( 515 )
nait à quelque effet vital de la cellule, comme une cyclose
du suc intracellulaire qui aurait fait tournoyer sur elles-
mêmes ces massules huileuses , libres de tonte adhérence
avec les parois , ou toute autre cause qui eût son siége en
dehors même des gouttelettes huileuses. Je brisai donc des
cellules par le compressorium , et j'en vis sortir ({g. 13, F):
1° un liquide aqueux , rose ; 2° des globulines vertes qui,
dans une cellulle entière , sont peu visibles, à cause de Ja
couleur rouge du liquide , seulement elles salissent par
leur teinte le rouge de l’utricule; 3° la grosse gouttelette
d'huile rouge et ses compagnes, les petites, qui se mirent
à tournoyer sur elles-mêmes et à voyager dans le liquide
du porte objet, comme de petits morceaux de camphre
déposés sur de l’eau. Comme si la matière volatile se per-
dait insensiblement , ces globules ralentissaient peu à peu
leur mouvement et l'immobilité complète finissait par les
faire coller à quelques corpuscules étrangers.
Une autre observation de ce genre que je fis sur l'O-
phrys ovata, est peut-être plus remarquable encore par
les conditions où la plante se trouve lors de l'existence de
ce phénomène. Je l'ai trouvé sur les feuilles de cette
plante, peu avant et pendant la floraison. Le derme supé-
rieur des feuilles est formé d'un prismenchyme fort tenace,
à cellules à huit faces. Il y a de ces cellules qui, remplies
d’un suc transparent comme l’eau , montrent des globules
très-nombreux , trés-pelits, noirâtres, quand ils sont petits,
et se montrant comme des gouttelettes, quand ils aug-
mentent de volume (fig. 1, À, a). Tous grouillent , tour-
noyent; c’est un mouvement continuel. Bientôt, on voit
ces points se réunir, devenir des gouttelettes plus grandes,
et on dirait alors voir de la matière brownienne (fig. 1,
B, à), entremélée de globules plus grands, mais toujours
( 516 )
actifs et tournoyans. Peu après ces globules se fondent les
uns dans les autres, et il naît une goutte mobile et tour-
noyante, absolument comme dans le Sparmannia afri-
cana, seulement l'huile est ici blanche. Dans d’autres
cellules plusieurs globules tournoyans se forment de la
même manière, el par-ci par-là on reconnaît de rares
cristaux intracellulaires (fig. 1, C, h). Enfin, il y a des
utricules où le globule huileux est solitaire et immobile
(g. 1, F, 9).
Le derme inférieur m'a offert : 1° des stomates où les
cellules sphinctériennes ont un nucléus pariétal (fig. 5,
À , a); 2° des cellules sinueuses ou prismatiques à nucléus
ou cytoblaste simple (fig. 5, B, b), à aréole (E, k, {), ou
entouré d’un cercle de globules (F, m). Ces cellules ren-
fermaient outre le liquide intracellulaire de la matière
brownienne en mouvement , des globulines vertes inertes,
et enfin de l'huile mobile (fig. 5,D,f,g,h).
Voilà l’ensemble des corps avec lesquels cette huile se
forme, et c’est bien de l'huile, car observant dans une
chambrette dont une fenêtre avait quatre vitres, la croi-
sée venait se réfracter en croix dans ces goullelettes ; le
bord des gouttelettes est ombré, et l'ombre se perd peu à
peu; quand on comprimait la cellule pour la briser et faire
sorlir le contenu , les gouttelettes d'huile surnageaient sur
le liquide, et se comportaient en tous url comme un
corps gras.
Sur un Ophrys ovata l'huile était rouge (fig. 4).
J'ai observé ces faits, comme je l'ai dit, avant et pendant
la floraison de l'Ophrys ovata ; j'ai voulu les vérifier sur
d’autres pieds après la floraison , il m'a élé impossible de
contenter mes désirs; plus aucun pied d’une prairie voisine
dela maison de campagne que j'occupe, ne me les a offerts de
( 517 )
nouveau , mais une feuille d’un des individus qui, trois se-
maines auparavant, m'avaient montré cesmouvemens, ayant
été submergée dans de l’eau, j'y ai retrouvé et l'huile
el la matière brownienne et leur mobilité.
Il est évident que ces observations prouvent que l'huile
peut se former dans les cellules, y séjourner quelque
temps et en sortir sans doute par imbibition pour graisser
le derme qui ne se laisse pas mouiller par la pluie. On
a toujours dit que c’élait la poussière glauque et cireuse
qui remplissait celte fonclion (iris, mésembryanthèmes,
prunes , etc.), mais je commence à croire que de l'huile
formée dans les utricules du derme, et sortant hors d'elles,
peut remplir le même office en graissant l'appareil cutané :
de quelques plantes qui vivent dans des atmosphères hu-
mides. Cetle fonction ne s’exécuterait que dans la parfaite
santé du végétal.
$ IL. Æuiles fixes se formant dans l’intérieur des cel-
lules. — Un nouvel exemple d’une formalion temporaire
d'huile, mais d'une huile sans mouvement et qui paraît
grasse ou fixe, m'a élé fourni par les feuilles du Colchicum
autumnale, étudié au printemps.
Dans cette plante , le derme est formé de longues cel-
lules prismaliques à six faces, à parois fort épaisses et
enclavant des stomates. On y trouve : 1° un liquide intra-
cellulaire aqueux et transparent ; 2° un nucléus ou cyto-
blaste simple et globuleux (fig. 7, a); 3° une matière
grumeleuse verte (b); 4 des globulines vertes, le plus sou-
vent agglomérées (c, d); 5° de la matière brownienne en
mouvement (e); 6° des globules d'huile immobile (f); 7° de
grands amas d'huile qui garnissent quelques parties de la
cavilé intracellulaire. L'huile est ici si abondante, qu’elle
forme des îlots dans le liquide.
Tou. vi. 35
( 518 )
Cependant cette huile n’est pas toujours à trouver sur
les feuilles de colchique. Il m’a paru que c’est à elle, trans-
sudée à travers les parois des cellules du derme, que celui-
ci doit de ne pas se laisser mouiller par la pluie. Quand
on ne voit pas l'huile dans les cellules, c'est que proba-
blement elle s’est répandue alors à la surface de la feuille,
et qu'elle a besoin de temps pour se réformer.
$ IL Fuiles fixes existant entre les cellules. —J'ai
examiné le gisement des huiles fixes dans beaucoup de
graines oléagineuses, et il m’a paru que dans quelques-
unes d’entre elles, comme le Linum austriaeum , Papa-
ver spectabilis, Brassica campestris oleracea , Yhuile
existait entre les cellules. Des tranches bien minces, cou-
pées avec un scalpel bien tranchant et sans retourner la
lame, mises dans de l’eau et examinées au microscope,
m'ont offert les aspects dessinés (fig. 8, 9 et 10), c’est-à-dire
partout des cellules distinctes et entre elles de petits amas
d'huile qui, au dehors des lames, s’accumulaient bientôt
en gouttes quelquefois fort grandes. La graine de colza a
des cellules prismatiques fort développées, granuleuses , et
je n'ai pu voir dans leur intérieur la moindre gouttelette
d'huile. Je pense donc que l'examen de la structure des
graines oléagineuses est à refaire, pour avoir une histoire
exacte de la formation des huiles.
$ IV. Æuiles volatiles se formant par sécrétion & la
surface dermique de poils. — L'exemple d’une telle for-
mation d'huile volatile ne m'a encore été fourni que par
le Passiflora fwtida. J'ai décrit ailleurs le singulier phéno-
mène que présente cette plante (1): « Quand on plonge
(1) Morren, Sur une matière qui tournoie dans l’euu à la manière du
( 519 )
sous l’eau un poil de cette plante, il se détache , si l'organe
est frais, vivant et bien portant, une gouttelette d'huile
verte qui surnage à la surface du liquide. Aussitôt, un
mouyement intestinal commence à s’ÿ manifester, la gout-
telette s'étend , puis se rétrécit, puis s'étend encore pour
se contracter; bientôt elle semble éclater avec force, et
alors la plaque qu'elle forme se déchire par des solutions
de continuité qui se rétrécissent à leur tour pour prendre
plus d’étendue une seconde après. Ces masses détachées
tournoient, s'élancent au loin, prennent des figures de
toute espèce; c'est un combat où tout est en mouvement.
Quand cette agitation a duré une dixaine de minutes, la
substance liquide commence à montrer des granules et
peu à peu toule l'huile se concentre, le mouvement dimi-
nue , il cesse bientôt tout-à-fait, et pour cela il a fallu que
toute la matière se condensât. Il est infiniment probable
qu'il y a là encore une matière volatile qui, aussi long-
temps qu’elle se dissipe, produit ces mouvemens gyra-
toires ; le fait est que les poils de cette passiflore sont
très-odorans, et leur sécrétion est fort âcre et irritante.
Une dame qui étudiait avec moi ces poils au microscope
eut le malheur de les porter à ses lèvres ; pendant deux
jours elle ressentit une cuisson insupportable à la bouche,
et il fallut des ablutions fréquentes d’eau tiède pour la dé-
barrasser de ce.mal. »
J'ai dessiné ici cet organe sécréteur du Passiflora fæ-
tida. C'est un des poils de la base du pétiole (fig. 11). On
woit, dans la tige du poil et dans son renflement céphali-
que, le faisceau de vaisseaux trachéens qui, dans les grands
camphre ; CORRESPONDANCE MATHÉMATIQUE ÊT PHYSIQUE ; publiée par A. Qué-
telet, 3e série , tom. 11, juillet 1838, pag. 339.
( 520 )
organes analogues de cette plante, se divise en deux par-
ties quand il est entré dars la glande. Le tissu cellulaire
de la glande ne montre pas de trace d'huile dans les cel-
lules, mais au dehors, sur la surface sécrétoire , l'huile
abonde. On la voit répandue en formes diverses en e,
fig. 11. Cette huile montre, quand elle est en repos, les gra-
nulations (e, fig. 11), semblables à la matière mouvante de
Brown. Il est certain que son mouvement si étrange n’est
qu’une exagération de la même cause qui fait mouvoir
l'huile de l'Ophrys ovata et du Sparmannia africana
dans l’intérieur des cellules.
EXPLICATION DE LA PLANCHE.
Fig. 1. Portion du derme supérieur de la feuille de l’'Ophrys ovata.
A. Cellule à granules huileux mobiles a.
B. Cellule à souttelettes plus grandes.
&. Gouttelettes d'huile.
i. Matière brownienne.
C. Cellule à goutte et gouttelette d’huile.
D. Cellule où se trouvent :
d. Petite goutte huileuse ;
f. Grande goutte huileuse;
h. Cristal déformé par l’union de deux cristaux.
E. Cellule contenant des gouttelettes mobiles d'huile et
f. Une grosse goutte de même substance.
Fig. 2. Gouttelette d'huile exprimant son mouvement de va et vient
par des flèches.
Fig. 3. Gouttelette exprimant son mouvement de rotation par des
flèches.
Fig. 4. Cellules de l’Ophrys ovata (derme supérieur de la feuille) à
globules d’huile rouge.
a. Gouttelettes en mouvement.
b. Goutte pariétale immobile.
c. Goutte pariétale immobile.
d. Gouttelette en mouvement.
Fig: 5. Portion du ‘derme inférieur de l’Ophrys ovata, pris sur la
feuille.
Letins de l'Académie
Lom. V1 : 7772 320.
e
VIT Ophrys ovata L.- 172 7- Colchicun autumnate. 1 gd. Lin austrincum.
72 ,9 lapaver spectabiles Li 10. Drassrea carnpestres oleifera LDEC. = lg 1“
Û “flora - fatida lig. 22: par rue africana.
Le … +
(s f F —< n
’
L 4 d
.
:
’
.
;
.
+
( 521 )
À, Stomate.
a. Nucléus de la cellule sphinctérienne. ,
B. Cellule contenant :
b. Nucléus ;
c. Granules chlorophyllaires ;
d. Gouttelettes huileuses.
- Cellule contenant des granules chlorophyllaires verts et des
gouttes d’huile.
nm
D. Cellule contenant :
e. Nucléus ;
f. Granules de chlorophylle ;
g- Goutte d'huile ;
hk. Matière brownienne.
E. Cellule contenant L
2. Matière brownienne ;
k. Nucléus à aréole;
Z. Globule intérieur,
F. Cellule à
m. Nucléus entonré de globules en cercle et de plis de la
membrane utriculaire.
Fig. 6. Derme inférieur d’une feuille d'Ophrys ovata, prise aprés la flo-
raison,
A Cellule sinueuse renfermant :
a. Nucléus;
8. Granules chlorophyllaires.
B. Stomate,
Fig. 7. Derme inférieur de la feuille d’un Cochicum autumnale , ob-
servé au printemps.
À. Cellule sans Corps contenu,
B. Cellule avec
f. Gouttelette contractée d'huile,
C. Cellule renfermant seulement des globulines chlorophyl-
laires.
D. Cellule contenant une gouttelette d'huile et de la matière
brownienne,
E. Cellule contenant de la matière brownienne , des granules
chrolophyllaires et un nucléus.
F Cellules contenant un nucléus, des amas d'huile et de la
matière brownienne,
G. Cellule renfermant de l'huile, de la matière mouvante de
Brown, des granules de chromule.
Fig. 8.
Fig. 9
Fig. 10.
Fig. 11.
Fig. 12.
(52)
£. Des lacunes circulaires imitant des nucléus non formés.
%. Un nucléus entouré d’un cercle de globules de chro-
mule,
H. Stomates.
Portion d’une tranche de l’amande de la graine du Linum aus-
triacum,
a. Cellules.
b. Gouttelettes d'huile.
c. Gouttes d'huile séparées.
d. Goutte d’huile avec des cellules qu’elle enveloppe.
Portion d’une tranche de l’amande de la graine du Papaver
spectabilis.
a. Cellules.
8. Gouttelette d'huile avec des cellules adhérentes à sa su-
perficie.
c. Gouttelettes plus petites.
d. Goutte d'huile séparée.
Portion d’une tranche de l’amande de la graine du Brassica
campestris oleracea. Decann.
a. Cellules granulifères.
be. Gouttelette d'huile.
d. Goutte libre.
Poil de la base du pétiole du Passiflora fœtida.
A. Tige du poil avec son faisceau central de fibres.
B. Glande ou tête du poil.
c. Huile mobile et gyratoire.
de. Matière granuleuse (brownienne)? qui se forme dans
cette huile.
Cellules oléifères des étamines du Sparmania africana.
. Cellule à suc jaune existant seul.
. Cellule à globule huileux, incolore.
Cellule à globule huileux rouge, mobile.
. Cellule à suc rose et à globule huileux rouge.
. Cellule contenant :
a. Un nucléus pariétal;
b. Suc rougi;
c. Grosse goutte d'huile rouge;
d, Gouttelettes d'huile rouge ; mobile.
F. Cellule semblable ouverte.
a. Nucléus.
6. Granules chlorophyllaires verts.
CCR
( 523 )
c Globule d'huile rouge.
d. Gouttelette mobile d’huile.
e. Granules chlorophyllaires verts,
HISTOIRE.
Les Grâces du F endredi-Suint » SOUS l’ancien régime
q ?
par M. Gachard, correspondant de l'académie.
Le souvenir des anciens usages s’efface chaque jour;
ceux même qui en ont été contemporains les oublient :
c'est un des effets du mouvement extraordinaire imprimé
depuis quarante ans à l’ordre social. Je suis certain que peu
de personnes aujourd’hui connaissent ce que l’on appelait
autrefois, dans les Pays-Bas, es grâces du vendredi-saint :
je laisserai le soin de l'expliquer au comte de Trauttmans-
dorff; voici ce que ce ministre, qui était chargé à Bruxelles,
sous les ordres de l’archiduchesse Marie-Christine et du
duc Albert de Saxe-Teschen, son époux, de la principale
direction du gouvernement, écrivait, le 20 février 1788,
au prince de Kaunilz, chancelier de cour et d'état de l’em-
pereur Joseph IT :
« Il a été constamment d’usage, dans ce pays-ci, de
» faire des grâces à l’occasion du vendredi-saint : on accor-
» doit toujours grâce de la vie à un homme condamné à
» mort, et c'est ce qu’on appeloit faire un Barrabas , et
» à celte occasion on faisoit également grâce à quelques
» malfaiteurs dont les fautes n’étoient pas bien graves , ou
» on apporloit quelques adoucissemens aux punitions
» auxquelles ils éloient condamnés ; et non-sculement le
( 524 )
» gouvernement remelloit à celte époque des concessions
» de grâce qu'il ne trouvoit pas convenable d'accorder
» dans l’année, mais l’usage des grâces accordées avec
» plus de facilité au vendredi-saint, était tel et si ancien
» et connu, que les particuliers mêmes réservoient sou-
» vent les demandes de grâce, pour ne les faire qu’à ce
» terme, et que, dans la quinzaine qui précédoit, il venoit
» une foule de demandes et d'avis : le conseil privé y déli-
» béroit dans une assemblée extraordinaire, qu’il tenoit
» le jour niême du vendredi-saint, et rendoit son avis en
» faisant trois listes : l’une des cas non graciables, dont on
» tiroit Barrabas ; l’autre des cas graciables, et la troi-
» sième des cas douteux; la plupart des cas graciables
» étoient suivis de la grâce. Il y avoit même celle circon-
» stance de plus, d’après l'usage, que les chefs et présidens
» avoient la prérogalive d'aller en faire rapport eux-
» mêmes au gouverneur général, sans que cela passât par
» le canal du ministre, »
Je ferai remarquer qu'à Ypres, le magistrat, en vertu
d’un ancien privilége, faisait grâce aussi à des criminels le
jour du vendredi-saint. Je ne connais pas d'autre ville de
la Belgique où le même usage existât.
Lettre de Philippe IT, qui nomme Abraham Ortélius
son géographe honoraire, par M. Gachard.
On sait qu'Abraham Ortélius, qui mérita le surnom de
Ptolémée de son temps , reçut de Philippe II le titre de
son géographe. J'ai trouvé récemment, aux archives du
royaume, la lettre originale que ce monarque écrivit à ce
sujet au gouverneur des Pays-Bas; je me fais un devoir
de la mettre sous les yeux de l'académie , comme un docu-
(525 )
ment curieux pour l’histoire des sciences dans notre pays.
Cette lettre, adressée au duc d’Albe , est ainsi conçue :
« Mon cousin, comme de la part du docteur Arias Mon-
tanus relation m'a esté faicte de la personne et bonnes
qualitez en vertu et doctrine de Abraham Ortelius ,
m'ayant dedié ung livreintitulé Theatrum Orbis, etil
soit que j'entens qu’il desireroit bien avoir le tiltre de
mon geographe ad honores, ceste sera pour vous adver-
tir que, eu regard à sesdites bonnes qualitez, et pour
en aucune manière recognoistre qu’il ma dédié ledit
livre, comme dict est, je suis eslé content de luy donner
ledit tiltre, vous requerant et ordonnant de luy en faire
depescher mes lettres pertinentes, comme en sambla-
bles cas de tiltres ad honores s'est accoustumé de faire.
À tant, mon cousin, Nostre Seigneur vous ait en sa
saincte garde. De Madrid, le xx° de may 1573.
» PHE. »
Le duc d’Albe pourvut à l'exécution de cet ordre royal
peu de jours avant de résigner le gouvernement des Pays-
Bas entre les mains de don Louis de Requesens et de
Cuniga, grand commandeur de Castille; on lit, à la suite
sa 8 : ;
de la lettre de Philippe IL, le décret suivant :
» Sox Excezzence ordonne que les lettres patentes cy
mentionnées soyent despeschées comme Sa Majesté le
commande, sans prejudice d’aultres. Fait à Bruxelles
le xvij° jour de novembre 1573 (1).
» BERTY. »
— M. Gachard lit ensuite une note sur un système d'é-
(1) Le duc d’Albe notifia aux conseils de justice des provinces son rem-
placement par le grand commandeur, le 28 novembre 1578.
| (526 )
change des doubles des bibliothèques, mis en pratique
par le ministère de l’instruction publique en France, et
sur lutilité qu’il ÿ aurait à introduire ce système en Bel-
gique. Cette note sera envoyée à l'examen de la commission
de l'académie , chargée de s'occuper du projet d'un cata-
logue imprimé à l'usage de toutes les bibliothèques de
la Belgique, présenté par M. Voisin , à la séance du
7 mai 1838.
—M. le doyen d'âge ; en levant la séance, a fixé l’époque
de la prochaine réunion au samedi 6 juillet.
OUVRAGES PRÉSENTÉS.
— —
Mémoires de l’académie impériale des sciences de
S'- Pétersbourg. VI: série : Sciences mathématiques, phy-
siques et naturelles. Tome II, 5°et G° livr.; — Sciences
naturelles. Tome I, 1*° liv.; — Sciences politiques , his-
toire , philologie. Tome IT, 2° et 3°, 4° et 5° livraisons.
St-Pétersbourg, 1833 et 1834. 5 vol. in-4°.
Mémoires présentés à l'académie impériale des scien-
ces de St-Pétersbourg, par divers savans. Tome I, 1°, 2°
et 3° iv. St-Pétersbourg, 1833. 2 vol. in-4°.
Recueil des actes de la séance publique de l’académie
impériale des sciences de S'-Pétersbourg, tenue le 29 dé-
cembre 1883. St-Pétersbourg , 1834. 1 vol. in-4°.
Künigl. Preuss. Akademie der Wissenschaften zu
Berlin : Abhandlungen. Aus dem Jahre 1835. Berlin ,
1837. 1 vol. in-4°. — Bericht über die zur Bekanntma-
chung geeigneten V'erhandlungen. 2° sem. 1836 et 1°
sem. 1837. Berlin. 2 broch. in-8°. — Preisfrage der
A?
Con) :
philosophisch-historischen Klasse, für das Jahr 1839.
1 feuille in-&e,
Kongl. Vetenskaps-Academiens Handlingar, fr ar
1836, Stockholm. 1838. 1 vol. in-&c.
Arsherättelser om nijare zoologiska Arbeten och
Upptäckter, ti kongl. Vetenskaps-Academien, afgifne
den 31 mars 1835 och 1836, af B.-Fr. Fries. Stockholm,
1837, 1 vol. in-8&.
Arsberättelse om Framstegen 1 Fysik och Kemi afoif-
ven den 31 mars 1836 ; af Jac. Berzelius. SLockholm, 1836.
1 vol. in-8°.
Arsberâttelse om botaniska Arbeten och Upptäcker
für ar 1835. Till K. V. A. ufgifven den 31 mars 1836.
Af Joh. Em. Wikstrôm. Stockholm , 1837. 1 vol. in-&e.
Arsberättelse om technologiens Framsteg. TiK. V. Aù
afgifven den 31 mars 1836, af G.-E. Pasch. Stockholm,
1836. Broch. in-8e.
Arsberättelse I astronomien af S. À. Cronstrand. Den
31 mart. 1836. Stockholm, 1836. Broch. in-8e.
Aminnelse-tal ôfver K. V. 4°. framlidne ledamot
friherre Lars À. Mannerheim, hallet infôr K. Vetens-
kaps-Academien den 15 mars 1837, af A.-G. Mürner.
Stockholm, 1837. Broch. in-8e.
Tal om Hydraulikens nürvarande tillstand m. m.
hallet vid praesidii nedläggande uti kongl. Vetenskaps-
academien den 2 april 1834. Af P. Lagerhjelm. Stock-
holm, 1837. Broch. in-8c.
Transactions of the institution of civil engineers.
vol. LIL Part. 1. London, 1839. 1 vol. in-4°
Rapport à l'académie des sciences morales et politi-
ques sur l'état physique et moral des ouvriers employés
dans les fabriques de soie, de coton et de laine ; Par
M. Villermé. 1 vol, in-4o.
+
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Comptes rendus des séances de l’académie des sciences
de Paris, 1* sem. 1839, n°16 à 20. Paris. 5 broch. in-4°.
Annalen der Slaats- Arzneikunde , herausgegeben
von Schneider, Schürmayer und Hergt. 4 Jahrgang. 1°
heft. Freiburg im Breisgau , 1839. 1 vol. in-4°.
Diseurso lido em 15 de maïo de 1838 na sessao publica
da academia real das sciancias de Lisboa por Joaquim
Jose’ da Costa de Macedo. Lisboa, 1838. 1 vol. petit in-4°.
Annales et bulletin de la société de médecine de
Gand, année 1839.— 5° vol., 4° et 5° livr. Avril el mai.
Gand. 2 broch. in-&.
Journal historique et littéraire. Tome 6. 62° livr.
1e juin 1839. Liége. Broch. in-4°.
Notice sur G. Moll, membre de l’académie royale de
Bruxelles , par À. Quetelet. Traduiteen anglais. (Extraite
du Phil. Mag. 3° S. vol. 14, n° 89, avril 1839, p. 288.)
In-8&.
Carte céleste indiquant les trajectoires calculées des
comètes de Halley et d’'Encke, dans leur retour en 1835,
avec le lieu comparatif occupé par la terre, durant leur
apparilion. Suivie de la trajectoire observée de la comète
de Halley, par L.-F. Wartmann à Genève. 1 feuille.
Annuaire de l'université catholique de Louvain, 1839.
Troisième année. Louvain. 1 vol. in-12. Présenté par M. De
Ram.
Bibliotheca Gandavensis. Catalogue méthodique de la
bibliothèque de l’université de Gand. 1"° partie, jurispru-
dence, publiée par le bibliothécaire M. Aug. Voisin. 1 vol.
in-8. Gand, chez Annoot-Braeckman. 1839.
De la liberté physique et morale, par L.-A. Gruyer.
1 vol. in-8°. Bruxelles, chez ST 39.
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